Article : Que sont les adultes doués ?

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Message par EmiM Ven 14 Avr 2017 - 10:53

Que sont les adultes doués ?
Un article de Stephanie S. Tolan http://www.stephanietolan.com
Traduction de Jean-Pierre Norguet http://jpn.alternatifs.eu

L'acte premier pour honorer son Soi est la revendication de la conscience: le choix de penser, d'être conscient, de porter un regard curieux et ouvert sur le monde extérieur et sur notre nature profonde. Manquer à cet acte de choix revient à trahir l'honneur de son Soi au niveau le plus élémentaire.
Honorer son Soi, c'est être disposé à penser par soi-même, à vivre selon nos propres normes, et avoir le courage de ses propres perceptions et jugements (Branden, 1983).
L'expérience de l'adulte doué est celle d'une conscience inhabituelle, celle d'un esprit extraordinaire dont les perceptions et jugements peuvent être à ce point différentes qu'elles requièrent un courage extraordinaire. De nombreux adultes doués, conscients non seulement de leurs capacités mentales mais aussi du degré auquel ces capacités les distinguent des autres, le comprennent. Pour d'autres, tout aussi nombreux, honorer complètement le Soi doit commencer par découvrir quelle type de conscience, quel type d'esprit est le leur. Que leurs propres perceptions et jugements sont inhabituelles peut avoir été évident depuis l'enfance, il n'empêche qu'ils peuvent avoir passé leurs vies à supposer que cette différence était un déficit, une anomalie, ou même une faute de caractère ou un signe de maladie mentale (Lovecky, 1986; Alvarado, 1989). Penser par soi-même peut sembler imprudent ou associal. « Qui suis-je? » est une question qu'ils peuvent avoir besoin de se poser sans cesse parce que les réponses prodiguées dans l'enfance et l'adolescence étaient imprécises ou incomplètes (Silverman & Kearney, 1989; Tolan, 1992; Wallach, 1994). Où sont passés les enfants doués ? Depuis les années 1920, des milliers de livres et d'articles ont été écrits sur les enfants doués [NdT.: parfois appelés enfants surdoués, enfants intellectuellement précoces, ou plus récemment enfants à haut potentiel] (voir par exemple : Burks, Jensen, & Terman, 1930; Carroll, 1940; DeHaan & Havighurst, 1957; Gross, 1992; Hirt, 1922; Hollingworth, 1926; Piirto, 1994; Stedman, 1924; Terman, 1925; Webb, Meckstroth, & Tolan, 1982; Witty & Jenkins, 1935; Zorbaugh & Boardman, 1936). Des associations d'éducateurs, parents et autres se sont formées pour protéger, préserver et développer leur potentiel (Hall & Skinner, 1980; Krueger, 1978). Différentes factions ont débattu de la question de si c'était l'inné ou l'acquis – ou les deux – qui créait l'intelligence inhabituelle, ou de si les enfants doués avaient besoin ou méritaient des ressources et des programmes éducatifs spéciaux (Burks et al., 1930; Galton, 1869; Margolin, 1994; Renzulli, 1978; Sapon-Shevin, 1987; Sternberg & Davidson, 1986; Witty, 1951; Yoder, 1894). Pendant ce temps, des générations d'enfants doués sont venues et ont passé, parcourant et traversant les institutions éducatives où ils ont été ou non identifiés, ont été ou non pris en charge de manière appropriée. Ces enfants doués ont disparu dans le grand territoire de l'âge adulte. Ont-ils disparus de la même manière que les prodiges ? Peu importe la puissance du talent adulte d'un enfant prodige qui a grandi, il n'est plus un prodige, parce que le terme est lié non seulement au talent, mais aussi à l'âge. L'adulte, même s'il continue d'exceller dans le domaine de ses débuts, est pour toujours un exprodige. Est-ce que l'enfant doué, une fois qu'il a grandi, devient de la même manière un ex-enfant doué ? Après avoir quitté l'enfance et l'école, les différences qui lui étaient reconnues dans
l'étiquette de « doué » l'ont-elles également quitté ? Ou peut-il être décrit plus précisément comme un doué ex-enfant ?
Qu'est-ce que la douance ? Si la douance est principalement un produit de la progression rapide dans les niveaux de développement normal, son destin pourrait être de s'estomper lorsque les autres le « rattrappent » ou même le dépassent. Si, d'un autre côté, elle est une qualité d'esprit qui crée une trajectoire de développement purement inhabituelle, elle serait un attribut stable, accompagnant l'individu tout au long de son existence, que ce soit évident vu de l'extérieur ou non. Tout le monde ne perçoit pas la douance de la même manière. Certains la voient comme la réalisation de quelque chose sortant de l'ordinaire, essentiellement externe (Gardner, 1993; OERI 1993; Tannenbaum, 1983). D'autres la voient comme un ensemble interne de processus mentaux sortant de l'ordinaire, pouvant ou non mener à réalisation (Columbus Group, 1991; Hollingworth, 1942, 1937; Shurkin, 1992). Traditionnellement, la perception de notre culture s'est basée dans une certaine mesure sur l'âge de l'individu en considération. Parce que l'enfance est inévitablement et biologiquement une période de développement, la douance dans l'enfance a été vue en termes de qualités inhabituelles et mesurables de l'esprit en développement. Nous reconnaissons qu'il y a quelque chose d'interne à l'enfant que nous étiquettons. Les tests de QI ont été créés pour évaluer la capacité intrinsèque d'un enfant à raisonner et à apprendre, et dans la mesure où ils ont atteint ce but, ils ont été utiles à la détection des enfants dont le potentiel extraordinaire nécessite des méthodes éducatives inhabituelles. Le phénomène de « l'enfant doué sous-performant » dépend évidemment de notre reconnaissance qu'un enfant a un potentiel inhabituel qui ne se montre pas de lui-même dans une réalisation également inhabituelle. Lorsqu'on regarde les adultes, cependant, la focalisation change. Nous reconnaissons l'existence d'adultes doués, bien sûr. Ce sont les personnes aux réalisations spectaculaires. Et pour ces réalisations, nous nous attendons à ce qu'ils soient récompensés – par un prix Nobel, de la notoriété, de la fortune, ou une distinction dans leur propre domaine. Il arrive que l'on sache que certains adultes doués sont suffisamment malchanceux pour ne pas obtenir les récompenses que leurs idées ou leurs productions méritent (il existe de nombreuses exemples, comme Van Gogh, de personnes dont les réalisations n'ont pas été reconnues de leur vivant) mais c'est néanmoins les réalisations ou les productions qui sont la base de notre reconnaissance de la douance chez les adultes. Cette focalisation est essentiellement externe. Bien que nous reconnaissions qu'il doit y avoir quelle capacité mentale inhabituelle (une réalité interne) qui permette à un Georges Charpak de développer des idées qui influencent le domaine de la physique, si nous ne disposions pas de ces idées (la preuve externe), nous ne reconnaitrions pas Charpak comme un adulte doué. Il n'existe pas de concept communément accepté « d'adulte doué sous-performant » parce que le nombre d'adultes qui ont des résultats aux tests ou aux autres moyens standardisés de mettre en évidence un mode de fonctionnement mental inhabituel autre que par des productions, est relativement faible. Pour la société, dès lors, la définition changeant de la douance de l'enfance à l'âge adulte mettrait en évidence le fait que parmi les nombreux enfants doués identifiés, bien peu ont continué sur la voie de devenir des adultes doués (Shurkin, 1992; Subotnik, 1993). Le changement de critère d'un mode de fonctionnement interne différent à une production externe inhabituelle a été reconnu par une certaine Sophie frustrée, l'une des femmes sujette de la célèbre étude longitudinale de Lewis Terman sur les individus doués. Tandis que l'étude était en cours, elle écrivit à Terman, « Vous avez évalué les jeunes enfants sur base de leur capacité et de leur personnalité, mais vous évaluez les adultes par une mesure plus matérialiste de situation financière et de reconnaissance par un public qui n'a jamais montré quelque capacité particulière de distinction entre les fripons et les sots, et les bons serviteurs publics. » (Shurkin, p. 269)
Pour brouiller encore plus les pistes, il apparaîtrait également qu'il existe des personnalités douées qui ont émergé dans ce monde adultes, sans jamais avoir été identifiés ou perçus comme doués lorsqu'ils étaient enfants (e.g. Darwin, Edison, Einstein). Il n'est pas surprenant qu'il existe une certaine controverse et une certaine confusion sur le sujet pour notre culture en général, et pour les individus également.
La douance comme différence dans le développement Récemment, une définition de la douance dans l'enfance comme « développement asynchrone » (Columbus Group, 1991) a été avancée pour aborder la douance selon un point de vue phénoménologique, en considérant ce à quoi ça ressemble de l'intérieur. Au travers de l'enfance, les individus asynchrones atteignent des niveaux de développement remarquables et clairement définis, et acquièrent diverses compétences bien avant les autres enfants. Mais la différence ne tient pas de la simple précocité, de simplement « y arriver plus vite ». L'enfant qui manipule des concepts abstraits avant les autres emporte avec lui ces concepts pour les transposer dans toutes les expériences ultérieures. Cette façon différente, plus complexe, d'intégrer les expériences crée des expériences essentiellement différentes. Le résultat est que ces différences, loin de se résorber au cours du développement de l'enfant, ont tendance à s'étendre de plus en plus. Un enfant dont le développement cognitif est dans la norme plutôt que dans l'intervalle de douance ne va pas plus « rattrapper » l'enfant doué qu'un petit frère va rattrapper l'âge de sa grande soeur. La trajectoire de développement de l'enfant doué diverge dès son plus jeune âge et ne revient pas à la normale. Le « développement asynchrone » peut ne pas être pertinent pour les adultes, parce que le développement adulte n'est pas aussi dépendant du temps. Il s'étend sur une bien plus large période et n'est pas aussi fermement lié au développement physiologique. Il n'est pas nécessairement une progression stable et montante dont tous les adultes font l'expérience à des rythmes différents, mais est bien plus que dans l'enfance une question de développement personnel et de choix. Nous nous attendons à ce que les adultes soient capables de faire preuve de raisonnement abstrait ; nous n'avons pas autant tendance à remarquer quelqu'un dont le raisonnement l'entraîne dans des domaines complexes où la plupart des adultes ne pourraient pas suivre, qu'à remarquer un enfant qui raisonne de manière abstraite bien avant que les autres enfants en soient capables. Si un adulte décidait d'apprendre chacune des langues humaines écrites, il ne passerait probablement pas pour quelqu'un qui les lit plus tôt que les autres adultes, étant donné que peu d'autres adultes choisiraient ne serait-ce que de poursuivre ce but. A l'âge adulte, on pourrait parler de « développement différencié », plutôt que de développement asynchrone, étant donné que la direction que tout individu choisit pour son développement personnel a tendance à lui être caractéristique. Ceci rend la différence entre l'esprit de l'adulte doué et les autres plus difficile à reconnaître, plus difficile à mesurer. Cependant, la réalité de la douance reste une expérience de vie difficile, que l'individu soit ou non capable d'utiliser cette expérience différente pour dynamiser sa croissance et son apprentissages continus, ou pour créer des produits ou manifester des performances sur des voies que la plus grande culture reconnaît et récompense.
Cractéristiques d'enfance Certaines des caractéristiques cognitives des enfants doués qui sont des différences de genre plutôt que des acquisitions précoces sont : une quantité extraordinaire d'information, une mémoire inhabituelle ; une compréhension avancée ; des intérêts inhabituellement variés ; de la curiosité ; une capacité inhabituelle de traitement de l'information ; un rythme de pensée accéléré ; une capacité de synthèse globale ; une capacité supérieure de voir des relations variées et inhabituelles ; une capacité à générer des solutions et des idées originales ; une évaluation de soi-même et des autres ; un comportement persévérant, orienté objectif (Clark, 1988). Ces caractéristiques non seulement perdurent à l'âge adulte, mais interagissent parfois pour créer une progression géométrique de différences significatives par rapport à la norme (Wallach, 1994; Roeper, 1991).
Outre ces caractéristiques cognitives, de nombreux chercheurs ont trouvé chez les enfants doués une sensibilité et une intensité émotionnelles élevées (Morelock, 1992), (une caractéristique qui a tendance à s'introvertir à l'âge adulte, en particulier chez les hommes) (Kline & Meckstroth, 1985; Roeper, 1991), un fin sens de l'humour (qui peut être bienveillant ou hostile, sophistiqué ou bizarre) (Webb, Meckstroth & Tolan, 1982), une préoccupation précoce et extrême pour la justice et la moralité (Roeper, 1991) et le désir de s'assurer que les actions sont cohérentes avec les valeurs (Hollingworth, 1942). Socialement, les enfants doués peuvent avoir du mal à trouver leur place parmi leurs pairs chronologiques, étant donné que leurs intérêts ont tendance à être différents. De plus, leur sensibilité et intensité émotionnelles peuvent rendre les interactions sociales spécialement compliquées, en particulier dans les configurations où les émotions sont suspectes, dévalorisées ou directement censurées (Kline & Meckstroth, 1985). Lorsque leurs capacités provoquent de la jalousie chez les autres, il peut y avoir une puissance incitation à cacher ou à camoufler ces capacités dans le but de mieux « s'intégrer ». Parfois, cet effort se mute en un déni puissant et à long terme de leurs différences. Ceci est tout particulièrement vrai pour les adolescentes (Kerr, 1985; Noble, 1989; Silverman, 1993).
Effets à l'âge adulte Toutes ces caractéristiques, se poursuivant à l'âge adulte, créent une expérience de vie différentes pour l'adulte doué, exactment de la même manière que pour l'enfant doué, que l'individu se réalise et soit reconnu comme doué ou non, que l'individu comprenne et accepte ses différences ou non (Lovecky, 1986). Parfois l'expérience de vie différente est positive, mais pas toujours. Parfois elle est douloureuse ou même destructive (Alvarado, 1989). Les différences cognitives peuvent mener à de hauts niveaux de succès de carrière dans de nombreux domaines. Ce sont là les capacités spécifiques qui si souvent produisent l'adulte doué reconnu, le physicien révolutionnaire, le grand philosophe, le diplomate pacificateur, l'entrepreneur à succès. Mais pour l'adulte dont les circonstances de vie ne fournissent pas tout de go une arène pour un usage positif de ces capacités, le résultat peut-être une sensation de frustration, un manque d'accomplissement, une sensation tenace d'être retenu, emprisonné, contrecarré (Roeper, 1991; Smith, 1992). Le cadre moyen qui a la capacité de voir et d'imaginer des solutions à divers problèmes de l'entreprise peut être gravement frustré dans son travail parcqu'un patron à qui cette capacité fait défaut ne permet pas l'expression, et moins encore l'implémentation de ces solutions. La femme au foyer de banlieue, qui a élevé plusieurs enfants et travaillé comme bénévole pour d'innombrables associations civiques, peut se trouver dans l'agitation, l'ennui et la frustration lorsque ses enfants ont quitté le domicile. Les activités sociales ne remplissent pas le vide, de même que la forme de travail routinier qu'elle peut être tentée de poursuivre pour se sortir de la maison. Le travailleur pris dans l'impasse d'un job subalterne parce qu'il lui a manqué l'opportunité d'obtenir une éducation appropriée à ses capacités cognitives inhabituelles, n'a aucun moyen d'utiliser ces capacités dans son travail intellectuellement peu exigeant. Il se peut qu'aucun de ces individus ne comprenne entièrement les raisons de leur insatisfaction. Ils peuvent ne pas voir de moyen ou même de besoin à se donner à eux-mêmes un exutoire à leurs capacités, parce qu'ils ne reconnaissent pas la source du problème. Pour avoir cru dans la définition liée aux réalisations que la société a de la douance, ils ont peu de chances de se considérer comme des adultes doués. Peu d'adultes aujourd'hui ont été identifiés comme doués dans l'enfance et ils peuvent n'avoir jamais compris leurs propres différences par rapport à la norme. Parce qu'il est difficile d'être différent, ceux qui ont été identifiés peuvent s'être protégés par le déni. Le doué tient fréquemment ses propres capacités pour acquises, croyant que ce sont les personnes aux capacités différentes qui sont les personnes véritablement brillantes (Alvarado, 1989; Tolan,
1992). Ne comprenant pas la source de leur frustration ni les moyens de l'apaiser, ils peuvent choisir de soulager la douleur à travers l'utilisation d'alcool, de drogues, de nourriture ou d'autres substances ou comportements addictifs. Ou ils peuvent simplement se reclure et vivre leurs vies sur un mode de survie. Même lorsque l'individu est capable d'utiliser ses dons pour atteindre un succès indéniable dans sa carrière, il peut se sentir ou sembler gravement déphasé. Barbara Streisand, par exemple, dont les capacités sont non seulement évidentes et hors-normes mais aussi éclectiques, est critiquée pour son perfectionnisme, pour ses exigences trop importantes aux personnes avec qui elle travaille. Son inconfort bien connu pour les représentations publiques peut venir en partie des problèmes d'estime de soi en apparence paradoxaux, qui accompagnent souvent les dons extraordinaires.
Intensité émotionnelle Bien que les adultes, ayant fait pendant des années l'expérience d'une culture dans laquelle l'émotivité est largement prise d'assaut, sont habituellement plus à même que les enfants doués de contrôler l'expression de leur intensité et sensibilité émotionnelle, ils doivent encore faire face dans une certaine mesure au ressenti de cette émotion. Dans certains domaines, tels que les arts, l'émotivité inhabituelle des doués peut s'exprimer librement et est, en réalité, un puissant atout qui peut mener au succès et à la réalisation (Piechowski & Cunningham, 1985; Piechowski & Silverman, 1985). Dans la plupart des domaines, cependant, les émotions sont suspectes et les exprimer peut être défendu. De nombreux hommes, ayant été entraînés de la sorte tout au long de leur enfance, réussissent à refouler leur émotivité et souffrent des répercussions psychologiques de ce refoulement. Les femmes, habituées à une plus grande liberté d'expression émotionnelle dans l'enfance, peuvent avoir du mal au refoulement nécessaire pour progresser dans une carrière choisie.
Les difficultés morales La sensibilité morale de l'adulte doué et sa préoccupation pour la justice peut le mener à une vie de service, de performance et/ou de réalisation dans la diplomatie, la loi, la médecine, la philanthropie et d'autres domaines. Cependant, elles peuvent aussi mener à la dépression et à d'autres difficultés psychologiques, l'état de la civilisation et la santé de la planète pouvant sembler insurmontables à qui possède une lucidité de pensée inhabituelle et une profondeur de perception combinées avec une préoccupation morale et une empathie fortes (Roeper, 1991). De plus, une telle personne peut trouver intolérable l'éthique à géométrie variable, la tromperie, la malhonnêteté absolue et la compétition du lieu de travail (Hollingworth, 1937). « Un professeur d'université qui remet en cause les hypothèses de base de son domaine, qui est outrée par la compétition et l'ordre hiérarchique de son département, et qui ne parvient pas à exprimer ses idées sans entrer dans l'émotion, sera considérée comme un élément marginal non professionnel » (Wallach, 1994). Ni lui ni ses collègues n'aura tendance à percevoir ses problèmes de travail comme provenant de sa douance.
Les réalités sociales Socialement, l'expérience des adultes doués peut être variée. Ceux qui ont choisi une carrière qui les met en contact avec d'autres adultes doués peuvent régulièrement ressentir la joie et l'excitation de la synergie intellectuelle qui a lieu dans un tel groupe. De visu ou via les réseaux informatiques, ces personnes se basent sur les idées des uns et des autres, se déplaçant par de formidables bonds, stimulants, au travers de domaines intellectuels complexes. Il peut exister un sentiment de connexion pratiquement magique tandis que les idées s'écoulent de l'un à l'autre, semblant prendre vie par elles-mêmes. Lorsque des esprits aux capacités inhabituelles travaillent ensemble, il se produit un sentiment puissant de communauté et d'appartenance. Pour d'autres, ou pour ces personnes hors du lieu de travail ou déconnectées des réseaux,
l'interaction sociale peut être à la fois problématique et difficile à comprendre. Un adulte doué peut se retrouver sur le lieu de travail et/ou en-dehors en train de s'associer avec de nombreux individus qui ne partagent pas la complexité et la profondeur de ses perceptions. Il peut avoir du mal à partager avec les autres d'importants aspects de lui-même. Il peut devoir peser ses mots, simplifier ses conceptions, se tenir à l'écart de la conversation. Cette expérience est à la fois épuisante et frustrante. En particulier, s'il ne comprend pas ou n'accepte pas sa douance, il (et les autres) peut interpréter sa difficulté comme de l'inaptitude sociale. Même s'il est capable de faire correspondre ses interactions au niveau d'intérêt ou de compréhension de ses compagnons, il peut quitter un événement social se sentant isolé, « étrange », insatisfait, malheureux. D'autres peuvent clairement apprécier les activités que l'adulte doué trouve débilitantes et répétitives, ou préférer les divertissements qui manquent de la profondeur et de la nourriture intellectuelle dont il a tant besoin. La faim de compagnie intellectuelle se ressent même lorsqu'elle n'est pas reconnue ou comprise. En manque de compagnons aux intérêts similaires, l'adulte doué peut se soustraire des interactions avec les autres et se résigner à une vie solitaire.
L'honneur du Soi Il existe de nombreux profils individuels de la douance adulte, certains correspondant avec soin à nos attentes culturelles, d'autres bien plus nombreux n'y trouvant pas leur place. L'expérience de la douance à l'âge adulte a plus de chances d'être problématique et douloureuse lorsque l'individu nie ou ne comprend pas sa propre douance. Sans cette compréhension, il se sent coupé, non seulement des autres, mais aussi de lui-même. Sans cette compréhension, il ne sait pas comment résoudre les problèmes, soigner les blessures, satisfaire ou même faire face à la puissante dynamique intérieure (Rubin, 1990). Notre focalisation impitoyable sur la réalisation plutôt que sur le mode de fonctionnement mental inhabituel qui constitue la douance rend la nécessaire reconnaissance, et compréhension, difficile si pas impossible pour beaucoup. Il est critique à la fois pour l'adulte doué en tant qu'individu et pour la société d'être capable de bénéficier de ces capacités non encore utilisées, que nous étendions nos perceptions et que nous continuions de faire attention aux doués lorsqu'ils ont quitté la communauté éducative et pris leur place dans le monde adulte. Nous devons aussi surveiller attentivement la perception de la douance dans le domaine de l'éducation, parce que c'est dans l'enfance que l'individu doué commence à former ce sens critique de lui-même, sa compréhension initiale de son propre mode de fonctionnement mental, de son propre esprit. Nombreux sont ceux qui aujourd'hui dans l'éducation douée voient la douance même dans l'enfance comme définissable par la réalisation plutôt que par le potentiel (Dunn, Dunn & Treffinger, 1992). « La personne douée est celle qui fait don de ses dons à la société », a dit l'une des principales voix dans le domaine, suivant cette formulation par l'affirmation selon laquelle « je crée la douance » en offrant aux étudiants un ensemble bien choisi d'opportunités et de ressources (Renzulli, 1989). La nouvelle focalisation sur le « talent » plutôt que sur la « douance », bien qu'elle reconnaisse une réalité interne (un talent qu'un individu possède alors qu'un autre non), étend en réalité l'orientation réalisation/produit. Un talent est une capacité spécifique, limitée, plutôt qu'une large base de moyens de fonctionner mentalement. Le développement du talent, mène impitoyablement à la performance dans un « domaine » plutôt qu'au soutien, au renforcement et au développement de l'esprit, de la conscience et du jugement. Le domaine de l'éducation semble maintenant se diriger vers une mesure de la douance largement externe, basée sur la réalisation. En procédant ainsi, il dévalorise l'individu et plante le décor pour que des enfants de plus en plus nombreux (qui peuvent ne pas être capables d'intégrer leurs facultés mentales dans l'intervalle de réalisation étroit des écoles) entrent dans l'âge adulte sans être conscients ou en niant les besoins de leurs esprits inhabituels.
Les enfants doués ne disparaissent pas lorsqu'ils sortent des humanités ou terminent leur baccalauréat ou leur maîtrise. Ils deviennent des adultes doués. S'ils entrent dans l'âge adulte aveugles de leurs capacités mentales inhabituelles, ils peuvent naviguer dans leurs vies fragmentés, frustrés, insatisfaits et aliénés des tréfonds de leur être. Ce qui est différent chez l'individu doué, c'est son esprit. Ne pas comprendre cet esprit rend virtuellement impossible d'honorer le Soi. Il est manifeste que le « Soi » ... est notre esprit – notre esprit et sa manière caractéristique de fonctionner (Branden, 1983). L'esprit fait de nous des humains ; l'esprit fait de nous des individus. De l'enfance à l'âge adulte, pour être eux-mêmes, pour se valoriser et s'honorer eux-mêmes et mener des vies accomplies, les adultes doués doivent comprendre et accepter leur propre esprit – inhabituel.


Références de l'article original Alvarado, N. (1989). Adjustment of gifted adults. Advanced Development, 1(1), 77-86. Branden, N. (1983). Honoring the self, the psychology of confidence and respect. Los Angeles: J. P. Tarcher, xiii, 22. Burks, B. S.,Jensen, D. W., & Terman, L. M. (1930). Genetic studies of genius: The promise of youth. Stanford, CA: Stanford University Press. Carroll, H. A. (1940). Genius in the making. New York: McGraw-Hill. Clark, B. (1988). Growing up gifted (3rd ed.). Columbus: Charles Merrill. Columbus Group (1991). Unpublished transcript. Columbus, Ohio. DeHaan, R. F., & Havighurst, R. J. (1957). Educating gifted children. Chicago, IL: Chicago University Press. Dunn, R., Dunn, K. & Treffinger, D. (1992). Bringing out the giftedness in your child: Nurturing every child's unique strengths, talents and potential. New York: John Wiley Sons. Galton, F. (1869). Hereditary genius. London: Macmillan & Co. Ltd. Gardner, H. (1993). Creating minds: An anatomy of creativity seen through the lives of Freud, Einstein, Picasso, Stravinsky, Eliot, Graham, and Ghandi. New York: Basic Books. Gross, U. M. (1992). The early development of three profoundly gifted children of IQ 200. In P. S. Klein & A. J. Tannenbaum (Eds.), To be young and gifted (pp. 94-138). Norwood, NJ: Ablex Publishing Corporation. Hall, E. G., & Skinner, N. (1980). Somewhere to turn: Strategies for parents of the gifted and talented. New York: Teachers College Press. Hirt, Z. I. (1922). A gifted child. Training School Bulletin, 19, 49-54. Hollingworth, L. S. (1926). Gifted children: Their nature and nurture. New York: The Macmillan Company. Hollingworth, L. S. (1937, June). "Bright students take care of themselves". North American Review, p. 261-273. Hollingworth, L. S. (1942). Children above 180 IQ (Stanford-Binet): Origin and development. Yonkers-on-Hudson, NY: World Book Company. Kline, B. E., & Meckstroth, E. A. (1985). Understanding and encouraging the exceptionally gifted. Roeper Review, 8(1), 24-30. Kerr, B. A. (1985). Smart girls, gifted women. Columbus, OH: Ohio Psychology Publishing. Krueger, M. L. (1978). On being gifted: National student symposium on the education of the gifted
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Message par Confiteor Dim 7 Mai 2017 - 17:55

Merci de m'avoir fait connaître cet article dans lequel je retrouve bien synthétisé l'état de ma réflexion.
Celle-ci est récente car bien que diag dans l'enfance (et donc ... il y a fort longtemps), je ne me suis jamais intéressé au sujet !
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