Un peu de groove dans ce monde de balais dans le c**!

J'ouvre ce topic pour partager cette fois des pépites en matière de musiques d'influences afro-américaines, soul, funk, hip hop, etc... Car la notion de groove, cruellement absente dans la plupart de la musique grand public, est pour une des principales sources d'expressivité dans les musiques populaires actuelles. Ce que j'entend par groove, techniquement, ce sont les rapports temporels et rythmiques entre les placements effectifs et théoriques des notes d'une mesure avec une notion importante de régularité entre les mesures. Plus simplement, c'est le fait d'interpréter une phrase rythmique en influant volontairement sur l'impression que sa répétition d'une mesure à l'autre procure, selon que l'on joue chaque note légèrement en retard ou en avance par rapport à son emplacement théorique sur la partition. En gros le groove est quelque chose d'extrêmement subtile, et qui ne passe pas à l'écoute pour de la complexité. Il permet de rendre extrêmement efficaces les phrases musicales les plus simples, dès lors qu'il est constant et non aléatoire d'une mesure à l'autre.

Bref, dans ce topic, le but est de partager des morceaux, si possible pas des gros standards absolus du genre Ray Charles ou Stevie Wonder, car le but est la découverte. Si j'oriente le topic vers les musiques afro-américaine, c'est que le groove y est généralement une composante fondamentale, beaucoup plus que dans le reste des musiques populaires, mais vous pouvez poster n'importe quoi ici du moment que ça groove!

Je commence avec Amp Fiddler; "I believe in you"

Du très lourd dans un autre genre.

Et voilà pour aujourd'hui.

Un petit tour par le Brésil, dans les années 60 et 70

Jorge Ben : Mas Que Nada


Les Etoiles : Kid Cavaquinho


Edit : bon, les Etoiles, c'est surtout le Brésil à Paris . Mais c'est une excellente reprise du fameux titre de Joao Bosco.

Ah cool ! Merci Thingfish pour ce fil
Ca faisait un moment que je n'avais pas écouté ce style de zik   

Plus récent...

D'Angelo : Shit, Damn, Motherfucker (1995)


Meshell NdégéOcello : Body (2003)


Plantlife : Appreciate (2004)

(...)techniquement, ce sont les rapports temporels et rythmiques entre les placements effectifs et théoriques des notes d'une mesure avec une notion importante de régularité entre les mesures.

woo-hoo c'est la première fois que je lis la définition du groove   
ce que moi j'entends par ce mot, c'est un truc qui donne envie de danser, c'est souvent induit par une basse lascive, et ça se manifeste au niveau du bassin qui se met à faire des huit et du menton qui pointe   
on va voir si ça se rejoint...

Moi j'aime bien les petites secousses mescaliniennes du funk, de la soul et de pas mal de house/techno.

Kass a écrit:(...)techniquement, ce sont les rapports temporels et rythmiques entre les placements effectifs et théoriques des notes d'une mesure avec une notion importante de régularité entre les mesures.

woo-hoo c'est la première fois que je lis la définition du groove   
ce que moi j'entends par ce mot, c'est un truc qui donne envie de danser, c'est souvent induit par une basse lascive, et ça se manifeste au niveau du bassin qui se met à faire des huit et du menton qui pointe   
on va voir si ça se rejoint...

En fait ce que tu décris, ce sont les conséquences du groove, qui varient un peu selon les individus, mais d'un point de vue de musicien, le groove n'est pas dû au hasard, ça se travaille et ça se met en pratique. C'est d'ailleurs extrêmement difficile à appliquer!

Allez, un peu de grosse G-FUNK DAIGALÂSSE comme j'aime!! Dissiz da west coast baby bubba!!

https://soundcloud.com/nobunaga/l33-x-nobunaga-gfunk

techniquement je me demandais si c'était différent du swing - qui donne aussi irrésistiblement envie de bouger, mais différemment ?
et le boogie tiens ?
est-ce qu'on peut interpréter n'importe quel morceau de manière à le faire groover ?
est-ce uniquement de la technique (du travail) ou y'a-t-il un peu de magie (talent + inspiration) ?  
chuis chiante avec mes questions ?
j'ai l'habitude  

le nez dans les paillettes:



(...Scottie !)

Tu n'es pas chiante, au contraire, ça me fait plaisir quand les gens s'intéressent à ces choses là!

En fait le swing c'est une forme particulière de groove, nécessairement ternaire (c'est à dire dont l'unité de temps de base se divise en multiples de trois et non de deux comme dans la majorité de la musique qu'on écoute), et généralement très énergique sur un tempo assez soutenu, En fait c'est une forme de groove assez spécifique pour pouvoir être considérée comme un genre musical à part entière même si personnellement je préfère parler de forme particulière de groove. Souvent en répétition, quand on joue un morceau ternaire assez rapide et qu'on se dit "c'est trop raide, faut que ça swing plus", ça nous donne une indication assez claire sur la manière d'aborder la temporalité spécifique du morceau en question. Par contre, parler de swing sur un morceau binaire, c'est être à côté de la plaque puisque "l'effet swing" dépend surtout du rapport entre la troisième division ternaire du temps et la première du temps suivant (sachant que la seconde division est généralement un silence), de manière à donner un effet de rebond assez énergique.

Le boogie, c'est carrément une forme musicale exclusivement pianistique, très proche du ragtime, ternaire également donc pas incompatible avec la notion de swing, même si historiquement le boogie est apparu une vingtaine d'année peut être avant l'apparition du terme swing davantage utilisé à la base dans les big bands de jazz des années 40. Le boogie c'est une utilisation particulière de la main gauche sur le piano qui assure à la fois le rôle rythmique et celui de la ligne de basse, tandis que la main droite, elle, fait son taff mélodique et harmonique. C'est surtout la main gauche qui est particulière dans le boogie. Sinon sur le plan structurel, le boogie est directement inspiré de la forme standard du blues avec un balancement entre les 1er et 4ème degrés harmoniques, et l'utilisation du 5ème degré pour le turn over qui annonce la fin du cycle (même si rien n'est rigide et qu'il est évidemment possible de ne pas respecter cela).

Ces deux termes ne sont donc évidemment pas incompatibles ni entre eux, si avec la notion de groove. Je ne sais pas si à l'époque on parlait de groove, je ne pense pas, je crois que c'est un terme qui est apparu bien après. Ce qui est certain c'est que c'est un terme souvent utilisé à tort et à travers, bien que tout le monde l'utilise pour qualifier une musique qui lui donne envie de bouger sans savoir expliquer concrètement ce que ça veut dire. En théorie n'importe quel morceau peut groover, même si j'ai beaucoup de mal à trouver le terme approprié pour certaines musiques très souples rythmiquement comme les jeux en rubatto des morceaux de Chopin par exemple, car dans le groove il y a une notion de répétition stricte d'une figure rythmique avec ses subtilités propres. Le groove ne fonctionne pas en général quand on ne retrouve pas de cycle rythmique d'une mesure à l'autre ou parfois d'un ensemble de mesures à un autre. Egalement en musique électronique, lorsque tout les temps sont calés artificiellement sur la grille de la timeline et joués par un ordinateur, la rigueur absolue de la machine peut être considérée comme anti-groove, même si personnellement je préfère dire que c'est juste un groove particulier dont la caractéristique est l'absolue rigidité. Il est possible d'avoir une approche spécifique sur le groove en musique par ordinateur, car on peut évidemment décider de placer chaque temps un tout petit peu en avance ou en retard par rapport à sa place d'origine, mais si on veut vraiment pousser loin la prise de tête sur le groove, celui ci implique également la notion de comportement du son dans le temps, c'est à dire les caractéristiques des quatres phases d'un objet sonore dans le temps (attack, deccay, sustain, release). Là ça devient vraiment technique mais c'est juste pour dire qu'il y a énormément de paramètres à prendre en compte si on veut vraiment pousser loin la construction artificielle du groove, et généralement les musiciens électro ne se posent pas se genre de questions, encore moins leur public (bien sur il existe de la musique électronique très élaborée à ce niveau, par des mecs qui sont des espèces de gros geeks du groove). C'est pourquoi en général le groove est davantage propre à l'humain qu'à la machine car un humain gère toutes ces données de manière intuitive et en réaction avec l'environnement musical, notamment avec les autres musiciens, ce qui fait que l'alchimie se produise ou pas entre certains musiciens.

Le groove c'est donc à la fois du travail et de la technique, car en tant que musicien, lorsqu'un directeur artistique pas trop à la ramasse me dit "joue plus au fond du temps", ou "anticipe le troisième temps", il faut que ça ait du sens dans ma tête, et que je sois en mesure de le traduire dans mon jeu. D'autant que comme je l'ai dit, le groove est quelque chose de collectif, et qu'en général plus on apprend à connaître les musiciens avec lesquels on joue, plus le groove est "tight", c'est à dire sur de lui. Mais il est vrai qu'il y a une grande part de magie là dedans. Il m'est arrivé de rencontrer des musiciens avec lesquels l'alchimie se produisait instantanément, et ce qui est génial c'est que quand ça se passe, en général tu sais que le mec qui joue avec toi va devenir ton meilleur pote, et tu sais qu'il le sais aussi. Il y a des personnes que je considère comme des frères alors que finalement j'ai assez peu parlé verbalement avec eux, mais la musique étant un langage, on se dit énormément de choses et on est sur la même longueur d'onde. C'est l'une des choses que je trouve assez magique dans la pratique de la musique. Il y a aussi des gens pour qui ça semble plus facile que pour d'autres, voir instinctif. J'ai par exemple une élève à qui je donne des cours de batterie qui est extrêmement douée, à 8 ans elle groove plus que beaucoup de batteurs bien plus expérimentés qu'elle, et j'aime particulièrement prendre une basse à la fin des cours et jouer de la grosse funk poussive avec elle à la batterie et l'alchimie se produit, même si techniquement elle reste une débutante, elle a la sensibilité, la réceptivité nécessaire pour le groove. A l'opposé, j'ai déjà enregistré des disques avec un batteur professionnel pour une maison de disque toute pourrie, et le résultat était catastrophique. Ce batteur là était un mec très gentil, humainement tout se passait à merveille, mais musicalement rien à faire. Malgré tout son travail acharné (car il travaille énormément son instrument) et se technique de 20 années de pratique, il était à côté de la plaque et n'arrivait pas à concevoir l'essentiel, c'est à dire le groove, ce qui est très embêtant pour un batteur professionnel. Pour avoir longuement discuté avec ce mec qui est un ami malgré le fait que musicalement il ne se passe rien entre nous, je pense qu'il est juste bourré d'à prioris et de certitudes sur la musique en général et qu'il ne va pas assez à l'essentiel. Car c'est bien de conceptualiser la musique, je le fais tout le temps, mais il est important lorsqu'on doit jouer, de simplement la vivre, de ne surtout pas réfléchir et de se contenter de nager dans le groove comme un bon gros poisson rouge.

la notion de comportement du son dans le temps, c'est à dire les caractéristiques des quatres phases d'un objet sonore dans le temps (attack, deccay, sustain, release).

*se remémore un vieux schéma scolaire de moteur à quatre temps*   
pour le groove en électronique, j'ai un morceau de Fatboy Slim qui me revient à l'esprit, ou plus exactement la perf de Christopher Walken qui par sa danse indique le swing; je fais confiance à l'esthétique que dégage le monsieur pour décrire le style - c'est vrai, je "subis" les conséquences du groove au niveau physique/visuel plus que je ne puis l'expliquer. et c'est mieux, car en salsa, plus j'essaie de compter, moins j'y arrive   

si on me demandait "c'est quoi le groove ?", je montrerais ça:



Il m'est arrivé de rencontrer des musiciens avec lesquels l'alchimie se produisait instantanément, et ce qui est génial c'est que quand ça se passe, en général tu sais que le mec qui joue avec toi va devenir ton meilleur pote, et tu sais qu'il le sais aussi. Il y a des personnes que je considère comme des frères alors que finalement j'ai assez peu parlé verbalement avec eux, mais la musique étant un langage, on se dit énormément de choses et on est sur la même longueur d'onde. C'est l'une des choses que je trouve assez magique dans la pratique de la musique.

c'est tellement ça en danse également...  il m'est arrivé de passer des nuits entières à danser avec des gens, sans leur parler - ce n'était absolument pas nécessaire. d'autres avec qui j'ai supporté - et quand c'est l'homme qu'est supposé mener   et qu'il a pas de swing dans les pattes, c'est pas loin de la torture.

deux définitions, façon musicien professionnel et façon danseuse autodidacte, bah l'un sans l'autre, à quoi bon  

Je ne danse pas, j'ai horreur de ça parce que je n'aime pas m'exprimer avec mon propre corps dont je ne sais jamais quoi faire. Mais ça c'est mon problème à moi et je le regrette car dans les faits, la musique et la danse sont faits de la même matière première, à savoir le temps. Donc ce qui est vrai en musique l'est aussi en danse la plupart du temps. En tout cas je ne trouve pas ça inapproprié du tout de parler de groove en danse également, bien au contraire!

L'exemple de soul train que tu as donné illustre parfaitement cela.

https://soundcloud.com/kriswontwo/georgia-anne-muldrow-personal

Q-Tip & Raphael Saadiq  

Le groove, vaste sujet... Ça avait été débattu longuement sur un forum de bassistes que je fréquentais. On a pas pu se mettre d'accord. Un type citait un musicien dont le nom m'échappe "Le groove c'est ce truc qui te fait bouger ou non la tête en rythme". Si on applique cette définition, un paquet de truc peuvent groover. Je me souviens avoir fait écouter ce morceau à mon frère, qui écoute pas mal de funk et affiliés. Hé bien surpris, il me dit "en fait ça groove !" tout en bougeant la tête sur un style de musique qu'il n'écoute pour ainsi dire jamais !  


Mais pour parler de groove, pourquoi ne pas laisser parler l'homme le plus funky de l'univers en train de construire un groove : Bootsy Collins !

C'est là qu'on voit que le groove, ça peut tenir avec vraiment pas grand chose, et donc qu'il faut pas grand chose pour le foirer aussi.
Concrètement, lorsqu'on dit de jouer au fond du temps, ça veux dire quoi exactement ? Quel temps ? Est-ce que ça correspond aux temps forts d'une mesure ? Jouer au fond du temps, ça veut bien dire commencer la note un pet de mouche après le début du temps ?

Tu m'a donné envie de sortir ma basse tiens.

ah tiens j'me souviens d'un workshop de Nile Rodgers (niveau funk il est pas mal aussi) auquel j'avais assisté en 2005, fascinant en effet de voir le processus de construction, un air très connu joué de différentes façons, les sources d'inspiration, anecdotes (pour Upside Down, Let's Dance, Like a Virgin... y'avait pas encore Get Lucky   ). 
il est repassé en 2012, ai trouvé la vidéo

je viens de tomber sur une série de vidéos de Cee-Lo Green qui reprend Hall & Oates... c'est un défi de rester immobile...



(EDIT: tellement bon le groove que j'en ai oublié ma casserole sur le feu   )

Enorme performance live!!

Johnny est mort.

Le blues a le cafard...

en hommage à mon fiston qui affectionnait ce groupe et qui m'a quitté il y a 4 ans

(made in Switzerland)

You know I'm all about that bass...

je sais mais je veux des nouvelles de l'auteur du fil et de sa compagne

merci d'avoir fait remonter le fil !!

Au top la playlist !!!!!!!!!!