Fata's présentation II le retour.

"Expand your mind". C'est une phrase relativement récurrente que l'on peut entendre dans certains disques (par ex de house). S'agit-il de savoir plus ? Que ne dit-on alors "reprenez des études" ? Parle t-on de tel type de yoga ? Mais le yoga précisément s'efforce de suspendre la pensée. Entendant cette formule j'ai beaucoup réfléchi. J'en suis arrivé à la conclusion qu'elle n'a aucun sens, ou plutôt qu'elle est une philosophie à fin de sensualisme.

Je lis avec consternation parfois ici-même des allégations absurdes, de surcroît formulées n'importe comment. L'expresssion désinhibée d'une ignorance inquiétante. Ce n'est pas que je n'ai rien à en dire, bien au contraire, tant de choses se présentent à mon esprit qu'il est impossible de toutes les développer, pas même la moitié, pas même un dixième, pas même un millième. Souvent le surdoué se plaint de la lenteur de l'écriture manuelle, ce qui lui donne une écriture illisible. Mais qu'est-ce donc quand ce qui nous vient à l'esprit réclamerait plusieurs vies pour en écrire la seule introduction ? Il faudrait que le lecteur puisse lire EN MÊME TEMPS tous les passages en une seule phrase ! Que s'épousent en une seule phrase les commencements, les développements et les fins et se laisse entraîner tout entier dans ce brusque vertige. "Expand your mind". Comme si cela pouvait relever de l'effort de ce même esprit qui n'est pas encore "expandu" et de ce fait dans l'impossibilité d'être plus que soi...

"Sois toi-même". Je me demandais hier: que sait-on ? Et dans la ligne de fuite d'une méditation approfondie j'en vins à me demander: "Peut-on savoir ?". Que sais-je de moi ? Que ne sais-je pas de moi ? Nul doute que cette deuxième question pointe un contenu autrement plus vaste que le "ce que je sais de moi". Puis-je me connaître ? Sais-je ce qu'est un homme ? Jusqu'où va l'homme ? Quel homme je serai en un temps T que je n'ai pas encore atteint ? Que sont les ressorts profonds (presque occultes) de mes désirs et l'idée que je me fais de ma finalité, de la manière de penser de cet inconnu, c'est à dire de moi, demain ? Mon idée du bonheur a ses périodes bleues et roses. Exception mise à part, je ne sais pas ce que je serai quand je leur aurais adjoint en sus les périodes mauves et blanches et vertes. Quelle est ma totalité. Je ne sais pas, tu ne sais pas. A l'injonction " sois toi-même alors je substituerai:" Deviens !".

On s'implique parfois en ne s'impliquant pas. En refusant par révolte de se mêler de la médiocrité commune. Ce silence est un "non" radicalisé.
Il y a des choses sacrées que l'on ne peut pas profaner en les étalant. Alors on secoue la poussière de ses chaussures et discrêtement on va contempler, là où tant croient qu'il n'y a rien à voir. Ils sont devant un voile et déduisent que le voile seul a de la réalité. On pointe la lune, ils regardent le doigt. Quand on a certaine pensée, on cherche aussitôt à nous maintenir dans une assignation à résidence. "Tabou ! tabou". Tu as gagné, démocratiquement, le droit de te taire ! remercie la société, si tu te tais, elle ne se dressera pas contre toi !" Comme aux bons vieux temps mais sur une base plus démagogique on t'autorise seulement à être utile à l'essaim, quand bien même il se fourvoirait vers les plantations empoisonnées.

On ne devient pas adulte en renonçant aux questions de l'enfance, on devient vieux.

Une chose que l'on peut dire (techniquement) vaut-elle la peine d'être dite ? Si elle doit se rabaisser à entrer dans le langage collectif, quelle valeur peut-elle bien avoir ? Ajouter au flow commun c'est être saisi dans sa pente. Qu'irions-nous faire à nous évaporer dans un désert ?

Surdoué ? A quoi ça sert si c'est pour perfectionner un donné ? C'est l'altérité qui vaut, un garagiste qui roule sur l'autoroute peut parfaitement connaître les moteurs, ils n'en roule pas moins sur la même route que le tout venant. Non, il s'agit  de faire enfin entendre un autre son de cloche, ou rien. Ou bien on ne fera que continuer le connu. Nous savons la direction globale des choses: tout, y compris la démocratie, repose sur des énergie fossiles en voie de disparition. Alors, surdoué, ce nouveau chemin ?

A mauvaise question, pas de réponse. C'est un double respect: envers le sujet d'abord qu'on ne veut pas compromettre et envers le questionneur, qui est libre de battre la campagne, si ça l'amuse.

Je me suis toujours senti étranger à la société. Cette société est la leur, pas la mienne. Cette usine à peuples a envahi tout l'espace et totalisé tous les recoins du monde, et se pense invincible (sa mort est entrain pourtant) mais elle ne m'a jamais convaincu. La foule m'est contraire. "L'opinion" n'est qu'une chose sans pensée, une masse gélatineuse qui va sur les pentes qu'on lui tend. La "majorité" n'est qu'un pis-aller fondé sur des absurdités énoncées avec un air grave. Une somme de compromis arbitraires y élabore des "lois". La société n'a d'autre discours qu'elle-même, elle ne peut rien penser en dehors de ses rescrits. Ce qui se passe en moi pourtant est infiniment plus riche, profond, durable, enrichissant que ce qui se passe au-dehors.

J'éprouvais le besoin de me désaltérer à même la vie. Retrouver la source, l'originel, le vivifiant. "Il est comme un arbre planté près des cours d'eau". Quelque chose de plus pur de plus vrai de plus essentiel m'était nécessaire. Les interminables déclinaisons de produits seconds (intellectuels, ontologiques, spirituels) avaient une saveur de mauvais cantine. Je devais y aller voir par moi-même.

Beau, beau comme l'heureux demain qui nous fait parvenir ses rayons. D'un sourire de miel, âme de toute enfance qui rafraichit les jardins.
Je suis de cet être là, de cette candeur aux regards de rosée.
La buée de tes lèvres déplace les galaxies.
Ce semis de diamants qui dérivent évoque les perles de tes boucles.
Va vers l'enchantement qui vient vers toi sembles-tu dire.
Tu m'invites à une autre existence en m'octroyant un autre être.
Il y a tant de secrets qui rayonnent sous mes yeux que je me liquéfie parfois dans ces fraîs soleils.
Ta parole traduit tous les chants des oiseaux, tous les souffles de la mer, tout le soupir des astres.
C'est là blotti au clair de tes secrets que je goûte ma vie. Un hydromel solaire coulant dans mes veines.
Mon cœur en moi devient une bulle dansant au soleil.