Quelle est l'origine de nos goûts musicaux?

Il y une question qui me trotte dans la tête depuis longtemps: pour quelle raison sommes nous attirés par un genre musical plutôt qu'un autre?

Mes parents sont tous deux originaires de Poitou-Charente, mes grands-parents étaient bouchers et employés de banque. Bref, un nom bien bien français et des origines autant que je sache bien françaises aussi. Mon père à la maison n'écoutait rien... ma mère écoutait de la variété française à la radio. Il n'y avait pas beaucoup de musique en général chez nous et je n'ai malheureusement reçu aucune éducation musicale.
Logiquement, il me semble que je devrais aimer la pop-rock anglo/américaine (mondialisation oblige) et, ayant grandi en France, la chanson française. Il y a bien sûr des artistes que j'aime dans ces deux domaines, mais ça me touche rarement.

En revanche, je suis très souvent bouleversé par les musiques d'ailleurs: tsiganes, Europe de l'est, flamenco, chant berbères, blues malien, traditionnel cubain, chants soufis pakistanais...
Tout ce que fait Thierry "Titi" Robin me transporte, il touche quelque chose d'inexpliqué et de très profond en moi
J'adore les "Songs of Rejoicing" par le chœur des femmes de Tetouan au Maroc, les chants soufis de Faiz Ali Faiz, la guitare sèche de Paco de Lucia, Boubacar Traoré le malien ou les percussions iraniennes du Trio Chemirani

Je m'interroge donc sur l'origine de mes goûts musicaux que je trouve très décalés par rapport à ma culture. D'où peut venir ma prédilection pour les musiques de l'ailleurs? Pourquoi est ce que ces musiques font autant écho en moi? Un lieu commun est de parler du caractère universel de la musique, mais cela me semble un peu léger comme explication...j'ai envie d'approfondir le sujet

Est ce que d'autre parmi vous sont dans ce cas là, se reconnaissent dans ce que j'écrit et sont touchés par des musiques qui n'ont rien à voir avec leur culture, leur éducation et leur passé?

Salut DéBé,

effectivement je me reconnais dans ce que tu écris. J'ai d'ailleurs une théorie (mais ce n'est que mon point de vue) : j'ai l'impression que mes goût musicaux sont liés à mes grands "centres d'intérêt" (musique du monde -> voyage, chanson d'amour -> ben... amour, complaintes et balades -> mélancolie, etc...).

De ce que j'en vois, au début on va aimer un style de musique beaucoup parce qu'il nous définit. Il y a qu'à voir les collégiens "tout sauf le rap", "le métal c'est nul" ou mieux "j'aime pas la musique commerciale".

Une fois qu'on s'est émancipé la musique de comme un moyen de s'inclure/se différencier, je rejoins Djodge, c'est à la sensation et en fonction de ce que l'on recherche en général pour nous faire plaisir.

Perso, j'aime bien les trucs que je ne comprends pas, alors quand j'entends des sons ou des manières de composer nouvelles, ça me fascine, c'est comme découvrir des nouvelles couleurs (merci pour la musique Soufi au fait, connaissais pas).
Ceci dit, mon fonctionnement d'écoute n'est pas exclusif, et d'expérience je sais que n'importe quelle musique peut me plaire à partir du moment où je l'écoute un nombre suffisant de fois, jusqu'à la pop la plus évidente, jusqu'au reggaetón le plus basique. J'ai toujours mes filtres liés au contexte de la musique ("c'est commercial, beurk"), mais comme je les vois, je peux les dépasser, si j'en ai envie (ce qui m'arrive quand même assez rarement pour le raggaetón).

Pour mes années collège, je n'ai jamais vraiment cherché à m'intégrer à un groupe, sur l'aspect musical comme sur les autres aspects d'ailleurs. j'avais renoncé bien avant ! et côté musical j'étais très ignorant.

Etant étudiant j'habitais juste au dessus d'une CDthèque municipale et j'ai pioché allègrement dans le fond disponible, découvrant le jazz et beaucoup de musiques du monde. Je suis d'accord que la répétition joue un grand rôle: au début le jazz me semblait étrange, dissonant, et à force d'en écouter pour découvrir, l'oreille s'y habitue, s'éduque, et maintenant je dirai que j'aime bien le jazz. Ici, mon goût pour cette musique provient d'un apprentissage. Mais quand il n'y a pas eu d'apprentissage? Quand la sensation, l'émotion surgissent à la première écoute et vous bouleverse?

je suis en train de lire "Musicophilia" du neurologue Oliver Sacks, qui explore les relations entre le cerveau et la musique à l'occasion de traumatismes (forcément, quand on va consulter un neurologue !). a mon avis, c'est peut être du côté des neurosciences qu'il faut chercher...

Sinon, le reggaeton: bof bof...je suis bien d'accord !

Et content de t'avoir fait découvrir les chants soufis. Le grand maître en était Nusrat Fateh Ali Khan, avant que son disciple Faiz Ali Faiz ne devienne le représentant majeur de cette musique maintenant. Chez Harmonia Mundi, il y a un album intitulé Qawwali Flamenco qui mêle avec bonheur musiques soufis et espagnole...

Pour ce qui est neuro, pour moi tout a à y voir à un moment où un autre, mais ça n'empêche pas d'essayer de décrypter les goûts et envies dans son référentiel personnel, d'un point de vue psycho. Par exemple, je ne sais pas, peut-être que quelqu'un qui aime la peinture abstraite sera plus facilement intéressé par la musique abstraite. En neuro, ça titillera les mêmes cartes mentales, mais l'échelle macro est plus facile à interpréter par rapprochement.

Après, j'ai l'impression que la musique fonctionne beaucoup par association d'idées ou de sentations : tel son en rappelle tel autre, telle voix, telle mélodie, et ce de manière inconsciente. Le cerveau étant assez conservateur et pas tellement tenté par le totalement nouveau, on reste comme ça dans des styles proches d'une manière ou d'une autre (syle à proprement parler, instruments, tempo, balance, paroles, ...).

Bon ça reste que des impressions, je n'ai jamais creusé là dessus. Ceci dit, j'avais vu des cours sur le sujet au Collège de France :

https://www.college-de-france.fr/site/christine-petit/course-2015-2016.htm

Merci pour les références musicales.

Merci, je vais écouter le cours, ça a l'air passionnant. j'espère que je vais pouvoir suivre, je n'ai pas trop de bases solides en génétique et physiologie

Tu nous feras bien un résumé après

Des cours j'en avais regardé un en faisant autre chose. Ca collait l'état de l'art, et sans concentration je suis incapable d'en tirer rien, je me les garde pour plus tard.

Pour l'expérience, après avoir bavé sur le raggaeton hier, j'ai fait le tour de ce qui passe du genre tous les jours à la cafet' de ma fac, voir si je m'y étais habitué. Résultat je me suis réveillé ce matin avec Daddy Yankee en boucle dans le crane, et j'en écoute depuis une heure pour essayer de drainer. Ca me valide que je suis franchement pas trop regardant de la qualité intrinsèque du bazar pour m'y faire.

Je souhaite ajouter un élément par rapport à ce que j'ai dit plus haut :

j'ai remarqué que lorsqu'une chanson me plaît à la première écoute je me focalise sur l'harmonie musicale, la mélodie. De nature curieuse, j'ai pour habitude de lire les paroles des chansons qui me touchent le plus et, oh surprise, les textes collent complètement à mes pensées/ressentis, de telle manière que je me reconnais systématiquement.

Tout cela marche aussi bien pour les chansons en français, qu'en anglais et en espagnol (deux langues que je maîtrise). Je pense qu'inconsciemment mon cerveau analyse les paroles et me dit "j'aime".

Mon père m'a transmis son goût pour la musique africaine, ma mère m'a transmis son goût pour les chansons d'amour française, et ma personnalité propre m'a fait aimer le reggae, la musique classique et la salsa.

Parmi les facteurs qui me rendent sensible à tel ou tel type de musique, il y a : le ryhtme (salsa, reggae, musique africaine), la mélodie (chansons d'amour), et la capacité à me transporter ailleurs, vers plus de spiritualité (musique classique et autres...).

fleurblanche a écrit:Parmi les facteurs qui me rendent sensible à tel ou tel type de musique, il y a : le ryhtme (salsa, reggae, musique africaine), la mélodie (chansons d'amour), et la capacité à me transporter ailleurs, vers plus de spiritualité (musique classique et autres...).

J'écrirais la même chose concernant la musique classique. C'est la plus à même de «m’élever», sans jugement de valeur aucun sur les autres genres, et de me rendre contemplatif. Je me souviens d'ailleurs très bien de ma première émotion classique, en cours de musique au collège, en cinquième, et dont La Moldau de Smetana fut la source, si vous me permettez ce jeu de mot