Un étonnant renouveau
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Un étonnant renouveau
Je viens de trouver dans les abysses de mon ordinateur et avec beaucoup d'étonnement, ce texte.
Il s'agit d'un jet du roman que j'ai rédigé il y a quelques années, avant de détruire entièrement. Je devais avoir 14 ans.
Ce texte est loin d'être parfait ou d'émaner quelconque fierté en moi.
Cela-dit, cette trouvaille me fait beaucoup sourire puisqu'elle a vu le jour à un moment de ma vie qui fait écho avec ce que je vis actuellement.
Notamment, lorsque j'écris : "sa démarche, le long de ces routes désertiques, lui avait donné la chose qu’il redoutait le plus ; le temps de réfléchir (...)".
Alors je m'interroge : la vie est-elle une perpétuelle boucle de réflexion inachevées ? Un boomerang d'équations insolubles ?
Les pans les plus torturés de nos personnalités sont-elles ancrées en nous à tout jamais ?
Je préfère la vision positive, finalement. Comme une intime conviction que cette (re)lecture m'apporte un élan incroyable d'optimisme et une envie viscérale d'aller de l'avant !
En voici un extrait :
C’est la fin. Après des jours et des nuits de marche, Armand arriva sur la rive, pour respirer l’air marin.
Il était persuadé que la solitude des longues plages allait vider son esprit de toute la tristesse et la colère qui s’étaient installés en lui pour creuser un silence profond dans son cœur.
Il était persuadé que ses tourments allaient disparaître avec la soif et la faim. Ce, pour qu’il devienne, grâce à cette douleur, un simple corps souffrant, sans émotions, qui ne sait ce qu’est vivre et qui ne se contente que de survivre.
Cependant, après des jours et des nuits de marche, son regard trahissait son désespoir. Et sa démarche, le long de ces routes désertiques, lui avait donné la chose qu’il redoutait le plus ; le temps de réfléchir, le temps de se souvenir, le temps de mourir.
(...)
Quelquefois, il était presque parvenu à oublier. Mais à présent, la douceur de ce paysage bucolique venait hanter toutes ses perceptions et faisait imploser son cœur. Cette douceur ne faisait qu’augmenter la douleur. Il ne pouvait plus se résilier à essayer de vivre.
Son arme avait connu une multitude de sangs différents : le sang du devoir, le sang des règlements de comptes, le sang de criminels, le sang de la vengeance. Aujourd’hui, elle connaîtra celui du soulagement, de l’extinction de la douleur ; le sang du désespoir.
Ses orteils effleurent l’eau turquoise, son pistolet serré dans son poing, il avance dans l’eau, calmement, sans ciller. Ses poils se hérissent.
Il ne s’arrête pas. L’espoir d’une délivrance est trop intense pour abandonner maintenant. Son cœur s’accélère et on peut deviner un sourire caché sous la barbe de son visage squelettique. Ses pieds peinent à toucher le sable, alors il avance, encore, Kalyilla à la main alors que ses traits se détendent. Au milieu de la mer, il aperçoit à peine la côte ; il arrive au but, abattu, anéanti, épuisé.
La terre d’où il vient est déserte à présent, plus aucun sentiment n’émane de cette vie pleine de péripéties qui avait fait de lui un homme comblé. Son index, d’un geste sûr, se pose sur la gâchette ; aucune hésitation ne vit en lui, aucun doute, aucun regret ; aujourd’hui, c’est bel et bien terminé. Sa mâchoire se crispe, en attente de la douleur, un dernier regard vers l’horizon, comme un adieu à cette vie disparue. Les trois temps des valses tournent dans son crâne, comme pour lui demander de rester, comme pour le rappeler vers le monde de Rimbaud, comme pour lui arracher une nouvelle fois le cœur. Mais plus rien ne peut le retenir ; il est temps.
Il tire. Ses yeux se ferment alors que le plomb se mêle à son sang ; il sent le basculement, le fil de la vie, conducteur de la mort. Rien ne peut l’arrêter, la proximité de l’apaisement se propage en lui... La douleur s’intensifie encore, la délivrance se rapproche. Il sait qu’il est prêt à se noyer dans la crinière d’Isabella, et à se délecter, jusqu’à la dernière goûte, de son parfum envoûtant.
Il est Armand Zechir, et alors que l’air se fait rare, sa vie passée et ses rêves inachevés se battent dans le fond de ses yeux pour le forcer, une dernière fois, à se souvenir des nuits d’amour passées sur la poésie de Baschung et devant les tableaux de Manet.
Il s'agit d'un jet du roman que j'ai rédigé il y a quelques années, avant de détruire entièrement. Je devais avoir 14 ans.
Ce texte est loin d'être parfait ou d'émaner quelconque fierté en moi.
Cela-dit, cette trouvaille me fait beaucoup sourire puisqu'elle a vu le jour à un moment de ma vie qui fait écho avec ce que je vis actuellement.
Notamment, lorsque j'écris : "sa démarche, le long de ces routes désertiques, lui avait donné la chose qu’il redoutait le plus ; le temps de réfléchir (...)".
Alors je m'interroge : la vie est-elle une perpétuelle boucle de réflexion inachevées ? Un boomerang d'équations insolubles ?
Les pans les plus torturés de nos personnalités sont-elles ancrées en nous à tout jamais ?
Je préfère la vision positive, finalement. Comme une intime conviction que cette (re)lecture m'apporte un élan incroyable d'optimisme et une envie viscérale d'aller de l'avant !
En voici un extrait :
C’est la fin. Après des jours et des nuits de marche, Armand arriva sur la rive, pour respirer l’air marin.
Il était persuadé que la solitude des longues plages allait vider son esprit de toute la tristesse et la colère qui s’étaient installés en lui pour creuser un silence profond dans son cœur.
Il était persuadé que ses tourments allaient disparaître avec la soif et la faim. Ce, pour qu’il devienne, grâce à cette douleur, un simple corps souffrant, sans émotions, qui ne sait ce qu’est vivre et qui ne se contente que de survivre.
Cependant, après des jours et des nuits de marche, son regard trahissait son désespoir. Et sa démarche, le long de ces routes désertiques, lui avait donné la chose qu’il redoutait le plus ; le temps de réfléchir, le temps de se souvenir, le temps de mourir.
(...)
Quelquefois, il était presque parvenu à oublier. Mais à présent, la douceur de ce paysage bucolique venait hanter toutes ses perceptions et faisait imploser son cœur. Cette douceur ne faisait qu’augmenter la douleur. Il ne pouvait plus se résilier à essayer de vivre.
Son arme avait connu une multitude de sangs différents : le sang du devoir, le sang des règlements de comptes, le sang de criminels, le sang de la vengeance. Aujourd’hui, elle connaîtra celui du soulagement, de l’extinction de la douleur ; le sang du désespoir.
Ses orteils effleurent l’eau turquoise, son pistolet serré dans son poing, il avance dans l’eau, calmement, sans ciller. Ses poils se hérissent.
Il ne s’arrête pas. L’espoir d’une délivrance est trop intense pour abandonner maintenant. Son cœur s’accélère et on peut deviner un sourire caché sous la barbe de son visage squelettique. Ses pieds peinent à toucher le sable, alors il avance, encore, Kalyilla à la main alors que ses traits se détendent. Au milieu de la mer, il aperçoit à peine la côte ; il arrive au but, abattu, anéanti, épuisé.
La terre d’où il vient est déserte à présent, plus aucun sentiment n’émane de cette vie pleine de péripéties qui avait fait de lui un homme comblé. Son index, d’un geste sûr, se pose sur la gâchette ; aucune hésitation ne vit en lui, aucun doute, aucun regret ; aujourd’hui, c’est bel et bien terminé. Sa mâchoire se crispe, en attente de la douleur, un dernier regard vers l’horizon, comme un adieu à cette vie disparue. Les trois temps des valses tournent dans son crâne, comme pour lui demander de rester, comme pour le rappeler vers le monde de Rimbaud, comme pour lui arracher une nouvelle fois le cœur. Mais plus rien ne peut le retenir ; il est temps.
Il tire. Ses yeux se ferment alors que le plomb se mêle à son sang ; il sent le basculement, le fil de la vie, conducteur de la mort. Rien ne peut l’arrêter, la proximité de l’apaisement se propage en lui... La douleur s’intensifie encore, la délivrance se rapproche. Il sait qu’il est prêt à se noyer dans la crinière d’Isabella, et à se délecter, jusqu’à la dernière goûte, de son parfum envoûtant.
Il est Armand Zechir, et alors que l’air se fait rare, sa vie passée et ses rêves inachevés se battent dans le fond de ses yeux pour le forcer, une dernière fois, à se souvenir des nuits d’amour passées sur la poésie de Baschung et devant les tableaux de Manet.
Maks_- Messages : 5
Date d'inscription : 05/07/2019
Localisation : Paris
Re: Un étonnant renouveau
... c'est amusant, je me suis posé la question tout récemment et suis arrivée à la conclusion que oui.Maks_ a écrit: la vie est-elle une perpétuelle boucle de réflexion inachevées ? Un boomerang d'équations insolubles ?
J'imagine qu'on doit pouvoir boucler le truc, quand même. Un jour. A force.
Dans mon cas oui, je le crains.Maks_ a écrit:
Les pans les plus torturés de nos personnalités sont-elles ancrées en nous à tout jamais ?
Mais je ne vois pas pour autant de réelle incompatibilité entre des pensées sombres et une forme d'optimisme... les deux cohabitent en moi, et je peux à la fois ressentir un profond désespoir et une sorte de vision détachée et non résignée de la vie - que l'on pourrait assimiler à de l'optimisme.
Tu écrivais de cette façon à 14 ans ? je suis impressionnée.
Invité- Invité
Re: Un étonnant renouveau
Wyrdwyn a écrit:J'imagine qu'on doit pouvoir boucler le truc, quand même. Un jour. A force.
Finalement, lorsque l'on s'en rend compte, n'est-ce pas un chemin vers la rédemption ?
Wyrdwyn a écrit:Mais je ne vois pas pour autant de réelle incompatibilité entre des pensées sombres et une forme d'optimisme...
N'est-ce pas deux forces qui se repoussent ? Le tout est de laisser l'un l'emporter sur l'autre, non ?
Wyrdwyn a écrit:Tu écrivais de cette façon à 14 ans ? je suis impressionnée.
Oui, je devais avoir cet âge là il me semble !
Puis j'ai complètement arrêté d'écrire. Je m'y remet peu à peu ces dernières semaines
Maks_- Messages : 5
Date d'inscription : 05/07/2019
Localisation : Paris
Re: Un étonnant renouveau
... sauf si on tourne en boucle à ce niveau...Finalement, lorsque l'on s'en rend compte, n'est-ce pas un chemin vers la rédemption ?
Qui se repoussent, oui, mais qui chez moi, curieusement, se (ré)génèrent l'une l'autre.N'est-ce pas deux forces qui se repoussent ? Le tout est de laisser l'un l'emporter sur l'autre, non ?
En y réfléchissant bien, c'est comme si je ne pouvais ressentir d'optimisme sans avoir pleinement conscience de toute cette noirceur.
Parce qu'il me faut le contraste ?
----------------
Je n'arrive pas à écrire en ce moment. L'inspiration est chez moi un phénomène très fragile qui se dissout si je le force.
Je suis admirative de tous ceux à qui les mots arrivent sans effort.
Invité- Invité
Re: Un étonnant renouveau
Peut-être que le contraste nous permet de ne pas demeurer dans un flou constant. Nous sommes donc conscients de ce qu'il y a des deux côtés.
Peut-être que nous devons réveiller nos névroses, les pousser dans leurs derniers retranchements. Ce, pour mieux les guérir ?
As tu tenté l'écriture intuitive ?
Parfois ce sont nos barrières qui bloquent notre inspiration, non ?
Je ne suis pas certaine que les mots arrivent sans efforts.
Peut-être que nous devons réveiller nos névroses, les pousser dans leurs derniers retranchements. Ce, pour mieux les guérir ?
Wyrdwyn a écrit:Je n'arrive pas à écrire en ce moment. L'inspiration est chez moi un phénomène très fragile qui se dissout si je le force.
As tu tenté l'écriture intuitive ?
Parfois ce sont nos barrières qui bloquent notre inspiration, non ?
Je pense qu'il faut de grands efforts pour manier les mots. Qu'il faut aussi sortir de sa zone de confort !Wyrdwyn a écrit:Je suis admirative de tous ceux à qui les mots arrivent sans effort.
Je ne suis pas certaine que les mots arrivent sans efforts.
Maks_- Messages : 5
Date d'inscription : 05/07/2019
Localisation : Paris
Re: Un étonnant renouveau
Bonne question... quiconque a la réponse...Peut-être que nous devons réveiller nos névroses, les pousser dans leurs derniers retranchements. Ce, pour mieux les guérir ?
L'écriture intuitive ? Si cela consiste à laisser courir son stylo sur la feuille sans contrainte, je l'ai pratiquée, je peux couvrir des pages entières de phrases sans intérêt que j'ai du mal à relire tant je les trouves répétitives, fades, convenues.
Ce dont je suis le plus contente en matière d'écrits (ce qui ne veux pas dire que ce serait jugé bon d'un point de vue extérieur) m'est toujours venu sous une sorte d'impulsion émotionnelle profonde, sorti sous une forme quasi définitive qu'il n'était plus besoin que de poncer, lisser, pour lui donner la forme que j'acceptais comme définitive...
Invité- Invité
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