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Re: ?????????
S'inquiéter de savoir comment va David est une excellente idée.
En espérant qu'il recevra une notification...
En espérant qu'il recevra une notification...
Invité- Invité
Re: ?????????
david50 a écrit:Nuages,
Nuages... J'ai conscience du ciel aujourd'hui, car il y a des jours où je ne le regarde pas, mais le sens plutôt – vivant comme je le fais à la ville, et non dans la nature qui l'inclut. Nuages... Ils sont aujourd'hui la réalité principale, et me préoccupent comme si le ciel se voilant était l'un des grands dangers qui menacent mon destin. Nuages... Ils viennent du large vers le château Saint-Georges, de l'Occident vers l'Orient, dans un désordre tumultueux et nu, teinté parfois de blanc, en s'effilochant pour je ne sais quelle avant-garde ; d'autres plus lents sont presque noirs, lorsque le vent bien audible tarde à les disperser ; noirs enfin d'un blanc sale lorsque, comme désireux de rester là, ils noircissent de leur passage plus que de leur ombre le faux espace que les rues prisonnières entrouvrent entre les rangées étroites des maisons.
Nuages... J'existe sans le savoir, et je mourrai sans le vouloir. Je suis l'intervalle entre ce que je suis et ce que je ne suis pas, entre ce que je rêve et ce que la vie a fait de moi, je suis la moyenne arbitraire et charnelle entre des choses qui ne sont rien – et moi je ne suis pas davantage. Nuages... Quelle angoisse quand je sens, quel malaise quand je pense, quelle inutilité quand je veux ! Nuages... Ils passent encore, certains sont énormes, et comme les maisons ne permettent pas de voir s'ils sont moins grands qu'il semble, on dirait qu'ils vont s'emparer du ciel tout entier, d'autres sont d'une taille incertaine, il s'agit peut-être de deux nuages réunis, ou d'un seul qui va se séparer en deux – ils n'ont plus de signification, là-haut dans le ciel las ; choses puissantes, balles irrégulières de quelque jeu absurde, toutes amassées d'un seul côté, esseulées et froides.
Nuages... Je m'interroge et m'ignore moi-même. Je n'ai rien fait d'utile, ne ferai jamais rien que je puisse justifier. Ce que je n'ai pas perdu de ma vie à interpréter confusément des choses inexistantes, je l'ai gâché à faire des vers en prose, dédiés à des sensations intransmissibles, grâces auxquelles je fais mien l'univers caché. Je suis saturé de moi-même, objectivement, subjectivement. Je suis saturé de tout, et du tout de tout. Nuages... Ils sont tout, dislocation des hauteurs, seules choses réelles aujourd'hui entre la terre, nulle, et le ciel, qui n'existe pas ; lambeaux indescriptibles de l'ennui pesant que je leur impose ; brouillard condensé en menaces de couleur absente ; boules de coton sale d'un hôpital dépourvu de murs. Nuages... Ils sont comme moi, passage épars entre ciel et terre, au gré d'un élan invisible, avec ou sans tonnerre, égayant le monde de leur blancheur ou l'obscurcissant de leurs masses noires, fictions de l'intervalle et de la dérive, ils sont loin du bruit de la terre, mais sans le silence du ciel. Nuages... Ils continuent de passer, ils passent toujours, ils passeront éternellement, enroulant et déroulant leurs écheveaux blafards, étirant confusément leur faux ciel dispersé.
Fernando Pessoa, Le livre de l'intranquillité
?
https://www.youtube.com/watch?v=7JF3Gj8U0YA
https://www.youtube.com/watch?v=lNLkcOqQSBM
Penser à changer la température de la piscine dans le jardin la semaine prochaine : c'est le printemps
ni triangle, ni carré, nid rond elle
Invité- Invité
Re: ?????????
david50 a écrit:Nath : Dois-je y voir un message ?
Oui celui d'avoir de tes nouvelles et donc là on va en avoir, chouette
Invité- Invité
Re: ?????????
Je te l'avais dit a écrit:david50 a écrit:Nath : Dois-je y voir un message ?
Oui celui d'avoir de tes nouvelles et donc là on va en avoir, chouette
Pas grand chose à dire, j'ai hiberné, il faisait trop froid, tout était gelé, dans ces cas là il n'y a pas grand chose d'autre à faire.
Je me réveille gentiment, un peu endolori, tout amaigri
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
david50 a écrit:Je te l'avais dit a écrit:david50 a écrit:Nath : Dois-je y voir un message ?
Oui celui d'avoir de tes nouvelles et donc là on va en avoir, chouette
Pas grand chose à dire, j'ai hiberné, il faisait trop froid, tout était gelé, dans ces cas là il n'y a pas grand chose d'autre à faire.
Je me réveille gentiment, un peu endolori, tout amaigri
En tous les cas, ton passage ici est cool, je déteste avoir parlé de mes problèmes et ne pas pouvoir dire que ça va mieux Ils ont prévu les glaces pour la reprise de poids après l'hiver (cela dit logiquement c'est l'inverse ? t'es bizarre toi bref), la vie est bien faite en ce sens.
Etontaf ?
Invité- Invité
Re: ?????????
Je te l'avais dit a écrit:
Etontaf ?
Emporté dans la tourmente, tant mieux, je ne supportais plus personne.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
david50 a écrit:Je te l'avais dit a écrit:
Etontaf ?
Emporté dans la tourmente, tant mieux, je ne supportais plus personne.
Mode "pire que ta mère ou pas" : et ta petite famille, ta nouvelle maison, ton nouveau médecin ? toussa ... tout bene ? (tou baigne aussi dans la piscine ké tu auras mise dans le jardin ?
Ca fait un mode "Râler David sonne"
Invité- Invité
Re: ?????????
Les beaux jours arrivent ... et les bonnes nouvelles sont apportées par une douce brise. David est de retour !!
Re: ?????????
Salut Gasta
- Spoiler:
- Le numéro de portable que je t'avais donné était celui de mon job, je l'ai rendu et était donc injoignable, désolé.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Bonsoir David, tu as fait la marmotte ?
Y'a du taf de ce que j'ai lu... Bon courage pour la reconstruction.
Y'a du taf de ce que j'ai lu... Bon courage pour la reconstruction.
Invité- Invité
Re: ?????????
Merci
J'aime bien ce titre de New-Order, bien vu, c'est l'un des rares, ils n'ont jamais pu égaler Joy Division.
J'aime bien ce titre de New-Order, bien vu, c'est l'un des rares, ils n'ont jamais pu égaler Joy Division.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Allez, un peu de chaleur quoi !
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
Fata Morgana a écrit:Allez, un peu de chaleur quoi !
J'ai encaissé un gros choc thermique, tu as manqué de me tuer !
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Aujourd'hui proposition de job : Prof de compta/gestion dans un CFA.
Tests et entretien la semaine prochaine.
Tests et entretien la semaine prochaine.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
C'est quoi un CFA ?
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
"Centre de Formation des Apprentis"
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Espérons surtout que ça ne va pas tourner à la cata...A combien de temps estimes-tu ta capacité à ne pas en avoir marre ?
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
Merci Gasta
@Fata : Tu as raison, ma difficulté n'a jamais été de trouver un job, mais de le supporter plus d'un an ou deux.
Mais j'en ai marre de ce cycle, il faut que je travaille sur moi, c'est devenu une nécessité de bosser, matériellement parlant, donc il va bien falloir que cela passe.
@Fata : Tu as raison, ma difficulté n'a jamais été de trouver un job, mais de le supporter plus d'un an ou deux.
Mais j'en ai marre de ce cycle, il faut que je travaille sur moi, c'est devenu une nécessité de bosser, matériellement parlant, donc il va bien falloir que cela passe.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Mouais. C'est moche.
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
Si t'as besoin d'un soutien moral on est là *-*
Vincenz'- Messages : 11411
Date d'inscription : 31/10/2012
Age : 30
Localisation : Pau
Re: ?????????
Mon chat c'est fait un pote.
Dans notre ancienne résidence il avait également sympathisé avec un matou noir et blanc comme lui, aucun autre n'avait le droit d'approcher la maison.
Il récidive ici, encore un chat qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau, mais les roux, les tigrés et autre oust!!!
Moi qui le tenais en très haute estime, et je découvre qu'il est raciste à un degré extrême, cela me peine énormément
Dans notre ancienne résidence il avait également sympathisé avec un matou noir et blanc comme lui, aucun autre n'avait le droit d'approcher la maison.
Il récidive ici, encore un chat qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau, mais les roux, les tigrés et autre oust!!!
Moi qui le tenais en très haute estime, et je découvre qu'il est raciste à un degré extrême, cela me peine énormément
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
C'est difficile.
Il n'a pas perdu un frère jumeau étant petit ?
Il n'a pas perdu un frère jumeau étant petit ?
zelle- Messages : 1184
Date d'inscription : 27/03/2015
Age : 54
Localisation : à l' ouest
Re: ?????????
Ah, c'est peut-être une piste zelle, je vais creuser.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Si je peux aider.
zelle- Messages : 1184
Date d'inscription : 27/03/2015
Age : 54
Localisation : à l' ouest
Re: ?????????
Salut Parisette
Content que cela te plaise
Content que cela te plaise
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Ça respire la joie de gvivre !
Ça va la modo, pas trop chiant ? (Il faut surveiller Fata Morgana, il joue tout le temps avec les limites !)
Ça va la modo, pas trop chiant ? (Il faut surveiller Fata Morgana, il joue tout le temps avec les limites !)
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
Ça respire la joie de gvivre !
Lol, c'est pas faux , mais ce n'est pas la joie que je recherche la dedans!
Ouais je garde un œil sur lui, mais comme tu le sais je suis borgne, alors je ne préciserais pas lequel!
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
Bauhaus... la classe absolue !
Xymox... superbe !
et Anne Clarke...
Tous ces groupes, nés à la fin des années 70 ou au début des années 80, je les adore ! Ils sont sexe, drogue, rock n'roll ! (et avec classe, siouplait^^). Les groupes nés dans les années 90 (Sopor Aeternus, Das Ich...) c'est tout le contraire... (je suis moins fan)
Xymox... superbe !
et Anne Clarke...
Tous ces groupes, nés à la fin des années 70 ou au début des années 80, je les adore ! Ils sont sexe, drogue, rock n'roll ! (et avec classe, siouplait^^). Les groupes nés dans les années 90 (Sopor Aeternus, Das Ich...) c'est tout le contraire... (je suis moins fan)
Invité- Invité
Re: ?????????
david50 a écrit:
Intéressant, intéressant...Tout un cas a étudier.
RupertDrop- Messages : 651
Date d'inscription : 23/02/2016
Age : 43
Localisation : Saint Raphaël
Re: ?????????
ddistance a écrit:Les groupes nés dans les années 90 (Sopor Aeternus, Das Ich...) c'est tout le contraire... (je suis moins fan)
Tout à fait d'accord, même si j'aime quelques titres particuliers comme celui que j'ai posté.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
François Bondy : Vous traite t-on souvent de réactionnaire?
Cioran : Je m'en défends. Je vais bien au-delà. Henri Thomas m'a dit un jour : "Vous êtes contre tout ce qui est arrivé depuis 1920", et je lui ai répondu : "Non, depuis Adam!".
Cioran : Je m'en défends. Je vais bien au-delà. Henri Thomas m'a dit un jour : "Vous êtes contre tout ce qui est arrivé depuis 1920", et je lui ai répondu : "Non, depuis Adam!".
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
J'ai retenu de mes jeunes années qu'il peut y avoir une addiction au pessimisme. Lors d'une discussion avec un ami où je tenais des propos pessimistes, il m'a répondu: " Oui, il y a ça, mais il n'y a pas que ça." Cette simple phrase m'a beaucoup servi.
Fata Morgana- Messages : 20818
Date d'inscription : 09/02/2011
Age : 67
Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: ?????????
Je suis d'accord, il n'y a pas que cela, mais pour le percevoir il faut d'abord avoir dépassé un certain nombre d'illusion.
Par exemple je ne crois en plus en l'avenir, plus précisément je ne m'attends à ce que le bonheur m'attende au bout du chemin, en récompense de je ne sais quels efforts, mais heureusement je trouve encore parfois dans le présent des occasions de me réjouir.
Par exemple je ne crois en plus en l'avenir, plus précisément je ne m'attends à ce que le bonheur m'attende au bout du chemin, en récompense de je ne sais quels efforts, mais heureusement je trouve encore parfois dans le présent des occasions de me réjouir.
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: ?????????
david50 a écrit:Je suis d'accord, il n'y a pas que cela, mais pour le percevoir il faut d'abord avoir dépassé un certain nombre d'illusion.
Par exemple je ne crois en plus en l'avenir, plus précisément je ne m'attends à ce que le bonheur m'attende au bout du chemin, en récompense de je ne sais quels efforts, mais heureusement je trouve encore parfois dans le présent des occasions de me réjouir.
Tout dépend avec qui tu fais ta route^^
Garde espoir, t'imagine meme pas en quoi j'ai espoir, alors.... tu as toutes les chances de trouver le bonheur...
Bon.... qui a renommé ce fil, je l'ai perdu c'est malin !
Invité- Invité
En plein gueule Pessoa.... je connaissais vaguement le poète mais pas ce passage. Bon sang que ça me chamboulle, j'en ai les larmes aux yeux. Merciiiiiiiii David50
david50 a écrit:De rien Bienbanale !
Pessoa, un auteur immense et une vie fascinante!
Je l'ai déjà collé quelque part sur le forum, mais puisque tu es amateur voilà ce que je pense être son plus beau texte :
Je ne suis rien
Jamais je ne serai rien.
Je ne puis vouloir être rien.
Cela dit, je porte en moi tous les rêves du monde.
Fenêtres de ma chambre,
de ma chambre dans la fourmilière humaine unité ignorée
(et si l’on savait ce qu’elle est, que saurait-on de plus ?),
vous donnez sur le mystère d’une rue au va-et-vient continuel,
sur une rue inaccessible à toutes les pensées,
réelle, impossiblement réelle, précise, inconnaissablement précise,
avec le mystère des choses enfoui sous les pierres et les êtres,
avec la mort qui parsème les murs de moisissure et de cheveux blancs les humains,
avec le destin qui conduit la guimbarde de tout sur la route de rien.
Je suis aujourd’hui vaincu, comme si je connaissais la vérité;
lucide aujourd’hui, comme si j’étais à l’article de la mort,
n’ayant plus d’autre fraternité avec les choses
que celle d’un adieu, cette maison et ce côté de la rue
se muant en une file de wagons, avec un départ au sifflet venu du fond de ma tête,
un ébranlement de mes nerfs et un grincement de mes os qui démarrent.
Je suis aujourd’hui perplexe, comme qui a réfléchi, trouvé, puis oublié.
Je suis aujourd’hui partagé entre la loyauté que je dois
au Bureau de Tabac d’en face, en tant que chose extérieurement réelle
et la sensation que tout est songe, en tant que chose réelle vue du dedans.
J’ai tout raté.
Comme j’étais sans ambition, peut-être ce tout n’était-il rien.
Les bons principes qu’on m’a inculqués,
je les ai fuis par la fenêtre de la cour.
Je m’en fus aux champs avec de grands desseins,
mais là je n’ai trouvé qu’herbes et arbres,
et les gens, s’il y en avait, étaient pareils à tout le monde.
Je quitte la fenêtre, je m’assieds sur une chaise. À quoi penser ?
Que sais-je de ce que je serai, moi qui ne sais pas ce que je suis ?
Être ce que je pense ? Mais je crois être tant et tant !
Et il y en a tant qui se croient la même chose qu’il ne saurait y en avoir tant!
Un génie ? En ce moment
cent mille cerveaux se voient en songe génies comme moi-même
et l’histoire n’en retiendra, qui sait ?, même pas un ;
du fumier, voilà tout ce qui restera de tant de conquêtes futures.
Non, je ne crois pas en moi.
Dans tous les asiles il y a tant de fous possédés par tant de certitudes !
Moi, qui n’ai point de certitude , suis-je plus assuré, le suis-je moins ?
Non, même pas de ma personne…
En combien de mansardes et de non-mansardes du monde
n’y a-t-il à cette heure des génies-pour-soi-même rêvant ?
Combien d’aspirations hautes, lucides et nobles -
oui, authentiquement hautes, lucides et nobles -
et, qui sait peut-être réalisables…
qui ne verront jamais la lumière du soleil réel et qui
tomberont dans l’oreille des sourds ?
Le monde est à qui naît pour le conquérir,
et non pour qui rêve, fût-ce à bon droit, qu’il peut le conquérir.
J’ai rêvé plus que jamais Napoléon ne rêva.
Sur mon sein hypothétique j’ai pressé plus d’humanité que le Christ,
j’ai fait en secret des philosophies que nul Kant n’a rédigées,
mais je suis, peut-être à perpétuité, l’individu de la mansarde,
sans pour autant y avoir mon domicile :
je serai toujours celui qui n’était pas né pour ça ;
je serai toujours, sans plus, celui qui avait des dons ;
je serai toujours celui qui attendait qu’on lui ouvrît la porte
auprès d’un mur sans porte
et qui chanta la romance de l’Infini dans une basse-cour,
celui qui entendit la voix de Dieu dans un puits obstrué.
Croire en moi ? Pas plus qu’en rien…
Que la Nature déverse sur ma tête ardente
son soleil, sa pluie, le vent qui frôle mes cheveux ;
quant au reste, advienne que pourra, ou rien du tout…
Esclaves cardiaques des étoiles,
nous avons conquis l’univers avant de quitter nos draps,
mais nous nous éveillons et voilà qu’il est opaque,
nous nous éveillons et voici qu’il est étranger,
nous franchissons notre seuil et voici qu’il est la terre entière,
plus le système solaire et la Voie lactée et le Vague Illimité.
(Mange des chocolats, fillette ;
mange des chocolats !
Dis-toi bien qu’il n’est d’autre métaphysique que les chocolats,
dis-toi bien que les religions toutes ensembles n’en apprennent
pas plus que la confiserie.
Mange, petite malpropre, mange !
Puissé-je manger des chocolats avec une égale authenticité !
Mais je pense, moi, et quand je retire le papier d’argent, qui d’ailleurs est d’étain,
je flanque tout par terre, comme j’y ai flanqué la vie.)
Du moins subsiste-t-il de l’amertume d’un destin irréalisé
la calligraphie rapide de ces vers,
portique délabré sur l’Impossible,
du moins, les yeux secs, me voué-je à moi-même du mépris,
noble, du moins, par le geste large avec lequel je jette dans le mouvant des choses,
sans note de blanchisseuse, le linge sale que je suis
et reste au logis sans chemise.
(Toi qui consoles, qui n’existes pas et par là même consoles,
ou déesse grecque, conçue comme une statue douée du souffle,
ou patricienne romaine, noble et néfaste infiniment,
ou princesse de troubadours, très- gente et de couleurs ornée,
ou marquise du dix-huitième, lointaine et fort décolletée,
ou cocotte célèbre du temps de nos pères,
ou je ne sais quoi de moderne – non, je ne vois pas très bien quoi -
que tout cela, quoi que ce soit, et que tu sois, m’inspire s’il se peut !
Mon coeur est un seau qu’on a vidé.
Tels ceux qui invoquent les esprits je m’invoque
moi-même sans rien trouver.
Je viens à la fenêtre et vois la rue avec une absolue netteté.
Je vois les magasins et les trottoirs, et les voitures qui passent.
Je vois les êtres vivants et vêtus qui se croisent,
je vois les chiens qui existent eux aussi,
et tout cela me pèse comme une sentence de déportation,
et tout cela est étranger, comme toute chose. )
J’ai vécu, aimé – que dis-je ? j’ai eu la foi,
et aujourd’hui il n’est de mendiant que je n’envie pour le seul fait qu’il n’est pas moi.
En chacun je regarde la guenille, les plaies et le mensonge
et je pense : « peut-être n’as-tu jamais vécu ni étudié, ni aimé, ni eu la foi »
(parce qu’il est possible d’agencer la réalité de tout cela sans en rien exécuter) ;
« peut-être as-tu à peine existé, comme un lézard auquel on a coupé la queue,
et la queue séparée du lézard frétille encore frénétiquement ».
J’ai fait de moi ce que je n’aurais su faire,
et ce que de moi je pouvais faire je ne l’ai pas fait.
Le domino que j’ai mis n’était pas le bon.
On me connut vite pour qui je n’étais pas, et je n’ai pas démenti et j’ai perdu la face.
Quand j’ai voulu ôter le masque
je l’avais collé au visage.
Quand je l’ai ôté et me suis vu dans le miroir,
J’avais déjà vieilli.
J’étais ivre, je ne savais plus remettre le masque que je n’avais pas ôté.
Je jetai le masque et dormis au vestiaire
comme un chien toléré par la direction
parce qu’il est inoffensif -
et je vais écrire cette histoire afin de prouver que je suis sublime.
Essence musicale de mes vers inutiles,
qui me donnera de te trouver comme chose par moi créée,
sans rester éternellement face au Bureau de Tabac d’en face,
foulant aux pieds la conscience d’exister,
comme un tapis où s’empêtre un ivrogne,
comme un paillasson que les romanichels ont volé et qui ne valait pas deux sous.
Mais le patron du Bureau de Tabac est arrivé à la porte, et à la porte il s’est arrêté.
Je le regarde avec le malaise d’un demi-torticolis
et avec le malaise d’une âme brumeuse à demi.
Il mourra, et je mourrai.
Il laissera son enseigne, et moi des vers.
À un moment donné mourra aussi l’enseigne, et
mourront aussi les vers de leur côté.
Après un certain temps mourra la rue où était l’enseigne,
ainsi que la langue dans laquelle les vers furent écrits.
Puis mourra la planète tournante où tout cela s’est produit.
En d’autres satellites d’autres systèmes cosmiques, quelque chose
de semblable à des humains
continuera à faire des genres de vers et à vivre derrière des manières d’enseignes,
toujours une chose en face d’une autre,
toujours une chose aussi inutile qu’une autre,
toujours une chose aussi stupide que le réel,
toujours le mystère au fond aussi certain que le sommeil du mystère de la surface,
toujours cela ou autre chose, ou bien ni une chose ni l’autre.
Mais un homme est entré au Bureau de Tabac (pour acheter du tabac ?)
et la réalité plausible s’abat sur moi soudainement.
Je me soulève à demi, énergique, convaincu, humain,
et je vais méditer d’écrire ces vers où je dis le contraire.
J’allume une cigarette en méditant de les écrire
et je savoure dans la cigarette une libération de toutes les pensées.
Je suis la fumée comme un itinéraire autonome, et je goûte, en un moment sensible et compétent,
la libération en moi de tout le spéculatif
et la conscience de ce que la métaphysique est l’effet d’un malaise passager.
Ensuite je me renverse sur ma chaise
et je continue à fumer
Tant que le destin me l’accordera je continuerai à fumer.
(Si j’épousais la fille de ma blanchisseuse,
peut-être que je serais heureux.)
Là-dessus je me lève. Je vais à la fenêtre.
L’homme est sorti du bureau de tabac (n’a-t-il pas mis la
monnaie dans la poche de son pantalon?)
Ah, je le connais: c’est Estève, Estève sans métaphysique.
(Le patron du bureau de tabac est arrivé sur le seuil.)
Comme mû par un instinct sublime, Estève s’est retourné et il m’a vu.
Il m’a salué de la main, je lui ai crié: « Salut Estève ! », et l’univers
s’est reconstruit pour moi sans idéal ni espérance, et le
patron du Bureau de Tabac a souri.
FERNANDO PESSOA
Álvaro de Campos, 15 janvier 1928.
Orangina Twist- Messages : 22
Date d'inscription : 03/08/2015
Age : 53
Re: ?????????
david50 a écrit:
Ben oui mais.... il est bien ce smiley, mais on n'entend pas ce que tu chantes, il faut un matos spécifique pour lire ton fil ? On me l'a pas dit.
Invité- Invité
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