Zébritude et résilience

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Message par Invité Sam 22 Sep 2012 - 17:25

Je n'ai pas vu de discussion sur le lien entre la zébritude et la résilience. J'ai lu quelques messages sur le fait de remonter la pente, de surmonter ses déprimes...Pour moi, ce n'est pas de la résilience. Ce mot désigne la capacité à surmonter les traumatismes. C'est un sujet qui me taraude depuis longtemps avant que je ne connaisse la zébritude : pourquoi certains peuvent surmonter les pires des événements et d'autres se laisseront mourir. Ma question sera plus spécifique : voyez-vous un lien entre la zébritude et la résilience ? Existe-t-il un lien ?

Je me rends compte que c'est un sujet sensible. Ceux, qui seraient les plus capables de répondre sur la base de leur expérience, ne voudront pas forcément s'exprimer. Vous pouvez ne pas décrire les traumatismes subits. Personnellement, je suis une résiliente, une survivor, qui a traversé plusieurs épreuves traumatiques. Cela ne veut pas dire que l'idée d'une abdication définitive ne me soit pas venue à l'esprit dans le passé. Et tout s'emmêle un peu dans ma tête entre ce qui viendrait de la zébritude et de ces traumatismes.

PS : malgré le ton de mon message, je suis relativement heureuse, équilibrée.

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Message par Fata Morgana Sam 22 Sep 2012 - 17:49

Je suis un enfant-martyr. Je suis né avant terme avec ce qu'on pense avoir été une encéphalithe. J'ai été placé dans des centres où j'ai été maltraité et qui m'ont éloigné de l'école. On m'y a par exemple et entre autres fait remanger mon vomi. Je n'ai presque pas suivi de scolarité, tout ce que je sais je l'ai reccueilli tout seul. J'ai été placé dans une multitude de familles d'accueil. A l'adolescence, la sucession des cliniques psy et des maisons de repos a duré dix ans au bas mot. Les médecins m'ont dit condamné. J'ai abusé des médicaments valium, mandrax, ect jusqu'à la folie. On m'a diagnostiqué une dépression endogène ET exogène. J'ai commencé les somnifères à quatre ans. Je prends des médicaments encore aujourd"hui. je suis passé par l'alcool et la drogue. j'ai connu des accès d'amnésie rétrograde (souffrance indicible). Je suis marié, j'ai deux enfants dont un autiste de Kanner... (et une fille surdouée.) Ma mère était quasiment folle. Je n'ai jamais travaillé. j'ai une carte d'invalidité. je ne vois que d'un œil, j'ai été gravement asmathique... On pourrait continuer la liste.
Je dois dire qu'indépendamment d'une vie de foi salutaire (et pour cause Wink ) Je suis un homme heureux. Je ne suis pas ou plus (totalement) l'objet de mon passé. Je pense, je crée, je médite, j'étudie, je compose de la musique, je suis moi-même. Je pense donc être résilient...
J'ai découvert ma zébritude à 53 ans environ. Tout le reste du temps je me suis cru fou, frappadingue, anormal, mentalement diminué...
Parfois, ce qui m'en reste, c'est juste que j'ai envie qu'on m'écoute, car je pense avoir pas mal de choses à dire sur pas mal de sujets...Voilà.
J'ignore l'impact de ce passé sur ma zébritude, qu'est-ce qui est dû à quoi, mais au fond, je m'en moque. Sans doute que si on m'avait placé dans un milieu adapté (à l'époque les écoles spécialisées n'existaient pas, pas plus que des tests valables) j'aurais sans doute fait des étincelles. Mais bon. La résililence consiste pour le principal en réconciliation, avec les autres, son passé et soi-même. C'est chose faite.
Ah oui, mon père a tenté de me défenestrer... What a Face

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Message par Invité Sam 22 Sep 2012 - 18:29

Wahou... Je ne m'attendais pas à ce type de réponse. Quel courage ! Merci en tout cas.

Pour moi, être résilient signifie avoir traversé ces traumatismes et arriver à vivre "normalement". Mais la réconciliation n'est pas forcément au rendez-vous. L'âge y est sûrement pour quelque chose (je ne suis pas en train de te dire que tu es vieux...je parle de distance temporelle). Contrairement à toi, malgré les vicissitudes de la vie et le contexte très défavorable, j'ai pu exploiter mon potentiel. Et je crois que ma soif de connaissance et ma volonté de me réaliser sont des moteurs qui m'ont permis de tenir. La vie intérieure comme un refuge.


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Message par Fata Morgana Sam 22 Sep 2012 - 18:42

Pour bien des zèbres la vie intérieure semble être en fait de toute façon la vraie. Souvent les contacts avec la société sont tendus, blessants et marqués par l'incompréhension. Du coup ce refuge de la solitude est l'une des caractéristiques (pas systématique bien sûr) de la zébritude.
Zèbre et introversion vont souvent de pair.
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Message par Invité Sam 22 Sep 2012 - 19:29

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Message par Invité Sam 22 Sep 2012 - 22:29

Ma question est très ouverte...car je pense que les différentes interprétations et réactions donnent des points de vue intéressants.

Dans une situation traumatique, qu'on soit zèbre ou non, on est dans une situation de survie. La force psychique est plus importante que l'intelligence. Je me demande seulement si les processus mis en jeu diffèrent selon la zébritude ou non.

Par exemple, ma soeur, qui a vécu la même chose que moi, a été diagnostiquée surdouée...Mais elle n'a pas su résister. La schizophrénie a été le processus qui l'a sorti de ce réel qui était devenu insupportable pour elle. De mon côté, le parcours a été très différent. Et pourtant, j'ai aussi utilisé mon monde intérieur pour résister. J'ai été mariée, j'ai une petite fille et j'ai "réussi" selon la norme sociale (mais ma vie personnelle est une catastrophe).

Je pense que Fata a compris ma question : est-ce que la zébritude renforce ou non la résilience ? Est-ce que les traumatismes nous marquent dans le développement de cette zébritude ?

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Message par Invité Sam 22 Sep 2012 - 23:13

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Message par Fata Morgana Dim 23 Sep 2012 - 8:50

La créativité a été pour moi l'idéal échappatoire. Et je pense que sans la zébritude, je n'aurais pas disposé de ce recours. Je me suis mis à écrire au plus fort de la crise adolescente qui a été très dangereuse. Un ami créatif nous accueillait dans sa grande maison à la campagne et nous écrivions et dessinions en groupe en écoutant de la musique, lors de nuits blanches inoubliables. La zébritude comme source de créativité ET les bonnes rencontres au bon moment ont été salutaires.
Je pense que la douance est surtout un potentiel. En tant que tel il peut être plus ou moins investi par la personne qui en dispose. Quand j'étais jeune, les comportements originaux et voyants étaient beaucoup mieux supportés qu'aujourd'hui. Le monde croyez-m'en a énormément régressé en matière de liberté. Du coup "l'originalité", du moins dans certains milieux, était vue d'un œil plutôt favorable, du coup, exprimer sa zébritude ne nous faisait pas forcément passer pour des demis-fous car le monde était alors beaucoup moins conformiste et psycho-rigide...


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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 11:20

Mazarine, ce que je vais te dire n'est pas méchant et je ne veux surtout pas te vexer. Une analyse de mon texte ne fait pas avancer la réflexion. Je sais ce que j'ai écrit. J'ai pris l'exemple de ma soeur et moi car nous n'avons pas évolué de la même manière...Et heureusement, tous les zèbres ne sont pas identiques. Nous avons des points communs mais nous sommes tous différents. Je voulais prendre un exemple où la zébritude n'a pas donné le même résultat.

Quant à ma zébritude, je n'en ai aucun doute même sans diagnostic officiel. J'ai rencontré plusieurs THPI diagnostiqués. Le dialogue était fluide et je m'y sentais bien. Le rythme était celui qui me convenait. Ceux-ci m'ont dit que j'étais zèbre sans aucun doute. Cela me suffit. Je ne suis pas intéressée par le fait d'avoir 125, 140 ou 160 de QI. Cela ne me sert en rien.
Je n'ai pas envie de voir un psychologue car il fera une fixation sur mes traumatismes au lieu de regarder mon fonctionnement interne. Je n'en ai rencontré qu'un, à l'occasion d'une thérapie de couple. La seule chose qui l'a intéressé était mon passé alors que je le manipulais pour lui faire dire à mon ex ce que je pensais de la situation. Il n'y eut qu'une séance et pour cause...même si le psychologue insistait pour me revoir dans des séances individuelles !

Fata, c'est intéressant ce que tu dis. J'ai un domaine de prédilection qui est la littérature. J'écris et ce processus d'écriture me fait un bien fou. Dans les périodes troublées, je me suis plongée dans le dessin, l'écriture. Je l'ai fait seule mais je suis d'accord que la rencontre d'un être qui te soutienne aux bons moments est essentiel.
Ce que tu dis par rapport à ton époque me fait penser à une de mes spécificités. Je suis asiatique et j'ai été baignée dans la culture asiatique. J'ai du faire un effort de décodage des conventions sociales très important. Mais je peux me permettre d'être moi sans choquer personne car je suis asiatique....Les gens mettront mes réactions plus sur un décalage culturel, ce qui n'est pas vrai. Finalement, cela a du bon d'être physiquement différent Smile

La réaction qui m'insupporte quand les personnes apprennent quel est mon passé est la pitié ou la gêne. Un non résilient, en lisant ce que tu as écrit, a habituellement la réaction : "Ah, Fata, mon pauvre, je suis désolé." Et là, le regard t'évite. Ma tactique dans ce cas est de faire de l'auto-dérision. Evidemment, je mets encore plus mal à l'aise les gens...Mais cela m'amuse et un grand rire éclate silencieusement en moi.
Et toi, quelle est ton expérience ? Si tu veux, on peut échanger par MP.


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Message par Doinel Dim 23 Sep 2012 - 13:42


Mon sentiment perso c'est que le zèbre présente un plus, soit pour s'enfoncer dans le trauma, soit pour en sortir et le sublimer.

Pour une raison qui m'échappe, je me suis toujours intéressé à la vie de certains artistes qui me touchent particulièrement (ex. Barbara, Marilyn, Brando, Louise Brooks, Truffaut, Dewaere, Gainsbourg). Comme par hasard, tous ont connu des traumatismes souvent terribles dans leur enfance, et la plupart me semblent être très rayés.
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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 15:17

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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 16:30

Je ne mets pas tout sur la zébritude. En fait, je pense que le potentiel zébré donne des moyens plus puissants pour faire face.
Par exemple, le zébré va réfléchir, va créer, va utiliser ses potentiels enfouis car il n'a pas le choix pour survivre. Il peut s'enfermer dans son monde pour s'évader. Dans les mêmes conditions, un non zébré s'appuyera sur sa force psychologique uniquement.
Ce ne sont que suppositions. Dans mon cas personnel, sans la littérature, sans l'imaginaire, je n'aurais pas réussi à faire face. A la base, je me sentais nulle dans tout ce que je faisais et les traumatismes m'ont encore plus enfoncé dans cette nullité. Comme pour me prouver que je valais quelque chose, j'ai lutté de toutes mes forces. C'était un pari. Et si je n'étais parvenu, je ne serai pas là...

Quand j'arriverai à écrire un long pavé sur mon expérience, je le ferai. C'est juré car je pense que tout témoignage peut aider...J'aimerais aussi avoir d'autres témoignages (il y a d'autres résilients, j'en ai identifié certains...).

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Message par Doinel Dim 23 Sep 2012 - 16:47

Mon hypothèse repose sur le fait que j'ai vu une étude avançant que les surdoués étaient en moyenne plus surexcitables dans les 5 domaines identifiés par Dabrowski (sensuel, psychomoteur, intellectuel, émotionnel, imaginaire). J'aurais tendance à voir ces surexcitabilités comme des boutons permettant d'aller soit plus haut, soit plus bas que la plupart des gens.
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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 17:12

Doinel, tu peux me donner les références de cette étude ?
Je suis assez d'accord avec ce point de vue.

Au cours de ma vie, quand j'étais au plus bas, je suis tombée en crise d'anorexie. J'ai vécu la dernière quand j'ai débuté ma carrière, seule à Paris. J'ai cru y rester. J'étais un petit squelette qui ne supportait plus aucun frottement de vêtement, dont les pieds ne pouvaient plus supporter le poids de ce corps...J'hantais ce corps. J'avais peur et en même temps, dans cette douleur, je me sentais vivre. Il aurait fallu d'un rien pour qu'un arrêt cardiaque m'emporte. C'est l'instinct de survie qui m'a donné une impulsion pour me nourrir à nouveau. J'avais trop de choses à découvrir, trop de beautés à percevoir, et d'amour à donner! J'avais une envie folle de ressentir tout intensément, quitte à ce que cela soit de la douleur. La période d'après, je me suis concentrée dans la recherche amoureuse Smile. Eros et Thanatos.

PS : Mazarine, je t'ai envoyé un MP et j'ai un doute sur son envoi car je n'ai pas compris à partir de combien de messages, je peux en envoyer Smile

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Message par Doinel Dim 23 Sep 2012 - 17:47


La voici:
http://www.positivedisintegration.com/Ackerman1997.pdf

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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 18:19

Merci Doinel. J'ai lu l'article. Dommage que l'échantillon soit aussi restreint. D'un point de vue statistique, la taille est insuffisante, surtout pour faire émerger les corrélations et non corrélations (j'ai fait des études de stat Smile ).
Par contre, sur le plan théorique, je trouve que ce point de vue est intéressant.

Par rapport au sujet de la résilience, si vraiment l'overexcitability psychomoteur est aussi discriminante, cela voudrait dire que l'individu zébré est capable de mobiliser plus d'énergie pour s'en sortir. Il serait plus capable de se donner l'impulsion pour s'en sortir...Mais l'overexcitability émotionnelle pourrait aussi le faire basculer dans la résignation, le faire plonger.

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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 19:04

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Message par Invité Dim 23 Sep 2012 - 20:32

Mazarine, je m'en doutais...Le premier pas est déjà de pouvoir en parler à une personne qui ne te jugera pas, qui sera bienveillante. Ce n'est pas facile de se dévoiler dans un contexte anonyme (le forum).

On ne se débarasse jamais de ses traumatismes comme personne ne peut panser tes blessures (ce que beaucoup recherchent à travers la relation amoureuse). Il existe un moment pivot où tu sens que ces traumatismes te rendent forte, que, sans eux, tu ne serais pas ce que tu es. Je ne sais pas trop comment l'expliquer (sauf par le pouvoir évocateur de la poésie). Quand tu as ce ressenti, c'est un signe d'acceptation...

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Message par Doinel Dim 23 Sep 2012 - 20:55

Tu as raison mais c'est le problème commun à la plupart des études sur les surdoués, avec le biais de sélection.

Dabrowski a défini le concept de "troisième facteur" de développement qui correspond à ce dynamisme interne dont tu parles. Il est certainement lié aux overexcitabilities, mais comme l'étude en question ne fait pas le lien (ou j'ai oublié), je me suis abstenu de le présenter comme une caractéristique potentiellement plus forte chez les surdoués.
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Message par fleurblanche Mar 25 Sep 2012 - 0:35

Mazarine a écrit: Car la résilience chez moi n'est pas une capacité mais un choix.

Je ressens la résilience comme une capacité, une sorte de « force intérieure » qui pousse à aller de l’avant.
Mais c’est vrai qu’il y aussi une question de « choix » dedans, car on peut prendre la décision d’avancer A CAUSE d’une responsabilité que l’on a (ex : un enfant à charge). Bien que je parle d'un ton impersonnel, c'est pourtant à partir de mon vécu que j'exprime ce que j'ai dit dans les 2 phrases précédentes. (Parler sur un ton impersonnel = prendre une distance émotionnelle pour ne pas se laisser replonger dans l'océan émotionnel vécu à l'occasion du trauma ? )

De toute façon, les facteurs influençant la résilience et les réactions aux traumatismes sont à la fois intrinsèques et extrinsèques. Si Bliss passe par ici, peut-être elle pourra nous en parler un peu plus (suis trop fatiguée pour rassembler et étoffer mes petites connaissances sur le sujet).

PS : La résilience se bâtit aussi.
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Message par Invité Mar 25 Sep 2012 - 20:49

Il est difficile de parler de ce sujet...Par traumatisme, je pense plus particulièrement aux événements que nous subissons et que nous ne maîtrisons pas. Je ne parle pas de ce qu'on s'auto-inflige. Généralement, ces violences contre soi sont des expressions de mal être (par exemple, l'anorexie)...Evidemment, nous avons chacun un seuil de tolérance plus ou moins élevé. Il m'est arrivé de sous-estimer l'impact d'un événement sur un être que j'aimais en ne me basant que sur mon seuil de tolérance. Grave erreur !

Si je reviens sur mon cas personnel, outre cette force intérieure, une chose m'a aidé. La majorité du temps, je vis une chose et, en même temps, je me vois vivre cette chose et me demande ce qu'il adviendra par la suite de cette expérience... C'est un peu handicapant dans la vie de tous les jours. Mais je dois reconnaître que cette faculté m'a aidée. Je me voyais dans ce trou sans fonds comme si ce n'était pas vraiment moi qui vivait le drame qui se déroulait. Le traumatisme fait ses dégâts sur moi comme en mon absence.

Le problème est que si les traumatismes se répètent, cet effet de distanciation devient de plus en plus important. Ce phénomène m'a fait peur, réellement peur....

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Message par Invité Mer 26 Sep 2012 - 21:35

Après avoir pensé, repensé comment je vais dire ce que j'ai promis de dire, je vais vous faire la version courte, la vision descriptive. Ce choix va impliquer la suppression de mon ressenti...peut-être...peut-être pas.


XXXXXXX (partie effacée)

Qu'est-ce qui m'a définitivement réconcilié à la vie (pas avec mon passé) ? C'est la présence de ma fille et mon divorce. C'est merveilleux de voir cette vie qui commence Smile. J'ai eu peur, très peur avant de l'avoir. Je m'imaginais incapable de l'aimer, capable de la laisser pour partir n'importe où...Et le divorce m'a obligé à réfléchir à ma conception de la vie, à ma relation particulière avec les hommes (mes deux premiers hommes, mes deux pères m'ont abandonnée).

Fondamentalemnt, j'ai eu la chance d'avoir été aimée (même si mal aimée) par ma mère, d'avoir été soutenue par plusieurs professeurs (l'un a dit à ma mère, que je parviendrais toujours à faire ce que je voudrais). Au fonds, tout au fonds, je sens un optimisme indestructible en moi. Quelque chose de fort. Je suis heureuse de pouvoir être euphorique dans des moments simples (même si je peux plonger dans le désespoir 5 minutes plus tard). La chose qui m'a toujours tirée vers le haut est la littérature, la poésie. Quand le monde réel était trop dur, je me réfugiais dans la lecture. Elle fut une compagne fidèle et sans faille qui me permettait de rêver, de réfléchir. Malgré tout ce qui m'est arrivé, j'ai eu le parcours envié "classe prépa - grandes écoles".

Avec le recul, je dirais que je suis ce que je suis aujourd'hui grâce à ma vie. J'ai connu la faim, l'abandon, la violence psychique, le deuil, la perte d'un être cher dans une presque folie. Mais d'autres dans le monde ont subi des horreurs, de terribles horreurs. Quel que part, j'ai eu de la chance, celle de rencontrer les bonnes personnes aux bons moments. Les nombeux voyages que j'ai eu la chance de faire m'ont fait prendre conscience que le malheur pouvait être sans fonds...

Je me rends compte que j'ai une force incroyable. Et je dirais que j'aime la vie. Oui, je savoure ce qu'elle peut m'offrir de beau, de bon. Je me montre humble par rapport à elle.


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Message par Kateo Mer 26 Sep 2012 - 23:37

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Message par Invité Jeu 27 Sep 2012 - 20:27

Je vous remercie pour votre message. Je dois avouer qu'après avoir publié le mien hier soir, j'étais dans un état émotionnel intense...

Cela prend du temps pour savoir se protéger. Certains utiliseront la froideur, d'autres le rire. Vous allez trouver votre manière personnelle de le faire. Et je pense qu'on n'a pas besoin de partir loin physiquement pour être en fuite.

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Message par fleurblanche Ven 28 Sep 2012 - 0:35

SoleilSombre a écrit:Je vous remercie pour votre message. Je dois avouer qu'après avoir publié le mien hier soir, j'étais dans un état émotionnel intense...
Je peux le concevoir... Raconter c'est parfois comme replonger dans la tempête émotionnelle vécue au moment des évènements. Je me suis toujours demandé si ceux qui racontent arrivent à garder une distance émotionnelle avec les faits qu'ils racontent, parce que ça me paraissait difficile à faire...

Cela prend du temps psour savoir se protéger. Certains utiliseront la froideur, d'autres le rire. Vous allez trouver votre manière personnelle de le faire. Et je pense qu'on n'a pas besoin de partir loin physiquement pour être en fuite.

Exact : les réactions d'évitement... Il y a quelques temps, dans le cadre de mon travail, des collaborateurs extérieurs à notre boîte nous ont suggéré de tester sur nous-mêmes (concepteurs), les modules et outils que nous mettions à la disposition de nos travailleurs du terrain pour soutenir psychologiquement les populations vulnérables. Le jour même, j'ai averti mes patrons que je ne serais pas disponible pour "tester" ces outils. Car tester commençait avec évoquer les traumatismes vécus, et je ne me voyais vraiment pas passer en revue tous mes traumas passés devant un groupe de personnes, et le faire de manière non volontaire. Car passer en revue = revivre les émotions, et en plus je me disais que l'évocation de mes traumas pouvaient choquer le reste du groupe. Sans compter que je risquais aussi de m'imbiber, comme une éponge, des traumas des autres. Est-ce que c'est de la fuite ? Je dirais plutôt que j'ai appris à connaitre mes limites, et donc à tenir compte d'elles. De la même manière que chacun a des limites sur le plan physique (exemple : force musculaire) différentes de celles des autres, on a aussi des limites émotionnelles qui diffèrent d'un individu à l'autre.

Quant à la protection, je dirais qu'il y a des domaines dans lesquels on est plus exposé que dans les autres (ex : vie professionnelle, relations sentimentales, vie familiale, etc). ça dépend des traumas vécus, mais aussi des "faiblesses", ou "points faibles" personnels. Il y a des gens qui vont répéter les mêmes schémas, et donc éventuellement revivre les mêmes traumas, à cause de ce qu'ils ont un faible pour telle ou telle chose, ou pour tel ou tel type de personne. Et donc, tant qu'ils n'auront pas résolu (ou au moins mis sous contrôle) ce faible qu'ils ont, ils se referont traumatisés, avec leur propre "complicité". Je parle encore de manière impersonnelle (pour garder une distance émotionnelle sans doute) mais c'est les leçons que j'ai tirées de mon vécu.

Concernant la résilience, je prie souvent que mes filles aient "hérité" des mêmes capacités que moi.
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Message par Grognon Ven 28 Sep 2012 - 8:01

Bonjour,

Je vais vous parler de ma propre expérience. J'ai perdu mon petit frère à 20 ans, il avait 14 ans. Décès d'un arrêt cardiaque, un accident à l'époque... Je commençais juste à me frotter au monde du travail, déjà que les relations étaient difficiles...
Cette époque je l'ai vécue "hors de mon corps", je regardais un automate manger, dormir, travailler... et moi je me réfugiais dans ma tour, je me coupais du monde pour ne pas en souffrir, c'était assez comme ça.

Quelques années après, nous découvrions la maladie génétique : tous mes frères et sœurs touchés, nous étions cinq à la base, nous voilà quatre dont trois mourants... Alors voilà, rebelote, je me coupe du monde qui déjà me fait souffrir, là c'est trop ! Bien évidemment, incapable d'extérioriser tout ça, c'est beaucoup trop. Je suis à nouveau cet automate. "Salut, ça va ? Ouais et toi ?" Et à mon bureau sans réponse, ce n'est qu'une histoire de forme...

Oui mais voilà, à force d'intérioriser, c'est le corps qui finit par dire je souffre. Les problèmes de santé arrivent, et entre temps je n'ai rien trouvé de mieux que de me coller avec une perverse narcissique. Ca tombe bien, comme ça j'explore mon côté minable et bon à rien à fond !

Et au bout de quelques années (ah oui quand même, six ans !!!) où je me regarde "vivre", c'est trop : j'explose ! Marre de mes frères et sœurs qui souffrent sans que je puisse prendre un peu de leur souffrance, marre de l'automate au travail, marre des "copains" opportunistes !

Je me casse, et fini le monde extérieur autre que le travail ! Ben oui quoi ils font rien que de m'agresser, ils sont méchants, profiteurs, bêtes, et ils s'imaginent que je les vois pas avec leurs gros sabots !!!! Rrrrrrrrrrrrrrrrrr !

Et je me coupe du monde, c'est facile, c'est doux... mais c'est chiant ! Et oui, on est différents mais nous sommes faits pour vivre avec nos cons génères (je sais je suis trop imbu de ma personne et j'y travaille, je commence bien à voir qu'ils ont des choses à m'apprendre). Je commence à "fréquenter" des filles, je cherche mais quoi ?!

Un jour, un 8 septembre il y a un an, je fini par comprendre ce que je cherche quand je tombe dessus : une personne qui me comprenne car elle vois les choses comme moi. Et oui, c'est mon aimée ! Et je rencontre sa famille, et oh surprise : certains fonctionnent comme moi ! Mon dieu quel délice, même pas besoin de finir mes phrases, il comprends mes raccourcis... Il rit de mes blagues !!!!! Moi qui suis habitué à rire cavalier seul !

Ben voilà, maintenant je suis ici, je peux échanger avec plus de personnes encore...

Enfin, pour revenir sur la résilience, je crois que c'est non seulement une affaire de personnes mais aussi de "hasard", de rencontres, même si nous les provoquons. De plus, si on gratte un peu, on s’aperçoit que bien souvent les "gens" ont eux aussi des misères qu'ils ont surmonté, parce-que la vie continue et que rester sur le trottoir... ben on a pas trop envie, alors on continue d'avancer comme on peux...

Voilà, c'est tout ce que j'ai à dire sur le sujet...

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Message par Mégalopin Ven 28 Sep 2012 - 13:30

Grognon a écrit:Ben voilà, maintenant je suis ici, je peux échanger avec plus de personnes encore...

Hi hi Wink

Bonjour Grognon king

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Message par Invité Ven 28 Sep 2012 - 21:07

Tout le monde a connu une expérience triste, traumatisante...sauf que le seuil de tolérance fera que nous n'aurons pas la même vision de cette expérience.

Je prends l'exemple du divorce. Certains ne s'en remettent jamais tout à fait. Lorsque j'ai vécu cet événement (après 10 ans de vie commune), je me suis aperçue que j'ai rebondi très vite...Je dirais 6 mois. C'est rapide et pourtant, j'aimais mon ex-mari. Au cours de cette expérience, j'ai pu observer ce qui se passait en moi : juste après la rupture, j'ai accueilli mes ressentis (douleur, colère, honte, etc...) sans les filtrer. Je me suis laissée couler à pic pour toucher le fonds. Puis, j'ai remonté la pente. Tout ceci a eu lieu assez rapidement...A posteriori, le divorce m'a fait souffir mais n'a pas été un traumatisme.

Fleurblanche...J'ai une vision assez proche de la tienne Smile. Raconter rend la chose encore plus matériel, plus réel. Le fait d'en être capable a été une libération. Je parle uniquement de mon premier traumatisme. Maintenant, j'en suis capable. Avant, j'avais honte, honte de ne pas être comme tous les enfants avec leurs "vrais" parents, honte de dire qu'on m'a abandonnée. Maintenant, je le fais assez naturellement. Et je connais mes limites. J'ai le même souci que toi : je suis une véritable éponge. Ce n'est plus de l'empathie, c'est ressentir exactement ce que les personnes ressentent. C'est dur. Par exemple, je suis à l'intérieur de la douleur de Grognon. Cette rage rentrée, cette violence contenue pour ne pas exploser. Devenir un automate, en dehors de sa propre vie pour ne pas disparaître...
Comme toi, je souhaite que ma fille ait la même force que moi mais en mieux, qu'elle puisse profiter de cette vie malgré ses côtés sombres. Elle se prendra des claques, parfois grosses, parfois des pichenettes mais elle en prendra. Déjà, quand j'ai dû lui dire que mes parents m'ont abandonné, cela a été dur pour elle. Du haut de ses 4 ans, elle m'expliquait qu'elle était trop petite pour être abandonnée, qu'elle avait encore besoin de maman et qu'elle ne pourrait pas se débrouiller seule....

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Message par fleurblanche Sam 29 Sep 2012 - 0:27

Grognon a écrit:Enfin, pour revenir sur la résilience, je crois que c'est non seulement une affaire de personnes mais aussi de "hasard", de rencontres, même si nous les provoquons.

C'est tellement vrai ! Parfois il suffit d'une seule personne.

Il y a de ces rencontres, spéciales, qui aident à remonter la pente.

@SoleilSombre : waouh ! je te trouve courageuse d'avoir pu aborder le sujet avec ta petite. Moi, j'en suis encore à essayer des protéger ma fille la plus jeune des choses les plus dures de la vie.J'essaie en quelque sorte de "protéger" sa joie de vivre.


Dernière édition par fleurblanche le Sam 29 Déc 2012 - 2:44, édité 1 fois
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Message par ou-est-la-question Sam 29 Sep 2012 - 11:32

Bonjour à tous et à toutes
bon...j'ai les larmes aux yeux à vous lire...et je vais vous dire que je vous aime na !

au fait je croyais que la résilience (j'avais lu les bouquins de Cyrulnik)
c'était la capacité à rebondir face à des événements traumatisants....grâce au fait que l'on avait reçu de l'affection avant l'âge de 18 mois

j'ai rencontré des résilients et n'ai pas constaté (à ma petite échelle) qu'il y en avait plus parmi les zébrés

par contre l'excès des réactions (bonnes ou mauvaises) face aux événements traumatiques est , je le pense aussi ,propre aux zébrés

je suis moi-même une résiliente-zébrée-non-testée

et j'ai toujours pensé que je m'en étais sortie parce que j'avais reçue très jeune de l'amour de la part de mes grands-parents lorsque j'allais chez eux (amour est un terme minoré tant nous nous aimions)

qu'est ce que j'ai vécu ?

j'ai toujours vécu avec ma mère , mes parents ayant divorcé durant la grossesse de ma mère (jamais connu mon père) mon père ayant ensuite fait un désistement de paternité je porte depuis toute petite le nom de ma mère

j'étais une enfant extrêmement sage docile et obéissante...

ma mère qui sortait beaucoup, m'attachait avec des sangles dans mon lit le soir, dès l'âge de 3 ans .

elle avait acheté 3 chambres de bonnes au 6è étage ,qu'elle avait mises en contiguïté
la chambre du fond était la sienne, celle du milieu était le salon
la première chambre contenant une cuisinette/une salle de bainette/ et un couloir dans lequel il y avait mon lit

au début vue les longueurs des heures (elle partait parfois 10 heures de suite) j'avais fait pipi au lit

mais elle avait la main très leste , très très leste et elle me frappait sur le corps cuisses fesses et la marque de ses mains avec les 5 doigts restait longtemps marquée (je m'en rappelle quand elle me lavait dans la salle de bainette et qu'elle constatait ses marques )

elle me frappait pour n'importe quoi
et j'ai très vite arrêté de pisser au lit pour ne plus avoir peur d'être frappée

mais d'autres peurs sont arrivées : peur du bruit que j'entendais des voisins, peur d'un cambrioleur, peur d'un incendie etc etc

mes bras étaient sous les sangles de même mes jambes et mon ventre

à ce petit âge j'ai cru devenir dingue tant j'avais peur

alors je me suis très vite mise à inventer mon monde , à partir du dernier rayon de soleil se reflétant sur le papier peint du couloir j'inventais des histoires , j'inventais des dessins , j'inventais une vie merveilleuse

et alors j'ai eu de moins en moins peur et puis plus peur du tout

ma mère m'oubliait aussi très souvent à l'école et je restais des heures avec la concierge de l'école debout le dos collé au mur tant j'avais la trouille de cette vieille femme puante qui n’arrêtait pas de me dire que ma mère m'avait encore oubliée et qu'elle en avait marre d'avoir à me garder

mes grands-parents étant au courant de ma vie et j'allais chez eux dès que possible et chez eux j'avais totale liberté je n'avais aucune entrave aucun interdit

c'est chez eux que je réalisais tout ce que j'avais inventé dans ma tête quand j'étais attachée

je fabriquais des maisons de rêve en papier, je jouais des morceaux inventés sur le vieux piano, je peignais j'écrivais et je partais toute seule en vélo découvrir la campagne et parler avec la nature , parfois une journée complète avec un casse croute en bandoulière

j'ai été une année scolarisée chez mes grands-parents dans ces écoles de campagne mélangeant les années de primaire, car le frère de ma mère venait de décéder d'un accident de voiture et elle voulait que ma présence leur remonte le moral

mon oncle était un papa pour moi et il m'adorait il venait me voir très souvent chez ma mère me comblant de cadeaux

pendant cette année de scolarité j'ai appris mais appris mais appris je dévorais le programme du CP du CE1 (toute seule) alors que j'avais 5 ans

ce qui fait que l'année suivante en retournant à Paris chez ma mère j'ai été mise au CP (école publique) mais je m'ennuyais énormément. Ma mère a fait des pieds et des mains et je suis passée au CE1 puis au CE2 la même année

quand j'ai été au CM2 là elle n'a pas lutté contre le fait que je redouble alors que j'étais première de la classe (motif:trop jeune) ensuite j'ai décidé de ne travailler ni l'histoire ni la géographie pour tendre vers zéro dans ces matières afin d'avoir une moyenne "normale"....

je sentais que j'encombrais ma mère
Elle avait un haut poste dans la pub plein de sorties et me casait à droite à gauche chez des copines à elle

je me suis construite par opposition à elle
"elle fait ceci ?: ne le fais jamais, ma petite !"

quand j'ai eu 16 ans elle m'a annoncé qu'elle avait rencontré un GO au club Med et qu'elle allait se marier et vivre en Turquie
et elle partit 2 jours après

elle m'a mise en "internat de jeunes filles" à Bourges à 50 km de chez ma grand-mère qui venait d'être veuve et chez qui j'allais tous les week-end

là j'ai senti un grand abandon et j'ai décidé de ne plus l'aimer pour que cela soit moins douloureux pour moi
ce fut ma première rébellion contre elle

elle m'avait élevée dans une atmosphère pleine d'interdits où je devais la choyer la bichonner car elle travaillait et m'avait à charge

je la récompensais par une scolarité exemplaire et par tout un tas d'attentions à son encontre (faire les courses le diner le déjeuner la vaisselle ....)

et je me retrouvais sans elle

sa forte personnalité violente disparue me faisait un vide un sacré vide

mais là, j'ai pu ,comment dire... me réaliser oui c'est ça

de l'enfance et du début d'ado docile muette et sans histoire j'en suis sortie en commençant à ouvrir ma bouche et à exprimer mes idées

tout doucement au début , parce que j'étais plutôt dans l'observation des gens je me sentais en grand décalage
décalage avec les personnes de mon âge que je trouvais immatures
et décalage avec le monde adulte qui m'ennuyait royalement à part quelques fantaisistes

je m'occupais toujours de ma grand-mère et continuait à peindre ,à écrire de la poésie et plein d'autres trucs manuels

à 17 ans je me suis retrouvée seule en chambre de bonne a Paris pour faire les études que j'avais choisies, j'ai déconné un an à faire la fête et surtout à "parler aux esprits" avec une bande d'adultes que j'avais rencontré et qui faisait tourner les tables tous les soirs

je faisais aussi des petits boulots car ma mère avec son entrée au club med n'avait plus trop de ronds

j'ai redoublé car je ne suis jamais allée en cours ....(les lendemains après de telles soirées étaient très éreintants)

ensuite je me suis attelée et j'ai réussi mes années
toujours en continuant mes activités créatrices et en m'occupant de ma grand-mère
pendant ces années j'ai aussi appris à me débrouiller toute seule car j'ai un naturel curieux de ce que je ne connais pas
(électricité plomberie et tout le bricolage maison)

j'ai rencontré celui qui allait devenir le père de mes enfants à 20 ans sur les bancs de la fac

22 ans mariée à un pervers narcissique où j'étais devenue l'ombre de moi-même et prête à interner (heureusement je continuais mes activités créatrices) avec 3 enfants

12 ans pour clôturer un divorce houleux où j'ai cru perdre ma joie (car ma nature profonde est joie) et j'ai cru perdre aussi toute créativité

à 50 ans j'ai téléphoné à mon père (géniteur) qui ma répondu qu'il attendait mon coup de fil ...depuis 50 ans...!!

3/4 d'heure où j'ai du me farcir son discours tout imbu de sa personne et je me suis dit qu'heureusement que mes parents avaient divorcé car deux imbus autoritaires ensemble ,j'en aurais certainement encore plus bavé !

je ne m'entends pas avec mon beau-père (mais mieux qu'avant quand même)

ma mère et lui habitent à deux pas et je les reçois souvent "par devoir" comme je dis

pour moi utiliser le mot "devoir" c'est quand on ne peut plus utiliser le verbe "aimer"

mais je déconne car je l'aime toujours mais pas de la même façon disons que je "l'aimote"

tout cela a fait que je suis devenue plutôt dure tout en étant émotionnelle et réceptive

je pense que c'est d'une part l'affection que j'ai reçue petite de mes grands-parents et de mon oncle , et d'autre part le fait de n'avoir jamais arrêté de créer , qui m'ont permis de tenir et qui m'ont "sortie d'affaire"

aujourd'hui ? que dire ? déjà je n'en veux plus à personne depuis longtemps , car "en vouloir à quelqu'un" utilise mon énergie vitale de façon négative et ça j'en ai horreur

suis-je heureuse ? j'ai une définition du bonheur particulière en ce sens que pour moi le bonheur est instantané ;ce sont des instants qui sont heureux pas des périodes en durée .Alors ,oui ,je sais saisir ces instants
que je savoure pleinement

je suis toujours résiliente mais surement moins zébrée car j'ai mis ma pensée en stand-bye ces 5 dernières années (et je continue de créer, bien sur)
















































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Message par Invité Sam 29 Sep 2012 - 13:33

.


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Message par ou-est-la-question Dim 30 Sep 2012 - 10:38

merci White et merci à tous

figurez-vous qu'en écrivant sur ce que j'ai écrit, je me suis dit ;"tu envoies ou pas ?"

non pas que j'avais peur d'une "mise à nue" , quoique....mais comme si je craignais d'en rajouter une couche à mon tour

et puis je me suis dit arrête de te critiquer !

en lisant la sincérité des interventions ici et leur authenticité sans aucune plainte , j'ai donc posté

une petite anecdote d'hier soir ...
(au fait maintenant je crée non pas comme si je faisais des ex-voto mais par pur plaisir)

donc hier après-midi j'étais avec 3 amis en train de peindre le portrait d'une copine qui posait + faire une sculpture en terre que j'ai appelée "nourrice"

ensuite diner ensemble et un ami me sert de l'eau en me taquinant
et en me disant ,car j'avais accepté cette eau , "mais tu vas rouiller"!
(car j'ai plutôt l'habitude de boire du vin )

je lui réponds :tu sais , je bois 2 à 3 litres d'eau par jour ,si ce n'est plus en été

Celle qui nous accueillait de me dire aussitôt : mais tu n'as pas fait pipi de tout l'après-midi !

Ben je lui ai dit : "oui, je vais aux toilettes toutes les 12 heures et j'ai même une amie, qui , lorsqu'elle m'a passée un scanner m'a dit :mais tu as 4 litres dans la vessie tu n'as pas envie d'uriner ?
ben non , pas envie, c'est une séquelle de mon enfance ai-je rajouté doucement en souriant à mon hôtesse

et je lui ai raconté mon enfance , je ne sais pas pourquoi

étrange car deux fois hier j'ai narré cela

j'ai réalisé que jamais je ne l'avais fait en "public" !

j'en avais déjà parlé à une psychiatre (+ le reste) il y a une dizaine d'années quand je me croyais parano hihihi, séances où j'ai tenu 2 ans et durant lesquelles j'ai connu un profond ennui, (j'ai une petite formation en la matière aussi j'avais l'impression de balader la psy tellement je connaissais ses réponses à l'avance )

j'en avais parlé aussi à qu'à quelques proches mais c'est tout

hier soir ce n'est pas mal passé du tout, mon voisin de droite (un gentil monsieur) que je ne connaissais pas du tout, m'a parlé qu'il était toujours très étonné de la "force"qu'il y avait en l'homme et qu'il était en ce moment en train de faire une enquête pour comprendre comment son grand-père rescapé de Buchenwald (enfermé en tant que résistant) avait fait pour tenir le coup..

nous avons parlé de Cyrulnik de résilience puis naturellement nous avons abordé d'autres sujets de conversation

j'étais très détendue car mon intervention n'avait pas du tout plombé l'atmosphère et mon amoureux m'a demandé au moment où l'on servait le café de jouer du piano , j'ai accepté et j'ai clavioté des notes inventées tout en douceur....

oui c'était une petite musique de fond toute douce et tout le monde se sentait bien

un délicieux moment de bonheur , une délicieuse après-midi et une délicieuse soirée .....

comme quoi....

et là c'était bien une réalité, cela ne provenait pas de mon monde imaginaire (excepté les notes)

oui, je pense comme toi ,White, que résilience et créativité sont liées
(et donc elle n'a pas forcément à voir avec le QI)

j'avais vu une conférence de psy italiens à propos de l'art brut , (l'art des personnes enfermées souvent à vie en hôpital psy)
conf appuyée par des vidéos et par une expo de tableaux (superbes les œuvres )

quand tu vois des gens coupés du monde, dont certains totalement mutiques , vivant souvent par automatisme, et qui "communiquent" seulement par leur expression créative
et bien ça en bouche un coin !

bien sur ces personnes ne sont pas des "résilients en totalité" puisqu'ils sont enfermés en psychiatrie , mais leurs créations sont une forme d'adaptation à leur enfermement , une forme d'adaptation à leur façon ,et à leur échelle ,vue le peu de liberté qu'ils ont , et donc c'est peut-être aussi une forme de résilience

en tout cas leurs créations étaient magnifiques






















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Message par Invité Dim 30 Sep 2012 - 23:56

Que dire ? Rien.
Nous avons presque honte d'écrire ces mots car nous avons une fausse impression que notre texte est larmoyant....

Je vois des tonalités très différentes selon les personnes : certaines sont de vrais résilients, d'autres ont encore une petite étape à franchir.

Oui, où-est-la-question, quand on se met à en parler, on en parle plus facilement et sans dramatiser.

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Message par Invité Jeu 4 Oct 2012 - 22:37

Je vais vous confier quelque chose.
Dimanche, j'ai vécu quelque chose de dur et depuis, je n'arrête pas d'envoyer des messages sur le sexe, l'amour, le couple comme pour éviter de revivre cette scène sanglante. Pourtant, j'ai eu peur. J'ai vu un être cher noyé dans son sang, je l'ai senti presque partir alors que je le caressais pour sentir que j'étais à ses côtés.
Le truc qui m'a fait le plus mal est que ma fille ait assisté au début de cette scène...Elle hurlait. Le plus dur n'est pas de supporter sa douleur mais d'être impuissant face à la douleur de son enfant.

Et je continue à fanfaronner sur ces fils sur le sexe. Bref, cela doit représenter l'axe vital auquel je me raccroche.

Je vais peut-être effacer mes messages de ce fil...Je n'en sais rien. Juste attendre un peu que ça murisse en moi.

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Message par fleurblanche Sam 6 Oct 2012 - 20:56

Salut SoleilSombre !

J'ai remarqué que dans ce genre de situation (évènement récent auquel on a du mal à faire face), ce qui m'a aidée, c'est d'en parler de vive voix avec quelqu'un. Après, c'était comme si une partie du poids s'enlevait de mes épaules.

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Message par Invité Sam 6 Oct 2012 - 21:04

Bonsoir Fleurblanche,

C'est ce que j'ai fait Smile
J'ai un couple d'amis à qui je peux tout raconter. Maintenant, je suis un peu plus calme.
Sur le coup, c'était le comportement de ma fille qui m'a perturbée. Elle restait coller à moi, à me dire "Je t'aimmmmmme très très fort" et surtout à me demander ce qu'elle devrait faire si je tombais sans pouvoir bouger... Elle semble avoir retrouver son équilibre.
J'ai eu la vision du corps en décomposition alors que je faisais tout pour la maintenir avec moi. C'est troublant, déstabilisant...

Et toi, comment vas-tu ?

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Message par fleurblanche Sam 6 Oct 2012 - 21:43

Vais bien Smile Pas d'évènement récent. Me bats juste pour garder la tête hors de l'eau avec la masse de travail sous laquelle je croule. Sans compter être en même tenps à la hauteur en tant que mère. Bref : le quotidien des femmes ! Smile


Dernière édition par fleurblanche le Sam 29 Déc 2012 - 2:46, édité 1 fois
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Message par Invité Sam 6 Oct 2012 - 22:01

Je ne me fie jamais aux apparences...J'étais une très bonne simulatrice quand j'étais enfant. Rien ne transparaissait. Quand on essayait d'aborder le sujet de mon abandon, je faisais semblant d'être absorbée par une tâche. Je ne voulais pas en parler pour ne pas réveiller la fulgurante douleur qui s'est produit au moment précis où je suis arrivée en France, où j'ai pris conscience de l'irréversibilité de ce qui se produisait.
Je pense que c'est la manière d'aborder le sujet qui est important. Tout dépend de l'enfant : faut-il en parler directement ? ou poser plusieurs questions détournées ?

Un enfant n'oublie pas. Je ne sais pas quel âge avait ta fille. Je sais que j'ai effacé certains souvenirs (mécanismes de survie) mais que j'en ai gardé beaucoup. Je sais d'où je viens, quelle est l'histoire de ma petite enfance alors que personne n'a pu me la raconter.....

Et la résilience ne prémunit d'aucune fragilité. Les hommes ont tendance à me voir comment un mélange de force et de fragilité, où on ne sait jamais si c'est la force ou la fragulité qui parle. Je crois qu'ils ont raison. Même les multiples cuirasses n'empêchent pas d'être touchée par des petits riens, par des petits mots. Je dirais que c'est tant mieux. Sinon, nous serions proche de l'état d'insensibilité. J'ai trop peur de devenir insensible. L'une de mes plus grandes peurs est de ne plus arriver à aimer un homme. Tout cela est lié à mes traumatismes. Je le sais.....

Par rapport à ta remarque sur ta maîtrise, il m'est arrivé la même chose dimanche dernier. Il s'agissait de ma mère. Quand je l'ai vu tomber, je l'ai mise en position latérale car elle a vomi tout ce sang, je l'ai maintenue, j'ai appelé le SAMU en étant précise tout en m'assurant que ma fille ne voyait rien. Et j'allais de l'une à l'autre pour les rassurer toutes les deux comme si je ne ressentais rien. Cela fait froid au dos en y repensant a posteriori...

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Message par fleurblanche Sam 6 Oct 2012 - 22:22

Tout dépend de l'enfant : faut-il en parler directement ? ou poser plusieurs questions détournées ?

Je crois que tu as raison : cela dépend du "type" d'enfant. Et, bien que ma fille soit quelqu'un qui exprime spontanément ses émtions et ses pensées, je crois pour certaines choses il va falloir creuser, poser des questions détournées...

La maitrise : oui, cela peut faire froid dans le dos, a posteriori. Mais c'est aussi un avantage que l'on a sur les autres (ceux qui n'ont jamais eu à faire face) : on a acquis des réflexes, des réflexes qui peuvent sauver (soi ou les autres).
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Message par Invité Sam 6 Oct 2012 - 22:38

Elle peut aussi en parler spontanément toute seule. Tu sais, du genre, j'aborde le sujet sans l'aborder. Ma fille le fait beaucoup. Et ce n'est que lorsqu'elle a accepté qu'elle aborde frontalement le sujet.

Je comprends ton inquiétude : ne pas être trop insistant tout en essayant de libérer la parole.

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Message par Invité Jeu 18 Oct 2012 - 12:29

Bonjour mon fil. Cela faisait un moment que je ne suis pas revenue vers toi.

Cette semaine, j'ai assisté à une scène anodine qui m'a plongée dans un état de malaise intense. Une personne "normale" n'aurait pas eu une telle réaction. Dans la vie quotidienne, certaines choses me sont insupportables à cause de mon histoire. Maintenant, la conscience de ce fait ne me fait pas avancer...

Cette fichue résilience est toujours un équilibre fragile. Je suis peut-être plus forte que la moyenne mais, en même temps, je suis plus fragile que la moyenne. C'est difficile à expliquer. Certaines blessures ont une cicatrisation lente, du sang coagulé reste coller des années durant. On est sur la voie de..mais on n'y est pas tout à fait. Mais a-t-on vraiment envie que la cicatrisation soit finie ? Quand on a connu que ce mode de fonctionnement, comment arriver à vivre sa vie sereinement ? Chez moi, le ciel est vidé de Dieu. Donc aucun réconfort de ce côté-là.

J’observe de nombreuses personnes ayant eu une vie « normale » qui sont complètement enfoncées dans la tristesse, dans la souffrance. Je peux imaginer cette douleur mais je ne peux pas imaginer comment on peut être marqué par une vie « normale »…Une gifle reçue dans l’enfance peut être un traumatisme pour certains, un mot dur restera à jamais graver dans la mémoire…Ces faits auront une grande influence dans la vie de ces individus. Ceci m’est complétement inaccessible. Je peut accueillir leur douleur mais je ne pourrais pas comprendre pourquoi ce fait « normal » a entraîné la douleur.

C’est tout. Juste une envie de décrire cette frontière infranchissable pour moi. D'autres résilients vivent peut-être la même chose que moi ?

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Message par Invité Jeu 18 Oct 2012 - 13:17

Je peut accueillir leur douleur mais je ne pourrais pas comprendre pourquoi ce fait « normal » a entraîné la douleur.

Etant dans ce cas, je peux oser quelques ébauches.
Mille faits individuellement normaux peuvent, réunis, constituer quelque chose d'anormal (au pied de la lettre. Par exemple : que des parents dévalorisent sans cesse leur enfant n'est pas normal, au sens où ce n'est pas ce qu'ils doivent faire, et où ce n'est pas courant). Mais celui qui les subit ne se rendra compte de rien. Il est malheureux, il souffre, il se sent mal dans sa peau et il n'a pas la moindre idée de l'origine. Autrement dit : tu ne peux pas comprendre ? Ben lui (en l'occurrence moi) non plus ! What a Face On se sent mal, sans raison. On peut très bien constater qu'on a mal vécu une gifle incohérente, des paroles négatives, mais exactement comme toi, on ne peut pas imaginer que ce soit là que gîte le lièvre. On se dit : non, ce n'est pas une souffrance issue d'un traumatisme mon truc : je n'ai rien vécu qui mérite le nom de traumatisme. Quand tu dis : ces faits ont une grande influence, c'est vrai, mais le sujet n'attribue pas les conséquences à de si minimes causes. C'est d'ailleurs une des raisons qui font perdurer sa souffrance : il ira en chercher l'origine ailleurs.

Puis, quand un travail sur soi révèle que c'est bien là le feu qui couve, on l'admet, on est bien forcé d'entériner ce constat, mais on ne comprend pas plus, surtout si on se remet en perspective aux côtés de personnes qui ont vécu un vrai traumatisme. On se sent un douillet, un pleurnichard, et on continue d'avoir honte, d'ailleurs.
Il peut même arriver qu'on intègre tellement cette donnée de "pleurnichard" qu'on se mette à minimiser ce qu'on subit par la suite en se disant que c'est de la même eau : "si je me rends malade pour des broutilles, alors tout ce qui me rend malade est broutille."

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Message par Invité Jeu 18 Oct 2012 - 20:31

Merci Fusain Smile
Je veux, quand même, préciser une chose : je ne minimise pas la souffrance qui peut émerger d'une vie "normale". Parfois, j'ai senti de très grandes souffrances. Ce sont des réalités psychiques bien là. Alors, ce ne sont pas des broutilles...Il n'y a pas de honte à avoir. Mon propos portait sur ma compréhension rationnelle et non ma perception émotionnelle.

Je comprends ce que tu veux dire. Cet aspect diffus empêche la personne de prendre conscience de la source de sa douleur.
Il faut préciser que les traumatismes sont également des petits chocs répétés dans le temps. Les effets peuvent être aussi importants que ceux des traumatismes dramatiques. Je pense aussi que la sensibilité personnelle fera qu'on sera plus ou moins atteint. Et le fonctionnement des zèbres n'aide pas. Surtout, la cogitation à vide est usante.
Je fais bien la distinction entre le décalage venant de mon histoire du décalage venant de la zébritude, même si la frontière est parfois floue. Pendant longtemps, j'ai mis mon décalage sur le dos des "drames" de ma vie en passant à côté de mon fonctionnement interne. Je ne sais pas si ce fonctionnement interne a été encore renforcé par mes expériences. Le décalage de la zébritude ne m'a pas fait souffrir car j'avais un décalage plus fondamental à gérer. Comment arriver à se faire accepter quand physiquement, j'étais déjà différente (milieu rural au début des années 80) ? Comment ne pas se sentir différente quand j'étais une adulte enfermée dans un corps d'enfant ? Comment faire comprendre ma soif de bonheur, d'acceptation alors que le regard des autres me renvoyait de la pitié ? La zébritude était noyée dans tout cela....
Alors, je suis une zèbre bien dans sa zébritude comparativement à ce que je peux percevoir sur ce forum. C'est l'aspect positif et je m'accroche à ces aspects positifs.

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Message par Invité Jeu 18 Oct 2012 - 21:40

Je veux, quand même, préciser une chose : je ne minimise pas la souffrance qui peut émerger d'une vie "normale". Parfois, j'ai senti de très grandes souffrances. Ce sont des réalités psychiques bien là. Alors, ce ne sont pas des broutilles...Il n'y a pas de honte à avoir. Mon propos portait sur ma compréhension rationnelle et non ma perception émotionnelle.

Oui, bien sûr. Je voulais juste illustrer ce qui se passait dans la tête d'une personne dans ce cas - enfin, utiliser mon propre exemple. Lorsqu'on est face à une personne qui a vécu un traumatisme objectivement grand, on sent les siens tout petits, on les assimile à des broutilles, on a honte. Mais il est notable de constater que ce n'est pratiquement jamais le "grand traumatisé" qui va dire au "petit traumatisé" que ce qu'il a vécu c'est peanuts. C'est généralement un non-traumatisé qui va dire au petit- qu'il devrait avoir honte et prendre exemple sur le grand- qui a subi pire et qui ne se plaint pas. lol!

Je pense que c'est exactement la même chose que pour la douleur physique (et là je vais ressortir ma réf habituelle, les nouvelles de G. Duhamel tirées de son expérience de médecin derrière le front de Verdun : il voyait, constatait, médicalement, l'inégalité devant la douleur, les hommes qui souffrent différemment d'une même blessure).

Je fais bien la distinction entre le décalage venant de mon histoire du décalage venant de la zébritude, même si la frontière est parfois floue.

Cela doit nécessiter une sacrée radioscopie de soi !

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Message par Invité Jeu 18 Oct 2012 - 22:11

Radioscopie de moi très puissante. Tu veux la recette : courage de se regarder bien en face, puissance d'analyse de ses propres réactions, aucune indulgence envers soi. Et je suis spectatrice de ce que je vis alors que je vis l'instant intensément. Ce n'est que récemment que j'ai découvert que cette manière de se percevoir n'était pas habituelle (j'en ai marre du mot "normal").

Ce que tu dis est peut-être vrai...Les personnes sans blessures profondes sont, en général, moins enclins à la bienveillance. Et je trouve que c'est plutôt sain de leur part. Sinon, nous n'aurions que des déséquilibrés comme nous qui peupleraient le monde Smile

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Message par fleurblanche Ven 19 Oct 2012 - 0:48

Moi je me demande ce qu'est une "vie normale". Cela existe-t-il seulement ? La normalité d'une vie ne serait-ce pas une notion subjective (comme celle du bonheur) variant d'un invividu à l'autre, d'une communauté à l'autre, d'une société à l'autre ?

J'ai fini par me dire que tout le monde porte son lot de traumatismes, conscients ou inconscients, avec des répercussions ou pas, résolus ou irrésolus, etc.

Ma mère ne m'a jamais dit "je t'aime" (ce n'était pas dans sa culture). Je n'en suis pas traumatisée. Car elle m'a montré son amour sans le dire. Mais je peux très bien comprendre qu'une autre personne sera traumatisée parce que sa mère ne lui aura jamais dit "je t'aime", même si elle lui a montré autrement son amour. Je peux le comprendre parce que j'ai intégré le fait qu'on n'a pas tous les mêmes besoins (psychologiques, émotionnels, affectifs, etc.).

On est tous différents, on n'est pas bâtis de la même façon, on a des "héritages" différents. Et à cause de cela, ce qui est broutille pour l'un peut sembler être un Himalaya insurmontable pour l'autre.
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Message par Invité Ven 19 Oct 2012 - 9:17

Les personnes sans blessures profondes sont, en général, moins enclins à la bienveillance. Et je trouve que c'est plutôt sain de leur part. Sinon, nous n'aurions que des déséquilibrés comme nous qui peupleraient le monde

Non, je ne crois pas que ce soit sain. Etre sans indulgence face à ce que subissent les autres et dont on a été soigneusement épargné ? Se targuer d'une résistance qui n'a jamais été éprouvée ? Le vase perché sur son étagère qui fait la morale au pot de terre chu de haut, cela ne l'empêche pas d'être en cristal. Assurance bidon ! Heureusement que les humains déséquilibrés sont là pour rappeler des choses aux inhumains autoproclamés sains.
Cela dit, tu as quelque peu extrapolé mes propos : je pense que les gens les moins bienveillants face à la souffrance d'autrui sont généralement des gens qui n'ont pas vécu trop de tempêtes par eux-mêmes, qui n'ont pas été "de l'autre côté", mais je ne fais pas d'équivalence. Il y a des gens capables de prendre en compte avec humanité ce qu'ils n'ont pas vécu eux-mêmes, et heureusement.

Tu veux la recette : courage de se regarder bien en face, puissance d'analyse de ses propres réactions, aucune indulgence envers soi.

Hélas, cela ne suffit pas. Le critère de l'absence d'indulgence ne caractérise pas une analyse juste. S'analyser sans indulgence, je l'ai fait pendant des années : il en reste des carnets entiers et même certains posts de ce forum où, à part m'auto-massacrer, et sincèrement en plus, le bougre, je n'arrive à rien, et certainement pas à la lucidité. D'ailleurs, on devrait facilement s'en rendre compte, de ce problème : on parle toujours de se juger, mais dans la procédure détaillée, on ne fait place qu'au procureur, voire à un vulgaire accusateur public. Il manque la défense, l'avocat, l'autre plateau de la balance. Pas d'équilibre. Si tu y aboutis, c'est qu'il y avait un autre phénomène en marche, sous-entendu, mais seulement sous-entendu dans le terme "puissance d'analyse"...
A moins qu'il ne faille du courage pour affronter ce qui est renvoyé de positif et non seulement la face sombre.

Ma mère ne m'a jamais dit "je t'aime" (ce n'était pas dans sa culture). Je n'en suis pas traumatisée. Car elle m'a montré son amour sans le dire.

La mienne n'a rien dit. Ni montré. Mais j'ai mis plus de 30 ans à comprendre qu'il y avait quelque chose qui clochait, qu'il manquait des éléments dans mes fondations et qu'ils auraient dû être posés à ce moment-là. C'était, si on veut, un "traumatisme" que d'avoir des parents qui gèrent à la perfection la dimension technico-économique de la parentalité, mais rien d'autre. Mais - c'est pour ça que j'en parle ici - je ne l'ai pas constaté ni vécu comme tel, puisque je pensais que c'était un fonctionnement normal. Le lien traumatisme-souffrance est brouillé. Et la dérive grandit vite puisqu'on ne sait pas par rapport à quel cap la boussole est déréglée. J'en reviens à mon idée : si la souffrance engendrée par un "petit" traumatisme peut être aussi grande, c'est peut-être parce que pendant toutes les années perdues à ignorer la cause, masquée par son insignifiance de départ, elle croît comme une mauvaise herbe invisible. Aucune lucidité ne peut sauver si on ne regarde pas du bon côté - persuadé qu'il n'y a rien de spécial à analyser de ce côté-là.
Et puis, il y a les effets cumulatifs.

Et à cause de cela, ce qui est broutille pour l'un peut sembler être un Himalaya insurmontable pour l'autre.[/quote]

Et un jour cela peut changer, comme dans la fable.
"L'autre, qu'aux grands périls tel a pu se soustraire,
Qui périt pour la moindre affaire."

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Message par Doinel Ven 19 Oct 2012 - 9:31


Fusain, ce que tu racontes ici ou ailleurs me semble être un grand traumatisme.

Pas un événement ou une suite d'événements spectaculaires, mais une attitude systématique envers toi qui t'a empêché de te construire psychiquement avec les défenses nécessaires pour avoir une vie sereine. Une attitude assimilable à une maltraitance psychologique.

Tu sembles dire que tes parents n'ont pas connu de problèmes eux mêmes. En es tu certain? Comment peux tu expliquer leur attitude?
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Message par Invité Ven 19 Oct 2012 - 9:44

Fusain, ce que tu racontes ici ou ailleurs me semble être un grand traumatisme.

C'est un traumatisme vécu comme grand, c'est tout ce que je suis légitime pour dire. Certains, en effet, le qualifient de maltraitance psychologique.
Il peut très bien être petit quand même, c'est tout le problème. De plus, les conséquences d'un "petit" traumatisme peuvent préparer le terrain pour en vivre encore très mal un "moyen". Comme un maquis mal débroussaillé devient inflammable à l'excès.

Tu sembles dire que tes parents n'ont pas connu de problèmes eux mêmes. En es tu certain? Comment peux tu expliquer leur attitude?

Je n'ai pas dit ça. Je n'ai rien dit d'eux. D'autre part, je crois que ce n'est pas vraiment le sujet et qu'on ne va pas faire dériver plus avant ce topic.
On peut éventuellement se raccrocher aux branches en se demandant si un traumatisme ne peut pas se présenter sous la forme d'une série de petites piqûres, et dans ce cas "équivaloir" à un gros coup d'épieu bien visible. Car il est évident qu'une gifle n'est pas traumatisante de la même manière selon le contexte. Il y a relativement consensus, par exemple, pour dire que l'enfant qui se prend une beigne pour une raison totalement spécieuse et incohérente avec la grille jusque-là pratiquée par les parents peut être lourdement traumatisé - surtout s'il s'agit d'un zébrillon très-capable de comprendre l'incohérence bien réelle - car désormais, il saura que le coup peut venir de partout, n'importe quand, d'une manière aléatoire, ce qui est insécurisant à l'extrême. Mais le diagnostic est biaisé car généralement, quand on est incohérent, on l'est de manière récurrente : le souvenir pourra se focaliser sur une gifle, mais l'enfant aura probablement subi what mille situations du même genre.

Après ça, cent mille taupinières forment-elles un Himalaya ? Est-ce sain de métrer la souffrance... et les traumatismes ? Je ne sais pas : en tant que petit-traumatisé, je ne suis pas impartial, j'ai intérêt à répondre non, pour revendiquer moi aussi la médaille de grand blessé de la vie.

Qu'en pensez-vous ? (Et ainsi, on devrait clore la digression et revenir à la question posée par SoleilSombre...)

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Message par Invité Ven 19 Oct 2012 - 9:46

Un traumatisme peut être un événement avec une grande rupture (il y a un avant et un après) mais aussi un phénomène qui se répète dans le temps. La durée et la répétition sont des paramètres à prendre en compte. Alors, oui, je partage le point de vue de Doinel sur Fusain.

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