Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
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Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
y a pas que le lithium...mais j'imagine que tu t'es déjà suffisamment penchée sur la question.
en tout cas la création est un excellent exutoire pour toutes ces émotions, même si l'état créatif implique pour toi justement encore plus démotions qui devront sortir chépas si c clair, hem...
en tout cas ta souffrance a l'air profonde...mais c'est vrai que je n'ai pas lu de texte que tu aurais écrit en phase plus positive. courage en tout cas, sois le roseau...
en tout cas la création est un excellent exutoire pour toutes ces émotions, même si l'état créatif implique pour toi justement encore plus démotions qui devront sortir chépas si c clair, hem...
en tout cas ta souffrance a l'air profonde...mais c'est vrai que je n'ai pas lu de texte que tu aurais écrit en phase plus positive. courage en tout cas, sois le roseau...
bluecat- Messages : 3953
Date d'inscription : 08/05/2010
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Effectivement Bluecat, je me suis penchée sérieusement sur la question... Et j'ai fait un choix, celui d'être libre et maître de moi-même... J'en assume les conséquences et je veilles, tant bien que mal, à ce que mes crises affectes le moins possible mon entourage puisqu'ils ne sont pas responsable de mes choix. Ce qu'il faut savoir toutefois, c'est que cette souffrance ne refait surface que de manière épisodique... En temps normal, je suis quelqu'un de sociable et d'assez "déconneur"... J'ai encore piqué un fou rire cet après-midi, non simulé je tiens à le préciser, fou rire qui à retentit dans les couloirs de la BNF... J'ai entraîné au passage plusieurs de mes collègues... On s'est retrouvés à 4 ou 5 à se bidonner comme des malades devant d'autres collègues parfaitement médusés....
Les textes que j'écris quand je vais mal ne sont pas uniquement le reflet d'une souffrance mais sont surtout la manifestation d'une activité cérébrale intense que j'intériorise. Je l'intériorise parce que je ne peux pas la partager avec mon entourage qui ne peut ni entendre ce que j'ai à dire, ni suivre le cour de mes réflexions et n'a pas la capacité d'argumenter. Et parfois, faut que ça sorte. Ma tête, c'est un peu une cocotte minute...! Mais paradoxalement, je suis dotée d'une personnalité très forte et très solide, ce qui permet d'équilibrer la balance. Accepter mes crises, accepter de les vivre me paraît plus sage que de les contrer en les intériorisant. Cela ferait beaucoup plus de dégâts... Extérioriser, c'est évacuer. Et évacuer, c'est se libérer. Quand je sais qu'une crise va se produire, je prend des précautions. Je sécurise mon environnement. Je prépare du papier, un crayon et je m'allonge pour attendre que ça passe... Et quelques heures plus tard, je reprend le cours de ma vie.
Rassure-toi, tu es très clair dans ce que tu exprimes. Mais la souffrance n'induit pas chez moi d'autres souffrances. Une fois que j'ai jeté sur le papier ce qui me torture, c'est terminé. Parfois, je retravailles mes textes à tête reposée. Je les étoffes, je vérifie mes références, je rajoute une idée de ci et de là mais ces "relectures" sont plutôt un plaisir pour moi. Oui, je sais, c'est paradoxal... Mais c'est le principe même de la réflexion philosophique... et j'ai un besoin vital, d'aucun diront névrotique, de cette activité réflexive. Sans elle, je ne suis rien. Disons que dans mon cas, l'accouchement est difficile !!!
Tu semble vouloir lire un texte écrit dans une phase dite "positive". C'est textes sont bien différents des précédents. Ce sont des textes narratifs, descriptifs, un peu comme le serait un conte. C'est un fragment du monde imaginaire dans lequel je vis. Je vais essayer de t'en trouver un qui soit joli...
Athénaïs
Les textes que j'écris quand je vais mal ne sont pas uniquement le reflet d'une souffrance mais sont surtout la manifestation d'une activité cérébrale intense que j'intériorise. Je l'intériorise parce que je ne peux pas la partager avec mon entourage qui ne peut ni entendre ce que j'ai à dire, ni suivre le cour de mes réflexions et n'a pas la capacité d'argumenter. Et parfois, faut que ça sorte. Ma tête, c'est un peu une cocotte minute...! Mais paradoxalement, je suis dotée d'une personnalité très forte et très solide, ce qui permet d'équilibrer la balance. Accepter mes crises, accepter de les vivre me paraît plus sage que de les contrer en les intériorisant. Cela ferait beaucoup plus de dégâts... Extérioriser, c'est évacuer. Et évacuer, c'est se libérer. Quand je sais qu'une crise va se produire, je prend des précautions. Je sécurise mon environnement. Je prépare du papier, un crayon et je m'allonge pour attendre que ça passe... Et quelques heures plus tard, je reprend le cours de ma vie.
Rassure-toi, tu es très clair dans ce que tu exprimes. Mais la souffrance n'induit pas chez moi d'autres souffrances. Une fois que j'ai jeté sur le papier ce qui me torture, c'est terminé. Parfois, je retravailles mes textes à tête reposée. Je les étoffes, je vérifie mes références, je rajoute une idée de ci et de là mais ces "relectures" sont plutôt un plaisir pour moi. Oui, je sais, c'est paradoxal... Mais c'est le principe même de la réflexion philosophique... et j'ai un besoin vital, d'aucun diront névrotique, de cette activité réflexive. Sans elle, je ne suis rien. Disons que dans mon cas, l'accouchement est difficile !!!
Tu semble vouloir lire un texte écrit dans une phase dite "positive". C'est textes sont bien différents des précédents. Ce sont des textes narratifs, descriptifs, un peu comme le serait un conte. C'est un fragment du monde imaginaire dans lequel je vis. Je vais essayer de t'en trouver un qui soit joli...
Athénaïs
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
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Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
oui, je veux bien découvrir le petit monde enchanté d'Athénaïs
bluecat- Messages : 3953
Date d'inscription : 08/05/2010
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Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Ok d'accord !!!! Alors en guise d'introduction au texte qui va suivre voici quelques photos des deux manoirs qui m'ont inspirés.
Château de la Reine Blanche, Coye la Fôret (Oise)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Château de la Reine Blanche, Coye la Fôret (Oise)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Manoir de Lady Mond, Plestin les Grèves (Côtes d'Armor)
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
C’était une petite île aux contours ondoyant qui contrastait avec le paysage marin chaotique. Les éléments déchainés se fracassaient sur des écueils verticaux, des lames de roche hérissaient l’horizon. Pourtant, ce confetti de terre verdoyant semblait presque épargné par le cataclysme ambiant. Au milieu de l’ilot s’élevait une curieuse demeure. Curieuse par son style mais surtout par sa présence improbable dans une atmosphère aussi accidentée et tourmentée. Comment avait-on réussi à construire une structure aussi complexe tant par son architecture que par sa décoration dans un lieu aussi hostile et éloigné de toute civilisation ? On y accédait depuis une île voisine beaucoup plus étendue mais il fallait souvent s’y reprendre à plusieurs fois avant de pouvoir accosté sur Kantolioù, l’île aux chandelles. Elle devait son nom à une légende raconté sur l’île voisine qui disait qu’à la nuit tombée, on pouvait voire briller une chandelle à chacune des fenêtres de l’improbable demeure. D’autres racontaient qu’on avait vu briller un cercle de chandelles avant que la demeure n’apparaisse comme par enchantement. Mais ce n’était que des légendes. Il n’en restait pas moins que la demeure était bien réelle et que son incongruité continuait à déranger les générations successives d’insulaires voisins.
Cette demeure semblait sortir d’un vieux tableau ou d’une de ces miniatures que nous nous plaisons tant à admirer dans les manuscrits moyenâgeux. Elle aurait certes mieux trouvée sa place, un soir, au coucher du soleil, dans une campagne solitaire. Cette jolie et riante demeure ressemblait à un logis du moyen âge restauré, tant l’imitation était exacte. Son style n’était pas celui des édifices religieux du treizième siècle dont la principale qualité doit être une grandeur sévère. Sa décoration était plus ornée, de la fin du quinzième siècle, à ce moment de transition où le gothique épanoui et fleuri s’allie aux fantaisies de la Renaissance qui commence, et se prête aux exigences modernes de distributions intérieure, aussi bien qu’au plus vifs caprices de l’imagination.
La façade de briques dessinant des losanges des deux couleurs, les tourelles aux angles, les cheminées, rondes comme de petites colonnes, se déroulant en spirales, le sommet du toit finement découpé, les gargouilles, monstres fantastiques allongeant leurs cols comme pour regarder dehors, le porche voûté couvrant un perron à élégante balustrade ; voilà l’aspect extérieur, un ensemble noble et varié, non uniforme et pourtant harmonieux.
Personne n’a jamais pénétré à l’intérieur. Et pour cause. C’est un peu comme si l’on avait fait entrer le château de Chambord dans une valise. Un peu comme si l’on sortait des objets disproportionnés d’une sacoche de voyage. L’étendue des pièces, leur distribution, l’ouverture des portes et des fenêtres, les détails de la décoration, tout semble démesurés. Les pièces sont ou plus petites ou beaucoup plus grandes ; il n’y a pas là, à proprement dire, un salon, un boudoir, une salle à manger, mais il y a un oratoire, des galeries, une librairie : l’oratoire, voûté, à nervures qui se croisent, avec de fines colonnettes, des personnages accroupis aux retombées de arcs, est pavé de briques vernissées et peintes de fleurons délicats ; la bibliothèque, les galeries, avec des plafonds divisés en compartiments qui étincellent de pourpre, d’azur et d’or ; des fenêtres à croisées de pierre, de larges baies qui laissent entrées pleinement le jour à travers les meneaux fleuronnés ; dans une vaste salle, une des grandes cheminées au manteau soutenu par de nobles cariatides, est fouillé, sculpté, chargé de cent personnages, véritable tableau de pierre, et de légers escaliers à vis, et de petits retraits éclairés par une étroite fenêtre qui ne laisse voire guère que le ciel, et où l’on irait rêver, si l’on avait de la tristesse dans l’âme.
Cette demeure semblait sortir d’un vieux tableau ou d’une de ces miniatures que nous nous plaisons tant à admirer dans les manuscrits moyenâgeux. Elle aurait certes mieux trouvée sa place, un soir, au coucher du soleil, dans une campagne solitaire. Cette jolie et riante demeure ressemblait à un logis du moyen âge restauré, tant l’imitation était exacte. Son style n’était pas celui des édifices religieux du treizième siècle dont la principale qualité doit être une grandeur sévère. Sa décoration était plus ornée, de la fin du quinzième siècle, à ce moment de transition où le gothique épanoui et fleuri s’allie aux fantaisies de la Renaissance qui commence, et se prête aux exigences modernes de distributions intérieure, aussi bien qu’au plus vifs caprices de l’imagination.
La façade de briques dessinant des losanges des deux couleurs, les tourelles aux angles, les cheminées, rondes comme de petites colonnes, se déroulant en spirales, le sommet du toit finement découpé, les gargouilles, monstres fantastiques allongeant leurs cols comme pour regarder dehors, le porche voûté couvrant un perron à élégante balustrade ; voilà l’aspect extérieur, un ensemble noble et varié, non uniforme et pourtant harmonieux.
Personne n’a jamais pénétré à l’intérieur. Et pour cause. C’est un peu comme si l’on avait fait entrer le château de Chambord dans une valise. Un peu comme si l’on sortait des objets disproportionnés d’une sacoche de voyage. L’étendue des pièces, leur distribution, l’ouverture des portes et des fenêtres, les détails de la décoration, tout semble démesurés. Les pièces sont ou plus petites ou beaucoup plus grandes ; il n’y a pas là, à proprement dire, un salon, un boudoir, une salle à manger, mais il y a un oratoire, des galeries, une librairie : l’oratoire, voûté, à nervures qui se croisent, avec de fines colonnettes, des personnages accroupis aux retombées de arcs, est pavé de briques vernissées et peintes de fleurons délicats ; la bibliothèque, les galeries, avec des plafonds divisés en compartiments qui étincellent de pourpre, d’azur et d’or ; des fenêtres à croisées de pierre, de larges baies qui laissent entrées pleinement le jour à travers les meneaux fleuronnés ; dans une vaste salle, une des grandes cheminées au manteau soutenu par de nobles cariatides, est fouillé, sculpté, chargé de cent personnages, véritable tableau de pierre, et de légers escaliers à vis, et de petits retraits éclairés par une étroite fenêtre qui ne laisse voire guère que le ciel, et où l’on irait rêver, si l’on avait de la tristesse dans l’âme.
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
la suite, la suite! ça me donne envie d'aller vivre là la bibliothèque m'a l'air comme dans mes propres rêves ...
bluecat- Messages : 3953
Date d'inscription : 08/05/2010
Age : 45
Localisation : Bruxelles
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
@ bluecat: j'aimerais arriver à la terminer la description de la bibliothèque mais dans ma tête, elle est protéiforme....
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
haa! moi je vois une pièce haute de plafond, avec fenêtres placées en hauteur (pr avoir de la lumière sans être vu de l'extérieur), lambris sur les murs, feu ouvert et des bouquins jusqu'au plafond (avec galerie, échelle et tout)
bluecat- Messages : 3953
Date d'inscription : 08/05/2010
Age : 45
Localisation : Bruxelles
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci de partager ton monde... encore
V.O- Messages : 1018
Date d'inscription : 10/02/2010
Age : 51
Localisation : Nord - Blayais, au pays des asperges et du vin
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Le texte qui suit à été écrit après ma lecture du roman de Goethe et après avoir vécue l'expérience d'une "affinités électives". Je me suis servie du net pour pousser plus avant ma compréhension de l'oeuvre de Goethe. Il est donc possible que des formulations qui m'ont marquées apparaissent ça et là dans mon texte. Écrit en décembre 2008, il m'est impossible d'identifier ce qui relève de ma propre inspiration de ce qui tient de l'influence... Et puis quant une formulation est claire, je ne vois pas l'intérêt de la reformuler.... Les mots appartiennent à tous.... Cela dit, à part deux ou trois formulations, le reste est bien de ma plume....
Pourquoi en plusieurs parties? Parce que ce texte est long...
AFFINITÉS ÉLECTIVES PARTIE 1:
D’une manière générale, et bien qu’il soit difficile de généraliser ce type de processus, on retrouve toujours un aspect essentiel, caractéristique, dans le travail introspectif auquel se livre un individu : la recherche d’un absolu. La recherche « d’un absolu » et non pas « de l’absolu » puisque chaque quête est unique dans la complexité qu’elle entretient avec l’activité réflexive de l’individu qui la mène. Toutefois, si aucune émulation ne vient renouveler notre mode d’analyse, notre esprit s’enferme dans une spirale réflexive stérile. Le regard extérieur d’un tiers est fondamental car il enrichit et ouvre des perspectives nouvelles qui nous permettent d’avancer dans notre quête. Sans lui, notre activité psychique glisse inexorablement vers un narcissisme délétère qui nous éloigne de notre but.
Chaque nouvelle rencontre induit le façonnage d’une nouvelle identité. Nos précédentes rencontres ne perdent pas de leur valeur pour autant. Nous changeons et la rencontre d’un individu est un moteur qui génère la mise en place d’une nouvelle personnalité et de ses aspirations propre. L’équation se complique sensiblement lorsque la rencontre d’autrui est vécue comme une « affinité élective » car elle implique des effets irréversibles aussi bien en ce qui concerne l’individu dans sa singularité que dans les relations que celui-ci avait engagées avant cette rencontre.
Une affinité élective se distingue des autres relations intersubjectives en cela qu’elle révèle à deux individus qu’il existe une étroite concordance dans la nature de leurs introspections et des aspirations qui en résultent. Comment savoir si nous sommes en présence d’une affinité élective et comment décrire les émotions qui président à ce type de rencontre ? Spinoza est, sur ce point, très précis. Dans la troisième partie de son Ethique, intitulée De l’origine de la nature des sentiments, on pourra lire ce qui suit dans la scolie de la proposition 52 : « Mais si ce que nous admirons est la sagesse (prudentia) d’un homme, son travail (industria) ou quelque chose de ce genre, comme par là même nous considérons que cet homme l’emporte beaucoup sur nous, alors l’admiration se nomme Vénération (Vénératio). (…) » Cette admiration est à la base de toute affinité élective en cela qu’elle sert de base à toute émulation. Si l’on poursuit notre lecture de Spinoza, voici comment l’auteur décrit le principe de l’émulation : « L’émulation (aemulatio) est le désir d’une chose qui naît en nous de ce que nous imaginons que d’autre ont le même désir. » Toujours d’après le philosophe, « si nous imaginons que quelqu’un pour qui nous n’avons éprouvé aucun sentiment, affecte de joie une chose semblable à nous, nous serons affectés d’amour pour lui. » On pourrait conclure ainsi l’enchaînement, « si nous admirons la sagesse, le travail, etc., d’un homme que nous aimons, notre Amour sera par la même plus grand (…). » Et si ce « même désir » est celui d’atteindre un absolu identique, l’amour qui en découle est d’autant plus puissant car enfin, qui pourrait consciemment refuser de marcher accompagné, même pour un temps seulement, dans les ténèbres qui mènent vers notre absolu. Autant il nous est possible de marcher dans la lumière, d’avoir une vie sociale aux côtés de nos congénères même si cela nous répugne, autant cela devient parfaitement impossible quand il s’agit de notre cheminement intérieur, celui de l’ombre. Il n’est pas question ici de ces amours chargés de niaiseries qui conjuguent le verbe aimer à toutes les personnes du singuliers et du pluriel comme pour mieux se convaincre de combler des vides ; il s’agit plutôt de l’alliance de deux penseurs qui décuplent ainsi leur puissance réflexive dans le cadre d’une considération réciproque. Si le terme d’«affinités électives » est principalement associé au roman de Goethe, on pourrait élargir son concept en imaginant qu’il s’agit donc d’un processus qui permet à deux consciences animées par des réflexions plurales d’entamer, à partir d’un rapport d’attraction, un échange s’organisant autour d’influences réciproques, de choix identiques, de convergence de vues et d’une mutuelle compréhension. Toutefois, même animé par des objectifs visant l’élévation spirituelle, l’homme n’en est pas moins homme et obéit à sa nature, plus facilement encore si cette dernière accroît considérablement ces facultés psychiques.
L’idée d’attirance irrépressible et de préférence sélective produit des altérations qui forment évènement. Fulgurante, s’inscrivant dans une immédiateté n’admettant aucun ajournement, ce type de relation se développe sur fond d’exclusion des autres relations possibles. Une attirance spontané et irrépressible, permet la combinaison d’individus jusqu’ici séparés car investi dans d’autres relations. Aucun pronostic n’est à priori possible. L’analyse rationnelle est inopérante, car les affinités électives se révèlent seulement au contact, par l’expérience. La raison est impuissante à anticiper comme à endiguer le cours de ces affinités. Souvent passionnelles, toujours (…), les obstacles que la raison pourrait dresser contre elles là renforcent.
Pourquoi en plusieurs parties? Parce que ce texte est long...
AFFINITÉS ÉLECTIVES PARTIE 1:
D’une manière générale, et bien qu’il soit difficile de généraliser ce type de processus, on retrouve toujours un aspect essentiel, caractéristique, dans le travail introspectif auquel se livre un individu : la recherche d’un absolu. La recherche « d’un absolu » et non pas « de l’absolu » puisque chaque quête est unique dans la complexité qu’elle entretient avec l’activité réflexive de l’individu qui la mène. Toutefois, si aucune émulation ne vient renouveler notre mode d’analyse, notre esprit s’enferme dans une spirale réflexive stérile. Le regard extérieur d’un tiers est fondamental car il enrichit et ouvre des perspectives nouvelles qui nous permettent d’avancer dans notre quête. Sans lui, notre activité psychique glisse inexorablement vers un narcissisme délétère qui nous éloigne de notre but.
Chaque nouvelle rencontre induit le façonnage d’une nouvelle identité. Nos précédentes rencontres ne perdent pas de leur valeur pour autant. Nous changeons et la rencontre d’un individu est un moteur qui génère la mise en place d’une nouvelle personnalité et de ses aspirations propre. L’équation se complique sensiblement lorsque la rencontre d’autrui est vécue comme une « affinité élective » car elle implique des effets irréversibles aussi bien en ce qui concerne l’individu dans sa singularité que dans les relations que celui-ci avait engagées avant cette rencontre.
Une affinité élective se distingue des autres relations intersubjectives en cela qu’elle révèle à deux individus qu’il existe une étroite concordance dans la nature de leurs introspections et des aspirations qui en résultent. Comment savoir si nous sommes en présence d’une affinité élective et comment décrire les émotions qui président à ce type de rencontre ? Spinoza est, sur ce point, très précis. Dans la troisième partie de son Ethique, intitulée De l’origine de la nature des sentiments, on pourra lire ce qui suit dans la scolie de la proposition 52 : « Mais si ce que nous admirons est la sagesse (prudentia) d’un homme, son travail (industria) ou quelque chose de ce genre, comme par là même nous considérons que cet homme l’emporte beaucoup sur nous, alors l’admiration se nomme Vénération (Vénératio). (…) » Cette admiration est à la base de toute affinité élective en cela qu’elle sert de base à toute émulation. Si l’on poursuit notre lecture de Spinoza, voici comment l’auteur décrit le principe de l’émulation : « L’émulation (aemulatio) est le désir d’une chose qui naît en nous de ce que nous imaginons que d’autre ont le même désir. » Toujours d’après le philosophe, « si nous imaginons que quelqu’un pour qui nous n’avons éprouvé aucun sentiment, affecte de joie une chose semblable à nous, nous serons affectés d’amour pour lui. » On pourrait conclure ainsi l’enchaînement, « si nous admirons la sagesse, le travail, etc., d’un homme que nous aimons, notre Amour sera par la même plus grand (…). » Et si ce « même désir » est celui d’atteindre un absolu identique, l’amour qui en découle est d’autant plus puissant car enfin, qui pourrait consciemment refuser de marcher accompagné, même pour un temps seulement, dans les ténèbres qui mènent vers notre absolu. Autant il nous est possible de marcher dans la lumière, d’avoir une vie sociale aux côtés de nos congénères même si cela nous répugne, autant cela devient parfaitement impossible quand il s’agit de notre cheminement intérieur, celui de l’ombre. Il n’est pas question ici de ces amours chargés de niaiseries qui conjuguent le verbe aimer à toutes les personnes du singuliers et du pluriel comme pour mieux se convaincre de combler des vides ; il s’agit plutôt de l’alliance de deux penseurs qui décuplent ainsi leur puissance réflexive dans le cadre d’une considération réciproque. Si le terme d’«affinités électives » est principalement associé au roman de Goethe, on pourrait élargir son concept en imaginant qu’il s’agit donc d’un processus qui permet à deux consciences animées par des réflexions plurales d’entamer, à partir d’un rapport d’attraction, un échange s’organisant autour d’influences réciproques, de choix identiques, de convergence de vues et d’une mutuelle compréhension. Toutefois, même animé par des objectifs visant l’élévation spirituelle, l’homme n’en est pas moins homme et obéit à sa nature, plus facilement encore si cette dernière accroît considérablement ces facultés psychiques.
L’idée d’attirance irrépressible et de préférence sélective produit des altérations qui forment évènement. Fulgurante, s’inscrivant dans une immédiateté n’admettant aucun ajournement, ce type de relation se développe sur fond d’exclusion des autres relations possibles. Une attirance spontané et irrépressible, permet la combinaison d’individus jusqu’ici séparés car investi dans d’autres relations. Aucun pronostic n’est à priori possible. L’analyse rationnelle est inopérante, car les affinités électives se révèlent seulement au contact, par l’expérience. La raison est impuissante à anticiper comme à endiguer le cours de ces affinités. Souvent passionnelles, toujours (…), les obstacles que la raison pourrait dresser contre elles là renforcent.
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
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Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci Athénaïs
DiDi- Messages : 166
Date d'inscription : 24/02/2010
Age : 37
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Je suis curieux de la lire la suite...
Prosopeion- Messages : 1054
Date d'inscription : 04/06/2010
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
@ Prosopeion: Je m'en voudrais de te faire attendre... La suite donc suit...
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
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Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
AFFINITÉS ÉLECTIVES PARTIE 2:
Goethe organise sont récit autour d’une analogie chimique : l’attirance de certaines substances pour d’autres est qualifiée d’ « affinité élective » dans le vocabulaire technique des chimistes. Je ne peux m’empêcher de penser à une de ces affinités chimiques, propre à mon métier : celle de l’or et du mercure. La tradition populaire, à tort, accorde à l’or la propriété d’être inaltérable : mis en contact, l’or et le mercure s’agglomère rendant le métal précieux aussi fragile et cassant que du verre. Pourtant, il est possible de rendre à l’or ses facultés originel : chauffé jusqu'à la limite de son point de fusion, le mercure s’évapore. Une fois refroidit, l’or a retrouvé ses propriétés mais le mercure, en s’évaporant, à définitivement disparu. Il ne retrouvera jamais sa forme originelle. L’inhalation répétée des vapeurs de mercure sont mortelles pour l’homme : c’est pourquoi cette technique est proscrite des ateliers bien que toujours pratiquée.
Il en est de même pour deux êtres touchés par des « affinités électives » : l’agglomération de leurs esprits, unis dans un même mouvement intérieur, les rends fragiles. L’émulation spirituelle porté à son paroxysme peu seul les libérés l’un de l’autre. Ainsi, tandis que l’un des deux retrouvera sa tranquillité intérieure, l’autre s’y brûlera les ailes pour mieux chuter. Bien que conscient de ces néfastes conséquences, l’exercice demeure diablement séduisant probablement parce qu’il n’en existe pas d’autre aussi captivant et efficace lorsqu’on recherche l’incandescence de l’esprit. Comme pour les vapeurs de mercure, s’investir à plusieurs reprises dans ce type de relation mène plus sûrement aux portes du cimetière qu’à celles de la chapelle. Il s’agit d’un opium puissant duquel il est difficile de décrocher dès lors que l’on à goûter à ses subtilités et voluptés. Les « affinités électives » occasionnent des mouvements spirituels d’une intensité telle, qu’ils balaient tous sur leur passage, provoquant aussi bien l’enthousiasme que le désespoir, obéissant en cela à un des premiers principe de l’alchimie : toute force positive en implique une autre, négative mais d’égale puissance, la médaille et son revers.
Malgré tout, rare sont ceux qui ont les capacités d’interférer favorablement dans le cercle vertueux de la « méta-pensée » : la encore, le narcissisme n’est jamais bien loin puisque seul un individu qui s’inscrit dans la même recherche peut prétendre à jouer le rôle de modérateur. Encore faut-il qu’il soit en mesure de maîtriser la force générée par ce type d’échange car la rencontre d’autrui est toujours le début d’une aventure intérieur, a mis chemin entre introspections et échanges, riche de découverte en bien comme en mal. Spinoza explique d’ailleurs qu’il n’y a pas de bien ou de mal absolus, l’un comme l’autre étant étroitement liés aux êtres et aux ensembles qu’ils composent. On pensera aux deux héros des Envoûtés de Gombrowicz, Maya et Walczak, fascinés par le mal, la violence et la destruction et qui voient leur relation ainsi analysée par un tiers :
« - S’il a tué, c’est que moi aussi j’aurais pu tuer, répétait-elle fébrilement, nous possédons des natures identiques ! Je le sais. S’il est comme ça, c’est que je le suis aussi… et c’est vrai !
[…]
- (…) Votre aventure pourrait s’expliquer le plus simplement du monde dans les faits et par la psychologie. Si vraiment il vous ressemble tant, la raison de votre néfaste influence réciproque devient claire. Vous êtes vous-même d’un tempérament extrêmement vif, passionné et agressif. Que cette nature en rencontre une qui lui soit proche et son impétueuse énergie s’en trouve multipliée : il vous excite, vous l’excitez à votre tour et c’est un véritable cercle vicieux. Cette force constitue en elle-même un trésor inestimable. Mais si elle n’est pas tournée vers le bien, elle se transforme en élément destructeur. (…) »
Aussi cruel que ce la puisse paraître, la souffrance psychologique qu’engendre inéluctablement une affinité élective est nécessaire puisqu’elle génère des réactions qui affectent la conscience et fournit ainsi matière à l’analyse de notre auto-conscience. La souffrance psychologique et l’introspection qui en résulte sont à l’origine de toute réflexion axée sur les problèmes les plus importants de la philosophie. La boucle se trouve ainsi bouclée et justifie la prise de risques.
Faut-il lutter contre les affinités électives ? Les décortiquer pour mieux les rationaliser ? Poser ces questions revient à se demander si l’on veut vivre et se savoir exister ou pas. Elles sont au cœur de la vie, elle sont la vie, son but, son moteur et probablement sa seule raison d’être. Les tempêtes qu’elles provoquent valent-elles le coup d’être vécues ? Je pense que oui. Je sais que oui. Il n’y a rien de plus beau qu’une tempête.
Goethe organise sont récit autour d’une analogie chimique : l’attirance de certaines substances pour d’autres est qualifiée d’ « affinité élective » dans le vocabulaire technique des chimistes. Je ne peux m’empêcher de penser à une de ces affinités chimiques, propre à mon métier : celle de l’or et du mercure. La tradition populaire, à tort, accorde à l’or la propriété d’être inaltérable : mis en contact, l’or et le mercure s’agglomère rendant le métal précieux aussi fragile et cassant que du verre. Pourtant, il est possible de rendre à l’or ses facultés originel : chauffé jusqu'à la limite de son point de fusion, le mercure s’évapore. Une fois refroidit, l’or a retrouvé ses propriétés mais le mercure, en s’évaporant, à définitivement disparu. Il ne retrouvera jamais sa forme originelle. L’inhalation répétée des vapeurs de mercure sont mortelles pour l’homme : c’est pourquoi cette technique est proscrite des ateliers bien que toujours pratiquée.
Il en est de même pour deux êtres touchés par des « affinités électives » : l’agglomération de leurs esprits, unis dans un même mouvement intérieur, les rends fragiles. L’émulation spirituelle porté à son paroxysme peu seul les libérés l’un de l’autre. Ainsi, tandis que l’un des deux retrouvera sa tranquillité intérieure, l’autre s’y brûlera les ailes pour mieux chuter. Bien que conscient de ces néfastes conséquences, l’exercice demeure diablement séduisant probablement parce qu’il n’en existe pas d’autre aussi captivant et efficace lorsqu’on recherche l’incandescence de l’esprit. Comme pour les vapeurs de mercure, s’investir à plusieurs reprises dans ce type de relation mène plus sûrement aux portes du cimetière qu’à celles de la chapelle. Il s’agit d’un opium puissant duquel il est difficile de décrocher dès lors que l’on à goûter à ses subtilités et voluptés. Les « affinités électives » occasionnent des mouvements spirituels d’une intensité telle, qu’ils balaient tous sur leur passage, provoquant aussi bien l’enthousiasme que le désespoir, obéissant en cela à un des premiers principe de l’alchimie : toute force positive en implique une autre, négative mais d’égale puissance, la médaille et son revers.
Malgré tout, rare sont ceux qui ont les capacités d’interférer favorablement dans le cercle vertueux de la « méta-pensée » : la encore, le narcissisme n’est jamais bien loin puisque seul un individu qui s’inscrit dans la même recherche peut prétendre à jouer le rôle de modérateur. Encore faut-il qu’il soit en mesure de maîtriser la force générée par ce type d’échange car la rencontre d’autrui est toujours le début d’une aventure intérieur, a mis chemin entre introspections et échanges, riche de découverte en bien comme en mal. Spinoza explique d’ailleurs qu’il n’y a pas de bien ou de mal absolus, l’un comme l’autre étant étroitement liés aux êtres et aux ensembles qu’ils composent. On pensera aux deux héros des Envoûtés de Gombrowicz, Maya et Walczak, fascinés par le mal, la violence et la destruction et qui voient leur relation ainsi analysée par un tiers :
« - S’il a tué, c’est que moi aussi j’aurais pu tuer, répétait-elle fébrilement, nous possédons des natures identiques ! Je le sais. S’il est comme ça, c’est que je le suis aussi… et c’est vrai !
[…]
- (…) Votre aventure pourrait s’expliquer le plus simplement du monde dans les faits et par la psychologie. Si vraiment il vous ressemble tant, la raison de votre néfaste influence réciproque devient claire. Vous êtes vous-même d’un tempérament extrêmement vif, passionné et agressif. Que cette nature en rencontre une qui lui soit proche et son impétueuse énergie s’en trouve multipliée : il vous excite, vous l’excitez à votre tour et c’est un véritable cercle vicieux. Cette force constitue en elle-même un trésor inestimable. Mais si elle n’est pas tournée vers le bien, elle se transforme en élément destructeur. (…) »
Aussi cruel que ce la puisse paraître, la souffrance psychologique qu’engendre inéluctablement une affinité élective est nécessaire puisqu’elle génère des réactions qui affectent la conscience et fournit ainsi matière à l’analyse de notre auto-conscience. La souffrance psychologique et l’introspection qui en résulte sont à l’origine de toute réflexion axée sur les problèmes les plus importants de la philosophie. La boucle se trouve ainsi bouclée et justifie la prise de risques.
Faut-il lutter contre les affinités électives ? Les décortiquer pour mieux les rationaliser ? Poser ces questions revient à se demander si l’on veut vivre et se savoir exister ou pas. Elles sont au cœur de la vie, elle sont la vie, son but, son moteur et probablement sa seule raison d’être. Les tempêtes qu’elles provoquent valent-elles le coup d’être vécues ? Je pense que oui. Je sais que oui. Il n’y a rien de plus beau qu’une tempête.
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Bonjour Athénaïs !
Bienvenue ! Moi aussi je trouve les gens très superficiels. Depuis très longtemps.
Merci pour ton texte sur l'affinité élective. Je ne suis pas sure de tout comprendre, ou plutôt de vouloir comprendre.
Mon passage préféré :
"L’idée d’attirance irrépressible et de préférence sélective produit des altérations qui forment évènement. Fulgurante, s’inscrivant dans une immédiateté n’admettant aucun ajournement, ce type de relation se développe sur fond d’exclusion des autres relations possibles. Une attirance spontané et irrépressible, permet la combinaison d’individus jusqu’ici séparés car investi dans d’autres relations. Aucun pronostic n’est à priori possible. L’analyse rationnelle est inopérante, car les affinités électives se révèlent seulement au contact, par l’expérience. La raison est impuissante à anticiper comme à endiguer le cours de ces affinités. Souvent passionnelles, toujours (…), les obstacles que la raison pourrait dresser contre elles là renforcent."
Le coeur a ses raisons que la raison ne connait pas ?
Bienvenue ! Moi aussi je trouve les gens très superficiels. Depuis très longtemps.
Merci pour ton texte sur l'affinité élective. Je ne suis pas sure de tout comprendre, ou plutôt de vouloir comprendre.
Mon passage préféré :
"L’idée d’attirance irrépressible et de préférence sélective produit des altérations qui forment évènement. Fulgurante, s’inscrivant dans une immédiateté n’admettant aucun ajournement, ce type de relation se développe sur fond d’exclusion des autres relations possibles. Une attirance spontané et irrépressible, permet la combinaison d’individus jusqu’ici séparés car investi dans d’autres relations. Aucun pronostic n’est à priori possible. L’analyse rationnelle est inopérante, car les affinités électives se révèlent seulement au contact, par l’expérience. La raison est impuissante à anticiper comme à endiguer le cours de ces affinités. Souvent passionnelles, toujours (…), les obstacles que la raison pourrait dresser contre elles là renforcent."
Le coeur a ses raisons que la raison ne connait pas ?
highschool2005- Messages : 100
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Age : 38
Localisation : Bordeaux
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
LES ARTISANS DE LA CONSCIENCE
Nous formons une société secrète sans vraiment le savoir, hors du temps et du monde, loin de ceux qui commercent et s’entre-tue dans une ignorance affligeante car consentie, replié dans nos bibliothèques, traquant les oublis, les confins du temps, les mœurs passionnées et les zones d’ombre, souvent seul, parfois accompagné mais toujours solitaire, nous sommes des artisans de la conscience.
La conscience est la faculté psychologique de percevoir sa propre existence ou ses états de conscience : il faut pouvoir être conscient de la conscience. Cette dernière se transforme alors en auto-conscience, conscience de soi qui ne voit autre chose qu’elle–même. Epurée, transparente, elle est la conscience exemplaire, celle qui produit la lucidité. Cette activité réflexive est à l’origine d’une mise en abyme où la pensée se met à "se réfléchir elle-même". Cette sorte de cercle vertueux crée une "méta-pensée". Une fois que la prise de conscience des réactions qui affectent la conscience a eut lieu et qu’elle est définitivement acquise à un processus de mise en abîme, reste à déterminer l’usage que nous pouvons en faire.
Quel est le but de ce « travail introspectif » ? Dans ces Méditations métaphysiques, Descartes nous montre l’unique voie possible : nous devons soumettre notre conscience à sa propre inspection, c’est à dire à l’introspection. L’esprit cherchera à se comprendre lui-même comme sujet pensant : réfléchir sur soi pour se connaître davantage dans l’espoir que ce processus d’auto-connaissance nous mène vers cet inconnu sans nom dont il est bien difficile de déterminer la nature mais qui constitue notre absolu. Il est difficile de dire qui, jusqu'à aujourd’hui, est parvenu à atteindre cet absolu : notre conscience peut-elle avoir d’autre activité que l’auto-clarification perpétuelle des pensées ? Pourra-t-elle achever une fois pour toutes son auto-clarification ou bien la clarté restera-t-elle toujours comme un désir bloqué au stade de projet, sans cesse souhaitée, jamais assouvie ?
Dans la troisième partie de son Ethique, Spinoza écrit ceci : « L’homme ne se connaît lui-même que par les affections de son corps et leurs idées. Donc, lorsque l’esprit peut se considérer lui-même, par la même il passe, par l’hypothèse, à une perfection plus grande, c’est à dire qu’il est affecté de joie, et d’une joie d’autant plus grande qu’il peut s’imaginer lui-même et imagine sa puissance d’agir plus distinctement. » Ce qui différencie l’homme de l’animal réside dans sa capacité à user de sa capacité réflexive. Le choix qui est fait d’atteindre un niveau de conscience supérieure est loin d’être évident tant il est vrai que ce difficile exercice est épuisant. De fait, rare sont ceux qui font de l’introspection une règle de vie et de la conscience supérieure, leur unique idéal. On peut difficilement blâmer ceux qui se contente du minimum nécessaire à leur survie puisqu’il ne sont même pas conscient d’ « être » et encore moins de leur capacité à « se réfléchir ». Dans son tout premier livre, Sur les cimes du désespoir, Cioran à écrit : « Une constatation que je peux vérifier, à mon grand regret, à chaque instant : seuls sont heureux ceux qui ne pensent jamais, autrement dit ceux qui ne pensent que le stricte minimum nécessaire pour vivre. » Ce qui ne nous empêche pas pour autant de reconnaître le fait que l’égalité des hommes se limite à la dignité humaine, pour ne jamais atteindre celui de la conscience et de sa capacité introspective.
Contrairement à la démarche de Descartes, il n’est pas question d’user de ce processus pour savoir ce que nous sommes : Dieu est mort, Nietzsche est vivant. Nous sommes le produit de mutations biologiques comme tout ce qui vie sur cette planète. Et si la science permet de retracer fidèlement la chronologie des faits qui ont conduits à l’apparition de la vie humaine, rien ne vient expliquer la complexité du principe de la vie et de ses corolaires : sa partie matérielle, le corps, et sa partie immatérielle, la pensée. Quelque soit l’étendue des connaissances scientifiques, elles demeurent limitées et ne peuvent tout expliquer. Tous les scientifiques s’accordent à dire que lorsque la science à atteint ses limites et qu’elle ne parvient plus à remplir son office explicatif, toute les hypothèses doivent être envisagées y compris celles qui défient l’esprit le plus logique, rationnel et méthodique.
Demeure une question : quel est cet absolu qui hante ces lignes ? En ce qui me concerne, il procède d’une intuition qui pressent l’existence d’une puissance, d’une force, peut importe finalement le nom qu’on lui donne, et que celle-ci est à l’origine de toute chose. Il s’agit donc de parvenir à en déterminer la nature afin d’en maîtriser les secrets bien que leur appréhension soit réservée à un petit nombre d'initiés. La conscience humaine ainsi que sa capacité réflexive procède de cette force et il nous faut par tous les moyens parvenir à en saisir l’essence. On pensera à l’évangile de Thomas, un des manuscrits de Nag Hammadi : « Jésus disait : que celui qui cherche, soit toujours en quête jusqu'à ce qu’il trouve et quand il aura trouvé, il sera dans le trouble, ayant été troublé, il s’émerveillera, il règnera sur le Tout. (…) Ses disciples disaient : enseigne-nous le lieu où tu es. Il est nécessaire que nous le cherchions. Il leur dit : que celui qui a des oreilles, entende ! Il y a de la lumière à l’intérieur d’un homme de lumière, et il illumine le monde entier. S’il n’illuminait pas, quelles ténèbres ! ». Affranchi des dogmes et des croyances en tous genres qui la dénature, cette quête ne peut se départir totalement d’une certaine forme de mysticisme : cette attitude philosophique est davantage fondée sur le sentiment et l'intuition que sur la connaissance rationnelle mais c’est elle qui sert de moteur à notre quête. Paradoxalement, le seul chemin qui mène vers cet absolu est donc celui de la connaissance universelle puisqu’elle seule peut agir sur les êtres et les choses, cette envie de tout apprendre et de tout connaître demeure notre seul et unique guide. Une volonté s’inscrivant dans un schéma spirituel atemporelles, étranger au monde mais s’en nourrissant, l’intime conviction de jouir d’une faculté exceptionnelle en regard du petit nombre d’entre nous qui en sont dotés, la responsabilité qui nous incombe d’en faire usage et, de préférence, le plus éclairé possible, la certitude immuable du bien fondé de notre quête, tous ceci nous permet d’avancer chaque jour un peu plus, lentement mais surement.
Nous formons une société secrète sans vraiment le savoir, hors du temps et du monde, loin de ceux qui commercent et s’entre-tue dans une ignorance affligeante car consentie, replié dans nos bibliothèques, traquant les oublis, les confins du temps, les mœurs passionnées et les zones d’ombre, souvent seul, parfois accompagné mais toujours solitaire, nous sommes des artisans de la conscience.
La conscience est la faculté psychologique de percevoir sa propre existence ou ses états de conscience : il faut pouvoir être conscient de la conscience. Cette dernière se transforme alors en auto-conscience, conscience de soi qui ne voit autre chose qu’elle–même. Epurée, transparente, elle est la conscience exemplaire, celle qui produit la lucidité. Cette activité réflexive est à l’origine d’une mise en abyme où la pensée se met à "se réfléchir elle-même". Cette sorte de cercle vertueux crée une "méta-pensée". Une fois que la prise de conscience des réactions qui affectent la conscience a eut lieu et qu’elle est définitivement acquise à un processus de mise en abîme, reste à déterminer l’usage que nous pouvons en faire.
Quel est le but de ce « travail introspectif » ? Dans ces Méditations métaphysiques, Descartes nous montre l’unique voie possible : nous devons soumettre notre conscience à sa propre inspection, c’est à dire à l’introspection. L’esprit cherchera à se comprendre lui-même comme sujet pensant : réfléchir sur soi pour se connaître davantage dans l’espoir que ce processus d’auto-connaissance nous mène vers cet inconnu sans nom dont il est bien difficile de déterminer la nature mais qui constitue notre absolu. Il est difficile de dire qui, jusqu'à aujourd’hui, est parvenu à atteindre cet absolu : notre conscience peut-elle avoir d’autre activité que l’auto-clarification perpétuelle des pensées ? Pourra-t-elle achever une fois pour toutes son auto-clarification ou bien la clarté restera-t-elle toujours comme un désir bloqué au stade de projet, sans cesse souhaitée, jamais assouvie ?
Dans la troisième partie de son Ethique, Spinoza écrit ceci : « L’homme ne se connaît lui-même que par les affections de son corps et leurs idées. Donc, lorsque l’esprit peut se considérer lui-même, par la même il passe, par l’hypothèse, à une perfection plus grande, c’est à dire qu’il est affecté de joie, et d’une joie d’autant plus grande qu’il peut s’imaginer lui-même et imagine sa puissance d’agir plus distinctement. » Ce qui différencie l’homme de l’animal réside dans sa capacité à user de sa capacité réflexive. Le choix qui est fait d’atteindre un niveau de conscience supérieure est loin d’être évident tant il est vrai que ce difficile exercice est épuisant. De fait, rare sont ceux qui font de l’introspection une règle de vie et de la conscience supérieure, leur unique idéal. On peut difficilement blâmer ceux qui se contente du minimum nécessaire à leur survie puisqu’il ne sont même pas conscient d’ « être » et encore moins de leur capacité à « se réfléchir ». Dans son tout premier livre, Sur les cimes du désespoir, Cioran à écrit : « Une constatation que je peux vérifier, à mon grand regret, à chaque instant : seuls sont heureux ceux qui ne pensent jamais, autrement dit ceux qui ne pensent que le stricte minimum nécessaire pour vivre. » Ce qui ne nous empêche pas pour autant de reconnaître le fait que l’égalité des hommes se limite à la dignité humaine, pour ne jamais atteindre celui de la conscience et de sa capacité introspective.
Contrairement à la démarche de Descartes, il n’est pas question d’user de ce processus pour savoir ce que nous sommes : Dieu est mort, Nietzsche est vivant. Nous sommes le produit de mutations biologiques comme tout ce qui vie sur cette planète. Et si la science permet de retracer fidèlement la chronologie des faits qui ont conduits à l’apparition de la vie humaine, rien ne vient expliquer la complexité du principe de la vie et de ses corolaires : sa partie matérielle, le corps, et sa partie immatérielle, la pensée. Quelque soit l’étendue des connaissances scientifiques, elles demeurent limitées et ne peuvent tout expliquer. Tous les scientifiques s’accordent à dire que lorsque la science à atteint ses limites et qu’elle ne parvient plus à remplir son office explicatif, toute les hypothèses doivent être envisagées y compris celles qui défient l’esprit le plus logique, rationnel et méthodique.
Demeure une question : quel est cet absolu qui hante ces lignes ? En ce qui me concerne, il procède d’une intuition qui pressent l’existence d’une puissance, d’une force, peut importe finalement le nom qu’on lui donne, et que celle-ci est à l’origine de toute chose. Il s’agit donc de parvenir à en déterminer la nature afin d’en maîtriser les secrets bien que leur appréhension soit réservée à un petit nombre d'initiés. La conscience humaine ainsi que sa capacité réflexive procède de cette force et il nous faut par tous les moyens parvenir à en saisir l’essence. On pensera à l’évangile de Thomas, un des manuscrits de Nag Hammadi : « Jésus disait : que celui qui cherche, soit toujours en quête jusqu'à ce qu’il trouve et quand il aura trouvé, il sera dans le trouble, ayant été troublé, il s’émerveillera, il règnera sur le Tout. (…) Ses disciples disaient : enseigne-nous le lieu où tu es. Il est nécessaire que nous le cherchions. Il leur dit : que celui qui a des oreilles, entende ! Il y a de la lumière à l’intérieur d’un homme de lumière, et il illumine le monde entier. S’il n’illuminait pas, quelles ténèbres ! ». Affranchi des dogmes et des croyances en tous genres qui la dénature, cette quête ne peut se départir totalement d’une certaine forme de mysticisme : cette attitude philosophique est davantage fondée sur le sentiment et l'intuition que sur la connaissance rationnelle mais c’est elle qui sert de moteur à notre quête. Paradoxalement, le seul chemin qui mène vers cet absolu est donc celui de la connaissance universelle puisqu’elle seule peut agir sur les êtres et les choses, cette envie de tout apprendre et de tout connaître demeure notre seul et unique guide. Une volonté s’inscrivant dans un schéma spirituel atemporelles, étranger au monde mais s’en nourrissant, l’intime conviction de jouir d’une faculté exceptionnelle en regard du petit nombre d’entre nous qui en sont dotés, la responsabilité qui nous incombe d’en faire usage et, de préférence, le plus éclairé possible, la certitude immuable du bien fondé de notre quête, tous ceci nous permet d’avancer chaque jour un peu plus, lentement mais surement.
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci pour tes textes, je les grignottes sans aucune autre forme de procès ( oui ce mélange de mots me paraît aussi curieux )
DiDi- Messages : 166
Date d'inscription : 24/02/2010
Age : 37
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Enchanté Athénaïs,
j'admire l'aisance avec laquelle tu mets en mots tes songes et tes reflexions, "affinités électives" me réfere à l'amour passionnel, c'est destructeur mais tentant. Je te ressens comme "une artiste maudite" contemporaine, en tout cas je suis receptive à ce que tu partage,et je te félicite et te remercie. C'est à travers tes textes que je fais ta connaissance et j'en redemande...
j'admire l'aisance avec laquelle tu mets en mots tes songes et tes reflexions, "affinités électives" me réfere à l'amour passionnel, c'est destructeur mais tentant. Je te ressens comme "une artiste maudite" contemporaine, en tout cas je suis receptive à ce que tu partage,et je te félicite et te remercie. C'est à travers tes textes que je fais ta connaissance et j'en redemande...
corail déraille- Messages : 9
Date d'inscription : 29/07/2010
Age : 40
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Athenaïs, y aura-t-il une suite aux "artisans de la conscience" ?
Bien à toi
Bien à toi
b&w- Messages : 446
Date d'inscription : 18/06/2010
Age : 57
Localisation : 37
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci B&W de m'avoir orienté sur ce post.
Merci Athenaîs pour le post sur les affinités électives.
quand on a connu cela on n'en sort jamais vraiment indemne, c'est une drogue qui détruit si on s'y accroche pour ressentir ce plaisir intense, cette volupté des sens...
mais elle détruit aussi lorsque l'on veut s'en sortir et se sevrer, car retourner ou se tourner vers la ''tranquillité fade des autres relations" peut faire regretter ces relations destructrices mais o combien vivantes et passionnantes...
Je vais le relire a tête reposée pour pouvoir l'imprégner et avoir une autre vision que celle que je m'étais imposée.
Merci Athenaîs pour le post sur les affinités électives.
quand on a connu cela on n'en sort jamais vraiment indemne, c'est une drogue qui détruit si on s'y accroche pour ressentir ce plaisir intense, cette volupté des sens...
mais elle détruit aussi lorsque l'on veut s'en sortir et se sevrer, car retourner ou se tourner vers la ''tranquillité fade des autres relations" peut faire regretter ces relations destructrices mais o combien vivantes et passionnantes...
Je vais le relire a tête reposée pour pouvoir l'imprégner et avoir une autre vision que celle que je m'étais imposée.
Invité- Invité
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci à toi Athénaïs pour ces affinités électives.
Je ne saurais en dire davantage en ce lieu, je suis touchée.
Je ne saurais en dire davantage en ce lieu, je suis touchée.
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
@ Didi: C'est pas le tout de grignoter, faut digérer aussi et surtout, ne pas prendre de poid.... Ne pas manger trop gras, trop sucré, trop salé...
@ highschool2005, Corail déraille, Diana: L'amour est une drogue douce le plus souvent... Des scientifiques ont prouvé que décrocher d'un amour passionnel provoquait sur le corps humain les mêmes effets que sur un toxico qui décroche de la cocaïne... La passion est tentante, c'est sûr... Mais elle ne peut, par essence, s'inscrire dans la durée. La mort peut seule l'inscrire dans l'éternité... Pour ma part, j'aspire de plus en plus à la quiétude et à la simplicité sans exclure pour autant toute forme de passion.
@ b&w: Il n'y aura pas de suite aux "artisans de la conscience". Je ne ressent pas, pour le moment, le besoin de développer plus avant. Cela dit, aucun de mes points de vues ne sont figés... Ma pensée étant en perpétuel évolution, j'écrirais peut-être un nouveau texte qu'il faudra lire à la lumière du précédent....
@ La Laie: Je suis touchée que tu le sois...
@ highschool2005, Corail déraille, Diana: L'amour est une drogue douce le plus souvent... Des scientifiques ont prouvé que décrocher d'un amour passionnel provoquait sur le corps humain les mêmes effets que sur un toxico qui décroche de la cocaïne... La passion est tentante, c'est sûr... Mais elle ne peut, par essence, s'inscrire dans la durée. La mort peut seule l'inscrire dans l'éternité... Pour ma part, j'aspire de plus en plus à la quiétude et à la simplicité sans exclure pour autant toute forme de passion.
@ b&w: Il n'y aura pas de suite aux "artisans de la conscience". Je ne ressent pas, pour le moment, le besoin de développer plus avant. Cela dit, aucun de mes points de vues ne sont figés... Ma pensée étant en perpétuel évolution, j'écrirais peut-être un nouveau texte qu'il faudra lire à la lumière du précédent....
@ La Laie: Je suis touchée que tu le sois...
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci Athénaïs.
Et je suis touché par tes écrits.
Et je suis touché par tes écrits.
b&w- Messages : 446
Date d'inscription : 18/06/2010
Age : 57
Localisation : 37
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Anniversaire
DiDi- Messages : 166
Date d'inscription : 24/02/2010
Age : 37
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Bon anniversaire Athénaïs
b&w- Messages : 446
Date d'inscription : 18/06/2010
Age : 57
Localisation : 37
zheibr- Messages : 1508
Date d'inscription : 15/06/2010
Age : 56
Localisation : kornog don
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Dites 33...bon anniversaire
Od@vie- Messages : 811
Date d'inscription : 03/08/2010
Localisation : somewhere over the rainbow
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Bien bel anniversaire marquise, toute la cour est rassemblée là et vous souhaite mille joies
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Happy Birthday!!
Super PY est rive- Messages : 4432
Date d'inscription : 09/10/2009
Age : 39
Localisation : environ par la
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Nouveau venu sur ce forum .. cela ne m'empêche pas de te souhaiter un très bon anniversaire Athénaïs
Eric
Eric
eric the guy- Messages : 236
Date d'inscription : 12/10/2010
Age : 54
Localisation : Ile de Fance (Les Ulis)
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Alors là, suis mortifiée... J'avais pas réalisé qu'on m'avait envoyé autant de messages de sympathie pour mon anniv... J'ai pas eu de notification par mail... Suis désolée...
Merci à tous !!!!
Merci à tous !!!!
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Qu'il fait bon vivre au travers du miroir préraphaélite.....
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Merci beaucoup d'y avoir pensé. Je ne suis plus sur le forum ces temps-ci. Ma vie vient de prendre un virage à 180°....
Bises à tous,
Athénaïs
Bises à tous,
Athénaïs
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
Age : 46
Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Lettre à un fantôme - Première partie (2011)
Il y a peu, j'ai été l'objet d'une agression psychologique. Pas physique, certes mais parfois, j'en viens à me demander si la violence verbale ne nous est pas plus préjudiciable que la violence physique En temps normal, je ne me serais pas autant formalisé de cette agression. Seulement voilà, j'ai pour son auteur respect et considération, le tout en proportion raisonnable. Quoique... Sa réaction n'était pas spontanée mais entrait dans le cadre d'une dynamique bien particulière: celle d'une amitié amoureuse. Je n'aurais pas dû m'inquiéter de savoir si cette "amitié avait des chances raisonnables de déboucher sur quelque chose de plus concret. En fait, je n'aurais pas dû poser la question par écrit. La réponse, naturellement, fut de même nature. Et, c'est bien connu, les écrits restes.
Pour m'opposer une fin de non recevoir, il m'expose ses griefs. Evidemment, il semblerait que je sois seule responsable de cette "impossibilité". Mais passons...
C'est parce que j'ai pour lui de la considération que, la détresse psychique initiale dépassée, je me suis posé la question de savoir si il n'y avait pas quand même un peu de vrai dans ce qu'il avait pu écrire.
Mais avant d’aborder ce qu’il pourrait y avoir de vraiment constructif dans sa réponse, je voudrais avant tout me libérer de la douleur qu'ont provoqué en moi ces petites remarques assassines qu'il me coûte de relever tant elles m'apparaissent mesquines. Et cela avec d'autant plus de tristesse que cette attitude ne lui ressemble pas... Il dit que ma famille, mon univers et mon passé m’emprisonne dans des chaînes alors qu'en ce qui le concerne, rien de tout cela ne peut avoir la moindre influence sur son quotidien. Mais combien de temps lui a-t-il fallu pour annoncer à sa mère et à sa sœur sa séparation d'avec la mère de ses enfants? Combien de fois m'a-t-il parlé de son père avec une admiration pour le moins prononcée? N'écrit-il pas l'histoire de sa famille à destination de ces enfants? Ne transpose-t-il pas son univers dans le présent par l'intermédiaire des jeux de rôle? Ne se rend-t-il pas à un salon médiéval parce qu'il affectionne l'univers médiéval fantastique?
Il dit pouvoir construire un univers tangible pour deux comme si je n’étais pas en mesure de participer à cette construction. Ais-je l'air d'être aussi faible que ça? Serait-il assez naïf, à moins qu'il ne s'agisse d'un excès d'égocentrisme, pour croire qu'un couple peut fonctionner réellement quand l'un protège l'autre en le maintenant sous cloche? Un couple, c'est à deux qu'on le construit, c'est du 50/50 sinon ça ne peut pas fonctionner. De la même manière, il dit que j'ai appelé de mes vœux la rencontre avec un homme qui m'aiderais ou qui me changerais. Je n'ai jamais dis attendre quelqu'un de ce genre. En revanche, j'ai dis attendre un homme qui contribuerait à mon apaisement et dont l'amour serait un levier que je serais seule à pouvoir actionner. Parce que se savoir aimer peut faire toute la différence. Et puis quel genre de femme a-t-il bien pu croiser dans sa vie pour penser que je ne puisse attendre d'un homme que d'être protégée comme une pauvre petite chose trop faible pour gérer sa vie? Comment peut-il croire que mes attentes en matière de conjoint se résume à avoir les pieds au chaud et un perroquet qui me sert de répétiteur? Moi qui n'attend d'un homme qu'un honnête et solide compagnon de route qui saura maintenir une émulation intellectuelle... Cette vision réductrice des attentes féminines en matière de couple me laisse pantoise... N'aurait-il partagé sa vie qu'avec des dindes jalouses et castratrices qui ne peuvent concevoir l'amour que sous la forme d'une relation fusionnelle et étouffante? Si c'est le cas, j'en suis profondément peiné pour lui car il passe alors à côté de quelque chose d'éminemment constructif pour l'âme humaine... Je n'appartiens pas à cette majorité de femme que je regroupe sous l'appellation de "dinde"; ces "nanas" qui semblent ne pouvoir organiser leur vie qu'autour de leur "mec", à mi-chemin entre le trio infernal "coiffeur-manucure-maquillage" et leur prochaine virée entre copine à l'occasion des soldes... Et quant elle décide d’avoir un enfant, il faut s’inquiéter encore plus. La maternité, c’est souvent pour ce type de femme un moyen pour exister aux yeux des autres : l’enfant est le témoin d’une vie de femme qui ne peut-être, dans notre société, accomplie qu’avec la maternité ; l’enfant sera une raison de vivre qui leur donnera l’impression d’être utile. Leur besoin d’enfant est éminemment narcissique. Combien de femme d’ailleurs envisage d’avoir un enfant pour élever une âme au sein des hommes… ? Non vraiment, n'a t-il pas compris que je n'étais pas ce genre de femme, que mes attentes en matière de couple étaient beaucoup plus noble et que je plaçais la barre beaucoup plus haut? N'a t-il pas compris que je n'avais que méfiance, voir mépris, pour la conception moderne du couple ? Ce qui m'effraie le plus dans les couples modernes et plus encore dans les couples qui se sont formé très jeune, c'est l'aspect fusionnel de la relation. On a l'impression que l'un ne peut pas vivre sans l'autre et que lorsque l'être aimé sort du champs visuel de son alter ego, il y a péril en la demeure... Faut-il manquer à ce point d'autonomie psychologique pour en arriver là ? Serait-ce une complète hérésie que d'envisager ne pas tout sacrifier au couple pour continuer à exister par soi-même ? Faut-il absolument, à partir du moment où l'on est en couple, tout envisager à deux ? Ne peut-on sauvegarder un jardin secret ? Je suis horrifiée par ces amours qui conduisent à la négation de soi et à la construction d'un mirage où l'on croit exister à travers l'autre et qui, par là même, induit le spectre de la possessivité puisqu’on fait de l’autre un appendice de soi-même. Il est évidemment impossible au couple d'évoluer dans ces conditions puisque l'objet aimé n'est envisagé que sous une forme figée, ô combien sécurisante, illustrant en cela la cristallisation stendhalienne. C’est cette cristallisation qui nous amène peu à peu à considérer l'autre comme un étranger. On s’accroche désespérément à ce produit de notre imagination parce que la sécurité, c’est l’immuabilité. On oublie trop souvent que si l'on peut se voiler la face et nier l’évidence, à un moment où à un autre la réalité se rappelle toujours à notre bon souvenir. C'est pour cette raison que je pense que les couples qui se sont formé tardivement ont plus de chance de perdurer. Avant trente ans, la personnalité d'un individus n'est pas stable. Au contraire, elle est en pleine évolution. Avant trente ans, il est très difficile de savoir ce que deviendra réellement un individu. Or, la plupart des couples modernes se forment entre vingt-cinq et trente ans et le premier enfant arrive le plus souvent avant trente ans. Résultat, c'est dans la décennie qui suit, entre trente et quarante ans, qu'on constate le plus fort taux de séparartion. Mais l'age n'est pas le seul paramètre qui peut mettre en péril l'avenir d'un couple. Les raisons qui poussent deux êtres à s'unir sont souvent obscures et pour être honnête, rare sont ceux qui se posent les bonnes questions au bon moment, c'est à dire avant qu'il ne soit trop tard. Or, souvent la force des sentiments eclipse un paramètre fondamental, celui de la complémentarité. La complémentarité, c'est ce qui permet à un couple de survivre au delà des trois années pendant lesquelles nos hormones font le boulot de consolidation à notre place... Or, le plus fort taux de séparation intervient au bout de cinq ans d'union et il faut en moyenne deux ans pour que naissent les divergences qui conduisent à une séparation. Trois et deux, cinq, le compte est bon... Tenir compte de la complémentarité dès le début d'une relation, c'est l'assurance qu'on n'aliénera pas à l'autre une partie de soi et inversement, qu'on ne cherchera pas à le modeler à son image pour mieux s’y retrouver mais qu'au contraire, on le respectera dans sa singularité, qu'on aura assez d'égard pour épargner son jardin secret, qu'on considèrera cette part de mystère comme un cadeau et non comme l'ultime trahison; mais surtout, qu'on l'aimera pour ses qualités et plus encore, pour ses défauts. A mon sens, aimer vraiment un être, c’est ne pas chercher chez lui un double de soi pour mieux se contempler mais un révélateur de soi-même. Il dit que nos histoires sont très différentes et que nous appartenons à des mondes sans liens. N' a t-il pas compris que, précisément, je ne souhaitais pas rencontrer quelqu'un de mon monde et encore moins quelqu'un qui me ressemble tant par le caractère que par l'expérience? Je n'ai aucune envie de partager ma vie avec un double de moi-même. Je ne vois pas l'intérêt d'une telle disposition dans le couple. En revanche, il m'apparait comme incontournable qu'un couple partage les même valeurs, les mêmes principes. Et puis, la complémentarité, c'est aussi un moyen d’éradiquer la jalousie au sein du couple, indice d’immaturité flagrante, non par manque d'intérêt mais parce que la confiance et le degré de compréhension sont tels qu'il serait absurde de douter de l'autre. J'ai plaisir à croire que ce mode de pensée évite également les écueils de l'aspect fusionnel que prennent souvent les relations amoureuses moderne. Alors bien sur, choisir de construire son couple sur le respect de l'autre et de soi nécessite un minimum de discipline et peut parfois être épuisant tant que l'exercice n'est pas rodé. Mais une fois acquis, il accorde aux individus qui forment un couple, non seulement une liberté inaliénable mais également la possibilité de laisser s'exprimer l’individualité de chacun sans pour autant mettre en danger ce mouvement commun sans lequel un couple n'en serait pas un.
Il dit que je saute le présent, que je vis dans le passé en ayant à peine une pensée pour le futur. Là encore serait-il à ce point naïf? J'ai cessé de vivre le 1er novembre 2009 lorsque j'ai appris que ma mère était condamnée. Je l'ai assisté dans la maladie, je l'ai accompagné jusqu'à la mort. Je lui ai ainsi rendu ce qu'elle m'avait donné pendant de si nombreuses années. Et depuis son décès, je reconstruis ma vie. Sait-il seulement que j'avais déjà repéré l'appartement que je souhaitais acquérir avant le décès de ma mère et qu'il m'a fallu à peine trois jours après la mise en terre de ces cendres pour mettre en vente la maison de mes parents ? A-t-il seulement une idée du nombre de fois ou, pendant ces longs mois de calvaire, je me suis dit que ma mère ne mourrait pas assez vite? Horrible confession que voilà... J'avais abandonné tous mes rêves, renoncé à toute espérance.... Je n'aspirais qu'à reprendre le court de ma vie. Quant Sébastien m'a rencontrée, j'étais déjà embourbée dans cette situation depuis de longs mois. Et je savais que ce serait encore trop long à mon goût. En revanche, j'étais sur d'une chose: cette situation était provisoire, transitoire. Sommes toute, il n'a aucune idée de qui j'étais avant, de ce que je faisais et quels étaient mes projets. Et, il n'a, encore aujourd'hui, aucune idée de ce que sera ma vie quand je l'aurais reprise, ce qui est prévu dès janvier prochain.
Il se dit frustré de voir la situation stagner. Mais veut-il vraiment qu'elle évolue vers quelque chose de concret? N'aurait-il pas été plus constructif d'aborder tous ces problèmes de manière franche et directe au lieu de tergiverser sous le prétexte fallacieux de ne pas me heurter? Il parle de "notre histoire"... Ma plus grande déception serait qu'avec le temps nous nous embourbions dans une relation amicale qui n'en sera jamais vraiment une et d'ainsi troquer le feu contre les cendres... Alors bien sur, j'ai conscience des obstacles qu'il est obligé de franchir tant psychologiquement que physiquement. On ne se remet pas en seulement quelques mois d'une trahison comme celle dont il a été la victime. Et je suppose que dans sa situation, je ne serais pas beaucoup plus disposée à entendre parler de relation amoureuse et à faire à nouveau confiance. Mais quand même... Un tel degrés de complicité est rare et je ne peux pas m'empêcher de penser à ce que nous pourrions accomplir si nous faisons un bout de chemin ensemble. Et c'est ce qui me fait malgré tout garder espoir et tenir...
Mais revenons à ce qu’il y a de constructif dans ces propos : d'une manière générale, son propos ou, pour être plus précise, ces griefs, tournent tous autour de mon rapport à l'histoire, la petite comme la grande. En ce qui concerne la petite histoire, rien de très pertinent à dire. J'ai une famille certes un peu compliqué et qui compte un nombre de disparu peut-être un chouillat au dessus de la moyenne mais, sommes toutes, rien de très original. Le problème réside en fait dans la relation que nous entretenons avec nos morts. Pour être franche, cette famille est une véritable fabrique à fantômes. Et tout le monde semble s'en accommoder. Et moi, est-ce que je m'en accommode? Serait-il envisageable que je me traîne une série de boulets dont j'aurais du mal à reconnaître l'existence? Possible. J'imagine que quand il parle de fantôme, il parle de celui de mon père. Et il a raison. Force m'est de reconnaître que ce fantôme là est certainement le plus abouti de tous. Posons le décor. Je perds mon père à 14 ans. Je lui ressemble physiquement et très probablement, psychologiquement. Ma mère est veuve pour la seconde fois. Veuve inconsolable. Je deviens donc un appendice de mon père et son unique raison de vivre. Or, il se trouve que suite au choc provoqué par le décès de mon père, je développe progressivement une amnésie partielle. Petit à petit, je ne me souviens plus de lui. Ma mère compense, l'entourage aussi. Résultat, lorsqu'aujourd'hui j'évoque mon père, c'est en faisant appel a des témoignages extérieurs à ma perception. Ce que je sais de mon père ne m'appartient pas. Ma mère m'a pendant près de vingt ans entretenu dans une dynamique du souvenir. J'étais la fille de mon père. Je lui ressemblais forcément. Alors que j’entrais dans une période cruciale dans le développement de mon identité, l’adolescence, j’ai développé une personnalité quasi hybride : je me suis construite autour de ce que l’on attendait de moi en tant que fille de mon père. J’ai alors cherché le moindre indice le concernant pour savoir comment me conduire et où aller. Je voulais me rapprocher le plus de lui. Qui aurais-je été si mon père n’était pas mort et si j’avais grandi normalement ? Je ne le saurais probablement jamais. Maman a progressivement élevé mon père à l'état de mythe, brisant petit à petit tous liens avec la réalité. Ces liens, peut-être étaient-ils toujours présents pour elle mais pour moi, ils disparurent à jamais. Je ne juge pas. Je ne lui en veux pas. Je sais qu'elle a entretenu ce mythe dans l'espoir de créer des repères compensatoires et de fait, l'image que j'ai de mon père m'a poussée à me dépasser. Mais ce faisant, elle a cristallisée le processus du deuil que j'aurais du accomplir. Maman a attendu la mort pendant presque vingt ans avant de pouvoir enfin rejoindre mon père. J'ai attendu avec elle et aujourd'hui, je mène de front deux deuils, celui de ma mère et celui de mon père.... Depuis la disparition de maman, j'ai enfin pu ouvrir les fenêtres et aérer... Mais il a fallu qu'elle meure pour ça et c'est bien cher payé. Il ne me reste plus désormais que mon intime conviction: mes parents avaient tous deux une personnalité exceptionnelle et je suis fière d'eux.
Pour m'opposer une fin de non recevoir, il m'expose ses griefs. Evidemment, il semblerait que je sois seule responsable de cette "impossibilité". Mais passons...
C'est parce que j'ai pour lui de la considération que, la détresse psychique initiale dépassée, je me suis posé la question de savoir si il n'y avait pas quand même un peu de vrai dans ce qu'il avait pu écrire.
Mais avant d’aborder ce qu’il pourrait y avoir de vraiment constructif dans sa réponse, je voudrais avant tout me libérer de la douleur qu'ont provoqué en moi ces petites remarques assassines qu'il me coûte de relever tant elles m'apparaissent mesquines. Et cela avec d'autant plus de tristesse que cette attitude ne lui ressemble pas... Il dit que ma famille, mon univers et mon passé m’emprisonne dans des chaînes alors qu'en ce qui le concerne, rien de tout cela ne peut avoir la moindre influence sur son quotidien. Mais combien de temps lui a-t-il fallu pour annoncer à sa mère et à sa sœur sa séparation d'avec la mère de ses enfants? Combien de fois m'a-t-il parlé de son père avec une admiration pour le moins prononcée? N'écrit-il pas l'histoire de sa famille à destination de ces enfants? Ne transpose-t-il pas son univers dans le présent par l'intermédiaire des jeux de rôle? Ne se rend-t-il pas à un salon médiéval parce qu'il affectionne l'univers médiéval fantastique?
Il dit pouvoir construire un univers tangible pour deux comme si je n’étais pas en mesure de participer à cette construction. Ais-je l'air d'être aussi faible que ça? Serait-il assez naïf, à moins qu'il ne s'agisse d'un excès d'égocentrisme, pour croire qu'un couple peut fonctionner réellement quand l'un protège l'autre en le maintenant sous cloche? Un couple, c'est à deux qu'on le construit, c'est du 50/50 sinon ça ne peut pas fonctionner. De la même manière, il dit que j'ai appelé de mes vœux la rencontre avec un homme qui m'aiderais ou qui me changerais. Je n'ai jamais dis attendre quelqu'un de ce genre. En revanche, j'ai dis attendre un homme qui contribuerait à mon apaisement et dont l'amour serait un levier que je serais seule à pouvoir actionner. Parce que se savoir aimer peut faire toute la différence. Et puis quel genre de femme a-t-il bien pu croiser dans sa vie pour penser que je ne puisse attendre d'un homme que d'être protégée comme une pauvre petite chose trop faible pour gérer sa vie? Comment peut-il croire que mes attentes en matière de conjoint se résume à avoir les pieds au chaud et un perroquet qui me sert de répétiteur? Moi qui n'attend d'un homme qu'un honnête et solide compagnon de route qui saura maintenir une émulation intellectuelle... Cette vision réductrice des attentes féminines en matière de couple me laisse pantoise... N'aurait-il partagé sa vie qu'avec des dindes jalouses et castratrices qui ne peuvent concevoir l'amour que sous la forme d'une relation fusionnelle et étouffante? Si c'est le cas, j'en suis profondément peiné pour lui car il passe alors à côté de quelque chose d'éminemment constructif pour l'âme humaine... Je n'appartiens pas à cette majorité de femme que je regroupe sous l'appellation de "dinde"; ces "nanas" qui semblent ne pouvoir organiser leur vie qu'autour de leur "mec", à mi-chemin entre le trio infernal "coiffeur-manucure-maquillage" et leur prochaine virée entre copine à l'occasion des soldes... Et quant elle décide d’avoir un enfant, il faut s’inquiéter encore plus. La maternité, c’est souvent pour ce type de femme un moyen pour exister aux yeux des autres : l’enfant est le témoin d’une vie de femme qui ne peut-être, dans notre société, accomplie qu’avec la maternité ; l’enfant sera une raison de vivre qui leur donnera l’impression d’être utile. Leur besoin d’enfant est éminemment narcissique. Combien de femme d’ailleurs envisage d’avoir un enfant pour élever une âme au sein des hommes… ? Non vraiment, n'a t-il pas compris que je n'étais pas ce genre de femme, que mes attentes en matière de couple étaient beaucoup plus noble et que je plaçais la barre beaucoup plus haut? N'a t-il pas compris que je n'avais que méfiance, voir mépris, pour la conception moderne du couple ? Ce qui m'effraie le plus dans les couples modernes et plus encore dans les couples qui se sont formé très jeune, c'est l'aspect fusionnel de la relation. On a l'impression que l'un ne peut pas vivre sans l'autre et que lorsque l'être aimé sort du champs visuel de son alter ego, il y a péril en la demeure... Faut-il manquer à ce point d'autonomie psychologique pour en arriver là ? Serait-ce une complète hérésie que d'envisager ne pas tout sacrifier au couple pour continuer à exister par soi-même ? Faut-il absolument, à partir du moment où l'on est en couple, tout envisager à deux ? Ne peut-on sauvegarder un jardin secret ? Je suis horrifiée par ces amours qui conduisent à la négation de soi et à la construction d'un mirage où l'on croit exister à travers l'autre et qui, par là même, induit le spectre de la possessivité puisqu’on fait de l’autre un appendice de soi-même. Il est évidemment impossible au couple d'évoluer dans ces conditions puisque l'objet aimé n'est envisagé que sous une forme figée, ô combien sécurisante, illustrant en cela la cristallisation stendhalienne. C’est cette cristallisation qui nous amène peu à peu à considérer l'autre comme un étranger. On s’accroche désespérément à ce produit de notre imagination parce que la sécurité, c’est l’immuabilité. On oublie trop souvent que si l'on peut se voiler la face et nier l’évidence, à un moment où à un autre la réalité se rappelle toujours à notre bon souvenir. C'est pour cette raison que je pense que les couples qui se sont formé tardivement ont plus de chance de perdurer. Avant trente ans, la personnalité d'un individus n'est pas stable. Au contraire, elle est en pleine évolution. Avant trente ans, il est très difficile de savoir ce que deviendra réellement un individu. Or, la plupart des couples modernes se forment entre vingt-cinq et trente ans et le premier enfant arrive le plus souvent avant trente ans. Résultat, c'est dans la décennie qui suit, entre trente et quarante ans, qu'on constate le plus fort taux de séparartion. Mais l'age n'est pas le seul paramètre qui peut mettre en péril l'avenir d'un couple. Les raisons qui poussent deux êtres à s'unir sont souvent obscures et pour être honnête, rare sont ceux qui se posent les bonnes questions au bon moment, c'est à dire avant qu'il ne soit trop tard. Or, souvent la force des sentiments eclipse un paramètre fondamental, celui de la complémentarité. La complémentarité, c'est ce qui permet à un couple de survivre au delà des trois années pendant lesquelles nos hormones font le boulot de consolidation à notre place... Or, le plus fort taux de séparation intervient au bout de cinq ans d'union et il faut en moyenne deux ans pour que naissent les divergences qui conduisent à une séparation. Trois et deux, cinq, le compte est bon... Tenir compte de la complémentarité dès le début d'une relation, c'est l'assurance qu'on n'aliénera pas à l'autre une partie de soi et inversement, qu'on ne cherchera pas à le modeler à son image pour mieux s’y retrouver mais qu'au contraire, on le respectera dans sa singularité, qu'on aura assez d'égard pour épargner son jardin secret, qu'on considèrera cette part de mystère comme un cadeau et non comme l'ultime trahison; mais surtout, qu'on l'aimera pour ses qualités et plus encore, pour ses défauts. A mon sens, aimer vraiment un être, c’est ne pas chercher chez lui un double de soi pour mieux se contempler mais un révélateur de soi-même. Il dit que nos histoires sont très différentes et que nous appartenons à des mondes sans liens. N' a t-il pas compris que, précisément, je ne souhaitais pas rencontrer quelqu'un de mon monde et encore moins quelqu'un qui me ressemble tant par le caractère que par l'expérience? Je n'ai aucune envie de partager ma vie avec un double de moi-même. Je ne vois pas l'intérêt d'une telle disposition dans le couple. En revanche, il m'apparait comme incontournable qu'un couple partage les même valeurs, les mêmes principes. Et puis, la complémentarité, c'est aussi un moyen d’éradiquer la jalousie au sein du couple, indice d’immaturité flagrante, non par manque d'intérêt mais parce que la confiance et le degré de compréhension sont tels qu'il serait absurde de douter de l'autre. J'ai plaisir à croire que ce mode de pensée évite également les écueils de l'aspect fusionnel que prennent souvent les relations amoureuses moderne. Alors bien sur, choisir de construire son couple sur le respect de l'autre et de soi nécessite un minimum de discipline et peut parfois être épuisant tant que l'exercice n'est pas rodé. Mais une fois acquis, il accorde aux individus qui forment un couple, non seulement une liberté inaliénable mais également la possibilité de laisser s'exprimer l’individualité de chacun sans pour autant mettre en danger ce mouvement commun sans lequel un couple n'en serait pas un.
Il dit que je saute le présent, que je vis dans le passé en ayant à peine une pensée pour le futur. Là encore serait-il à ce point naïf? J'ai cessé de vivre le 1er novembre 2009 lorsque j'ai appris que ma mère était condamnée. Je l'ai assisté dans la maladie, je l'ai accompagné jusqu'à la mort. Je lui ai ainsi rendu ce qu'elle m'avait donné pendant de si nombreuses années. Et depuis son décès, je reconstruis ma vie. Sait-il seulement que j'avais déjà repéré l'appartement que je souhaitais acquérir avant le décès de ma mère et qu'il m'a fallu à peine trois jours après la mise en terre de ces cendres pour mettre en vente la maison de mes parents ? A-t-il seulement une idée du nombre de fois ou, pendant ces longs mois de calvaire, je me suis dit que ma mère ne mourrait pas assez vite? Horrible confession que voilà... J'avais abandonné tous mes rêves, renoncé à toute espérance.... Je n'aspirais qu'à reprendre le court de ma vie. Quant Sébastien m'a rencontrée, j'étais déjà embourbée dans cette situation depuis de longs mois. Et je savais que ce serait encore trop long à mon goût. En revanche, j'étais sur d'une chose: cette situation était provisoire, transitoire. Sommes toute, il n'a aucune idée de qui j'étais avant, de ce que je faisais et quels étaient mes projets. Et, il n'a, encore aujourd'hui, aucune idée de ce que sera ma vie quand je l'aurais reprise, ce qui est prévu dès janvier prochain.
Il se dit frustré de voir la situation stagner. Mais veut-il vraiment qu'elle évolue vers quelque chose de concret? N'aurait-il pas été plus constructif d'aborder tous ces problèmes de manière franche et directe au lieu de tergiverser sous le prétexte fallacieux de ne pas me heurter? Il parle de "notre histoire"... Ma plus grande déception serait qu'avec le temps nous nous embourbions dans une relation amicale qui n'en sera jamais vraiment une et d'ainsi troquer le feu contre les cendres... Alors bien sur, j'ai conscience des obstacles qu'il est obligé de franchir tant psychologiquement que physiquement. On ne se remet pas en seulement quelques mois d'une trahison comme celle dont il a été la victime. Et je suppose que dans sa situation, je ne serais pas beaucoup plus disposée à entendre parler de relation amoureuse et à faire à nouveau confiance. Mais quand même... Un tel degrés de complicité est rare et je ne peux pas m'empêcher de penser à ce que nous pourrions accomplir si nous faisons un bout de chemin ensemble. Et c'est ce qui me fait malgré tout garder espoir et tenir...
Mais revenons à ce qu’il y a de constructif dans ces propos : d'une manière générale, son propos ou, pour être plus précise, ces griefs, tournent tous autour de mon rapport à l'histoire, la petite comme la grande. En ce qui concerne la petite histoire, rien de très pertinent à dire. J'ai une famille certes un peu compliqué et qui compte un nombre de disparu peut-être un chouillat au dessus de la moyenne mais, sommes toutes, rien de très original. Le problème réside en fait dans la relation que nous entretenons avec nos morts. Pour être franche, cette famille est une véritable fabrique à fantômes. Et tout le monde semble s'en accommoder. Et moi, est-ce que je m'en accommode? Serait-il envisageable que je me traîne une série de boulets dont j'aurais du mal à reconnaître l'existence? Possible. J'imagine que quand il parle de fantôme, il parle de celui de mon père. Et il a raison. Force m'est de reconnaître que ce fantôme là est certainement le plus abouti de tous. Posons le décor. Je perds mon père à 14 ans. Je lui ressemble physiquement et très probablement, psychologiquement. Ma mère est veuve pour la seconde fois. Veuve inconsolable. Je deviens donc un appendice de mon père et son unique raison de vivre. Or, il se trouve que suite au choc provoqué par le décès de mon père, je développe progressivement une amnésie partielle. Petit à petit, je ne me souviens plus de lui. Ma mère compense, l'entourage aussi. Résultat, lorsqu'aujourd'hui j'évoque mon père, c'est en faisant appel a des témoignages extérieurs à ma perception. Ce que je sais de mon père ne m'appartient pas. Ma mère m'a pendant près de vingt ans entretenu dans une dynamique du souvenir. J'étais la fille de mon père. Je lui ressemblais forcément. Alors que j’entrais dans une période cruciale dans le développement de mon identité, l’adolescence, j’ai développé une personnalité quasi hybride : je me suis construite autour de ce que l’on attendait de moi en tant que fille de mon père. J’ai alors cherché le moindre indice le concernant pour savoir comment me conduire et où aller. Je voulais me rapprocher le plus de lui. Qui aurais-je été si mon père n’était pas mort et si j’avais grandi normalement ? Je ne le saurais probablement jamais. Maman a progressivement élevé mon père à l'état de mythe, brisant petit à petit tous liens avec la réalité. Ces liens, peut-être étaient-ils toujours présents pour elle mais pour moi, ils disparurent à jamais. Je ne juge pas. Je ne lui en veux pas. Je sais qu'elle a entretenu ce mythe dans l'espoir de créer des repères compensatoires et de fait, l'image que j'ai de mon père m'a poussée à me dépasser. Mais ce faisant, elle a cristallisée le processus du deuil que j'aurais du accomplir. Maman a attendu la mort pendant presque vingt ans avant de pouvoir enfin rejoindre mon père. J'ai attendu avec elle et aujourd'hui, je mène de front deux deuils, celui de ma mère et celui de mon père.... Depuis la disparition de maman, j'ai enfin pu ouvrir les fenêtres et aérer... Mais il a fallu qu'elle meure pour ça et c'est bien cher payé. Il ne me reste plus désormais que mon intime conviction: mes parents avaient tous deux une personnalité exceptionnelle et je suis fière d'eux.
Athénaïs- Messages : 61
Date d'inscription : 31/10/2009
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Localisation : CAEN
Re: Le petit monde désenchanté d'Athénaïs
Lettre à un fantôme - Seconde partie (2011)
Cependant, je suis lucide, je sais que, vu de l'extérieur, le souvenir de mon père peut apparaître comme occupant une place envahissante dans ma vie. Et c'est certainement le cas. Mon père incarne pour moi l'excellence à bien des niveaux. C'est peut-être exagéré mais cela m'a poussé et me pousse encore aujourd'hui à viser toujours plus haut. Or, dans la réponse que Sébastien m'a faite, sa réaction face à cette dimension de ma personnalité me laisse supposée qu'il pourrait se sentir menacé par l'admiration que je porte à mon père. Je n'ai jamais cherché mon père dans les hommes que j'ai aimé. La seule chose que je cherche, c'est l'émulation intellectuelle. Alors évidemment, ce besoin d'émulation intellectuelle m'a été transmise par mon père mais l'analogie s'arrête là. Mon père reste à sa place de père et mon idéal masculin, si tant est que j'en ai un, n'a rien à voir avec l'idéal paternel. Rien, de toute manière, ne justifie que j'annihile l'affection que j'ai pour lui sous prétexte qu'il froisse l'ego d'un homme susceptible de jouer un rôle dans ma vie. Ce n'est pas une compétition. Chacun à une place bien déterminée et il n'est pas question de faire un mélange des genres.
En ce qui concerne la famille, tant que mon père était en vie, il n'y eu pas de véritable problème. Il opposait à la pression familiale la force de l'inertie. Tant qu'on ne prête pas d'importance à une chose, elle ne peut raisonnablement pas constituer un problème. Mais après sa mort, les choses on radicalement changée. Ma mère de retrouva seule avec une gamine de 14 ans. C'était son deuxième veuvage. A part moi, il ne lui restait plus que sa famille dont l'histoire commença progressivement à envahir notre vie. Ma mère n'avait plus que moi comme seul interlocuteur quotidien. Ses peines familiales sont devenues miennes, ses frustration aussi. J'ai progressivement été mise dans la confidence, on m'a fait part d'évènements et de situations familiales qui ne me concernaient nullement et dont j'aurais du ne jamais avoir connaissance. Ma grand-mère, elle aussi, a beaucoup contribué à cette situation. Dernière de ces petits enfants, elle me considérait comme sa quatrième fille et a pris grande part à mon éducation. Elle a commencée de manière tout a fait informelle à me raconter l'histoire de la famille et tant que ces récits se sont bornés à d'édifiantes chroniques témoignant de la bravoure familiale, il n'y avait pas grand chose à redire. Mais plus je grandissais et plus les confidences devenaient sensibles. J'ai été entraînée dans une spirale de rancœur dont l'origine remontait souvent à une époque où je n'étais même pas née. On m'a souvent demandé de prendre partie, d'avoir une opinion, en bref de porter un jugement sur des situations qui m'étaient totalement étrangère. Il se trouve que j'ai été longtemps tiraillée entre le devoir de respecter ma famille que ma transmis ma mère et l'envie de tous les envoyé chier.... que m'a transmis mon père !!! Il faut savoir que je n'ai pas le sens de la famille mais que j'y est été contrainte et d’autant plus depuis que maman est tombé malade et aussi depuis son décès. J'étais seule. J'ai trouvé de l'aide là ou elle se trouvait. Aujourd'hui, je suis plus obligé de me plier à ces simagrées et je ne m'y plierais plus désormais.
Il demeure un dernier détail lier à la notion de famille. Celui de la meilleure amie de ma mère que je considère comme une tante et que je nomme par cette terminologie parce qu'elle m'a vu naître. Là on aborde un autre problème, celui de l'origine de mon milieu social. Ma famille est d'extraction plus que très simple et cela des deux côtés. Mais mes parents ont su s'élever dans la société et ont fréquenté des milieux complètement différents de celui de leurs origines. La meilleure amie de ma mère est issue d'une famille fortunée qui obéit à des codes très particulier propre à un milieu lui-même très particulier. Mes parents m'ont élevée dans ces milieux là, à la fois riche et ayant un accès illimitée à la culture et à l'intellect sans être pour autant des intellectuels. J'en ai énormément souffert. Les lois liées à l'apparence, celles qui régissent les relations sociale et bien d'autres encore toute plus absurdes et arbitraires les unes que les autres. Et aujourd'hui encore, je n'ai pas réglé tout à fait mes comptes à ce niveau là. Mais j'ai quand même fait beaucoup de chemin. En réalité, mon père m'a appris à tirer le meilleur de tout allant parfois même jusqu'à me conseiller de m'en servir. Ce que je fais. J'ai appris dans ces milieux là les arts de la table qu'il s'agisse de cuisine ou de décoration. J'y ai aussi appris l'amour des belles choses. Et je ne considère pas cela comme une tare ou une empreinte honteuse. Je considère que ce raffinement et se savoir-vivre on su m'ouvrir de nombreuses portes et m'attacher des relations qui me sont encore aujourd'hui très utile. Car, c'est aussi un milieu où l'on se fait des relations... et je m'en sers. Tous cela a beaucoup d'importance dans ma manière de vivre. Certes. Mais ça ne reflète en rien ma nature intérieure. Je demeure en perpétuel porta faux entre la simplicité dont mes parents faisaient preuve et le snobisme des milieux que j'ai et que je fréquente quoique de manière de plus en plus sporadique. On en revient toujours à la mort de mon père. Papa voulait faire de moi un esprit libre. Et comme tout esprit libre, je devais pouvoir évoluer n'importe où et dans n'importes quelles circonstances. La connaissance de ces milieux là, et de manière générale, de tous les milieux, était nécessaire à ces yeux. Mais ce n'était pas une fin en soit, loin de là. A sa mort, nous avons commencé à fréquenter presqu'exclusivement des gens que ma mère pensait être de la même classe sociale et elle voulait que cette classe soit la plus élevée possible. Elle voulait que j'évolue au contact d'un "mode de vie" bien particulier. Il y avait certainement de sa part une forme de snobisme quoiqu'elle n'ait jamais été méprisante avec qui que ce soit. Bien au contraire, elle se raillait elle-même allant parfois jusqu'à faire preuve d'une implacable objectivité qui la conduisait à porté un jugement souvent ironique sur les gens que nous fréquentions. En réalité, maman était, d'un côté, très lucide et de l'autre, elle voulait m'offrir le maximum de chance ainsi qu'une certaine sécurité que l'on ne trouve que dans un certains type de milieu. Mais je dois reconnaître que si cette éducation m'a ouverte beaucoup de portes, elle m'en a fermé aussi beaucoup tout en contribuant à alimenter un mal être dont j'ai du mal à me défaire.
En ce qui concerne la grande histoire, l'argumentation est tout autre. Et surtout plus inquiétante. Je suis historienne de l'art. L'histoire et l'art, c'est mon fond de commerce, c'est surtout ma passion. Or, il me reproche cet intérêt qu'il juge trop prégnant dans ma vie quotidienne. Oserais-je dire que rejeter ma passion pour l'histoire, c'est me rejeter tout court? Mais probablement le sait-il... Mon métier dit-il, est en "stase". Ce terme peu banal semble avoir beaucoup d'importance pour lui. Mais j'ignore réellement ce qu'il entend par là. Vérification faite dans un dictionnaire réputé, voici les trois définitions possible du terme "stase": 1°/ Se dit de la lenteur ou arrêt de la circulation sanguine ou de l'écoulement d'un liquide ou d'une matière organique; 2°/ Se dit d'un processus économique supposé par Freud comme pouvant être à l'origine de l'entrée dans la névrose de la psychose: la libido qui ne trouve plus de voie vers la décharge s'accumule sur des formations intrapsychiques; l'énergie ainsi accumulée trouvera son utilisation dans la constitution des symptômes`` ; 3°/ Au figuré, se dit d'une cessation d'activité.
Si l'on omet la théorie freudienne qui n'a pas grand chose à voir avec notre propos, je pense que le terme "stase" peu recouvrir les réalités suivantes: stagnation, immobilité, inaction, inertie, ralentissement, torpeur, passivité, lâcheté, indolence... Pour ma part, je privilégierais le synonyme de " stagnation" sans perdre de vue les nuances sous-entendues par le reste des autres synonymes.
Dire de mon métier qu'il est en "stase" revient donc à dire que la recherche en histoire, et histoire de l'art à fortiori, est une activité stagnante. On peut se demander quel est le référentiel de base, l'étalon, qui permet de la qualifier de stagnante. Car, pour que quelque chose stagne, il faut forcément qu'autre chose soit en activité. Sans référentiel, pas d'indice de mouvement... ou, par extension, d'absence de mouvement. Il faut donc un référentiel: dans le cas présent, je pense qu'il s'agit, entre autre, de la temporalité de l'existence humaine ou pour faire docte, la question métaphysique de l'existence spatio-temporelle du sujet conscient de sa finitude. Or, le passé est immobile dans le temps, il est figé, inactif. Le présent en revanche s'inscrit dans une immédiateté temporelle. On vit physiquement le présent; c'est chose impossible avec le passé. Il existe probablement un autre référentiel, celui de l'impact de l'individu sur son environnement et sur son temps. A priori, on pourrait penser qu’étudier l’histoire, travailler sur un sujet en rapport avec le passé soit incompatible avec la vie dans toute son immédiateté. Il est effectivement assez difficile de démontrer de manière immédiatement évidente les implications que l'étude d'un passé révolu peut avoir sur le présent et son actualité. Il peut apparaître encore plus hasardeux d’envisager que l’étude du passé puisse aider à comprendre l’actualité et contribuer à infléchir le cours des évènements à venir. Après tout, le passé appartient au passé ; seul le présent nous appartient. Quant au futur, il se construit à la faveur de notre présent. Si l’on adopte ce point de vue, évidemment, le passé ne semble pouvoir jouer aucun rôle dans l’implication d’un individu dans son présent et à fortiori dans son futur. Oui, mais…Penser ainsi, c’est sous-estimer ce que l’histoire peut nous enseigner. Et je ne peux pas croire qu'il est la vue aussi courte. Cela non plus, ça ne lui ressemble pas. « Your past does not have to define your future but you have to remember past to built your future. » : votre passé ne doit pas définir votre futur mais vous devez vous souvenir du passé pour construire votre futur. En résumé, si notre passé individuel, la petite histoire, à un impact le plus souvent inopérant voire préjudiciable sur notre présent, le passé d’une manière générale, la grande histoire, éclaire notre présent et contribue donc à construire le futur.
Si l’on me demandait quel impact je souhaite avoir sur mon environnement, je pense que j’évoquerais immédiatement la communication non verbale et en particulier tout ce qui concerne la communication instinctivement et instantanément intelligibles par la connaissance de signe commun ou d’une culture partagée. En bref, je voudrais faire la guerre aux codes sociaux et à l’acquis. Tordre le cou aux apparences… Les socialisations collectives humaines sont des phénomènes à double tranchant : d’un côté, ils permettent à un individus de se civiliser, de passer de l’état d’animal à celui d’homme ; de l’autre, il enferme l’individus dans un processus où son groupe d’appartenance deviens un vecteur de pression qui le pousse à la conformité. Les « apparences » constitues un ensemble de règles auxquelles nous obéissons le plus souvent de manière instinctive. Ces règles contribues à creuser un fossé entre les différents groupes sociaux et donc entre les hommes dans leurs liens interpersonnels. Je ne condamne pas l’usage des codes sociaux d’une manière générale mais j’en préconise un usage maîtrisé et mesuré. Mais pour en arriver là, il faut en connaître les mécanismes. Et pour en connaître les mécanismes, il faut les étudier. C’est là que l’étude de l’histoire est déterminante. Nos codes sociaux d’aujourd’hui sont tributaires de ceux du passé. C’est dans l’ordre des choses. Or, notre société va mal. Les hommes substituent de plus en plus les codes sociaux à leurs capacités individuelles d’évaluation. Il ne réfléchisse plus et font de moins en moins appel à leur libre arbitre. Si l’on veut tenter d’enrayer le mal, il faut chercher à ouvrir les yeux. Et pour ouvrir les yeux, il faut déconstruire la source du mal au moyen d’une solide argumentation. Il faut démontrer que notre société n’a rien inventée et qu’elle ne fait que reproduire des schémas déjà opérationnels depuis des siècles. A un bémol près, avec le temps ces schémas se sont édulcorés, ils se sont vidés de leur substance, ils ont été déformés et parfois pervertis. Ce qui les rends d'autant plus préjudiciables.
Pourquoi suis-je aussi encline à souhaiter tordre le cou aux apparences ? La genèse d’un tel combat est compliquée. Comme n’importe quel enfant, j’aurais dû les acquérir en grandissant de manière instinctive et sans me poser de question. Mais ce ne fut pas le cas. Je n’en ai jamais compris le sens. Pendant longtemps, je me suis battue à la fois pour parvenir à les comprendre mais aussi pour en démontrer leur absurdité. Mais l’on n’agit pas à vingt ans comme on le ferait à trente. Il y a quelques temps, je me suis rendue compte qu’inconsciemment, j’avais fini par obéir à certains de ces codes. Certains diraient que je me suis assagi. Moi, j’y vois de l’embourgeoisement, une indolente torpeur dans laquelle je me suis confortablement callée. En choisissant il y a trois ans de débuter un doctorat dont l’objet de la recherche était l’histoire des comportements au travers de l’usage des bijoux, j’ai choisis de replacer ce combat au centre de ma vie afin de réactiver et de maintenir en éveil mon libre arbitre. Si je dois utiliser certains codes, je veux continuer à mesure mon implication dans les choix que je fais. Je ne veux pas être un simple vecteur obéissant. Je veux continuer à garder la main sur mon identité. Si je veux faire évoluer les choses et continuer à dénoncer ce qui m’apparaît comme une dictature psychologique, je dois être quotidiennement au contact de l’objet de ce combat. Mon esprit critique doit être en veille permanente. Si je veux transmettre ma liberté de pensée, il faut qu’effectivement, je demeure libre. J’aurais pu choisir d’étudier la presse féminine contemporaine. Mais si j’ai choisis celle du XIXe siècle, c’est qu’elle est beaucoup plus riche. Le XIXe siècle ne cachait pas son obéissance aux codes sociaux. La société contemporaine en revanche, s’en cache et s’en défend sous prétexte de rendre à l’individu son libre-arbitre. Or, ce qui se cache est, et de loin, beaucoup plus dangereux que tout autre chose. Ce n’est pas pour rien si la société du XIXe siècle a fait de la lutte des classes un de ces chevaux de bataille favoris. Le XIXe siècle exposait les différences entre classes sociales. Et si, bien sur, je ne cautionne pas pour autant ces différences, il faut bien admettre qu'au moins, une telle configuration permettait d'identifier clairement les problèmes. Aujourd’hui, qui parlerais encore de lutte des classes sans passer pour arriérer…? Pourtant, les codes sociaux sont toujours là, ils œuvrent dans l’ombre à la division des hommes. Et surtout, ils deviennent tout à la fois de plus en plus complexe et de plus en plus simpliste. De fait, les codes sociaux auxquels nous obéissons sont larvés et donc très difficile à identifier. Si l’on peut parler d’une certaine forme d'honnêteté naïve pour le XIXe siècle, on peut clairement parler d’hypocrisie pour la société contemporaine. Je constate chaque jour au cours de mes recherches combien la société dans laquelle je vis obéit à des schémas archaïque qui l’éloigne de la vérité détenue par chaque être humain. La société enferme ses acteurs dans une enchevêtrement de contraintes dont ils se retrouvent prisonnier sans même s'en apercevoir: elle mutile et asservit le peu qui reste de leur conscience pour finir par lui substituer une illusion qui forme écran et qui empêche l'être humain de conquérir ou de recouvrir son indépendance psychique. La société va même plus loin, elle parvient à convaincre ses acteurs qu'en travaillant, ils travaillent pour la liberté et le bien-être de chaque individus en particulier. Et l'illusion est doublement perverse: on ne se contente pas de l'asservir mais on parvient aussi à ce qu'il soit tout à fait convaincu d'être en pleine possession de son libre arbitre. Résultat, quant on essaie d'ouvrir les yeux à ces gens là, on se heurte à une violente opposition. En effet, de quel droit se permet-on de mettre en doute leur bon sens... Dans ces conditions, comment réussir à ouvrir les yeux à un troupeau d'imbécile heureux qui se lève chaque matin, se regarde dans la glace et s'auto congratule d'être aussi unique... Oui, vraiment, le procédé est diabolique. Et pour essayer quand même d'en venir à bout, il faut traiter le mal par le mal et se faire diabolique à son tour. Je serais donc Lucifer, le porteur de lumière, celui qui apporte la connaissance aux hommes, une sorte de Prométhée en jupon... Je suis un « veilleur », j’étudie, j’analyse, je mets en lumière ce qui agit dans l’ombre. Une fois achevé, mon travail sera archivé et accessible au plus grand nombre. De cette manière, au mieux, contribuerais-je à réveiller les consciences ; au pire, j’aurais laissé une trace de ma manière de voir le monde. Mon but n’est pas la reconnaissance et si je pouvais publier anonymement, je le ferais.
Athénaïs
En ce qui concerne la famille, tant que mon père était en vie, il n'y eu pas de véritable problème. Il opposait à la pression familiale la force de l'inertie. Tant qu'on ne prête pas d'importance à une chose, elle ne peut raisonnablement pas constituer un problème. Mais après sa mort, les choses on radicalement changée. Ma mère de retrouva seule avec une gamine de 14 ans. C'était son deuxième veuvage. A part moi, il ne lui restait plus que sa famille dont l'histoire commença progressivement à envahir notre vie. Ma mère n'avait plus que moi comme seul interlocuteur quotidien. Ses peines familiales sont devenues miennes, ses frustration aussi. J'ai progressivement été mise dans la confidence, on m'a fait part d'évènements et de situations familiales qui ne me concernaient nullement et dont j'aurais du ne jamais avoir connaissance. Ma grand-mère, elle aussi, a beaucoup contribué à cette situation. Dernière de ces petits enfants, elle me considérait comme sa quatrième fille et a pris grande part à mon éducation. Elle a commencée de manière tout a fait informelle à me raconter l'histoire de la famille et tant que ces récits se sont bornés à d'édifiantes chroniques témoignant de la bravoure familiale, il n'y avait pas grand chose à redire. Mais plus je grandissais et plus les confidences devenaient sensibles. J'ai été entraînée dans une spirale de rancœur dont l'origine remontait souvent à une époque où je n'étais même pas née. On m'a souvent demandé de prendre partie, d'avoir une opinion, en bref de porter un jugement sur des situations qui m'étaient totalement étrangère. Il se trouve que j'ai été longtemps tiraillée entre le devoir de respecter ma famille que ma transmis ma mère et l'envie de tous les envoyé chier.... que m'a transmis mon père !!! Il faut savoir que je n'ai pas le sens de la famille mais que j'y est été contrainte et d’autant plus depuis que maman est tombé malade et aussi depuis son décès. J'étais seule. J'ai trouvé de l'aide là ou elle se trouvait. Aujourd'hui, je suis plus obligé de me plier à ces simagrées et je ne m'y plierais plus désormais.
Il demeure un dernier détail lier à la notion de famille. Celui de la meilleure amie de ma mère que je considère comme une tante et que je nomme par cette terminologie parce qu'elle m'a vu naître. Là on aborde un autre problème, celui de l'origine de mon milieu social. Ma famille est d'extraction plus que très simple et cela des deux côtés. Mais mes parents ont su s'élever dans la société et ont fréquenté des milieux complètement différents de celui de leurs origines. La meilleure amie de ma mère est issue d'une famille fortunée qui obéit à des codes très particulier propre à un milieu lui-même très particulier. Mes parents m'ont élevée dans ces milieux là, à la fois riche et ayant un accès illimitée à la culture et à l'intellect sans être pour autant des intellectuels. J'en ai énormément souffert. Les lois liées à l'apparence, celles qui régissent les relations sociale et bien d'autres encore toute plus absurdes et arbitraires les unes que les autres. Et aujourd'hui encore, je n'ai pas réglé tout à fait mes comptes à ce niveau là. Mais j'ai quand même fait beaucoup de chemin. En réalité, mon père m'a appris à tirer le meilleur de tout allant parfois même jusqu'à me conseiller de m'en servir. Ce que je fais. J'ai appris dans ces milieux là les arts de la table qu'il s'agisse de cuisine ou de décoration. J'y ai aussi appris l'amour des belles choses. Et je ne considère pas cela comme une tare ou une empreinte honteuse. Je considère que ce raffinement et se savoir-vivre on su m'ouvrir de nombreuses portes et m'attacher des relations qui me sont encore aujourd'hui très utile. Car, c'est aussi un milieu où l'on se fait des relations... et je m'en sers. Tous cela a beaucoup d'importance dans ma manière de vivre. Certes. Mais ça ne reflète en rien ma nature intérieure. Je demeure en perpétuel porta faux entre la simplicité dont mes parents faisaient preuve et le snobisme des milieux que j'ai et que je fréquente quoique de manière de plus en plus sporadique. On en revient toujours à la mort de mon père. Papa voulait faire de moi un esprit libre. Et comme tout esprit libre, je devais pouvoir évoluer n'importe où et dans n'importes quelles circonstances. La connaissance de ces milieux là, et de manière générale, de tous les milieux, était nécessaire à ces yeux. Mais ce n'était pas une fin en soit, loin de là. A sa mort, nous avons commencé à fréquenter presqu'exclusivement des gens que ma mère pensait être de la même classe sociale et elle voulait que cette classe soit la plus élevée possible. Elle voulait que j'évolue au contact d'un "mode de vie" bien particulier. Il y avait certainement de sa part une forme de snobisme quoiqu'elle n'ait jamais été méprisante avec qui que ce soit. Bien au contraire, elle se raillait elle-même allant parfois jusqu'à faire preuve d'une implacable objectivité qui la conduisait à porté un jugement souvent ironique sur les gens que nous fréquentions. En réalité, maman était, d'un côté, très lucide et de l'autre, elle voulait m'offrir le maximum de chance ainsi qu'une certaine sécurité que l'on ne trouve que dans un certains type de milieu. Mais je dois reconnaître que si cette éducation m'a ouverte beaucoup de portes, elle m'en a fermé aussi beaucoup tout en contribuant à alimenter un mal être dont j'ai du mal à me défaire.
En ce qui concerne la grande histoire, l'argumentation est tout autre. Et surtout plus inquiétante. Je suis historienne de l'art. L'histoire et l'art, c'est mon fond de commerce, c'est surtout ma passion. Or, il me reproche cet intérêt qu'il juge trop prégnant dans ma vie quotidienne. Oserais-je dire que rejeter ma passion pour l'histoire, c'est me rejeter tout court? Mais probablement le sait-il... Mon métier dit-il, est en "stase". Ce terme peu banal semble avoir beaucoup d'importance pour lui. Mais j'ignore réellement ce qu'il entend par là. Vérification faite dans un dictionnaire réputé, voici les trois définitions possible du terme "stase": 1°/ Se dit de la lenteur ou arrêt de la circulation sanguine ou de l'écoulement d'un liquide ou d'une matière organique; 2°/ Se dit d'un processus économique supposé par Freud comme pouvant être à l'origine de l'entrée dans la névrose de la psychose: la libido qui ne trouve plus de voie vers la décharge s'accumule sur des formations intrapsychiques; l'énergie ainsi accumulée trouvera son utilisation dans la constitution des symptômes`` ; 3°/ Au figuré, se dit d'une cessation d'activité.
Si l'on omet la théorie freudienne qui n'a pas grand chose à voir avec notre propos, je pense que le terme "stase" peu recouvrir les réalités suivantes: stagnation, immobilité, inaction, inertie, ralentissement, torpeur, passivité, lâcheté, indolence... Pour ma part, je privilégierais le synonyme de " stagnation" sans perdre de vue les nuances sous-entendues par le reste des autres synonymes.
Dire de mon métier qu'il est en "stase" revient donc à dire que la recherche en histoire, et histoire de l'art à fortiori, est une activité stagnante. On peut se demander quel est le référentiel de base, l'étalon, qui permet de la qualifier de stagnante. Car, pour que quelque chose stagne, il faut forcément qu'autre chose soit en activité. Sans référentiel, pas d'indice de mouvement... ou, par extension, d'absence de mouvement. Il faut donc un référentiel: dans le cas présent, je pense qu'il s'agit, entre autre, de la temporalité de l'existence humaine ou pour faire docte, la question métaphysique de l'existence spatio-temporelle du sujet conscient de sa finitude. Or, le passé est immobile dans le temps, il est figé, inactif. Le présent en revanche s'inscrit dans une immédiateté temporelle. On vit physiquement le présent; c'est chose impossible avec le passé. Il existe probablement un autre référentiel, celui de l'impact de l'individu sur son environnement et sur son temps. A priori, on pourrait penser qu’étudier l’histoire, travailler sur un sujet en rapport avec le passé soit incompatible avec la vie dans toute son immédiateté. Il est effectivement assez difficile de démontrer de manière immédiatement évidente les implications que l'étude d'un passé révolu peut avoir sur le présent et son actualité. Il peut apparaître encore plus hasardeux d’envisager que l’étude du passé puisse aider à comprendre l’actualité et contribuer à infléchir le cours des évènements à venir. Après tout, le passé appartient au passé ; seul le présent nous appartient. Quant au futur, il se construit à la faveur de notre présent. Si l’on adopte ce point de vue, évidemment, le passé ne semble pouvoir jouer aucun rôle dans l’implication d’un individu dans son présent et à fortiori dans son futur. Oui, mais…Penser ainsi, c’est sous-estimer ce que l’histoire peut nous enseigner. Et je ne peux pas croire qu'il est la vue aussi courte. Cela non plus, ça ne lui ressemble pas. « Your past does not have to define your future but you have to remember past to built your future. » : votre passé ne doit pas définir votre futur mais vous devez vous souvenir du passé pour construire votre futur. En résumé, si notre passé individuel, la petite histoire, à un impact le plus souvent inopérant voire préjudiciable sur notre présent, le passé d’une manière générale, la grande histoire, éclaire notre présent et contribue donc à construire le futur.
Si l’on me demandait quel impact je souhaite avoir sur mon environnement, je pense que j’évoquerais immédiatement la communication non verbale et en particulier tout ce qui concerne la communication instinctivement et instantanément intelligibles par la connaissance de signe commun ou d’une culture partagée. En bref, je voudrais faire la guerre aux codes sociaux et à l’acquis. Tordre le cou aux apparences… Les socialisations collectives humaines sont des phénomènes à double tranchant : d’un côté, ils permettent à un individus de se civiliser, de passer de l’état d’animal à celui d’homme ; de l’autre, il enferme l’individus dans un processus où son groupe d’appartenance deviens un vecteur de pression qui le pousse à la conformité. Les « apparences » constitues un ensemble de règles auxquelles nous obéissons le plus souvent de manière instinctive. Ces règles contribues à creuser un fossé entre les différents groupes sociaux et donc entre les hommes dans leurs liens interpersonnels. Je ne condamne pas l’usage des codes sociaux d’une manière générale mais j’en préconise un usage maîtrisé et mesuré. Mais pour en arriver là, il faut en connaître les mécanismes. Et pour en connaître les mécanismes, il faut les étudier. C’est là que l’étude de l’histoire est déterminante. Nos codes sociaux d’aujourd’hui sont tributaires de ceux du passé. C’est dans l’ordre des choses. Or, notre société va mal. Les hommes substituent de plus en plus les codes sociaux à leurs capacités individuelles d’évaluation. Il ne réfléchisse plus et font de moins en moins appel à leur libre arbitre. Si l’on veut tenter d’enrayer le mal, il faut chercher à ouvrir les yeux. Et pour ouvrir les yeux, il faut déconstruire la source du mal au moyen d’une solide argumentation. Il faut démontrer que notre société n’a rien inventée et qu’elle ne fait que reproduire des schémas déjà opérationnels depuis des siècles. A un bémol près, avec le temps ces schémas se sont édulcorés, ils se sont vidés de leur substance, ils ont été déformés et parfois pervertis. Ce qui les rends d'autant plus préjudiciables.
Pourquoi suis-je aussi encline à souhaiter tordre le cou aux apparences ? La genèse d’un tel combat est compliquée. Comme n’importe quel enfant, j’aurais dû les acquérir en grandissant de manière instinctive et sans me poser de question. Mais ce ne fut pas le cas. Je n’en ai jamais compris le sens. Pendant longtemps, je me suis battue à la fois pour parvenir à les comprendre mais aussi pour en démontrer leur absurdité. Mais l’on n’agit pas à vingt ans comme on le ferait à trente. Il y a quelques temps, je me suis rendue compte qu’inconsciemment, j’avais fini par obéir à certains de ces codes. Certains diraient que je me suis assagi. Moi, j’y vois de l’embourgeoisement, une indolente torpeur dans laquelle je me suis confortablement callée. En choisissant il y a trois ans de débuter un doctorat dont l’objet de la recherche était l’histoire des comportements au travers de l’usage des bijoux, j’ai choisis de replacer ce combat au centre de ma vie afin de réactiver et de maintenir en éveil mon libre arbitre. Si je dois utiliser certains codes, je veux continuer à mesure mon implication dans les choix que je fais. Je ne veux pas être un simple vecteur obéissant. Je veux continuer à garder la main sur mon identité. Si je veux faire évoluer les choses et continuer à dénoncer ce qui m’apparaît comme une dictature psychologique, je dois être quotidiennement au contact de l’objet de ce combat. Mon esprit critique doit être en veille permanente. Si je veux transmettre ma liberté de pensée, il faut qu’effectivement, je demeure libre. J’aurais pu choisir d’étudier la presse féminine contemporaine. Mais si j’ai choisis celle du XIXe siècle, c’est qu’elle est beaucoup plus riche. Le XIXe siècle ne cachait pas son obéissance aux codes sociaux. La société contemporaine en revanche, s’en cache et s’en défend sous prétexte de rendre à l’individu son libre-arbitre. Or, ce qui se cache est, et de loin, beaucoup plus dangereux que tout autre chose. Ce n’est pas pour rien si la société du XIXe siècle a fait de la lutte des classes un de ces chevaux de bataille favoris. Le XIXe siècle exposait les différences entre classes sociales. Et si, bien sur, je ne cautionne pas pour autant ces différences, il faut bien admettre qu'au moins, une telle configuration permettait d'identifier clairement les problèmes. Aujourd’hui, qui parlerais encore de lutte des classes sans passer pour arriérer…? Pourtant, les codes sociaux sont toujours là, ils œuvrent dans l’ombre à la division des hommes. Et surtout, ils deviennent tout à la fois de plus en plus complexe et de plus en plus simpliste. De fait, les codes sociaux auxquels nous obéissons sont larvés et donc très difficile à identifier. Si l’on peut parler d’une certaine forme d'honnêteté naïve pour le XIXe siècle, on peut clairement parler d’hypocrisie pour la société contemporaine. Je constate chaque jour au cours de mes recherches combien la société dans laquelle je vis obéit à des schémas archaïque qui l’éloigne de la vérité détenue par chaque être humain. La société enferme ses acteurs dans une enchevêtrement de contraintes dont ils se retrouvent prisonnier sans même s'en apercevoir: elle mutile et asservit le peu qui reste de leur conscience pour finir par lui substituer une illusion qui forme écran et qui empêche l'être humain de conquérir ou de recouvrir son indépendance psychique. La société va même plus loin, elle parvient à convaincre ses acteurs qu'en travaillant, ils travaillent pour la liberté et le bien-être de chaque individus en particulier. Et l'illusion est doublement perverse: on ne se contente pas de l'asservir mais on parvient aussi à ce qu'il soit tout à fait convaincu d'être en pleine possession de son libre arbitre. Résultat, quant on essaie d'ouvrir les yeux à ces gens là, on se heurte à une violente opposition. En effet, de quel droit se permet-on de mettre en doute leur bon sens... Dans ces conditions, comment réussir à ouvrir les yeux à un troupeau d'imbécile heureux qui se lève chaque matin, se regarde dans la glace et s'auto congratule d'être aussi unique... Oui, vraiment, le procédé est diabolique. Et pour essayer quand même d'en venir à bout, il faut traiter le mal par le mal et se faire diabolique à son tour. Je serais donc Lucifer, le porteur de lumière, celui qui apporte la connaissance aux hommes, une sorte de Prométhée en jupon... Je suis un « veilleur », j’étudie, j’analyse, je mets en lumière ce qui agit dans l’ombre. Une fois achevé, mon travail sera archivé et accessible au plus grand nombre. De cette manière, au mieux, contribuerais-je à réveiller les consciences ; au pire, j’aurais laissé une trace de ma manière de voir le monde. Mon but n’est pas la reconnaissance et si je pouvais publier anonymement, je le ferais.
Athénaïs
Athénaïs- Messages : 61
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