Une invitation au restaurant offerte à celle/celui qui a compris Wrong de Quentin Dupieux

Personnellement j'ai tout compris à ce film (je n'ai aucun mérite : c'est le génial ADN de mon cerveau qui a tout fait inconsciemment, presque sans effort de ma conscience).
J'ai fait plusieurs recherches sur internet (en français, anglais,...), et j'ai halluciné : aucun critique de cinéma professionnel, aucun blog/site de passionnés de cinéma, même parmi ceux qui ont aimé Wrong, n'a compris quoi que ce soit à ce film il est vrai très original. C'est là que j'en ai conclu que critique de cinéma, c'était le métier de ceux qui n'avaient pas le niveau pour faire critique de livres (j'ai toujours considéré le cinéma comme un art plutôt insignifiant malgré quelques chefs-d'oeuvre, alors que je place les livres écrits par les génies plus haut que tout).

Passons maintenant au défi que je vous lance : que signifie le passage des minutes de 59 à 60 sur l'écran du réveil ?

Le prix à gagner n'est pas une chouette en or, mais une invitation dans un restaurant bio ou chez Pierre Hermé à Paris, ou le livre de votre choix dans votre boîte aux lettres si vous n'avez aucun goût pour les nanoparticules des diesels de la capitale.



P.S. : d'autres films de Quentin Dupieux sont aussi très stimulants pour les surdoués, comme Rubber (les cinéphiles pensent que c'est un film sur un pneu !), ou Nonfilm (digne successeur des films situationnistes de Guy Debord et compagnie).

J'ai adoré Rubber et Wrong.
Le premier m'a permis de me confronter à l'absence d'audimat dans mon entourage pour en discuter, ayant eu le droit au sus-cité "c'est un film sur un pneu" ou autres "faut être débile pour aimer un film débile et dénué de sens". Ça ne m'a pas empêché de le revisionner avec plaisir.
Le second est plus frais dans mon esprit, l'ayant vu pour la première fois il y a 2 semaines de cela. Autant Dupieux excelle dans l'utilisation de l'absurde pour dépeindre sa vision nihiliste de la vie, autant je ne trouve pas systématiquement un sens à ce qui se passe à l'écran.

Je suis curieux de connaître ton ressenti sur le 7:60, ayant moi aussi émis diverses théories à ce sujet pendant le visionnage du film. Mais d'après cet extrait d'une interview de Q.D. c'est se donner du mal pour pas grand chose :

JH: There’s a narrative in “Wrong” but there’s also an endless collection of gags, like the digital clock that clicks from 7:59 to 7:60. Do you keep a journal filled with gags to put into your films?

QD: This idea, and it is a good example, it comes when I am writing. I get very excited by small ideas, I think, oh my God, what is happen if the clock if it turns to 7:60. It is a gag, a weird moment, but they are moments that are very interesting to me. What happens in a world where the clock goes from 7:59 and does not go to the next hour but goes to 7:60, it’s a little bit like being on the other side of the mirror.

Interview complète ici : http://www.film.com/movies/quentin-dupieux-interview-wrong

Bref, vivement Wrong Cops (et je vais profiter de ton intervention pour me lancer dans Nonfilm que j'avais zappé)

J'ai compris depuis longtemps que tous les efforts de nos professeurs de français au lycée pour nous amener à analyser en profondeur les sens codés des textes des grands auteurs étaient vains, puisque la plupart des élèves, une fois devenus adultes, ne feront plus jamais ce genre d'efforts d'eux-mêmes face à une oeuvre d'art, tout comme plus personne ne fait les recherches nécessaires pour ensuite construire une pensée selon le schéma thèse-antithèse-synthèse en s'appuyant sur les idées de grands penseurs. Les gens se contentent de vomir leurs opinions insignifiantes issues des réactions névrotiques instantanées de leur inconscient. La question que je me pose est simple : sur un forum de surdoués, aurai-je le bonheur de voir mes congénères réellement utiliser toutes les ressources de leur QI et nous livrer des analyses bien plus poussées que celles des médiocrissimes critiques professionnels des films très riches de sens d'un cinéaste génial profondément sous-estimé ?

Voici un extrait d'une interview qu'il a donnée à l'occasion de la sortie de Wrong Cops, qui permet de comprendre que Quentin n'a jamais dit la vérité sur Wrong, et pourquoi :

<< - Je passe à autre chose, mais d'ailleurs, toi qui te fais d'ordinaire rare en interview, j'ai le sentiment que tu as vu défiler du monde aujourd'hui. Qu'est ce qui a changé?

- En fait, j'en ai fait autant pour Rubber : on a été à Cannes et tout, donc j'ai fait tout le parcours du clébard en interview, mais Wrong par contre, je trouvais que c'était vraiment inutile d'en parler - enfin j'avais peur de casser tout un tas de trucs en en discutant. Je m'attendais à des questions fatalement tordues, et je m'attendais aussi à ce que les gens projettent des trucs dans ce film. Et lorsque c'est effectivement ce qui se passe en interview, tu ne peux pas juste dire au mec "ah bah non, j'ai juste décidé ça arbitrairement", tu es obligé de trouver des raisons. L'exercice de l'interview te force à trouver des raisons qui sont chiantes, et puis au bout d'un moment, ça devient des formules toutes faites, et je ne voulais pas abîmer le film et son espèce de magie un peu pure en essayant d'en parler. Il y a des films dont tu ne peux pas parler, ou alors si tu dissèques trop le film, tu essayes d'en montrer les ficelles, et de ce fait, tu en abîmes la magie. Donc au moins, avec Wrong Cops, le film est clair - il vient d'un tuyau super normal, il y a des tas de trucs à dire, sur la musique, sur les comédiens qui viennent de mes autres films : c'est un objet beaucoup plus sauvage, il comporte moins de zones d'ombre en fait. >>


Quand il nous dit que Wrong Cops est beaucoup plus sauvage, il nous révèle en contrepoint que Wrong est pour sa part un film très construit. La preuve dans une autre interview :

<< Ensuite, on a réussi a financer Wrong correctement, et celui que j'ai tourné après Wrong Cops, Réalité, il a été financé aussi. Mais avant de faire Réalité, j'avais besoin de faire un film de porcs : Wrong Cops. Je savais que Réalité c'était un truc un peu plus mental, très écrit etc. J'ai fait un caprice de mec qui peut se le permettre, je nous ai mis un peu de pression, j'ai dit à mon producteur que je ne pouvais pas enchaîner Wrong et Réalité. II fallait que je fasse un film de cochon.>>


Question subsidiaire : si Rubber n'est pas un film sur un pneu, quel est alors son réel sujet ?

D'accord avec ton premier paragraphe, le terme non-sens étant utilisé à toutes les sauces par les critiques dans le cas de Quentin (il l'a provoqué sciemment, certes). Pour résuer grossièrement, on aime parce que ça n'a pas de sens, on y comprend rien mais c'est hype, ou on le déteste parce que ça n'a pas de sens, quel intérêt ?

La phrase en gras me fait penser aux interview de Noé, qui fonctionne lui aussi sur ce mode de communication en interview.

Réponse subsidiaire :
Je n'ai plus Rubber bien en tête - pas vu depuis 2 bonnes années - mais le sujet réel tournait d'après moi autour des spectateurs. Spectateurs qui, observant un "film en temps réel" absurde à la jumelle (voyeurisme/passivité/besoin d'absence de fond), y perdent la vie (leur liberté d'esprit/intellect). Un seul survit, la 2e vague d'absurdité arrive (les tricycles) et il succombe. J'y voyais un parallèle avec les mouvances du cinéma actuel, je parle du cinéma lucratif, celui qui remplit les salles malgré son inutilité intellectuelle. En gros, le besoin de divertissement du spectateur - dans son sens global et actuel, il y a des exceptions - est bien supérieur au besoin de réflexion.
Je le rematterai à l'occasion, je suis conscient de faire du très succint et inexact.

Concernant Rubber, tu as un avis sur le sujet du film ou une réponse péremptoire validée par le réalisateur ? Parce que des théories sur du Dupieux, on peut en faire un paquet

Les gens pensent que c'est un film sur un pneu. Mais ce n'est pas un film sur un pneu. Qu'est-ce que ce pneu en réalité ?
Il faut probablement que tu revois le film pour y voir clair.

Théorie absurde du jour :

Le pneu est fabriqué par l'homme -> à base de caoutchouc -> origine végétale
=> la nature prend sa revanche sur l'homme à travers ses propres créations.

La nature ne regarde pas la télé.

P.S. : j'ai oublié de dire que je pense que ce que tu dis sur les spectateurs est bien vu. Il y a encore d'autre détails qui peuvent être interprétés les concernant. Quentin raconte dans une interview qu'il a été écoeuré, en allant à certaines séances de Steak de voir des salles vides, et laisse entendre qu'il a pu mettre de force un public dans Rubber pour le critiquer impitoyablement. Mais les spectateurs ne sont pas au centre du film.
P.S. bis : Quentin Dupieux a un jour reçu un mèl enthousiaste de Marilyn Manson à propos de Rubber : c'était la meilleure analyse qui ait jamais été faite de son film. Il dit aussi que Marilyn Manson est la personne la plus humaine et la plus drôle qu'il ait rencontrée aux USA. Je ne sais pas si ça va t'aider. Par contre tu peux peut-être te demander par quoi tu pourrais remplacer ce pneu dans le film pour le rendre plus clair, pour qu'il ait un sens plus évident.