Avant que le voile noir

Si de mon âme ne restaient que des cendres
D' un temps lointain où je sus mieux que tous aimer
Je me souviens, alanguie sur le fauteuil posée 
Le rai de lune affleurant mes yeux vides et tendres.

De ces soleils de ces rires que nous reste t il?
De la fumée sans feu, des poussières étalées 
Un gout de l'amertume, les regrets attelés
Aux visages des aimés, à mon cœur servile

Avant que le voile noir emporte mon corps mort
Revoir le doux cygne blanc sur les eaux scintillantes
Revivre matin bleu, frénésie insolente
Toucher du bout des doigts ta peau de soie et d'or

Ce poème est séduisant, éloquent et évocateur, empreint de langueur nostalgique. Ces vers me parlent tout particulièrement :

Vivelavie a écrit:D' un temps lointain où je sus mieux que tous aimer
Je me souviens, alanguie sur le fauteuil posée 
Le rai de lune affleurant mes yeux vides et tendres.

Ils font écho, investis de ma subjectivité galopante, à cette confession d'un poète-philosophe lui aussi revenu des grands sentiments généreux :
« Je suis né pour aimer, et j'ai aimé peut-être avec autant d'amour qu'en peut montrer une âme humaine. Aujourd'hui, bien que, comme vous le voyez, je ne sois pas encore à l'âge où les passions se glacent, ni même s'attiédissent, je ne rougis pas de dire que je n'aime personne, excepté moi-même, par nécessité naturelle ; et encore : le moins possible. » — Giacomo Leopardi, Petites œuvres morales

Je me permets d'associer cette image ad hoc à mon partage :


[Aneta Grzeszykowska – Selfie #18 de la série "Selfie", 2014]