Comment se repérer dans le domaine complexe des Sciences Cognitives

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Message par Invité Dim 29 Jan 2017 - 11:09

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Message par Invité Dim 29 Jan 2017 - 11:35

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Message par Invité Dim 29 Jan 2017 - 11:48

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Message par soto² Dim 29 Jan 2017 - 12:54

Badak a écrit:Mon possible désaccord avec ton point de vue ...

De mon coté, je ne perçois pas de désaccords sur les points que tu évoques, juste des façons différentes de les exprimer Wink  Razz

Badak a écrit:Tu questionnes (...) En particulier l'utilisation de concepts biologiques pour l'étude du social.
Je n'ai pas exprimé cette généralisation, même si en effet elle y était suggérée. Il s'agissait d'un exemple illustratif précis.

Badak a écrit:Je rappelerais pour commencer que le critère de cette légitimité tient à l'"isomorphisme" entre les systèmes des deux domaines en questions.  Il faut ajouter que les systèmes dont on parle ici ne sont jamais comme tels dans la réalité, mais correspondent plutôt à des modèles choisis pour rendre compte de phénomènes spécifiques.

Oui, le sujet induit est bien la modélisation:
.
... qui joue à mon sens un rôle de "tiers médiateur" entre les domaines théoriques (hypothético-déductifs) et pratiques, expérimentaux. Son statut éthique est ambigüe, tout à la fois heuristique et normatif.

Et donc non, il ne s'agit pas pour moi d'un "isomorphisme" (traduction moins technique : "forme équivalente") a priori. Le transfert ne vas pas de soi pour une raison majeure et négligée par un scientifique professionnel  : contrairement aux apparences, je prétend qu'il n'y a pas de relation "bijective" ( "à double sens de correspondance point par point") et triviale, évidente, entre explication et compréhension. C'est un des sens de la coupure cartésienne, et elle nous oblige. Ce qui complexifie d'autant le passage entre le point de vue individuel et le point de vue inter-subjectif, et a fortiori sur les modélisations sociales qui auront inévitablement un impact sur la normativité politique. En compréhension heuristique, oui, en explication normative, non, pour situer le dipôle éthique, et bien sur, c'est plus complexe que çà... "L'enaction est aussi une cognition sub-linguistique" me suggère, là, tout de suite, mon corps absent de ce débat simulé et médié par l'écriture et les nouvelles technologies. Ce qui complexifie un peu la situation pour un apprenti de l'enaction comme moi face à un (légitime) positionnement plutôt (ok, le connectionnisme est plus intermédiaire et plus ambigüe) cognitiviste, comme Stanislas Dehaene et apparemment comme toi.  Calimero Boxe pirat  Basketball

Au sujet du choix de l'ouvrage, et on en parle plus, c'est voté à l'unanimité (non ?!) :

Très rapidement et pour l'appuyer : oui, tout est rediscutable..., je ne connais pas d'autre panoramique aussi brillant, et en français s'il vous plais, il s'y exprime aussi une sensibilité et une culture biologique et éthique de grande qualité et un point de vue "meta" salutaire (le biohacking est dans les garages), relativement neutre tout en exprimant clairement sa différence...

Révelations sur mes intentions:


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Message par paela Dim 29 Jan 2017 - 23:51

Hola,

Ayant lu le bouquin de Varela et l'article "The Computationnal Theory of Mind" de l'encyclopédie philosophique de Stanford, je reviens pour faire quelques commentaires.


Je trouve que Varela met suffisamment en exergue les oppositions conceptuelles entre les différentes approches qu'il classifie. J'aimerais ne pas en rajouter et me focaliser sur les différences pratiques. Etant donné que je suis loin d'être en mesure de décrire plus clairement, plus synthétiquement ou avec plus de détail le contenu de l'article de l'encyclopédie, je vais me contenter de quelques remarques sur le bouquin Varela à la lumière de ce que j'ai lu chez Stanford.

-La seule différence majeure que je trouve entre cognitivisme / connexionisme d'un côté et énaction de l'autre est que tandis que les premiers se demandent "Comment se fait-il que le système A possède la faculté cognitive B?", la troisième demande "Quelle faculté cognitive le système A possède-t-il?". Cette description fait que l'énaction semble moins ancrée dans la science que le cognitivisme et le connexionnisme. Il n'y a qu'à voir la troisième colonne du tableau de Soto dans son deuxième message: c'est beaucoup plus vague. Mais c'est aussi une question de maturité des approches.


-Plutôt que des paradigmes, le cognitivisme et le connexionnisme sont des approches différentes de la cognition qui coexistent actuellement. Pour chacune d'entre elle, il y a un jeu d'affinité avec d'autres disciplines qui est spécifique, des facultés cognitives centrales dont la modélisation est directe tandis que d'autres doivent être simulées de manière plus complexe.
Le cognitivisme place la manipulation de symbole au centre de sa modélisation; pour le connexionnisme, c'est l'apprentissage qui est central.
Le cognitivisme et le connexionnisme préconisent des architectures cognitives différentes (par exemple ordinateurs et réseaux de neurones), qui peuvent néanmoins intervenir à des niveaux interchangeables. Les réseaux de neurones peuvent simuler une machine de Turing, et un ordinateur peut simuler un réseau de neurones. Les divergences entre les deux sont par conséquent liées à l'efficacité, et à la comparaison avec les facultés cognitives connues: sont-elles fondamentalement cognitivistes ou connexionnistes, autre réponse?



-La critique de la représentation basée sur la critique de l'existence d'un monde prédéfini est bof bof, et elle se mute à certains endroits en une argumentation confuse proche de la critique de l'existence d'un monde indépendant du sujet. Le cognitivisme n'a pas besoin de supposer que le monde est prédéfini (attention à la nuance entre "prédéfini" et "préexistant"!), ou qu'une table complète de symboles pour le décrire existe. Pas besoin de supposer que la représentation du monde est fidèle. Parce qu'il refuse de définir l'exogène (le monde énacté selon Varela) comme une entité virtuelle, le monde perçu (on pourrait presque dire "représenté", il n'y a cependant pas nécessairement de symboles ici), Varela semble en faire une entité réelle qui interagit avec le système.
"La perspective de l'énaction demanderait ici que ce genre de système cognitif soit transposé dans une situation ou l'endogène et l'exogène se définissent mutuellement au fil d'un historique prolongé, ne nécessitant qu'un couplage viable, et ignorant toute forme d'adéquation optimale."  
Je trouve cette idée maladroite. Qu'en pensez-vous?

Je suis plutôt d'accord avec Badak concernant la méthode d'investigation. La lecture de l'article de l'encyclopédie fait vite comprendre que le domaine des sciences cognitives est en constant ballonnement conceptuel. Les grandes lignes ne dessinent pas grand-chose.

Par ailleurs, Soto, si tu veux que les gens puissent lire ce fil qui risque d'être "dense", il faudrait que tu fasses des efforts d'intelligibilité; je ne comprends pas ton dernier post.
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Message par I am So Sure Lun 30 Jan 2017 - 0:16

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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 7:40

@ paela : Désolé si tu perçois un manque d'intelligibilité mais je fais tout ce que je peux, ce n'est pas une posture, et c'est un peu réciproque. Non désolé Mais nous sommes là en partie pour çà, non ?! Si la communication était absolument transparente, cela signifierait que nous aurions effacés artificiellement nos singularités et qu'il n'y aurait pas de médiation. C'est d’ailleurs ce dont je parle dans mon précédent message... C'est aussi pour çà que j’insistai sur le livre de Varela, parce qu'on peux y trouver une qualité d'expression et, il me semble, une clarté dont je suis personnellement surement incapable.

L'enaction n'est pas un paradigme trivial, ce n'est pas une vision des choses qui peux se comprendre rapidement... je ne sais pas comment dire les choses, sans me dire en même temps que je prête le flanc à une critique superficielle (pour moi) d'irrationalité, de post-modernisme, etc, et que ce serait dommage, car il y a bien plus que çà à mon humble avis. Et c'est pour çà que la perspective historique est aussi importante, car elle permet d'améliorer le point de vue génétique (dynamique), si l'on se souvient que c'est une histoire de ce qui peux être dit dans le contexte de l'époque, et non une histoire "objective" des choses en elles mêmes. L'enaction tente d'aborder du point de vue des sciences cognitives l'émergence du sens incarné, ce que les approches orthodoxes, elles, négligent en vue de l'efficacité et de l'opérationnalité matérielle (technologique) mais aussi linguistique/rhétorique (dominance culturelle... et intellectuelle).

Donc, aides moi à t'aider : pourrais-tu m'indiquer plus précisément ce qui n'est pas clair, que je puisse tenter d'améliorer les choses ?

Je n'ai pas encore lu l'article de Standford, je m'y emploi, et j’approfondis ton post...  study


Dernière édition par soto le Lun 30 Jan 2017 - 8:22, édité 2 fois (Raison : ... et intellectuelle.)
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Message par paela Lun 30 Jan 2017 - 10:04

@Soto: Pour ce qui est de l'intelligibilité, il s'agit du passage de ton post de “Et donc non.” au smiley qui dribble. Je ne sais pas pourquoi tu parles de relation bijective entre compréhension et explication, mais à la limite on comprend vaguement ce que tu veux dire; la suite en revanche n'est pas claire grammaticalement parlant. Mais bon je ne tiens pas particulièrement à être chiant, essayons juste de nous exprimer clairement.

Et je n'ai rien contre le postmodernisme. J'aime bien Foucault; le reste, je ne connais pas.

Je ne l'ai pas précisé, mais je trouve la posture de Varela très intéressante. Effectivement, le livre est clair et concis. Cela devient un peu obscur au niveau de la démarcation de l'énaction par rapport au cognitivisme, notamment à cause d'arguments qui font penser à un relativisme pur, mais c'est sûrement dû au fait que dans cette ébauche de l'énaction, Varela veut faire retentir la radicalité du virage qu'il propose. Ce n'est gênant qu'en première lecture. Je compte en lire plus sur sa vision – en particulier sur sa mise en pratique – afin de mieux cerner la démarche.


L'enaction tente d'aborder du point de vue des sciences cognitives l'émergence du sens incarné, ce que les approches orthodoxes, elles, négligent en vue de l'efficacité et de l'opérationnalité matérielle (technologique) mais aussi linguistique/rhétorique (dominance culturelle... et intellectuelle).

Que veux-tu dire par efficacité (ou opérationnalité?, ou les deux?) linguistique/rhétorique?


De mon côté je vais aussi aller faire un tour du côté de l'article “narrow content” de l'encyclopédie, parce que j'ai mal compris certaines explications dans le paragraphe concerné dans l'autre article.
J'aurai des questions à poser concernant Varela, et comment il faut comprendre l'énaction (en particulier le monde énacté); j'attends que plus de gens aient lu.
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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 10:15

En passant, pour m'exprimer :

Pour appuyer sur la notion de perte du "sens incarné vivant" (humain ou animal) dans le geste d'avoir mécanisé le calcul, et donc objectivé une opération qui n'avait de sens que dans la subjectivité des opérateurs humains : la thèse de Church-Turing (on oublie souvent Church) évacue toute référence de ce qui participe au sens, puisque l'on est dans le domaine mathématique. Ce qui n'a pas empêché pourtant que l'on parle ensuite un peu rapidement de "machine universelle de Turing" mais qui est plus exactement un modèle opérationnel de formalisation de la calculabilité (computability).

Et c'est sur ces bases que se cristallisera le travail de Von Neumann (le père de l'ordinateur concret) et de son équipe. Turing, lui, s'étant suicidé (on lui reprochera sont homosexualité et on le mettra sous camisole castratrice chimique). Je précise que ces travaux de matérialisation des idées de Church et de Turing ont été effectués avec des financements importants de la Rand Corporation et du lobby militaro-industriel, dont Von Neumann était un membre actif, car il fallait mettre rapidement au point les bombes A et H (nous sommes en pleine seconde guerre mondiale), et pour cela il fallait une très grosse puissance de calcul. Or c'est précisément l'ordinateur qui sert aujourd'hui de modèle métaphorique pour expliquer l'esprit humain. Pour réaliser ce tour de force, Von Neumann va traduire et axiomatiser les processus calculatoirs en terme d''automates à états finis réplicateurs', symbolisables par des réseaux. Alleluia !! et applaudissements nourris dans le "petit théâtre cartésien"...

Mais ce faisant, Von Neumann avouera lui-même qu'une moitié du problème a été jeté par la fenêtre, celui de la référence au monde réel.

Et le réel est ainsi subsumé par le calculable, ce qui ouvre la voie à une nouvel ordre de réalité, à une autonomisation d'un monde abstrait associé à une expression binaire elle même abstraite : 0/1, elle même traduisant des flux électroniques physiques. Une métaphore de métaphores, c'est à dire une métaphore de second ordre. Ok, mais quels rapports à la vie vécue, à la chair de jouissance et de souffrance sommes nous en train d'élaborer ? Quelle éthique du vivant à l'heure du transhumanisme et des manipulations génétiques, de la perte généralisée du sens ?

Et en résonance par rapport au sens du mot "information", qui est un caméléon conceptuel (je crois que Varela parle de "phlogistique" moderne), la "théorie de l'information", c'est à dire plus exactement la théorie mathématique de la communication, n'est-elle pas finalement une théorie du signal ?! (la forme interrogative est rhétorique, pour moi), une théorie a-signifiante, contrairement à ce qu'elle laisse entendre. Je ne suis pas sûr qu'une majorité de personnes en soit bien conscientes. Et quand on parle d'"intelligence artificielle", je me demande si on ne parle pas surtout de celle de leurs zélateurs. Je n'ai rien contre les robots, bien au contraire, mais je combat l’idolâtrie et le faitichisme (Stengers) qui leur est trop souvent associés.

Tout cela n'est pas innocent et influence sur le long terme la façon dont nous nous envisageons et donc ce que nous entendons par "être humain" (puisque c'est justement le propre de l'homme) et comment de façon générale nous interagissons avec le vivant (écologie). Voilà donc, entre autres, d'autres questions qui sont aussi au cœur de ces enjeux et qui impactent l'avenir de l'ensemble de l'humanité, et sur lesquelles il me semble important de développer une lecture populaire critique commune.


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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 11:01

@ paela / passage :

soto-citation a écrit:Et donc non, il ne s'agit pas pour moi d'un "isomorphisme" (traduction moins technique : "forme équivalente") a priori. Le transfert ne vas pas de soi pour une raison majeure et négligée par un scientifique professionnel  : contrairement aux apparences, je prétend qu'il n'y a pas de relation "bijective" ( "à double sens de correspondance point par point") et triviale, évidente, entre explication et compréhension. C'est un des sens de la coupure cartésienne, et elle nous oblige. Ce qui complexifie d'autant le passage entre le point de vue individuel et le point de vue inter-subjectif, et a fortiori sur les modélisations sociales qui auront inévitablement un impact sur la normativité politique. En compréhension heuristique, oui, en explication normative, non, pour situer le dipôle éthique, et bien sur, c'est plus complexe que çà... "L'enaction est aussi une cognition sub-linguistique" me suggère, là, tout de suite, mon corps absent de ce débat simulé et médié par l'écriture et les nouvelles technologies. Ce qui complexifie un peu la situation pour un apprenti de l'enaction comme moi face à un (légitime) positionnement plutôt (ok, le connectionnisme est plus intermédiaire et plus ambigüe) cognitiviste, comme Stanislas Dehaene et apparemment comme toi.  Calimero Boxe pirat  Basketball

Ce que j'ai voulu exprimer, c'est que la relation entre expliquer et comprendre n'est pas symétrique, contrairement à qui nous apparait habituellement dans le jeu d'une conversation. Pour expliciter : pour moi la compréhension met en jeu le corps dans son ensemble et de façon synchronique et itérative (je simplifie volontairement), c'est un acte synthétique subjectif. D'où La compréhension est une cognition sub-linguistique. Alors que le processus explicatif, est plus orienté intellection, diachronique, on "déroule" graduellement et méthodologiquement des assertions, qui ici s'appuient sur une culture commune de la rationalité. La visée est plus externe, on veut "inter-subjectiver". C'est une opération plus analytique qui s'adresse à la compréhension synthétique de l'interlocuteur. On se comprends ?! je ne dis pas que l'un se déroule exclusivement dans le corps et l'autre dans la tête (qui fait aussi parfois partie du corps, malgrès la coupure cartésienne Wink ) Mais j'indique une polarisation. Or dans un contexte dit "scientifique dur", la rationalité méthodique impose (légitimement dans un contexte professionnel d'inter-subjectivité partagée) des contraintes d'expression qui sont, justement, cognitiviste (nécessité des représentations partagées, logique du raisonnement pour évaluer le transfert de vérité, etc). Il y a donc un couplage et une résonance qui s’effectue entre le style d'expression cognitiviste et le style "scientifique". Ce qui en renforce d'autant plus sa force de persuasion et d'attraction ("linguistique/rhétorique") comme "modèle unique" de pensée valide.

Est-ce que cette reformulation est plus compréhensible pour toi ?

Encore une fois, les différents style de modélisation/paradigmes ne sont pas en opposition stricte, et l'énaction est une "voie moyenne" (d'où certains rapports avec la philosophie bouddhiste) entre relativisme et absolutisme, entre représentationalisme et solipsisme. (pfffffiou, çà commence à me fatiguer les "ismes").
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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 11:43

Pour le coté plus "applicatif" :

Par exemple la réflexion sur la "cognition affective et sensitive", voir par exemple le travail philosophique d'Evan Thompson (proche de Varela), et plus pratique, un lien certain avec les approches éducatives et thérapeutiques sur la "pédagogie perceptive et relationnelle" (voir par exemple ce message adressé à une nouvelle arrivante sur le forum avec une référence de thèse en ce sens).

Après, comme l'a souligné Badak, il y a tout le mouvement de la "Embodied Cognition" (cognition incorporée ? bof, cognition incarnée, non , à cause des robots... je ne sais pas comment traduire).

Mais je pense que le coté applicatif le plus important était peut-être, cela n'engage que moi, de transformer de l'intérieur la rationalité des scientifiques eux-même . C'est en cela que Varela est pour moi quelqu'un de remarquable.
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Message par paela Lun 30 Jan 2017 - 17:08

@Soto: Merci pour ton explication, c'est plus compréhensible oui.

Quelques commentaires sur l'objectivité et la rationalité:

On peut toujours partir dans des discussions vagues sur le fait que la science, en objectivant le monde, passe à côté de sa dimension subjective pourtant essentielle, etc.
La science s'efforce d'avoir un discours objectif. Qu'il soit traite de calculs ou de phénomènes subjectifs, c'est ce qui est recherché.
La rationalité est une condition d'une communication compréhensible, qui permet notamment de construire sur les épaules des géants et des autres.
C'est une qualité d'une articulation de propositions, (un raisonnement, la mise en rapport de propositions) et non d'une proposition. Ce n'est pas la rationalité qui dicte les principes de l'approche cognitiviste*. Ses principes sont des prises de position explicites, certes justifiées (au sens “argumentées”) rationnellement* et empiriquement, confortées par la culture scientifique science,  l'efficacité de la formalisation de la logique mathématique et de l'approche cognitiviste, la réticence à utiliser des données subjectives, et l'ignorance du fait qu'il y a peut-être une alternative.
Je soutiens qu'il n'y a pas besoin de transformer la rationalité de l'intérieur, mais je ne jouerai pas davantage son avocat car elle ne devrait pas tant en avoir besoin. Et puis il y a déjà eu je ne sais combien de débat stériles sur des oppositions entre rationalité ou choses vaguement connexes et spiritualité ou choses vaguement connexes.

Je ne dis pas que le débat sur le “réductionnisme scientifique” n'est pas bon à avoir, mais il n'est pas si controversé que ça. “N'importe qui“ rêverait de pouvoir étudier la conscience comme phénomène subjectif, la question est: comment? Certains chercheurs répondront que c'est en l'élucidant comme un phénomène objectivé qui révèlerait la vacuité de sa conception subjective; d'autres, envisageront que c'est impossible, ou seulement possible dans un contexte mystique, et d'autres, comme Varela, proposeront des approches.
Comment trancher la question autrement qu'en étudiant les diverses propositions (la première et la troisième, car l'autre est une position neutre)?

Puisque Varela en parle bien, tôt et dans des registres divers, je vais commencer par voir dans quel direction il est parti après cette invitation au sciences cognitives. Pour l'instant j'ai un point de départ avec Varela, et un point plus récent avec Sam Harris, mais pas de traces de la maturation d'une approche entre les deux. Je note tes liens pour plus tard Soto.

J'ai lu l'hommage à Varela par Thompson qui servira peut-être de pivot. Je n'ai pas réussi à trouver le papier dans lequel prétendûment Robert Rosen montre que certains systèmes sont plus forts que les machines de Turing; je suis curieux de voir à quoi ça ressemble. Quelqu'un a une source?



*voir pour lever l'apparente contradiction le fil de Badak sur les limites de la rationalité dans le salon de discussions rationnelles: la rationalité est une qualité du raisonnement et non des prémisses du raisonnement
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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 17:09

@ Badak :

soto a écrit:une autre référence de grande qualité sur la généalogie des SC  (plus histoire des idée/philo critique), par Jean-Pierre Dupuy (Polytechnique, grâce à qui Varela à été accueilli en France) : Les savants croient-ils en leur théories ? Une lecture philosophique de l'histoire des sciences cognitives. Ed. Sciences en question, INRA Editions.

Mince, je réalise que je me suis trompé de référence dans un de mes premiers messages, même si je pense que cela n'aura pas de conséquences. Je corrige donc et je modifie le post d'origine :

La bonne ref est : "Aux origines des Sciences Cognitives", Jean-Pierre Dupuy, Ed. La Découverte poche, sciences humaines et sociales.
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Message par soto² Lun 30 Jan 2017 - 17:59

@ paela : ta réponse, que je suis en train de lire, est intéressante parce qu'elle me permet de mieux comprendre nos différents. J'y répondrai plus tard mais j'ai des choses à dire (faut que je lâche cet écran chronophage... Smile ).

Comme çà, je ne vois pas de rapport évident entre Varela et Sam Harris (fiche Wikipédia) ...

Juste une question : sans indiscrétion, bien sur, pourquoi la dimension applicative t'intéresse tant ? (tu en parle dès ton premier message).
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Message par paela Lun 30 Jan 2017 - 19:09

Sam Harris s'intéresse à la neurophénoménologie (et a travaillé dans cette discipline) ainsi qu'à la possibilité d'obtenir des indications sur ce qu'est la conscience via notamment la méditation. je pense qu'il souscrit entièrement à la critique de l'oubli de l'aspect subjectif de la cognition / conscience par l'approche "orthodoxe", même si sa position semble plus agnostique que celle de Varela sur la possibilité de procéder différemment avec fruits. C'est en cela principalement que je le relie à Varela, je ne crois pas avoir lu d'allusion à Varela chez Sam Harris, mais j'ai peut-être zappé.

Pour faire simple, des idées générales, si elles ne sont pas mises en application, peuvent n'être rien que des souhaits ou des craintes infondés. Des notions peuvent être conçues et avoir une grande puissance explicative, sans pour autant être pertinentes ou utiles. Par l'application, la pertinence est mise à l'épreuve, les notions sont testées, on avance quoi. Pour ce qui nous occupe par exemple: il faut mettre le processus d'énaction au centre du regard des sciences cognitives - oui, mais comment? Lorsqu'on peut répondre à cette question, ça vaut le coup de le faire. Ici Varela et d'autres ont travaillé à le faire, donc allons-y.
Je n'ai rien contre la réflexion sur les fondements et les motivations hein, mais je préfère y revenir après.
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Message par Badak Mar 31 Jan 2017 - 0:44

@ Roger
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Message par Badak Mar 31 Jan 2017 - 1:32

Encore au sujet des aspects épistémologiques :
soto a écrit:Au sujet du choix de l'ouvrage, et on en parle plus, c'est voté à l'unanimité (non ?!) :
Moi je ne vais pas encore acheter ce livre, je vais l'emprunter à la bibliothèque bientôt.  Pour l'instant par contre, j'ai trouvé des résumés de cours portant sur ce livre. Il y a aussi des descriptions critiques des concepts de Varela dans les intros de plusieurs articles plus récents.  Sans compter les dictionnaires et encyclopédies.  
J'espère quand même que tu iras voir d'autres sources que le livre de Varela pour les comparaisons de concepts.  ( Il est aussi nécessaire de ne pas discuter que d'une conception unique pour avoir une vue d'ensemble du débat )

-----------
Note:  au sujet de mes réponses/questions concernant les aspects épistémologiques , vous en avez déjà discutés plus haut pour l'essentiel(Avec Paela ). Donc je ne tient pas vraiment à ce qu'on s'englue dans un débat qui porterait davantage sur les aspects historico-herméneutiques des "sciences humaines" versus les aspects clairement scientifiques de ces disciplines.
Par contre, la même pluralité de méthodes se rencontre dans l'étude de la cognition, et je pense qu'ici c'est aussi important de clarifier les portées épistémiques de ces différentes démarches.  Je veux dire par là, entre autre, que je comprends l'intérêt d'une théorie philosophique de l'enaction qui incorpore dans la cognition le point de vue du sujet vivant et connaissant.  J'adore vraiment ce discours. Mais, il nous faut aussi distinguer celui-ci d'une théorie scientifique et chercher ce que concrètement cette conception signifie.
Je pense qu'on peut parler de l'"enactivisme" comme d'un paradigme de recherche pouvant inspirer les sciences cognitives, mais en soi l'idée de l'enaction ne semble pas être techniquement vérifiable. ( Comment penseriez vous que ce puisse faire l'objet d'expériences chez des non-humains ? )  On peut par contre postuler l'existence de ce monde subjective pour tout être vivant et système cognitif, et en comprendre intuitivement les grandes lignes en nous référant aux modes de perceptions. Par exemple, le monde interne de la chauve-souris est tel qu'il peut être perçu par les sonars tandis que celui du chien l'est surtout par l'olfaction  (Nagel: what is it like to be a bat ?)

Je remarque aussi que ce monde interne subjectif n'est pas forcé d'être conscient, puisque on ne sait rien de la conscience de la chauve-souris, et que même chez l'humain, nous ne pouvons jamais être pleinement conscient de l'ensemble de nos perceptions ou des transformations qu'elles produisent en nous.  D'ailleurs Varela applique ce paradigme de l'enaction (et de l'autopoiesis) également aux cellules vivantes, qui ne sont apriori pas conscientes (au sens habituel du terme ).

Si on prend au sérieux la portée phénoménologique de l'idée d'enaction pour tous les systèmes cognitifs "incarnés", alors cela impliquerait de prendre au sérieux l'existence d'un monde interne subjectif chez les robots "épigénétiques", ( i.e. les robots cognitifs qui se développent au contact d'un environnement sensoriel ).   Sinon, sur quelle base n'appliquer le concept d'enaction qu'à certains des systèmes cognitifs et pas aux autres ?   Ça nous prendrait dans chaque cas, une connaissance à la première personne d'un point de vue subjectif qui n'est pas le notre.
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Message par Badak Mar 31 Jan 2017 - 4:42

paela a écrit:.....
Puisque Varela en parle bien, tôt et dans des registres divers, je vais commencer par voir dans quel direction il est parti après cette invitation au sciences cognitives. Pour l'instant j'ai un point de départ avec Varela, et un point plus récent avec Sam Harris, mais pas de traces de la maturation d'une approche entre les deux. Je note tes liens pour plus tard Soto.

J'ai lu l'hommage à Varela par Thompson qui servira peut-être de pivot. Je n'ai pas réussi à trouver le papier dans lequel prétendûment Robert Rosen montre que certains systèmes sont plus forts que les machines de Turing; je suis curieux de voir à quoi ça ressemble. Quelqu'un a une source?
......

Juste une parenthèse au sujet des machines super-Turing, dont plusieurs rêvaient qu'elles puissent offrir un paradigme de "calcul" échappant au "computationnalisme" , il y a plusieurs possibilités, mais elles exploitent toutes, d'une manière ou une autre l'infini non-dénombrable du continu.  
Ce peut être des réseaux de neurones à temps continu, (pour un point de vue récent, voir par exemple :
 Cabessa 2014, The_super-Turing_computational_power_of_plastic_recurrent_neural_networks)

Ce peut aussi être un système de calcul membranaire impliquant une imbrication de sous-compartiments.  En gros, dans ce paradigme de calcul, il s'agit de formaliser la manière de calculer des canaux ioniques présents dans les membranes cellulaires.  Une cellule est formée d'une membrane qui lui donne une interface et dont les canaux agissent comme des ports faisant entrer et sortir des ions (ou d'autres symboles).   D'autres opérations, comme la fusion et la séparation des membranes sont disponibles.  Cette cellule contient à son tour des sous-compartiments membranaires possédant aussi des ports entrant/ sortant pour communiquer avec son milieu, et ainsi de suite.  
 
Supposons une hierarchie de sous-compartiments imbriqués tel quel le temps de réaction à l'intérieur d'un compartiment soit d'autant plus accéléré qu'il est a un niveau élevé de la hierarchie.  Le temps total de réaction chimique est donc un temps de calcul égal à la série convergente de toutes les durées de calcul, et ce temps total peut être borné par un temps fini.   Je pense saisir que si on n'a qu'un nombre FINI de niveaux de récursion alors on ne peut pas dépasser la "barrière de Turing"....  donc encore ici, ce n'est pas un paradigme de calcul réaliste.
Voir : Georghe 2012, Membrane system models for super-Turing paradigms  

Une autre approche qui pourraient être pertinente à la cognition (du moins selon une perspective hypercomputationnaliste): le paradigme de calcul interactif.. En gros il s'agit de faire communiquer un ensemble de machines de Turing d'une manière que le tout puisse dépasser la puissance de calcul de chacun et ainsi devenir "super-récursif".
Ceci dit, je n'ai lu que le début de cet article, ainsi que l'énoncé de quelques théorèmes, mais  tu le comprendras sûrement mieux que moi... Razz
Bulgin2008_ Superrecursive Features of Interactive computation


D'autres machines ne concernent plus vraiment les systèmes vivants.  Certains cherchent à exploiter la relativité générale classique en montrant qu'il existe en théorie des espaces-temps dans lesquels il serait possible de contourner en un temps fini des géodésiques de longueur infinie.  Cela permettrait de commencer un calcul au point A, et de partir en un temps fini pour un point B tel que la lumière ait parcouru un temps infini pour aller de A à B.


Dans tous les cas, la réalisabilité physique des modèles théoriques capables de produire des hypercalculs ( super-Turing) est extrèmement controversée.  Pour tout dire, les théoriciens de l'informatique comme Martin Davis nous disent d'arrêter de fantasmer et que c'est physiquement impossible, ne serait-ce qu'à cause de limitations dues au bruit stochastique ou même aux fluctuations quantiques que tous ces modèles de calcul oublient.   L'infini ne s'atteint jamais en (bio)physique expérimentale.

Voici aussi une réponse plus récente cherchant à défendre l'éventuelle possibilité de la réalisation de l'hypercalcul face aux arguments de Davis:  
GOVINDARAJULU 2012, The myth of "the myth of hypercomputation"
Je ne suis pas convaincu par la validité de leurs objections, mais c'est bien de voir qu'il y a un débat...

Un autre point important encore plus récent est que les systèmes dynamiques à temps continus (comme les réseaux de neurones ou les réseaux de protéines qui sont considérés comme des calculateurs analogiques ) ont été reconnus comme équivalent à des machines des Turing par Bournez (en 2014).  C'est-à-dire que finalement, il pourrait être acquis que les systèmes continus sont aussi converts par la thèse de Church_Turing , ce qui signifierait que l'on doive oublier l'idée de réalisabilité physique de l'hypercomputationnalité basée sur des systèmes physiques servant de modèles à des equations différentielles.
Bournez 2014, Continuous time models are equivalent to Turing machines  (Ici encore je ne comprends pas très bien tous les raisonnements, mais j'ai un vrai livre d'informatique théorique a étudier avant de relire cet article et les autres...
Mais je pense que tu en sais bien plus que moins sur l'informatique théorique Wink

Une remarque: dans le paradigme de "calcul naturel" (natural computing), c'est bien l'expérience du système physique qui est pris comme outil de calcul pour évaluer de manière analogique des systèmes d'equations qui, selon le sens commun habituel, modéliseraient le système physique. En effet, pour illustrer l'idée, mentionnons que le mouvement naturel d'une rivière, par exemple, calcule beaucoup plus rapidement les équations de Navier-Stokes que n'importe quel super-ordinateur.


Je veux aussi faire observer que dans la majorité des articles que je cite ici, il y a des auteurs travaillant en sciences cognitives. Ce qui justifie la pertinence de ce point de vue puisque les auteurs plus "anciens" associent toujours le computationnalisme aux machines de Turing, ce qui fait qu'en suivant leur terminologie, le calcul super-Turing n'est plus "computationnel"...  Pour d'autres auteurs, le computationnalisme a été généralisé de manière à inclure l'hypercomputationnalisme..  
C'est exactement un des points auquel je réferrais lorsque je disais que ces foutus mots en "-isme" énoncés sans définition étaient polysémiques.

Bref, les débats sont assez récents, et on verra comment la compréhension des notions d'information et de calcul évolueront.
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Message par ifness Mar 31 Jan 2017 - 18:51

Bon, je lis, moi.

Faut que je rentre dans le sujet,
je suis pas vraiment versé Sciences Cognitives, apparemment,
pourtant j'suis assez versé, comme garçon.

Faut que j'apprivoise le vocabulaire, puis les concepts.
J'ai lu par ex l'interv' de paella, et j'ai suivi (je lis dans tous les sens)

C'est terriblement intéressant, un fil comme ça, mais j'ai du mal
non à comprendre (je m'y reprends à 3 ou 4 fois mais je finis par piger)
mais ce qui me terrifie un peu, c'est l'extrême hiatus
entre le commun (qui ne comprendra rien) et le passionné (qui maîtrise son sujet)

Je veux dire : si je suis incapable de m'investir dans les théories quantiques ou les particules produites dans le cyclotron,
on s'en fout, je me contente de lire de la doc généraliste,
c'est de la science dure, les gars bossent, ils remettent en cause à chaque découverte les modèles existants, c'est passionnant,
mais on ne marche pas dans le mou : on parle de l'Univers, et de ce qu'on apprend à en connaître (et peut-être si l'Humanité parvient à survivre navigueront-ils sur des modèles tout à fait différents dans quelques siècles, je dis, c'est passionnant.)

Dans le domaine qu'on aborde (et je répète que ce n'est PAS DU TOUt mon domaine de prédilection, les miens étant plutôt l'histoire (antique) , l'Art (en général), les sciences dures (que je n'aborde que par journalismes interposés), la biomédecine, , bon je me disperse
il me semble que quelque chose de "subjectif" s'interpose.

Il est facile d'opposer à Levi Strauss sa démarche "structuraliste",mais
Il devient facile d'opposer à Foucault ses "erreurs" d'interprétation historiques (dans le domaine de la folie, en particulier)

Il est difficile d'opposer "comme ça" quelque chose à VOUS.
Umberto Ecco,(que les dieux l'accueillent en l'Olympe) utilisait votre programme de sémiologie, mais dans un domaine restreint.

Vous (ce n'est pas une critique, je ne permettrais pas !) semblez évoluer dans un monde fait de référentiels un peu inabordables (encore une fois je ne critique pas, on nous conseille de saines lectures abordables par tous et chacun)
mais vous me faites un peu peur.


Avez-vous lu du Heidegger ?
Je crains que vous ne naviguiez dans les mêmes eaux que lui, je veux dire : dans des concepts que VOUS maîtrisez, mais que j'ai du mal à intérioriser.
J'ai eu le même problème à la lecture d'Edgar Morin, un grand esprit s'il en est,
Levi Strauss  avait, lui, ce don, ce génie, de rendre sa science d'une lecture facile.

Bon, je ne me permettrai pas de "critiquer" vos passions.
Je vous l'ai dit : je lis.
Merci.
Je relis le dernier paragraphe de badak.
Et je souris.
Si je lis, à haute voix, devant une assemblée de personnes ordinaires mais cultivées,
on va rigoler. Enfin : moi.
je ne sais pas si vous vous en rendez compte....
(Et, moi, j'accède à votre pensée ! Il ne s'agit donc pas de moi  Smile )

Je sais, nous sommes sur un forum de HQI, voire THQI.
Je ne nourris aucun complexe, je me sens capable de (sauf de suivre un mathématicien dans ses séries d'équations, là, j'ai fait un blocage à 16 ans dont ne me suis pas remis  Embarassed )

Ce qui me déplaît, quelque part, c'est qu'un discours devienne par le fait même de sa spécificité, isolé, peu accessible, abstrait.
J'ai lu le livre de Piketti sur "Le capital au XXIème siècle".
C'est ardu, long, un pavé, mais c'est accessible. Piketti ne se paie pas de mots.

Vous me rétorquerez : "si t'es pas branchouille, va voir ailleurs, tu trouveras ton bonheur".
Le problème est que je suis révolté.
Vous me rétorquerez : "fous-nous la paix, on dicute entre potes. Si les problèmes religieux style "que signifie la Trinité?" te branchent, vas-y voir.
Le problème est que je suis curieux, et que j'adore relever des défis.
Il se trouve que vous m'en posez un.

................Alors je danse......
Non : ....Alors je lis........

Le titre m'a interpellé : il est "pédagoqique". Suspect
Alors chuis v'nu voir.

J'ai de la lecture, merci.
Tu m'étonnes, que c'est chronophage, hé cong !!!! Razz I love you

So long. If.

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Message par soto² Mar 31 Jan 2017 - 19:40

@ ifness : Re Wink Mon projet initial quand j'ai lancé ce fil était bien de tenter de faire une présentation du sujet abordable et la moins pédante possible, ouverte aux débutants. Donc, tu fais bien de nous rappeler à l'ordre. Ceci étant dit, il est un peu normal au début, et vu que l'on étaient très peu nombreux, de jouer quelques passes d'armes amicales pour faire connaissance. De plus, nous avons chacun des backgrounds qui sont éclectiques, ce qui enrichie d'autant les conversations mais complexifie la communication...

ifness a écrit:Vous me rétorquerez : "si t'es pas branchouille, va voir ailleurs, tu trouveras ton bonheur".

Personne n'a jamais suggéré cela ici, bien au contraire. Très honnêtement, et malgré le peu d'autorité que j'ai sur ce fil, c'est bien la dernière chose que je voudrais entendre, et je suis persuadé de ne pas être le seul, regarde les interventions qu'il y a eu et tu comprendra.

Donc, merci de ton intervention, et j'espère que l'on va maintenant revenir un peu plus sur les fondamentaux, de manière à ce que les personnes qui ont envies de poser des questions ou des demandes d'éclaircissements ne se sentent pas intimidées de les faire. Encore une fois, je pense qu'ici personne ne prêtant être au dessus de la mêlée, il y a juste des différences d'expérience et de point de vue.

Pour ce qui est de nourrir la critique, encore faut-il préalablement que l'on sache de quoi on parle, et ce n'est pas chose aisée. Et puis en plus de la régulation critique, il y a aussi la régulation éthique. N'hésites donc pas à poser des questions sur des points précis qui ne te semblent pas clairs.

Sinon personnellement je n'ai pas lu dans le texte Heidegger, mais il y a certaines de ses idées qui m'intriguent concernant la compréhension de la nature de la technique (il y a aussi, plus récemment, la pensée de Simondon qui m'intéresse)... Tu vois comment çà démarre... Wink

ps : chapeau, si tu as lu le Piketti, à mon avis plus rien ne peux plus t'arrêter !
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Message par ifness Mar 31 Jan 2017 - 20:05

Je sens que tu es très sympa, que tu désires réellement communiquer/faire comprendre/dialoguer
Badak et paella participent, c'est bien,
on va voir.
(Bon Piketti, laisse béton, i a vendu des mill....d'exemplaires
ce qui ne prouve rien)
-il est adoré sur les campus américains-
mais je te conseille un livre hilarant, le dernier Laurent Binet
"La septième fonction du langage"
il y est question de sémiotique entres autres,
et Binet ridiculise ouvertement (on se tord de rire) les discours fumeux de Barthes ,de Foucault, de Derrida, and so & so,
qui firent les belles heures des campus des années 80.

Ceci pour dire que oui, il est nécessaire d'être accessible.
(je notais dans mon précédent post une exception évidente : les équations mathématiques ou astrophysiques)

Bon, je vais lire, en fait si tu mesures tu te rends compte que votre fil fait un bouquin, ou quasi,
surtout si on entre dans un sujet a priori abstrus.

A bientôt. Je vais lire.
Ca m'intéresse,
vu que je ne connais pas bien (si certaines notions....) et que ça me paraît réellement pas fumeux, branché sur des réalités neuves que tout "honnête homme" se doit de bosser. (Mon héroïne est Emilie du Chatelet, qui, près de Voltaire, traduisit Newton.)
Voilà : je me situe perso dans la ligne de Diderot (un ami Smile )
merci pour (en dépit de ton autorité) ton humilité.
If.

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Message par soto² Mar 31 Jan 2017 - 20:26

@ ifness : tu te trompes, je ne suis pas sympa, j'essaye d'être convivial et de tenir l'engagement de mon titre de fil. Question de co-errance. Ok ?! Dent pétée
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Message par Badak Mar 31 Jan 2017 - 20:37

soto² (mode camo on) a écrit:...Question de co-errance. Ok ?! Dent pétée
Spoiler:
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Message par paela Mar 31 Jan 2017 - 21:27

@Badak, au sujet de la calculabilité:

Pour résumer cette parenthèse, depuis Turing, les informaticiens, mathématiciens et autres utilisent une notion de calcul qui est formellement définie en maths: le calcul par une machine de Turing. Description (modifiée) de ce qu'est une machine de Turing par Wikipedia:

Une machine de Turing est une sorte de machine à écrire automatique qui comporte les éléments suivants :

-Un nombre fini de rubans horizontaux parallèles infinis vers la gauche divisés en cases consécutives, avec une première case à droite pour chacun, les premières cases étant alignées. Chaque case peut comporter le symbole 0 ou le symbole 1. On considère que les cases non encore écrites des ruban contiennent le symbole 0 ;
-Une tête de lecture/écriture qui peut lire et écrire les symboles sur les rubans (tous ceux qui sont verticalement alignés avec la tête de lecture), et se déplacer d'une case vers la gauche ou vers la droite des ruban perpendiculairement à eux;
-Un registre d'état qui mémorise l'état courant de la machine de Turing. Le nombre d'états possibles est fini, et il existe un état spécial appelé "état initial" qui est l'état de la machine avant son exécution, et un "état final" qui est l'état qui indique à la machine de s'arrêter.
-Une table d'actions qui indique à la machine, en fonction de l'état dans lequel elle est et des symbole qu'elle lit là où la tête de lecture se trouve, quel symbole écrire sur le ruban, comment déplacer la tête de lecture (ou bien pas du tout, ou bien d'une case vers la gauche, ou bien d'une case vers la droite), et quel est le nouvel état de la machine. Si aucune action n'existe pour une combinaison donnée d'un symbole lu et d'un état courant, la machine s'arrête. Cette table d'action est définie à l'avance, d'où le fait que la machine fonctionne toute seule.

On écrit autant de suites fines u1,u2,...,up de 0 et de 1 qu'il y a de rubans sur chaque ruban de la machine de Turing T, le dernier symbole de chacque suite figure sur la première case du ruban sur lequel elle est écrite. La machine se lance selon sa table d'action, et finit par s'arrêter si elle atteint l'état final. Le cas échéant, la suite de 0 et de 1 qui est écrite sur le ruban est considérée comme le résultat T(u1,...,up) du calcul de T en u1,...,up. Sachant que les suites finies de 0 et de 1 correspondent naturellement à des nombres entiers via la décomposition en base binaire (0 correspond à 1.2^0 = 1, 101 correspond à 1.2^2 + 0.2^1 + 1.2^0 = 5, 1000 correspond à 1.2^3 + 0.2^2 +0.2^1 + 0.2^0 = 8, etc...), on peut une fois ce codage effectué considérer que T calcule la fonction qui à la liste de nombres codés respectivement par u1,...,up associe le nombre codé par T(u1,...,up). Attention toutefois, la machine peut tourner en boucle, et donc la fonction associée n'est pas nécessairement définie en tout p-uplet d'entiers.

Les machines de Turing peuvent calculer plein des choses: elles peuvent faire des additions, des multiplications, des divisions euclidiennes, et j'en passe. Ce sont les modèles de calcul à partir desquels on a conçu l'ordinateur.
La thèse de Church-Turing consiste en l'idée que tout calcul réalisable (en un sens non formel: tout calcul qu'on peut réaliser) est réalisable par une machine de Turing. On peut dire qu'à ce jour, on n'a pas trouvé de moyen de dépasser "la barrière de Turing" et de proposer des machines qui calculent plus que les machines de Turing. Si on trouvait un moyen de le faire, cela réfuterait la thèse, et changerait notre façon de voir le calcul, les ordinateurs. Mais cela n'invaliderait pas à ce que je sache les courants cognitiviste et connexionniste. C'est plutôt une question interne à ces courants. Bref, je pense qu'on peut dire que la thèse de Church-Turing n'est pas fondamentale dans ce qui nous importe.

Bienvenue ifness!


Dernière édition par paela le Mer 1 Fév 2017 - 0:51, édité 1 fois
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Message par ifness Mar 31 Jan 2017 - 22:12

Merci paela.
Pour l'heure je me débats en cohérence et co-errance.
Ton spoiler me donne de la difficulté.
Merdre, il va me falloir réactiver certains neurones.
Mais ça me va, j'en ai besoin, je dors trop.


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Message par soto² Mer 1 Fév 2017 - 9:31

Badak a écrit:Je pense qu'on peut parler de l'"enactivisme" comme d'un paradigme de recherche pouvant inspirer les sciences cognitives, mais en soi l'idée de l'enaction ne semble pas être techniquement vérifiable. ( Comment penseriez vous que ce puisse faire l'objet d'expériences chez des non-humains ? )

A mon avis, c'est justement sur les humains que c'est est le plus intéressant, et pas n'importe lesquels : nous même !

Badak a écrit:On peut par contre postuler l'existence de ce monde subjective pour tout être vivant et système cognitif, et en comprendre intuitivement les grandes lignes en nous référant aux modes de perceptions. Par exemple, le monde interne de la chauve-souris est tel qu'il peut être perçu par les sonars tandis que celui du chien l'est surtout par l'olfaction  (Nagel: what is it like to be a bat ?)

Non, je ne suis pas d'accord !! Râleur  Ne commençons pas à flouter la distinction entre "être vivant" et "système cognitif", ou alors il faut déclarer son allégeance transhumaniste tout de suite et on ouvre un nouveau fil.

Par contre très bonne référence à Nagel pour ceux qui veulent comprendre la légitimité de l'idée du monde propre/phénoménal (Umwelt, Von  Uexkul), sans passer d’emblée par l'absconde et élitiste phénoménologie husserlienne, et cheminer vers la praxis complémentaire du "point de vue en 1ère personne".

Badak a écrit:Je remarque aussi que ce monde interne subjectif n'est pas forcé d'être conscient, puisque on ne sait rien de la conscience de la chauve-souris, et que même chez l'humain, nous ne pouvons jamais être pleinement conscient de l'ensemble de nos perceptions ou des transformations qu'elles produisent en nous.  D'ailleurs Varela applique ce paradigme de l'enaction (et de l'autopoiesis) également aux cellules vivantes, qui ne sont apriori pas conscientes (au sens habituel du terme ).

Oui, bien sur, et c'est pour aussi çà que nous avons besoin de nous appuyer sur une culture rationnelle valide  et objectiviste, et d'échanger nos points de vue respectifs. Nous ne sommes pas grand chose sans les autres...

Tiens une superbe référence varélienne sur la biosémiotique (Sebeok, Brier, ...) :
The 'Surplus of Meaning'. Biosemiotic aspects in Francisco J. Varela's philosophy of cognition, Andreas Weber.
Voir aussi du même auteur : Life after Kant: Natural purposes and the autopoietic foundations of biological individuality - Weber, Varela, 2002.

Badak a écrit:Si on prend au sérieux la portée phénoménologique de l'idée d'enaction pour tous les systèmes cognitifs "incarnés", alors cela impliquerait de prendre au sérieux l'existence d'un monde interne subjectif chez les robots "épigénétiques", ( i.e. les robots cognitifs qui se développent au contact d'un environnement sensoriel ).   Sinon, sur quelle base n'appliquer le concept d'enaction qu'à certains des systèmes cognitifs et pas aux autres ?   Ça nous prendrait dans chaque cas, une connaissance à la première personne d'un point de vue subjectif qui n'est pas le notre.

Tu peux enlever les guillements à "incarné". Ma chair ce n'est pas une métaphore, elle, et mon rapport au corps n'est pas virtuel. Par contre, ce n'est peut-être pas le cas pour tout le monde. Si ?! Wink

Et çà continue... par contre tu as bien fait de mettre des guillements à "épigénétique"... les robots "cognitifs qui se développent au contact d'un environnement sensoriel". Puisque tes machines sont déjà "cognitives", qu'elle se "développent" et qu'elles ont un "environnement sensoriel", je ne vois vraiment pas pourquoi nous nous embêtons (...) à discuter et à réfléchir !!

Appliquer, appliquer, vous n'avez donc que ce mot à la bouche ?!  Pété de rire c'est cela le faitichisme. Si tu veux à tout pris appliquer le concept d'enaction, c'est à toi-même qu'il faut d'abord le faire. L'enaction c'est une praxis de souplesse herméneutique, c'est une vision ouverte et compréhensive (au double sens du mot).
Ce que les scientifiques sont incapables de théoriser, et tant mieux, c'est justement la créativité scientifique.

"il ne s’agit pas de contester les sciences, mais d’admettre qu’elles s’enracinent dans une expérience première de l’être.". Merleau-Ponty.

"Faire de la science, ce n’est pas vérifier une ontologie, c’est se priver d’ontologie préconçue." Rastier.
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Message par paela Mer 1 Fév 2017 - 16:42

@Soto: C'est bien la peine que je t'explique pourquoi je cherche à savoir comment on peut appliquer les principes de l'énaction si tu reviens immédiatement à ton idée que c'est une manie...
A quoi ça sert à ton avis d'appliquer tiens? (ce n'est pas une question rhétorique)
Et puis tiens, aussi, pourquoi ne faut-il pas s'intéresser à l'application ici?

Déjà, il ne s'agit pas tout de suite d'appliquer mais de préciser. On ne parle pas d'appliquer la théorie pour concevoir un nouveau modèle de smartphone, mais de manipuler les idées dans d'autres contextes. Réfléchir pour comprendre quoi.
Comme je l'ai dit, la troisième colonne du tableau que tu as reconstitué à partir du livre de Varela est vague (au fait, il manque un "à" entre "s'adjoint" et "un monde" à la troisième ligne, ça m'avait fait bugger au début!). Je ne sais pas si Varela entend trouver des critères pour distinguer la cognition comme il la voit de la simulation de cognition (problème évidemment intéressant et important), mais si on veut au moins avoir une idée plus claire de la cognition d'autres animaux, on ne peut pas en rester à dire en gros qu'un système cognitif est un système qui est vraiment cognitif.
Je ne comprends pas pourquoi tu t'opposes à ce qui n'est que de la simple curiosité pour l'idée de Varela exprimée par Badak. D'autant plus que Varela lui-même ne s'est pas contenté d'énoncer son idée générale.
Si tu espères susciter de l'intérêt et de l'adhésion à tes idées sur le plan éthique sans vouloir qu'on s'intéresse à la question à notre manière, tu vas être déçu.

Enfin bref je parle seulement en mon nom. Je ne veux pas être désagréable mais la rhétorique antirationnelle me fatigue à l'avance.

L'enaction c'est une praxis de souplesse herméneutique

Que veux-tu dire par là?
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Message par Badak Mer 1 Fév 2017 - 18:35

ifness a écrit:....
entre le commun (qui ne comprendra rien) et le passionné (qui maîtrise son sujet)

.....
Merci.
Je relis le dernier paragraphe de badak.
Et je souris.
Si je lis, à haute voix, devant une assemblée de personnes ordinaires mais cultivées,
on va rigoler. Enfin : moi.
je ne sais pas si vous vous en rendez compte....
........
Ce qui me déplaît, quelque part, c'est qu'un discours devienne par le fait même de sa spécificité, isolé, peu accessible, abstrait.
.....
Le problème est que je suis curieux, et que j'adore relever des défis.
Il se trouve que vous m'en posez un.
................Alors je danse......
Non : ....Alors je lis........
...
Tu m'étonnes, que c'est chronophage, hé cong !!!! Razz  I love you

Salut !  
Pour te rassurer, chacun ici ne maîtrise qu'une partie infime du sujet.  Pour ce que j'ai personnellement écrit tout en haut, ce n'est pas la peine de le lire, j'y expose mes incompréhensions à partir des biais provenant de mes connaissances importées d'un autre domaine...  C'était plus vers Soto.

Je pense que c'est très interessant que tu discutes aussi, et pas besoin d'être intimidé...  Tu as une autre perspective c'est tout.
Si tu as lu Heidegger, alors en effet, il y un lien :  c'est qu'il s'agit, avec la théorie de l'enaction de Varela (et d'autres ensuite), de prendre aussi en compte les apports de la phénoménologie du sujet (au sens de Husserl) et de tenter de marier cela avec les sciences cognitives, dont la philosophie est traditionnellement plutôt analytique (et proche des maths). Pour Heidegger, ce serait sûrement un mariage contre nature... et le même scepticisme serait aussi partagé par la plupart des scientifiques, (dont moi avant les lectures de ce post ) .

Par contre, je ne pense pas que le langage et la pensée soient ici aussi idiosyncratiques que chez Heidegger (ce que tu semblais suggérer)  Je veux dire qu'il faut essayer de définir ce dont on essaie de parler et essayer aussi d'être rationnel, même en incorporant des réflexions portant sur la phénomènologie du sujet..  Ce qui n'était visiblement pas le souci d'Heidegger ( qui est envoutant mais pas toujours vraiment logique).

Pour lire de manière efficace le sujet initié par Soto, je suggérerais d'abord de lire quelques articles de l'encyclopédie de philosophie de Stanford pour éclaircir le vocabulaire....  et  éviter les erreurs que j'ai commises plus haut en utilisant les mots en "-isme" dans des sens différents de ceux utilisés dans ce contexte spécifique.    
sur la notion de représentation mentale en science cognitive
sur le functionalisme en science cognitive/
sur le computationalisme en science cognitive
sur la cognition "incarnée"  (ou incorporée.. ), avec un passage sur l'enaction de Varela)
une très brève synthèse de la théorie de l'enaction de Varela

**  Et/ou (tel que préconisé par soto:) de trouver le petite livre de Varela mentionné par Soto plus haut (qui fait à peine plus de 100 p.  invitation aux sciences cognitives, 1989... ) . Même si les articles de l'encyclopédie introduisent plus de nuances, c'est quand même plus compliqué aussi à lire.

Pour ce qui est du débat sur le mode de calcul de l'Esprit ( "calcul" pris dans un sens plus ou moins élargi, et sa relation (ou non) avec le réductionnisme), Paela a raison que c'est une question assez spécialisée et que ce n'est pas le plus important en premier lieu si on s'interesse au paradigme de l'enaction. (Et la thèse de Church Turing n'est pas démontrable, elle fait le lien entre une intuition  et une formalisation   )
(Esprit = "Mind" en anglais, i.e. le sujet pensant et connaissant en nous, qu'il soit ou non émergeant ou dual avec la nature physique n'importe pas.. )  (Je voudrais ajouter plus tard des nuances pour défendre l'idée que l'étude du mode de calcul est important, mais pour l'instant on a trop de bases en philo des sciences cognitivies à rattraper.   ) Very Happy

Chronophage... ouais... . surtout quand on a autres choses à faire ! Razz Shocked
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Message par Badak Mer 1 Fév 2017 - 19:29

soto² a écrit:
Badak a écrit:Je pense qu'on peut parler de l'"enactivisme" comme d'un paradigme de recherche pouvant inspirer les sciences cognitives, mais en soi l'idée de l'enaction ne semble pas être techniquement vérifiable. ( Comment penseriez vous que ce puisse faire l'objet d'expériences chez des non-humains ? )

A mon avis, c'est justement sur les humains que c'est est le plus intéressant, et pas n'importe lesquels : nous même !  
Laughing  (on dirait que je discute avec ma mère qui est une grande fan du Dalai-Lama.. et du Bouddhisme comme toi et Varela   Razz )   Évidemment, nos intérêts spécifiques dépendent des questions auquelles on aimerait pouvoir répondre  !!  

soto² a écrit:
Badak a écrit:On peut par contre postuler l'existence de ce monde subjective pour tout être vivant et système cognitif, et en comprendre intuitivement les grandes lignes en nous référant aux modes de perceptions. Par exemple, le monde interne de la chauve-souris est tel qu'il peut être perçu par les sonars tandis que celui du chien l'est surtout par l'olfaction  (Nagel: what is it like to be a bat ?)

Non, je ne suis pas d'accord !! Râleur  Ne commençons pas à flouter la distinction entre "être vivant" et "système cognitif", ou alors il faut déclarer son allégeance transhumaniste tout de suite et on ouvre un nouveau fil. Par contre très bonne référence à Nagel pour ceux qui veulent comprendre la légitimité de l'idée du monde propre/phénoménal (Umwelt, Von  Uexkul), sans passer d’emblée par l'absconde et élitiste phénoménologie husserlienne, et cheminer vers la praxis complémentaire du "point de vue en 1ère personne".
Voyons soto ?!? on ne va pas discuter de transhumanisme ici  (D'ailleurs je suis contre le transhumanisme tout autant que toi manifestement.. mais c'est une position éthique... Rien à voir avec la question ici. ).. Disons qu'il faut d'abord rappeler que Varela a commencé sa réflexion en posant l'egalité entre système cognitif et système vivant, par le biais de son concept d'autopoiesis.  Par la suite des nuances sont apparues.
Ce qui semble acquis est que tout système vivant est d'abord un système cognitif qui s'est auto-organisé.   L'enaction est une condition de l'autopoiesis (si je n'abuse ?).

Les systèmes cognitifs qui m'interessent le plus sont justement les plus élémentaires d'entre eux, ceux dont l'étude pourrait nous permettre de distinguer ce qui a de si particulier qui apparaît (emerge ?) avec la cognition.  
Bref: les bactéries, les neurones , les cellules gliales, les insectes, et plus les chats, les chiens.
Il y a aussi Gaia qui selon l'hypothèse de Lovelock est un organisme (non-vivant) mais qu'on peut aussi voir comme un système cognitif.  

"Habituellement" (i.e. selon mes biais),  les systèmes cognitifs les plus simples sont modélisées selon les approches computationnelles "cognitiviste" (i.e. approche classique basée sur la manipulation de symbole ) ou sur les approches connexionnistes et "dynamicistes" (utilisant des réseaux d'interactions )..Et comme on disait, aucun des deux ne peut apriori tenir compte de l'expérience vécue phénoménale.

Pour la Umwelt, c'est exactement ce à quoi je référais.  La biosémiotique emprunte un chemin similaire à celui de Varela en appliquant la phénoménologie à la biologie, et en mettant l'accent sur le sens.   D'ailleurs il faudrait y revenir après .  

soto² a écrit:...
Tiens une superbe référence varélienne sur la biosémiotique (Sebeok, Brier, ...) :
The 'Surplus of Meaning'. Biosemiotic aspects in Francisco J. Varela's philosophy of cognition, Andreas Weber.
Voir aussi du même auteur : Life after Kant: Natural purposes and the autopoietic foundations of biological individuality - Weber, Varela, 2002.

Merci, c'est un peu ce que je cherchais pour le premier article: le lien entre la biosémiotique et l'enactivisme de varela.

soto² a écrit:...
Badak a écrit:Si on prend au sérieux la portée phénoménologique de l'idée d'enaction pour tous les systèmes cognitifs "incarnés", alors cela impliquerait de prendre au sérieux l'existence d'un monde interne subjectif chez les robots "épigénétiques", ( i.e. les robots cognitifs qui se développent au contact d'un environnement sensoriel ).   Sinon, sur quelle base n'appliquer le concept d'enaction qu'à certains des systèmes cognitifs et pas aux autres ?   Ça nous prendrait dans chaque cas, une connaissance à la première personne d'un point de vue subjectif qui n'est pas le notre.

Tu peux enlever les guillements à "incarné". Ma chair ce n'est pas une métaphore, elle, et mon rapport au corps n'est pas virtuel. Par contre, ce n'est peut-être pas le cas pour tout le monde. Si ?! Wink
hahaha    Je mets des guillemets pour souligner que l'on ne prend pas la notion d'incarnation  au sens le plus commun qui est celui qu'on rencontre dans le Christianisme.   Ici l'incarnation (= embodiment) ne présume pas un dualisme du corps et de l'esprit, mais parle plutôt de la possibilité d'une emergeance.
soto² a écrit:...Et çà continue... par contre tu as bien fait de mettre des guillements à "épigénétique"... les robots "cognitifs qui se développent au contact d'un environnement sensoriel". Puisque tes machines sont déjà "cognitives", qu'elle se "développent" et qu'elles ont un "environnement sensoriel", je ne vois vraiment pas pourquoi nous nous embêtons (...) à discuter et à réfléchir !!

Appliquer, appliquer, vous n'avez donc que ce mot à la bouche ?!  Pété de rire c'est cela le faitichisme. Si tu veux à tout pris appliquer le concept d'enaction, c'est à toi-même qu'il faut d'abord le faire. L'enaction c'est une praxis de souplesse herméneutique, c'est une vision ouverte et compréhensive (au double sens du mot).
Ce que les scientifiques sont incapables de théoriser, et tant mieux, c'est justement la créativité scientifique.  

Pour ta dernière phrase, c'est assez amusant, mais justement la créativité (y compris scientifique) se théorise.. et par des modèles mathématiques en plus. (je t'enverrai la référence si ça te passionne et si je la retrouve Wink  ).

Pour ton premier paragraphe... c'est assez symptomatique en effet de nos divergences de buts.  
Revenons au titre que tu as toi même énoncé: tu parles de sciences cognitives..  Pas spécialement de phénoménologie du sujet humain, sans quoi la science serait presque inutile à cette réflexion.  Les philosophes ont réfléchis et réfléchissent encore à ces questions, mais l'intérêt ici est d'emmener cette perspective du côté des sciences, et cela exige du vérifiable expérimentalement.  

Je sais que tu n'es pas opposé à la science en tant que telle (tu l'a répété maintes fois), mais il ne s'agit plus finalement d'avoir d'une part un paradigme scientifiques (déconnectée du sujet phénoménal) et d'autre part une réflexion philosophique phénoménale invérifiable et floue, mais bien de tenter de comprendre si et comment on peut élaborer avec Varela (et d'autres) une théorie scientifique de la cognition qui tiennent aussi compte des expériences vécues phénoménologiquement par un sujet connaissant incarné et construisant son propre monde interne.
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Message par soto² Mer 1 Fév 2017 - 20:11

@ Paela : Soyons clairs, c'était une réponse à Badak : j'indiquai le sens dans lequel j'aimerai que la conversation s'oriente. Et ton intervention me met un peu mal à l'aise, car mon intention était provocatrice mais cordiale. Après, j'entends tes commentaires. Oui, "effectivement", je pense qu'il y a une manie aujourd'hui à n'évaluer les idées qu'en fonction de leurs applications, et cela me dérange. Voilà ce que j'exprimai. Pour le reste, j'ai déjà précisément exprimé ma conception d'une épistémologie scientifique "classique", on ne vais pas y revenir.

paela a écrit:Déjà, il ne s'agit pas tout de suite d'appliquer mais de préciser. On ne parle pas d'appliquer la théorie pour concevoir un nouveau modèle de smartphone, mais de manipuler les idées dans d'autres contextes. Réfléchir pour comprendre quoi.
Pas des modèles de smartphone, des algorithmes de data mining (Big Data), des robots militaires pour rendre les soft et hard powers un peu plus efficace. Au passage, Ray Kurzweil le pape du transhumanisme et de l'"IA dure" (Hard AI) travaille chez Google comme directeur de l'ingénieurie, collabore avec la NASA, ... vas-y traite moi de parano. C'est aussi l'automatisation du travail, qui est rentré dans une phase de développement rapide et qui va impacter à court terme de façon importante la démographie du chomage. C'est enfin, à travers la robotique d'agrément, la production d'artefacts renvoyant à des modèles implicites infiltrant insidieusement dans l'esprit du grand public que "oui, nous aussi nous sommes des ordinateurs" et "oui, nous les cogniticiens, nous sommes tellement intelligents que nous fabriquons des robots intelligents" et contribuer un peu plus à mécaniser l'esprit des gens.

Donc, oui paela, en tant que créateur de ce fil destiné aussi à des généralistes, j'entends bien exprimer le sens vers lequel j'aimerais que nos conversations se dirige, étant donné les enjeux politiques et stratégiques. Et je me répète.

Paela a écrit:Comme je l'ai dit, la troisième colonne du tableau que tu as reconstitué à partir du livre de Varela est vague (au fait, il manque un "à" entre "s'adjoint" et "un monde" à la troisième ligne, ça m'avait fait bugger au début!).
Très bien, voilà enfin peut-être notre premier sujet de discussion sur le livre en tant que tel (et j'ai corrigé la coquille, merci). Si tu pouvais en dire un petit peu plus, de manière à ce qu'on puisse cibler les réponses, dire que c'est vague est un peu vague... Vu que c'est un récapitulatif du livre, peux-tu préciser en y faisant référence ce que tu ne comprends pas.

Paela a écrit:Je ne sais pas si Varela entend trouver des critères pour distinguer la cognition comme il la voit de la simulation de cognition (problème évidemment intéressant et important), mais si on veut au moins avoir une idée plus claire de la cognition d'autres animaux, on ne peut pas en rester à dire en gros qu'un système cognitif est un système qui est vraiment cognitif.
J'ai beaucoup de mal à saisir ce que tu dis.

Paela a écrit:Je ne comprends pas pourquoi tu t'opposes à ce qui n'est que de la simple curiosité pour l'idée de Varela exprimée par Badak. D'autant plus que Varela lui-même ne s'est pas contenté d'énoncer son idée générale.
Déjà tu parles à la place de Badak, ensuite je ne m'oppose pas, et encore une fois est-ce que tu as lu le livre ??? Comment peux-tu dire que "Varela lui-même ne s'est pas contenté d'énoncer son idée générale.", alors qu'il l'expose très clairement dans l'ouvrage, et qu'il a écrit, en scientifique reconnu, des centaines d'articles et des dizaines de livres.

Paela a écrit:Si tu espères susciter de l'intérêt et de l'adhésion à tes idées sur le plan éthique sans vouloir qu'on s'intéresse à la question à notre manière, tu vas être déçu.
Je note encore une fois que tu parles au nom des autres. Ce ne sont pas tant "mes idées" qui m'importent ici que celles de Varela. Tes leçons d'éthique, tu peux te les garder pour toi même. Et j'ai envie de rajouter, l'ambiance aidant et parce que çà me démange depuis quelque temps : tu n'as pas le monopole de la rationalité, alors arrête ce que je perçois comme un ton condescendant avec moi. Capisce ?!

Et pour finir, dire "Enfin bref je parle seulement en mon nom" juste à la fin de ton message, surtout après ce que tu insinues juste avant et après avoir parlé au nom des autres, au bas mot je trouve çà un peu cavalier mon cher.

PS : Je vois que Badak vient de poster avant moi, tant pis, j'envoie, faut s'exprimer.
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Message par soto² Mer 1 Fév 2017 - 20:27

Bon, faut que je me calme, c'est çà d'avoir du sang italien dans les veines...

Badak a écrit:(on dirait que je discute avec ma mère qui est une grande fan du Dalai-Lama.. et du Bouddhisme comme toi et Varela   Razz )   Évidemment, nos intérêts spécifiques dépendent des questions auquelles on aimerait pouvoir répondre  !!  

LOL  Pété de rire  Bon, après je ne connais pas ta mère, mais comme çà elle m'a l'air sympathique.

Je me rend, j'avoue !:


Dernière édition par soto² le Jeu 2 Fév 2017 - 15:45, édité 2 fois
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Message par Badak Mer 1 Fév 2017 - 20:37

soto² a écrit:Bon, faut que je me calme, c'est çà d'avoir du sang italien dans les veines...

Badak a écrit:(on dirait que je discute avec ma mère qui est une grande fan du Dalai-Lama.. et du Bouddhisme comme toi et Varela   Razz )   Évidemment, nos intérêts spécifiques dépendent des questions auquelles on aimerait pouvoir répondre  !!  

LOL  Pété de rire  Bon, après je ne connais pas ta grand-mère, mais comme çà elle m'a l'air sympathique.

Je me rend, j'avoue !:

Ma mère me dirait qu'il faut méditer avant qu'on s'enerve pour rien.  (  Razz  )

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Message par soto² Mer 1 Fév 2017 - 20:53

Ce que j'ai dit, c'est que je crois assez bien connaître l'épistémologie des sciences "dures", c'est à dire classiques (de la matière et de la vie), parce qu'on ne peut plus trop dire à mon avis que la physique moderne le soit (je sens que çà risque de faire débat). Mais ce que je voulais surtout indiquer (surtout au début, vu mon discours et mon positionnement), c'était que je ne venais pas des sciences humaines.

CV:

Et vous, quelle est votre CV ?
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Message par Badak Mer 1 Fév 2017 - 21:15

soto² a écrit:@ Paela : Soyons clairs, c'était une réponse à Badak : j'indiquai le sens dans lequel j'aimerai que la conversation s'oriente. Et ton intervention me met un peu mal à l'aise, car mon intention était provocatrice mais cordiale. Après, j'entends tes commentaires. Oui, "effectivement", je pense qu'il y a une manie aujourd'hui à n'évaluer les idées qu'en fonction de leurs applications, et cela me dérange. Voilà ce que j'exprimai. Pour le reste, j'ai déjà précisément exprimé ma conception d'une épistémologie scientifique "classique", on ne vais pas y revenir.

Pas des modèles de smartphone, des algorithmes de data mining (Big Data), des robots militaires pour rendre les soft et hard powers un peu plus efficace. Au passage, Ray Kurzweil le pape du transhumanisme et de l'"IA dure" (Hard AI) travaille chez Google comme directeur de l'ingénieurie, collabore avec la NASA,
......, j'entends bien exprimer le sens vers lequel j'aimerais que nos conversations se dirige, étant donné les enjeux politiques et stratégiques. Et je me répète.  

Pour la dernière phrase:  je pense que le but de la discussion était déjà énoncé, et il ne concerne pas apriori l'éthique, mais plutôt les relations entre philosophies phénoménologiques et les sciences de la cognition, et en particulier le paradigme de l'enaction inité par Varela.   (Oui il y a des liens à faire, mais à un autre niveau ).  

Lorsqu'on parle d'applications (je parle pour moi, mais je pense que Paela le voyais aussi comme ça), on ne parle pas vraiment d'applications technologiques, mais bien d'applications de la philosophie aux sciences, que ce soit la à biologie, ou la à psychologie (au sens large).  
 Lorsque je parle de l'importance (devenue à mon avis cruciale) de la robotique en science de la cognition, il ne s'agit pas non plus d'applications technologiques...    L'intérêt est de les utiliser comme modèles concrets incarnés ("embodied") (j'enlève les guillemets comme tu me dis.. ).  Il est clair que si on veut tester l'apparition de diverses facultés cognitives à partir des réseaux de neurones et de leur interaction avec leur environnement, qu'il est impossible de se rabattre sur la simulation.  
Se rabattre sur la simulation numérique, c'est ce qu'on fait "normalement" pour construire des modèles computationnels (i.e. connexionnistes ici), mais  

Devant un problème concret, les industriels ne vont normalement pas utiliser un robots dont ils ne peuvent pas prédire le comportement, et dont l'efficacité est assez minable.    
Le problème est sociologique par contre: la poursuite de la recherche fondamentale a besoin de convaincre les gouvernements et le grand public d'accorder du financement , et les gens ordinaires veulent qu'on leur construisent des gadgets...(c'est pareil en biologie théorique ou en physique)   Donc on remplit souvent les demandes de subvention en leur faisant croire qu'il pourrait y avoir des applications technologiques même lorsqu'on en a rien à foutre.. Et je vois que ça nourrit une méprise quant aux buts que les scientifiques accordent à la science.   Les journalistes se gargarisent de gadgets technologues en confondant cela avec la science.

(  ceci dit il y a aussi des technologies cognitives interessantes qui méritent d'être développées:  pour moi c'est en rapport avec le biomédical... D'ailleurs même en biomédical ils recoivent du financement du DARPA ... ce qui te donne un peu raison aussi. )

soto² a écrit:Ce que j'ai dit, c'est que je crois assez bien connaître l'épistémologie des sciences "dures", c'est à dire classiques (de la matière et de la vie), parce qu'on ne peut plus trop dire à mon avis que la physique moderne le soit (je sens que çà risque de faire débat). Mais ce que je voulais surtout indiquer (surtout au début, vu mon discours et mon positionnement), c'était que je ne venais pas des sciences humaines.

CV:

Et vous, quelle est votre CV ?

LOL merci pour ton CV, mais désolé je ne voulais pas ête rude (j'ai l'impression de t'avoir heurté.. je ne remettais pas en question ta légitimité à discuter, c'était le "background culturel" et "expérientiel" qui m'intriguait.  Tu pourrais par exemple avoir travailler dans les ANN et avoir trouvé que ça n'atteignait pas l'essentiel de la cognition etc ).

moi:
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Message par paela Mer 1 Fév 2017 - 23:50

soto² a écrit:Soyons clairs, c'était une réponse à Badak : j'indiquai le sens dans lequel j'aimerai que la conversation s'oriente. Et ton intervention me met un peu mal à l'aise, car mon intention était provocatrice mais cordiale. Après, j'entends tes commentaires. Oui, "effectivement", je pense qu'il y a une manie aujourd'hui à n'évaluer les idées qu'en fonction de leurs applications, et cela me dérange. Voilà ce que j'exprimai. Pour le reste, j'ai déjà précisément exprimé ma conception d'une épistémologie scientifique "classique", on ne vais pas y revenir.

D'accord, désolé de me mêler de ça alors, je n'ai pas perçu le ton provocateur. Le procès d'intention était assumé, mais je veux bien admettre qu'il n'était pas justifié.

Ce n'est pas nécessaire de “prévenir” du transhumanisme et de la technophilie irraisonnée ici si? Ca ne vaut pas mieux que les cris au postmodernisme dès que le terme “doxa” apparaît. M'enfin je fais un peu pareil avec la rationalité.

Si je dis que je ne parle qu'en mon nom c'est justement pour préciser que je ne veux pas parler à la place de quelqu'un d'autre! Dire "je pense que tu veux faire ça à ce type" ce n'est pas parler au nom du type en question.





Je reviens à Varela:
On sait déterminer que certains systèmes peuvent reconnaître et apprendre des langages, traiter de l'information. Ces systèmes, le cognitivisme les peut facilement les identifier en tant que systèmes cognitifs. De même, on sait ce qu'est un réseau de neurones. Mais comment sait-on qu'un système fait émerger un monde? C'est ça que j'ai en tête quand je dis que c'est vague. Je me demande, du bas de mon ignorance du travail de Varela, s'il a cherché à trouver un critère (objectif, car sinon on restreint les systèmes cognitifs aux êtres humains seuls) pour reconnaître ça.* L'alternative, c'est qu'il cherche surtout à compléter une description de la cognition qu'il trouve creuse, sans prétention de caractérisation objective.
Sans critère assez strict, on est amené à se demander si un robot tel que décrit par Badak ne fait pas, lui-aussi, émerger un monde. La question est peut-être hors de portée, mais elle est centrale. D'où la curiosité. Personnellement je comprends qu'on puisse répondre: non, pas possible, mais je ne vais pas jusque là. Sinon, comme le fait remarquer soto² dans le cas inverse, ce n'est presque pas la peine de discuter.

*Si j'ai bien compris, l'autopoïèse est un critère nécessaire. A vue de nez, je dirais qu'il n'est pas raisonnable de le penser suffisant, mais encore une fois, je ne sais pas encore ce que Varela en dit. Qu'en pensez-vous?


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Message par soto² Jeu 2 Fév 2017 - 4:57

@ paela : plouf, plouf, n'en parlons plus.

Si on veux avancer, il faut différencier soigneusement ce qui est de l'ordre de la modélisation et ce qui est de l'ordre du phénomène décrit, sinon on y arrivera pas. Fondamentalement, les mots "système", "apprendre", "traiter de l'information", "réseau de neurones", ce sont des métaphores que nous utilisons pour mieux expliquer/comprendre ce qui se passe. Ce sont des re-présentations. Il y a une relation signifiant / signifié.

Et, je ne vais pas en rajouter encore une couche maintenant (et si), mais juste pour mémoire : c'est la même chose avec les mots que nous utilisons dans nos phrases pour nous exprimer sur ce forum. Passons pour l'instant.

Par contre, si tu en as l'envie sinon ignore, j'aimerai bien savoir si tu as lu le livre et savoir franchement comment tu l'as trouvé. Je te demande çà, parce que moi c'est un livre vers lequel je suis revenu souvent, que j'ai démarré il y a presque 30 ans, et je ne me rends pas bien compte du coup de la perception que l'on peux en avoir.

Sinon, je comprend ta question sur "l'émergence d'un monde", mais çà va me demander un tout petit peu de temps pour y répondre. D’ailleurs, si quelqu'un d'autre en est capable, qu'il ne se gêne surtout pas. Mais très rapidement, tu peux le comprendre par grossièrement par "comment les êtres vivants, et l'homme en particulier, créent-ils du sens" (voir mon précédent message sur information vs sens).
Pour la dualité être vivants/artefacts, j'y reviendrai aussi, mais toutes ces questions sont liées, et c'est ce qui rend les choses très difficile à expliquer.

Pour le sens de "L'enaction c'est une praxis de souplesse herméneutique", je veux dire que d'après mon expérience, il faut déjà être à l'aise avec ces deux conceptions (cognitivisme et connectionisme), ces deux façons d'interpréter (herméneutique) un phénomène cognitif, pour prétendre comprendre l'énaction, qui demande de pouvoir circuler aisément entre les deux et rajoute ensuite en plus un niveau supplémentaire.

@ Badak : Non, non, je ne me suis pas senti du tout "rudoyé" Cool , au contraire, j'ai trouvé que c'était à ce stade une très bonne initiative pour améliorer la communication et mieux cibler notre compréhension mutuelle et nos réponses. Par exemple, personnellement, je ne suis pas un matheux, même si je me sens doué pour l'abstraction. Donc si je peux, j'essaierai d'illustrer certaines idées préférentiellement avec des math, ou je te demanderai de faire le relais, etc, si je sais que je m'adresse par exemple à quelqu'un qui aime les math Wink... Donc je salut ton initiative, qui devrait devenir la règle. Après, chacun dit ce qu'il veut, on est entre autodidactes, pas de complexes.

Pour l'absence de guillemets à "incarné" : c'était pour mettre en évidence le fait que tout ce qui est dit l'est par un observateur, en l’occurrence nous même. Et ce n'était pas, je pense que tu as compris maintenant mon point de vue, pour rendre ambigüe la notion, alors même que je demandais à corps et à cri de lever cette source de confusion...

Ce que je vous propose comme convention sémantique, de manière à simplifier les choses : si l'on dit "incarné", c'est forcément du vivant et sinon, on emploi le terme anglosaxon "embodied", lorsque l'on parle indifféremment de vivant ou d'artefacts, comme dans la modélisation. Ok ?
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Message par Badak Jeu 2 Fév 2017 - 8:57

soto² a écrit:....Pour l'absence de guillemets à "incarné" : c'était pour mettre en évidence le fait que tout ce qui est dit l'est par un observateur, en l’occurrence nous même. Et ce n'était pas, je pense que tu as compris maintenant mon point de vue, pour rendre ambigüe la notion, alors même que je demandais à corps et à cri de lever cette source de confusion...
 Ma remarque précédente concernant le fait que je retirais les guillemets était de l'humour un peu sarcastique pour faire exprès pour te signifier mon intention de tenter de minimiser apriori les différences entre l'humain, les insectes, et les autres "machines". (Je mets des guillements à machine pour en enlever les connotations péjoratives que tu y verras sûrement... C'est une petite provoc de ma part, c'est tout... Wink )

soto² a écrit:Ce que je vous propose comme convention sémantique, de manière à simplifier les choses : si l'on dit "incarné", c'est forcément du vivant et sinon, on emploi le terme anglosaxon "embodied", lorsque l'on parle indifféremment de vivant ou d'artefacts, comme dans la modélisation. Ok ?

Non, dédoubler les termes en utilisant un anglicisme, ça ne va pas.  (Tant qu'à écrire en anglais, aussi bien tout écrire en anglais, sauf qu'on peut aussi faire l'effort de rester francophone.) Surtout, conceptuellement, ce serait présumer que nous connaissons d'avance la différence entre un système cognitifs général et un système vivant.  Ensuite ce serait présumer que la cognition s'y exerce d'une manière qualitativement différente.  
Ce n'est pas si simple.  On ne le sait pas.  Si on pose des prémisses de cette sorte, ça empêcherait de discuter justement des questions qui m'interessent (ce qui ferait en effet ton bonheur Razz Razz Razz ).  

Concernant les guillemets, en réalité, je m'en fous Wink Je peux mettre des guillements quand c'est une machine et ne pas en mettre quand c'est un humain.

Ensuite toute la réflexion concernant l'attribution philosophique d'un sujet phénoménal à tous les vivants, y compris les plus simples (la biosémiotique), se généralise aussi aux autres systèmes cybernétiques: on peut parler de cybersémiotique ou de physico-sémiotique.  Évidemment c'est plus douteux, et plus spéculatif, mais étant donné que nous ne possédons pas de moyens clairs (à ce stade) pour interroger l'éventuel vécu phénoménologique, évacuer totalement l'hypothèse radicale de ce pan-psychisme ne serait pas justifiable.
À quel stade en particulier est-ce qu'un système cognitif artificiel deviendrait vivant ou même conscient ?  On put répondre par nos conceptions personnelles, mais quels critères de vérifiabilité peut-on trouver, c'est ça qui me préoccupe.

Pour le reste je reviendrai plus tard, et je ne te parle plus de ma grand-mère Razz .
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Message par Badak Jeu 2 Fév 2017 - 10:16

soto² a écrit: Si on veux avancer, il faut différencier soigneusement ce qui est de l'ordre de la modélisation et ce qui est de l'ordre du phénomène décrit, sinon on y arrivera pas. Fondamentalement, les mots "système", "apprendre", "traiter de l'information", "réseau de neurones", ce sont des métaphores que nous utilisons pour mieux expliquer/comprendre ce qui se passe. Ce sont des re-présentations. Il y a une relation signifiant / signifié.
...  c'est la même chose avec les mots que nous utilisons dans nos phrases pour nous exprimer ...

D'une part, la distinction que tu exiges semble importante et en même temps très délicate.  Là pour tout dire, ça me semble même un peu confus.

L'apprentissage n'est-il vraiment qu'une métaphore.  Lorsqu'un enfant apprend, qu'est-ce que cela signifie ? N'y a t il pas un phénomène naturel ?
Je t'accorde que pour être conceptualisée et être décrit par un mot, une description objective des observations doit nécessairement avoir été interprétée pour donner lieu à la construction d'un phénomène.  Je veux dire que si l'on parle d'un phénomène, c'est déjà qu'on lui donne un sens (qui vient de notre interprétation sociale, etc etc), devant les mêmes perceptions, un chat ou un chien ne comprendront sûrement pas le même phénomène.  

Malheureusement, ce sens est en quelque sorte trivial parce qu'il s'applique à tous les concepts, et toute la construction de notre langage. Ce n'est pas avec cela qu'on distinguera la description des phénomènes de celle de la modélisation théorique.

La notion d'information et de son traitement (et de même pour la notion de calcul) est aussi assez floue.  On en a une idée intuitive correspondant à une réalité naturelle présente partout autour de nous.  

DONC Je résume ma compréhension des distinctions, en évitant de parler naivement de la "La réalité en soi ", car justement on ne veut pas rester dans la métaphysque pure:


  • 1)Conception intutive du monde tel qu'on le pense au delà de nos observations: une forme de modèle informel flou, mouvant et invériable souvent décrit dans un langage ordinaire "vivant", tout autant flou et mouvant, (ou dans un langage philosophique sophistiqué à peine moins flou... ) Déjà les concepts sont des constructions utiles, tout en référant à ce qui nous semble aller souvent de soi.
  • 2) Description empirique des phénomènes :  on utilise le langage ordinaire pour rendre compte de nos perceptions ( et observations non-rigoureuses).  Il me semble qu'il y a une boucle sur les points 1) et 2)

  • 3)Description empirique objectivée des phénomènes :  on se construit un langage spécialisé afin d'introduire un peu de rigueur pour identifier les concepts pertinents et permettre des descriptions utiles aux procédures scientifiques...  Ce sont les données sur lesquelles on s'appuient pour modéliser.
  • 4) Modélisation théorique  :  un modèle peut être formalisé ou non. On n'a qu'à jeter un coup d'oeil aux livres de bio avec tout plein de schémas.  Tout dépend de la maturité scientifique du domaine. La biologie et les sciences cognitives n'ont certes pas encore atteintes le même stade que la physique. Le modèle devrait être minimal et se garder de mentionner des éléments au sujet desquelles on ne peut pas avoir de données (venant du point 3 ).  
    Les points 3 et 4 forment aussi une boucle décrivant gossièrement la méthode scientifique.
    et ce point 4) nourrit aussi en retour de nouvelles conceptions intuitives floues appelée à évoluer.  

    On "comprend" par l'intuition (point 1) ), mais on "explique" par les modèles et théories scientifiques ( 4) )

 

Il y a dans ta listes des expressions qu'on peut interpréter tour à tour comme faisant partie de diverses catégories ci-haut, à des niveaux différents du discours.

La notion de système est au départ assez floue.  Pour Bertalanfy, il me semble que l'idée de système était ontologique. Pour Varela, on dirait aussi (il me semble). Mais autrement, dans l'usage qu'on en fait ici, tu as raison: on parle plutôt de système dans le sens d'une description de modèle.

Les réseaux de neurones :  il y a les réseaux de neurones naturels (avec toute leur complexité électrophysiologique, leur métabolisme, etc) et il y a des modèles dynamiques continus de neurones capturant une partie de la complexité dynamique de tel ou tel aspect, et il y a des neurones artificiels très simples servant purement au traitement de données etc.

Là, concernant la cognition enactiviste, et la question du sujet dans les systèmes cognitifs et vivants, à mon avis, on essaie de chercher à voir comment on peut dépasser le stade des points 1) et 2) .
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Message par Badak Jeu 2 Fév 2017 - 10:54

@ Soto et Paela.

paela a écrit:
Sans critère assez strict, on est amené à se demander si un robot tel que décrit par Badak ne fait pas, lui-aussi, émerger un monde. La question est peut-être hors de portée, mais elle est centrale. D'où la curiosité. Personnellement je comprends qu'on puisse répondre: non, pas possible, mais je ne vais pas jusque là. Sinon, comme le fait remarquer soto² dans le cas inverse, ce n'est presque pas la peine de discuter.


( @ paela et Soto, puisque on dirait que vous êtes d'accord sur ce point malgré tout)
Pourquoi dites-vous que si un système artificiel etait capable d'habiter un monde subjectif, alors ce ne serait presque pas la peine de discuter ?
Ça me semble au contraire faire apparaître la possibilité d'un foissonnement de problèmes assez excitants.

Si on admet que même un virus, qui est l'être vivant naturel le plus élémentaire, puisse suivre le paradigme enactif, et se construire un monde subjectif (etc), alors pourquoi décréter apriori qu'une synthèse artificielle de la structure moleculaire de ce virus en soit dépourvue ? Il s'agirait ici d'un système vivant artificiel.

Maintenant supposons qu'on relâche encore davantage d'hypothèses sur la structure, est-ce que, artificiel ou non, on aura que le système serait "Vivant" si et seulement si "cognition enactive" ?
C'est une hypothèse qui elle énoncée dans la littérature (voir Bibol 2004, je vais revenir là dessus plus tard).
Mais si au lieu d'ête implémenté chimiquement, le système l'était avec, par exemple, des neurones analogiques photoniques (ce qui ne revient pas apriori à un modèle simulée numériquement), aurait-on réellement perdu ce qui dans la structure du système permet présumément l'emergence enactive du sujet ?
Supposons que oui, alors qu'elle est la nature de ce qui est perdu, tout en restant dans un paradigme naturaliste "emergentiste" ?

Il me semble que répondre d'avance à toutes ces questions sur la base de nos préconceptions naives intuitives serait une erreur. En "réalité", on ne sait tout simplement pas comment on pourrait vérifier tout ça pour l'instant... Mais supposons que ces questions aient un sens assez important pour nous pour qu'on essaie de trouver une méthodologie appropriée.

Pour ma part, c'est une grande partie du programme qui m'interesse en ce qui concerne ce sujet.
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Message par paela Jeu 2 Fév 2017 - 11:13

@soto²: Oui c'est vrai qu'il y a une ambiguïté sur ces termes. Comme l'explique Badak, ce n'est pas vraiment une question de représentation et de signifiant / signifié puisque pour nous ne sommes pas près de contourner le caractère représentatif du langage ici. Mais effectivement il faut peut-être faire attention au fait que Varela s'intéresse aux vrais systèmes, notamment biologiques. Dans mes messages précédents, j'entendais système comme à la fois l'objet théorique et le système réel, qu'il soit un être vivant, une machine ou autre. De même pour l'apprentissage. L'avantage d'une telle généralité qui néglige les ordres, c'est qu'elle survole les difficultés conceptuelles à les distinguer. Il ne faut toutefois pas imaginer que par là je veux les effacer.

Je ne sais pas pourquoi tu doutes que j'ai lu le livre de Varela au sujet duquel j'ai déjà fait quelques remarques après l'avoir lu. (quelques messages plus haut je crois que tu as interprété un “Varela ne s'est pas contenté de” en un “Varela s'est contenté de”)

Pour ce qui est de la vision générale, il faut dire que je n'ai pas ton recul. Le livre n'est pas pour moi une cartographie admirable d'un domaine complexe que je connaîtrais depuis plusieurs années, mais un dessin des grandes lignes d'un domaine que je ne connais qu'anecdotiquement, à la complexité duquel je ne me suis pas confronté par expérience. L'article de Stanford m'a ultérieurement donné une idée plus précise des différents courants en sciences cognitives.
Mon avis principal sur ce livre est que j'ai envie d'en savoir plus sur l'énaction - du point de vue de Varela dans un premier temps. Plus précisément, je veux comprendre si Varela cherche un critère objectif qui caractérise l'énaction, comment il définit sa voie du milieu entre réalisme et solipsisme (je souscris à une forme de réalisme dont ce qu'expose Varela dans le livre ne justifie pas, de ce que j'en ai compris, la remise en question), comment il propose d'expliquer le sens commun dont il parle.


J'ai quelques autres remarques à faire sur l'idée qui consiste à dire qu'une activité cognitive au sens de l'énaction est adaptée si elle est viable, mais je pense qu'on peut avoir cette discussion plutôt périphérique plus tard vu le nombre de points qui ont déjà été soulevés.

Sinon, je comprend ta question sur "l'émergence d'un monde", mais çà va me demander un tout petit peu de temps pour y répondre. D’ailleurs, si quelqu'un d'autre en est capable, qu'il ne se gêne surtout pas. Mais très rapidement, tu peux le comprendre par grossièrement par "comment les êtres vivants, et l'homme en particulier, créent-ils du sens" (voir mon précédent message sur information vs sens).
Pour la dualité être vivants/artefacts, j'y reviendrai aussi, mais toutes ces questions sont liées, et c'est ce qui rend les choses très difficile à expliquer.
Je comprends par quel bout Varela attrape la notion de sens, tout comme je comprends par quel bout l'approche cognitiviste (telle que décrite par Varela) attrape la notion d'information. Il n'est pas dit qu'ils ne finissent pas par se serrer la main. Encore une fois c'est toute la question. Je suis très intéressé par une réponse.

@Badak: “Au moment voulu”, je serai intéressé par tes remarques pour nuancer ma mise sur la touche de la thèse de Church.



Est-il plus tendancieux d'utiliser un même terme pour des choses éventuellement diverses que d'utiliser plusieurs termes pour des choses éventuellement semblables? Telle est la question. Tant qu'on sait si notre interlocuteur est en “suspension de jugement” ou pas, il n'y a pas de souci.
De mon côté en tout cas, je m'adapterai.

Haha, je viens de voir ton dernier message. Tu as raison, la question n'est pas importante seulement pour qu'on puisse dire basta après y avoir répondu.  Ce serait juste d'y répondre (d'une façon ou d'une autre) sur la base de préconceptions qui gênerait empêcherait le débat.
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Message par soto² Jeu 2 Fév 2017 - 13:32

pfffffiou, vous dégainez plus vite que votre ombre... Vous allez finir par m'avoir à l'épuisement ! Dent pétée

Une précision préalable : je différencie une "notion", un peu vague et de l'ordre du langage quotidien, d'un "concept", plus scientifique en ce qu'il repose sur une définition précise, si possible critiquable et falsifiable.

Je définirai plus tard ma notion d'"intuition", qui n'est pas en totale résonance manifestement avec celle de Badak.

Badak a écrit:D'une part, la distinction que tu exiges semble importante et en même temps très délicate.  Là pour tout dire, ça me semble même un peu confus.

Je récapitule :

Je revendique donc la légitimité d'une séparation la plus nette possible entre modèles (formels ou pas) et phénomènes, c'est me semble-t-il, au minimum l'exigence d'une démarche scientifique. L'espace des modèles, possède un statut déjà nommé de "tiers", faisant l'intermédiaire entre le domaine expérimental et le domaine expérienciel. Au sein de ce domaine, la valeur de vérité n'a pas de pertinence (elle n'en prendra qu'avec la confrontation avec les autres espaces), mais on peut en évaluer la rationalité et la raison (je différencie), la fonctionnalité : çà fonctionne ou çà ne fonctionne pas. Par contre, cet espace est polarisé par la tension du modèle soit vers la mise en application concrète, opérationnelle, soit vers la dimension compréhensive intérieure, expérientielle, de la personne qui abstrait ces modèles ou d'un éventuel interlocuteur.

Ensuite il y a une autre source de malentendu : est-ce qu'on parle "en spécialiste", comme des scientifiques le feraient dans leur cadre professionnel, auquel cas il y a une reconnaissance de cette distinction tacite, mais je m'en méfie terriblement (c'est mon coté parano Dent pétée ) ? Car Badak, oui, malheureusement, il y a des scientifiques qui "croient en leur théories" par manque de culture épistémologique, ou pour le dire autrement : un scientifique est-il scientifique quand il est en vacance. Et qu'en est-il d'éventuels lecteurs, puisqu'il s'agit d'un fil ouvert et "grand public", n'ayant pas cette formation ? Après je ne prends personne pour un con. Mais je suis prudent, au pas de l'éléphant.  elephant

Donc pour reprendre dans le contexte : "système", "traiter de l'information", c'est pour moi de l'ordre de la modélisation et plus précisément de la modélisation cognitiviste. "réseau de neurones" de l'ordre de la description des phénomènes naturels s'il n'y a pas de guillemets, sinon je préfère par exemple ANN (Artificial Neural Networks) ou réseaux de neurones formels, ou ce que vous voulez, mais que l'on sache de quoi l'on parle et qui n’entretienne pas la confusion, quelque soit le lecteur. Ces modèles ont des vocations heuristiques, et donc oui bien sur, nous allons faire ensuite "comme si" ils était dans "les choses en soi", il faut bien les projeter. Mais cette projection doit à mon sens se faire éthiquement en pleine conscience ! pas en entretenant une vague confusion entre le modèle et "la chose en soi", la dimension objectale.
Concernant l'apprentissage, c'est plus délicat. Vu qu'il s'agit d'un processus et non d'une forme (j'attache beaucoup d'importance à ce dipôle), il est malaisé de distinguer. Sinon il nous faudrait parler "mathématique" et évolution de systèmes dynamiques, et cela d'une part me larguerait vite, et deviendrai abscon pour des personnes non-mathématicienne, ce qui n'est pas l'objectif. Donc ok pour l'ambiguité sémantique, mais là aussi, en conscience.

Je tiens à repréciser et à re-rappeler que la plupart des mots du monde informatique sont des métaphores issue du langage du monde naturel et qu'il y a dans ce contexte un saut et une dérive sémantique : "mémoire", "calcul", "langage", "système d'exploitation" (!), "ascenseurs", "fenêtres", etc.
Lorsqu'on fait de la programmation, toutes les variables et les fonctions ne prennent sens que par rapport à un jeu de déclarations "sémantiques" purement conventionnelles. C'est le programmeur qui décide de la sémantique interne d'un programme, pas le programme lui-même. Et c'est ensuite, à l'autre bout de la chaîne, l'utilisateur-observateur d'un dispositif robotique ou d'un programme dit "cognitif" qui va projeter du sens sur la machine programmée.
Encore une fois je renvois vers mon message précédent sur information vs sens vivant.

Bon, je n'ai pas matériellement le temps d'aller plus loin, le rythme est beaucoup trop rapide pour moi avec vos interventions respectives.

Une suggestion "itérative et récurrente" : je pense qu'au stade ou nous en sommes et vu la perception que nous avons maintenant de nos compréhensions respectives, peut-être serait-il édifiant de relire ce fil depuis le début ?! J'essaierai pour ma part de le faire, vu la richesse et la densité de nos échanges.


Dernière édition par soto² le Ven 3 Fév 2017 - 6:26, édité 1 fois (Raison : ajout de l'utilisateur-observateur / perception du sens d'un dispositif "cognitif")
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Message par paela Jeu 2 Fév 2017 - 15:32

Je fais également une pause pour lire des sources un peu plus volumineuses et reprendre tout ça calmement.

@Soto: Je suis d'accord avec toi mais je ne partage pas tes inquiétudes concernant le langage scientifique. Cependant il y a déjà eu des incompréhensions, donc mieux vaut essayer d'être le plus précis possible.
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Message par Badak Jeu 2 Fév 2017 - 21:13

soto² a écrit: je différencie une "notion", un peu vague et de l'ordre du langage quotidien, d'un "concept", plus scientifique en ce qu'il repose sur une définition précise  
Oui tu l'as dit plus haut et je suis très d'accord avec toi.  Une notion comme celle d'information (ou celle de vérité) par exemple, correspond à un ensemble de concepts distincts

soto² a écrit: Je définirai plus tard ma notion d'"intuition", qui n'est pas en totale résonance manifestement avec celle de Badak.
Je n'ai pas de définition de l'intuition. J'en parlais de manière intuitive...  Nos intuitions ne s'accordent pas necessairement, c'est tout. C'est bien pour ça qu'on cherche à dépasser nos inuitions pour gagner un savoir un peu plus objectif... c'est-à-dire partageable (obtenu par intesubjectivité et tout ça, etc)

soto² a écrit:Je revendique donc la légitimité d'une séparation la plus nette possible entre modèles (formels ou pas) et phénomènes, c'est me semble-t-il, au minimum l'exigence d'une démarche scientifique.
  Tout-à-fait, c'est ce que j'ai essayé de clarifier plus haut en donnant des numéros aux différents niveaux que je voyais..   C'est la raison que tu invoquais pour cette séparation qui me semblait foireuse, pas la légitimité de la démarche.

soto² a écrit:.......
pour reprendre dans le contexte : "système", "traiter de l'information", c'est pour moi de l'ordre de la modélisation et plus précisément de la modélisation cognitiviste. "réseau de neurones" de l'ordre de la description des phénomènes naturels s'il n'y a pas de guillemets, sinon je préfère par exemple ANN (Artificial Neural Networks) ou réseaux de neurones formels, ou ce que vous voulez, mais que l'on sache de quoi l'on parle et qui n’entretienne pas la confusion, quelque soit le lecteur. Ces modèles ont des vocations heuristiques, et donc oui bien sur, nous allons faire ensuite "comme si" ils était dans "les choses en soi", il faut bien les projeter. Mais cette projection doit à mon sens se faire éthiquement en pleine conscience ! pas en entretenant une vague confusion entre le modèle et "la chose en soi", la dimension objectale.
Concernant l'apprentissage, c'est plus délicat. Vu qu'il s'agit d'un processus et non d'une forme (j'attache beaucoup d'importance à ce dipôle), il est malaisé de distinguer. Sinon il nous faudrait parler "mathématique" et évolution de systèmes dynamiques, et cela d'une part me larguerait vite, et deviendrai abscon pour des personnes non-mathématicienne, ce qui n'est pas l'objectif. Donc ok pour l'ambiguité sémantique, mais là aussi, en conscience.  
Je tiens à repréciser et à re-rappeler que la plupart des mots du monde informatique sont des métaphores issue du langage du monde naturel et qu'il y a dans ce contexte un saut et une dérive sémantique : "mémoire", "calcul", "langage", "système d'exploitation" (!), "ascenseurs", "fenêtres", etc.
 

C'est là où le bât blesse.   Et c'est terriblement interessant Wink

D'une part, je te rappelle, que toute connaissance est déjà fondée sur l'analogie et la métaphore.  En particulier, les concepts scientifiques sont tous de cette nature (même si on en sait comme "spécialistes" le sens spécifique).  
Tu a raison qu'il faudrait comme scientifiques rester conscient de la distinction entre les concepts épistémologiques et leur "projections" ontologiques.... Mais tout d'abord, lorsqu'on pense de manière intuitive au monde, on ne peut pas rester toujours conscient de cette séparation en particulier lorsque nous vivons dans le monde en tant qu'humain.  Exemple: je regarde un arbre:  ce que je conçois comme arbre est déjà une interprétation et pourtant il est utile et même important de ne pas toujours se le répéter.
Ensuite, lorsque on cherche à réfléchir au monde lui-même (en métaphysique), on ne peut que passer par une "illusion réaliste" que nous pouvons qualifier d'un peu naive pour nous (pauvres postmodernes Amen), mais qui peut très bien aussi ne pas être considérée naive pour quelqu'un d'autre embrassant des conceptions métaphysique donnée.  
Je veux maintenant défendre l'utilité de cette "naiveté" pour ne pas vider la science de sa capacité à donner du sens "physique" aux théories abstraites.  

Exemple: si on parle de "matière physique".  La plupart des gens vont s'entendre pour dire que la matière existe dans la nature en soi (ce qui est une idée métaphysique)....  Ce que ça signifie est clair pour le sens commun, mais ne l'est pas si un creuse un peu. Pour un physicien, il s'agirait finalement de parler des fermions (les particules qui forment la matière et qui sont caractérisées par certaines symétries, en quelque sorte).   Que finalement cette "matière" se dématérialise en étant  au final définie mathématiquement par de belles symétries presque platoniques est un peu perturbant mais ne nous empêche pas de prendre au sérieux  l'existence "matérielle" de la matière dans notre vie et dans notre intuition. (Lorsque on réfléchi en théoricien ou en matheux, on maintient la distinction, mais pour revenir au sens des choses, on doit en faire une interprétation métaphysique ) .  Lorsqu'un physicien veut comprendre une théorie, il n'a d'autres choix que d'en chercher un tel sens, et c'est ce qui s'affiche ensuite dans la vulgarisation..  Si on vidait la science totalement de toute signification au sujet du réel, alors on adopterait une position positiviste, et ce n'est pas ce qu'on veut ici.    

Pour continuer avec l'information.  Rappelons que justement, du point de vue physique, la matière et l'information ont des statuts comparables: ce sont des notions ayant des sens physiques.  Donc, d'une part, il y a un (ou plusieurs) sens spécialisés avec des définitions mathématiques, et d'autres part, il y a des interprétations par rapport au sens que ça a dans le monde tel qu'on pense qu'il est lorsqu'on cherche à le comprendre. On donne un sens métaphysique encore une fois.   (La plupart des physiciens diraient même sûrement que j'abuse en parlait ici de métaphysique, mais ce serait bien car ils croient vraiment à leur interprétation ontologiquement réaliste qui trahit en fait une métaphysique particulière. )  (Je sais que j'ai l'air d'avoir dit le contraire au début de ce fil, lorsque j'ai dit que les scientifiques ne croyaient pas vraiment à leur théories). C'est que pour moi, il y a une différence entre  "penser en scientifiques" et "penser en général", et il s'avère que les scientifiques utilisent leurs intuitions "plus ou moins naives" pour imaginer ce qu'ensuite ils formalisent. Bref, la signification de la science exigerait de dépasser la seule pensée scientifique rigoureuse.

S'il nous fallait aussi toujours avoir conscience que nos mots ne désignent jamais la réalité en soi, alors toute réflexion métaphysique serait interdite.

Concernant la notion d'information (notion, et pas concept einh), je te recommande deux bouquins vraiment interessants :

Davies 2010, Information and the nature of reality: from physics to metaphysics.

Terzis 2011, Information and living systems: philosophical and scientific perspectives.

Dans ce dernier livre, en particulier, il y a un chapitre sur la biosémiotique, dans laquelle le concept d'information sémiotique qui, comme tu sais, ne se réduit pas à la banale information de Shannon.  

Dit autrement : lorsque tu demandes de prendre conscience de la relation entre le signe et sa signification, tu sembles finalement considérer que la relation d'interprétation liant le signe et sa signification est le fondement.    Donc je pourrais t'interpréter comme disant que c'est l'interprétation de l'information sémiotique qui formerait la substance ontologique.  Mais alors il s'agit aussi d'un traitement d'une information particulière.  Le traitement de l'information peut aussi en particulier s'appeler un calcul ne se réduisant pas apriori à celui au modèle d'une machine de Turing. Donc j'interprète ta position métaphysique comme prétendant qu'une certaine forme de calcul est le fondement ontologique du monde réel.  
Personnellement c'est une partie de ce que je pense intuitivement...

Bref, le statut de l'information et sa signification sont l'objet d'intenses discussions, donc on ne va pas commencer par faire semblant que cette question est tranchée en se basant sur nos intuitions personnelles .  Je veux dire, que si pour toi, l'information (ou la matière) (dans un sens ou l'autre) a (ou n'a pas) de statut ontologique, il faut juste voir que ces distinctions n'ont pas de sens pour tout le monde.  
Alors autant rester agnostique sur ces points....        
C'est-à-dire: accepter le pluralisme ontologiques
Même si on se concentre sur une quête épistémologique, notre recherche de vérité concerne le "monde réel", on ne peut pas toujours éviter de s'y référer de manière imagée.....
Ce qui ne nous empêche pas au contraire de prendre des précautions de langages.

Est-ce qu'on serait ici en train de faire une discussion metadiscursive au sujet de la metacognition .... on a plusieurs couches d'abstractions ici et c'est assez marrant !!


soto² a écrit:.......Bon, je n'ai pas matériellement le temps d'aller plus loin, le rythme est beaucoup trop rapide pour moi avec vos interventions respectives.
soto² a écrit:
 On a tout notre temps (en principe).  Et on a tous autres choses à faire aussi dans la vie Wink

soto² a écrit:..Une suggestion "itérative et récurrente" : je pense qu'au stade ou nous en sommes et vu la perception que nous avons maintenant de nos compréhensions respectives, peut-être serait-il édifiant de relire ce fil depuis le début ?! J'essaierai pour ma part de le faire, vu la richesse et la densité de nos échanges.
 

On devrait peut-être, en effet, faire un petit résumé des principales questions qui ressortent (mais peut-être pas résumer toutes les sources, ou tous les délires), Si on parvient à un truc résumé et lisible, ce pourrait même être ajouté dans le résumé ("post") initial de Soto^2...    
( Et après on en écrit un livre.... hahahah ouf)

Pause j'approuve OUF !
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Message par Badak Ven 3 Fév 2017 - 18:08

Petite remarque entre parenthèse pour résumer le point avec lequel je suis très d'accord avec Soto. (et qui n'est pas nécessairement très transparent quand je me relis):

Du point de vue de la méthode, il devrait toujours être clair si on utilise les mots pour dénoter des notions inuitive floues, des concepts métaphysiques ou si on le fait pour dénoter des concepts opérationnels utiles à des modèles et théories scientifiques .

En fait, c'est plus compliqué que ça, puisque (en particulier ici), on cherche à faire le lien entre des théories philosophiques (comme celles de l'enaction et de l'autopoièse de Varela) et de possibles théories scientifiques qui s'appuient sur ces dernières.

L'enaction et l'autopoièse, pour Varela, ce ne sont pas des concepts opérationnels ( si ?), même si ce sont des concepts abstraits. On dirait bien qu'il pense que "ça" pourrait exister pour "vrai" dans la Nature . Il me semble que pour lui, le tissu ontologique du monde est fait de relations et de processus d'organisation.
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Message par paela Jeu 27 Juil 2017 - 15:57

Ploc, cette bête a-t-elle fini par partir en poussière de s'être figée pendant trop longtemps?

Six mois, c'est optimal pour une hibernation, alors que pensons-nous de nous réveiller tantôt? Tant qu'à être cérémonieux, je ferai un résumé des questions qui me travaillent le 3 Août, si le sujet intéresse encore.

En attendant, tiens - ploc ploc Badak - je reprends ceci:
Badak a écrit:Il me semble que pour lui, le tissu ontologique du monde est fait de relations et de processus d'organisation.

Il me semble au moins que cette idée joue un rôle dans la conception du monde par Varela, et d'ailleurs également chez Merleau-Ponty. Connais-tu l'interprétation relationnelle de la mécanique quantique (Relationnal Quantum Mechanics)? C'est une façon d'interpréter la mécanique quantique, proposée par Carlo Rovelli, qui remet en question le réalisme scientifique "naïf" (sans connotation péjorative). Je trouve que cela permet d'illustrer un aspect potentiellement problématique de la "voie du milieu" mentionée par Varela en la gardant justement de problèmes sérieux (le solipsisme, ou l'anti-réalisme grave). Il ne semble pas y avoir de lien conscient entre Varela, Rovelli et Merleau-Ponty cela dit.
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Message par paela Mar 8 Aoû 2017 - 0:04

Salutations à tous,

Me voici avec ce que j'avais dit que je rédigerais, et un retard dû à un séjour en Bretagne.

Pendant la pause annoncée il y a six mois, j'avais prévu de lire The Embodied Mind de Varela, Thompson et Rosch, et éventuellement Le visible et l'invisible de Merleau-Ponty, dont j'ai fininalement abandonné la lecture, ayant des difficultés à comprendre son argumentation. J'ai fini par lire des textes de conférences de Husserl (La Crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale) dans lesquels il détaille les enjeux et modalités de ce qu'il appelle la "réduction transcendantale". J'emprunte à Husserl quelques autres termes, parce que c'est seulement chez lui que j'en connais une définition suffisamment étoffée et que je crois que soto² et Badak les connaissent aussi.


Mon souci principal avant et pendant cette pause était de comprendre en quoi la "voie du milieu" décrite par Varela (et avant lui par la tradition Madhyamika), entre absolutisme et nihilisme, entre réalisme objectif et solipsisme, était autre chose qu'un solipsisme menant effectivement ou pas vers un nihilisme. Elle me semblait injustifiée. Je voulais également voir comment se mettait en pratique le programme de l'énaction, comprendre ce qui était fait de la nature dans l'abandon de l'a priori du monde pré-donné, et je voulais vérifier si Varela avait un critère distinguant un système cognitif que l'on considèrera "conscient" d'un dont on imagine qu'il ne l'est pas. De ces quatre points, seuls les deux premiers ont été éclarcis, le troisième l'étant partiellement et le dernier très peu.





Je reprends ici ces points un par un. Si quelqu'un a des éléments de réponses, corrections ou questions, qu'il en fasse part.


(i): La voie du milieu de Varela et de ses co-auteurs est ce qu'il doit rester lorsqu'on abandonne les a priori suivants sans pour autant s'y accrocher parfois sans s'en rendre comtpte:
-l'a priori d'existence d'un "soi" absolu, indivisible, au moins aussi durable que la vie, se préservant dans le temps, et qui serait en quelque sorte à l'intérieur du corps comme le sujet, au sens le plus strict, dans chaque vie. "Je".
-l'a priori d'existence d'un "monde" absolu (indépendant par exemple de ses habitants), pré-donné (ce terme me semblait avoir un avoir un sens un peu moins fort chez Varela que chez Husserl, car on peut traduire l'énaction de Varela, même dans une acceptation suivant le réalisme scientifique*, comme le fait que chaque système cognitif se donne un monde, mais en fait Varela remet bien en question la notion de monde absolu indépendant du système cognitif).

-La première remise en question est je crois (sans y avoir suffisamment réfléchi) moins cruciale pour l'énaction et les sciences cognitives, ou en tout cas pour la science actuelle que la seconde (bien que dans la tradition Madhyamika ces les deux croyances correspondantes soient liées au même trait de l'esprit et qu'elles présentent une certaine symétrie, d'ailleurs illustrée par Varela), aussi je ne m'y attarderai pas plus que ça. Elle n'est d'ailleurs pas opérée par Husserl. Pour en dire quelques mots, elle est justifiée par l'expérimentation à l'aide de la médidation et motivée par les conceptions bouddhiste et énactive. Je suis plutôt d'accord avec cette idée du reste mais j'aimerais bien m'y intéresser davantage avant d'y réfléchir sérieusement.

-La seconde est justifiée par la volonté de décrire le monde sans passer par une représentation abstraite (volontée à mon sens solidement justifiée par Varela dans l'étude du cas de la couleur par exemple) mais plutôt en la fondant sur un approfondissement du doute cartésien et sur la subjectivité correctement considérée. Tout cela, Husserl l'explique de manière très connvaincante, et son explication est peut-être suffisante pour refuser la tentative de sauvetage de l'approche naïve vers laquelle mène cet astérisque*
La justification de Varela n'est pas suffisante pour cela à mon avis, ni celle fondée sur les "cinq aggrégats" à laquelle je vous renvoie (chap 4 et 1à de The Embodied Mind), c'est d'ailleurs ce qui me gênait avec cette remise en question, dont il était difficile de bien comprendre les raisons avec la seule lecture du livre de Varela Invitation aux sciences cognitives présenté par soto². (Au fait, ce livre résume en partie The Embodied Mind)
Toujours est-il que cela pose le problème sérieux et de la même ampleur que celui que Husserl voulait exhiber dans la prétention des sciences objectives positivistes: le mystère de la nature. J'en reparle différemment avec le troisième point.


(ii): Pour ce qui est de la mise en pratique, certains travaux sont cités dans The Embodied Mind mais sont pour le coup assez anciens, et je ne me suis pas encore renseigné plus sur des mises en application. Curieusement, j'aurai l'occasion l'année scolaire prochaine de suivre un cours qui devrait proposer du point de vue mathématique des applications de l'énaction, je verrai donc au moins à ce moment-là, et je reviendrai avec vous sur ce point puisqu'il était aussi important pour Badak.


(iii): Le statut ontologique de la nature (ou pour être moins tendancieux, du monde objectif) dans la réduction transcendantale n'est pas tout à fait clair pour moi. Pour comprendre comment les phénomènes s'enchaînent et faire sens (donner un sens, un texte, sans forcément donner d'explication car justement on suppose ici que la science objective ne touche pas "l'étant" du doigt), la science objective est efficace et en fait indispensable. Elle vient également naturellement: de la déscription des phénomènes on déduit des lois régissant (après traduction et sans les décrire) les phénomènes, dont il n'est pas nécessaire de poser que les hypothèses presque syntaxiques ont un versant ontologique. Cependant, petit à petit apparaît un corps de lois, independant des systèmes cognitifs qu'il malmène, dont il est difficile de ne pas voir qu'il s'agit d'une sorte de "vérité approximative", et idéalement une vérité tout court. Si ce corps ne dispose pas de sujet et qu'il ne reste plus à exister que des ensembles de systèmes cognitifs corrélés avec leurs mondes énactés, alors pourquoi ne pas considérer que c'est exactement cela la nature, et qu'elle constitue justement un monde pré-donné, ou plutôt une nature pré-donnée? (c'est très proche de ce dont je parle dans le message précédent: Relational Quantum Mechanics de Carlo Rovelli)
Je ne suis pas sûr que cette idée soit celle des auteurs qui s'intéressent à cette question.


(iv): Le statut et la nature de la conscience sont bien sûr explorés dans le bouddhisme, mais je ne m'y connais pas sur ce sujet. Il est possible que Varela ne s'y intéresse tout simplement pas comme objet scientifique. Il est possible qu'il faille comprendre que dans le cadre d'une phénoménologie (mais pas nécessairement des sciences cognitives comme les imagine Varela), un monde énacté ne le soit que par un être conscient. Il est difficile en tout cas de ne pas se poser la question, si ce n'est celle du "problème difficile de la conscience", celle du lien entre la conscience et la "faculté" d'énaction. Une cellule est-elle un système cognitif pour Varela? Est-elle consciente? etc... J'avais déjà pas mal insisté sur ce point de toute façon.


(v): Je rajoute un point. J'avais critiqué le vague du critère de fonctionnalité de l'énaction mentionné dans le tableau donné par Varela dans  et recopié par soto² en première page. Il y est dit qu'un système cognitif (au sens d'éventuelle réalisation artificielle de l'énaction comme au sens de véritable être intelligent) fonctionne lorsqu'il énacte un monde de manière viable; (c'est-à-dire qu'il y survit).
Le problème que je trouvais était que la viabilité est un critère assez vague et discutable.
Je comprends maintenant que cette critique est malvenue. En effet Varela veut contraster la viabilité avec l'optimalité. En effet, les positions néo-darwiniennes majoritaires considèrent que la "sélection naturelle" sélectionne les atomes (gênes, cellules, individus, groupes d'individus) qui fonctionnent le mieux dans le monde pré-donné (en un sens ceux qui déchiffrent le plus fidèlement, complètement et efficacement leur environnement). Pour l'approche énactive, cette idée ne peut pas avoir de sens. Bref, c'est pour insister sur cette distinction que le critère est ainsi défini.





J'espère que c'est à peu près compréhensible. Pour ceux qui lisent, voyez ça comme une tentative de ressuciter le fil; il n'est pas nécessaire de partir dans les directions que je trace. Déjà des pistes de réflexion épistémologique, politique, et des questions qui ne demandent que du bon sens et de la curiosité pour en dire des choses intéressantes ont été mentionnées.


*Pour conserver à la fois un monde pré-donné et une science énactive (sans la conception métaphysique proposée par Varela pour la guider), on peut imaginer qu'un système cognitif énacte simplement un "monde perçu" à partir du monde pré-donné, et que ses relations avec le monde perçu sont virtuelles: elles ne sont qu'une projection de réactions "réelles" dans le monde pré-donné qui influent à la fois sur sa perception de celui-ci et sur le monde pré-donné. Je dirai que c'est une forme d'énaction ne remettant pas en cause le réalisme scientifique.
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Message par soto² Ven 1 Sep 2017 - 9:47

Salut Paela, content de te revoir sur ce fil.

Tes réflexions sont intéressantes et en attendant d'en discuter de façon plus argumentée de mon point de vue de "modélisateur", voici un clin d’œil plus phénoménologique et initiatique dont je te laisse apprécier la pertinence : Réalité & Illusion ou mode d'Existence vs mode d'Apparition. Wink
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Message par Badak Sam 11 Nov 2017 - 19:33

paela a écrit:  Re-Salut paela ( et Soto^2 aussi Wink )
Badak a écrit:Il me semble que pour lui, le tissu ontologique du monde est fait de relations et de processus d'organisation.
Il me semble au moins que cette idée joue un rôle dans la conception du monde par Varela, et d'ailleurs également chez Merleau-Ponty. Connais-tu l'interprétation relationnelle de la mécanique quantique (Relationnal Quantum Mechanics)? C'est une façon d'interpréter la mécanique quantique, proposée par Carlo Rovelli, qui remet en question le réalisme scientifique "naïf" (sans connotation péjorative). Je trouve que cela permet d'illustrer un aspect potentiellement problématique de la "voie du milieu" mentionée par Varela en la gardant justement de problèmes sérieux (le solipsisme, ou l'anti-réalisme grave). Il ne semble pas y avoir de lien conscient entre Varela, Rovelli et Merleau-Ponty cela dit.

Concernant l'interprétation relationnelle de la MQ, non je ne connaissais pas, merci.  Mais j'avais commencé à lire le livre de Michel Bitbol sur les débats entre réalisme et anti-réalisme en MQ.
J'avoue que ces questions me mettent très mal à l'aise. :

Pour revenir au sujet, Paella, j'ai lu et relu ton dernier message très interessant. J'avoue que je dois encore y réfléchir et il me manque des lectures de Varela pour pourvoir répondre sans encore partir dans tous les "mauvais" sens.  

------ Pour Soto aussi ------
Il me semble aussi qu'on devrait changer le titre de la discussion, parce que, clairement, si on se concentre sur la pensée de Varela, et la notion d'enaction, on n'est pas dans une introduction aux sciences cognitives, mais plutôt dans une réflexion philosophique sur une approche très spécifique de la cognition, dont la scientificité est justement à discuter.  Si on veut contourner ( éviter...) le débat sur les distinctions entre science et philosophie, il vaudrait mieux ne pas prétendre parler nécessairement de science. ( Cela ressemble un peu à un débat où on se demande si le verre est à moitié plein ou à moitié vide (ou au 3/4 plein ou au 3/4 vide), mais sans avoir de graduation pour mesurer le volume du verre.... On est forcément toujours à peu près d'accord mais jamais totalement à cause de l'impossibilité de communiquer dans un langage parfaitement défini. )
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Message par soto² Sam 11 Nov 2017 - 20:42

Très intéressant. Smile

A bâton rompu :

Pour une réflexion épistémologique de qualité et d'actualité sur la physique quantique, dans un esprit très proche de l'énaction, voir la pensée de Michel Bitbol (qui a fréquenté Varela). Un exemple ce citation : "Il y aurait co-adéquation de la théorie à ce quelle explore, et de ce qu'elle explore à la manière dont la théorie amène à l'explorer."

Il me semble aussi qu'on devrait changer le titre de la discussion
A l'origine, j'ai mis en place ce fil pour échanger avec des personnes qui souhaiteraient s'initier aux sciences cognitives. Et pour donner une base à ces discussions, je proposais ce petit opus de Varela qui personnellement m'a beaucoup aidé à y voir plus clair. D'où le titre. Mais cela ne s'est pas déroulé comme çà : vous connaissez la suite... Bien sur je ne regrette pas du tout vos interventions, bien au contraire : c'est riche et très stimulant et nous soulevons des questions fondementales et passionnantes, qui d'ailleurs de mon point de vue engagent l'avenir. Par contre le titre me semble toujours d'actualité, malgrès nos discussions "expertes" : il y a bien une problématique d'orientation, sinon nous serions d'accord, et l'épicentre du sujet reste bien pour moi, créateur du fil, les sciences ET les technologies cognitives, plus encore que les seules sciences de la cognition. Mais, soyons clairs, l'enjeux est bien pour moi la légitimité de la ré-introduction de l'observateur-acteur, sous forme réglée et instruite, en prise avec les pairs sociaux et l'expérimentation, bref rationnelle, dans le procès de connaissance.


Reprenons :

Le paradigme énactif est un paradigme des sciences ET technologies cognitives (RTFM !  Very Happy). C'est un style de pensée qui peux déranger parce qu'il est non-fondationnel. Il n'y a pas de préjugé ontologique, et c'est pour moi un critère scientifique. Ou plus précisément : ces préjugés sont déconstruits. C'est une alternative à la fois au réalisme et au kantisme. Néanmoins, commencer par le kantisme, qui différencie "la chose en soi" et ce que nous pouvons, nous, connaitre de la chose, peut être une première étape. Le problème est que cette différenciation est la plus évidente dans le domaine d'objet scientifique le plus ancien historiquement, celui qui était le plus évident pour le sens commun au départ de l'aventure scientifique, mais ce n'est pas ma culture et les mathématiques sont abstraites. Et je renvoi à Bitbol, même si je suis moi même arrivé, par d'autres voies, à la conclusion de sa ciatation (cf. début du message). Or là le sujet, c'est les sciences sciences et les technologies cognitives.

Les sciences cognitives qui historiquement apparaissent à un moment de maturité scientifique, marqué par la physique qui atteint les limites de la conception censée et ou apparait la cybernétique et la soit disant "théorie de l'information", qui vont aboutirent à l'informatique, à "l'intelligence artificielle", et de façon générale aux technologies numériques. C'est un projet de naturalisation de l'esprit. Elles ré-introduisent l'approche scientifique du sujet et de l'esprit, mais du point de vue des sciences de la nature. Mais de quelle nature parle-t-on ? De la nature "quantique" ?! Ne mélangeons pas tout et concentrons nous sur la méthode plutôt que sur le domaine d'objet.

Comme Badak le voit bien, il y a une tension entre philosophie et sciences à l’œuvre. "Eviter" ?! ce serait vider le sujet de son sens. C'est la tension qui est significative. De mon point de vue énactif, on peut aussi rajouter d'autres tensions : celle de l'émergence historique de la science moderne et donc de son évolution future, en résonance avec la création des concepts et des théories, voir des paradigmes et de leur relative occultation dans les épistémologies "normatives et critiques" (tiers exclu, critique poppérienne, etc). D’ailleurs çà va plus loin encore : toute description est implicitement normative.

Et que dire de la relation du scientifique avec le sens commun, pas celui des autres et de la "vulgarisation", le sien propre. Est-il scientifique quand il est le soir chez lui ?! Joue-t-il un jeux de rôle au labo ?! etc. C'est problématique à décrire, et c'est pourtant la "réalité".

Je sais que cela peut peut-être vous sembler rhétorique mais je le "vois" et c'est la difficulté de l'exercice : la non-rationalité peut s'interpréter d'au moins deux façons : d'une part comme une forme d'irrationalité, c'est à dire d'une rationalité erronée, ne respectant pas les normes et canons de la validité inter-subjectivement et historiquement instituée, ou simplement contraire à l'éthique. Et d'autre part comme désignant ce qui est le fond de la forme actuelle de cette même rationalité - aujourd'hui techno-scientifique - qui, bien qu'en cours d'évolution et de validation par les experts, ne fait pas encore sens dans la communauté des pairs.

Et il y a aussi la technologies... et ce n'est pas un hasard si l'idéologie transhumaniste, que je réprouve comme une illusion technologique, se répand et si les technologies numériques sont si addictives pour l'esprit. Il faudrait sans doute parler de Turing qui est à l'origine de ce geste.

Si les choses étaient simples, çà se saurai. Ces discussions sont bien sur infinie mais nous permettent de nous "individuer" (au sens de Simondon, penseur philosophe de la technique). Y'a du grain à moudre ! Very Happy


Dernière édition par soto² le Sam 11 Nov 2017 - 21:18, édité 14 fois (Raison : relation du scientifique avec le sens commun + cybernétique et technologies numériques)
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Message par paela Ven 17 Nov 2017 - 21:21

@Badak: Pour ce qui est de la MQR, je crois qu'elle avait été introduite afin - entre autres intérêts plus techniques - de résoudre certains problèmes (en premier le paradoxe EPR) sans renoncer au principe de localité.
Ce n'est pas vraiment une remise en question du réalisme scientifique au sens de la croyance en ce que les théories scientifiques traitent d'entités ou de lois réelles (idée qui me convainc le plus au passage), mais plutôt un cadre dans lequel s'inscrit naturellement la mise en question d'une forme de réalisme déjà mis à mal par la mécanique quantique: par exemple l'idée que toute entité se trouve dans un état donné ou que deux entités sont en principe discernables.
Du reste, je comprends ta peur du vertige.
Je ne connais pas ce Bitbol; vous me ferez un résumé? Smile

Reprenons la conversation générale, et tentons peut-être un discours positif. Imaginons-nous au milieu des ruines des anciennes fondations et voici déjà monter la marée. Varela nous avait-il appris à nager?
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Message par soto² Sam 18 Nov 2017 - 10:57

Si je peux me permettre pirat on est épistémologiquement en train de parler de conceptions qui sont des alternatives et au réalisme naïf et au kantisme. Ce ne sont pas des postures anti-réaliste, il y a bien une réalité objective et ce serait solipsiste et ridicule de le nier, halluciné ou pathologique, mais ce qui est en discussion c'est la façon dont nous l'élaborons, dont nous la représentons (d'où la relation avec la notion de vacuité bouddhiste).

Une des clef pour comprendre l'énaction c'est de comprendre qu'il s'agit de d'une épistémologie non-fondationnelle. C'est là la difficulté et c'est ce qui la rend un inconfortable à assimiler. C'est une question de patience et d'ouverture, mais une ouverture compréhensive disciplinée et bien ancrée dans la méthode (et pas la représention) scientifique.

paela a écrit:Je ne connais pas ce Bitbol; vous me ferez un résumé?
Je pense que tu peux tutoyer Badak. Very Happy

paela a écrit:Imaginons-nous au milieu des ruines des anciennes fondations et voici déjà monter la marée. Varela nous avait-il appris à nager?
Non-fondationnelle... Varela (et Maturana) nous apprennent à naviguer entre le monstre Scylla du représentationnisme et le tourbillon Charybde du solipsisme (Cf. "L'arbre de la connaissance", p125).
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