Des types en noir
+5
BR
félindemars
♡Maïa
Fa
Elijah Kvar
9 participants
Page 1 sur 2
Page 1 sur 2 • 1, 2
Des types en noir
A trois ans, je bois sagement le lait qu’on nous donne à l’école (je déteste le lait, ça me dégoûte). Je ne dis pas à la jeune fille qui me garde qu’elle fait couler les bains toujours trop chauds (mes peaux sont rouge, ça brûle). A six, dix, treize ans, je confirme à ma grand-mère gentillement pieuse que oui, bien sûr, je fais ma prière tous les soirs (je ne crois pas en Dieu, je ne sais pas ce qu’est une prière, j’ai par ailleurs un Juge-Ténia Intérieur très glouton qui fait très bien office de).
Les années passent. Le temps consiste à, de façon systématique/automatique — sous peine de désintégration/anéantissement/abandon et rejet éternel, me conformer en surface à ce que je suppose qu’autrui attend de moi (imagination fertile, en mode intuition délirante et débridée, ON ne m’en demande pas tant). Je me contorsionne, mens, faux-semblantise, m’imposture, me taille en morceaux (à chacun le sien, je les brade). Ado, je rêve de transparence et de flotter au milieu d’eux, invisible. Ce n’est pas possible, alors je lis (addiction 1), je couche à droite à gauche, je dépressionne, je bois (pré-addiction 2). Plus tard, je fais semblant d’étudier, d’adulter, de travailler, de parentaliser.
Un jour, c’est sûr, des types en noir bien informés, spécialistes en turpitudes mentales, viendront me chercher à six heures du mat.
Quelqu’une, intuitive, me dit une nuit de fête festive, mais toi, on ne sait pas vraiment qui tu es (ce que tu penses, ressens, aime, déteste, etc.). Je souscris à cette pensée, la relègue aussitôt dans mon trou noir. Changement de lieu. Non loin il y a une haute falaise, bien dessinée, ah que la mer est belle et l’horizon lointain. Un collègue bien intentionné, cheveux longs et sales, œil vitreux, me raconte un jour que son père s’est jeté du haut. Comme ça. Un jour. Endroit propice, noté mentalement pour les moments où. Je m’y rends une fois pour m’y balancer — une carcasse de plus, il y a du brouillard, un couple s’étreint dans une voiture, ça sent la chair et le mouillé. Trois pas dans la brume, demi-tour, je repars, ridicule (à mimer le drame comme dans un mauvais film français). Je bois un peu plus, à mesure de l’insupportable. Encore un peu plus. La nuit, surtout. J’aime la nuit. Je bois du vin. Beaucoup de vin. Rouge, de plus en plus mauvais. Pour me délester, souffler, exploser en douce, (banalité affligeante, je sais bien).
Un jour de printemps, c’est le matin, un matin solitaire, je bois déjà (le café n'a pas fait long feu), je voudrais écrire, je n’écris rien, je fixe l’écran et bois jusqu’à tomber et c’est le soir, une heure pénible, une heure à boire encore pour oublier qu’on a bu, une heure à chercher à atteindre le dernier verre, et pour la première fois cette pensée, cette pensée qu’il faudrait à cette heure précise de ce jour précis trancher net, entre vivre et mourir. C’est vertigineux, parce que soudain cette idée très claire, limpide, que s’il s’agit de vivre alors ça ne peut plus être comme ça, de cette façon que j’ai orchestrée savamment depuis des lustres, depuis aussi loin que je me rappelle, en fait. Vertigineux aussi parce qu’il me semble que c’est maintenant, la confrontation réelle, tangible, au vide, à l’inconnu, à l’incertitude, au temps et à la mort, à la vie nue, quoi. Bien plus vertigineux que la plus vertigineuse des falaises à suicides un jour de brume, en fait.
C’était il y a un peu plus d’un an, la déchirure.
Ce que je perçois aujourd’hui, ce qui s’est joué, je crois, en partie, c’est en fait une séparation : séparation d’avec l’alcool (mon si maternel, mon si cadavérique breuvage), mais séparation plus profonde avec autrui, l’idée que je me faisais d’autrui. C’était une impasse, en réalité, pour moi, car soit je me conformais mais l’intérieur hurlait, soit je ne me conformais pas et il me semblait que j’allais en mourir (ou pire encore). Si je me place hors de cette dualité fantasmée, si je regarde l’altérité comme quelque chose de l’ordre de singularités radicales (et non de "différences" qui sous-entendent nécessairement de mystérieuses et implacables normes velues), alors bien sûr il est question de SOLITUDE, mais le danger de l’autre comme empiètement, colonisation ou à l’inverse la possibilité du même parfaitement comblant tombent, et quelque part, là réside pour moi une possibilité d’être, même si elle est floue, mouvante, non définie. Quelque chose de l’ordre d’une liberté, même infime, même postulée, et d’un échange possible et complexe avec autrui, autre que celui qui consiste soit à se mesurer l’ego, soit à se fondre illusoirement dans l’autre, dans une nostalgie fusio-réparatrice.
Bazardées, du coup, les injonctions à être soi, à se connaître, à se réaliser, tout en grenouillant dans l’Enfer généralisé des normes du bien-être, bien–faire, bien-produire, bien-paraître (étau fatal, tétanisation absolue). Liquidées, les culpabilités mortifères, les horizons inatteignables, les horribles déclinaisons d’identité/goûts et couleurs, les sourires figés, tandis que les plaies suintent et puent. Au cul, les mille et une obligations internes, interminables, intergénérationnelles, interchangeables, interconnectables, interfécondes, intertextuelles. Anéanties, les attentes folles, les souhaits d’un autre qui comprendrait tout de moi (banzaï !), les peurs insensées inversées d’un autre qui me contraint, m’enchaîne, m’inflige, me dicte, me projette, me tranche menu (banzaï ! bis). Au feu, la honte de se savoir si mauvais, les automatismes, les postures figées, le connu et archi-connu, les états-mécaniques, la souffrance pour la souffrance pour la souffrance pour la souffrance pour la souffrance (rajoutez en moi une louche, c’est jamais jamais jamais jamais jamais fini, d’expier).
Dans l’idéal, pas encore tout à fait atteint (hum hum -les vieilles défroques-réflexes ont la vie dure), plus rien de tout ça, non. Juste marcher au bord du vide.
Sinon, je ne sais pas, pour HP ou pas (une psy a supputé récemment que, selon elle, sans doute, mais pas de test à ce jour et de mon point de vue de navet, ressenti plutôt carrément inverse). Je compte le faire, pour voir (en savoir un peu plus, sur le fonctionnement de mon cerveau. Oui les navets en ont un, les cons). Je viens par là parce que j’ai lu des trucs qui m’ont paru intéressants, et peut-être que je voudrais bien participer (enfin ce n’est pas si sûr, je ne m’avance pas trop, j’ai parfois des lubies qui passent aussi vite que l’éclair, et puis… je suis un tantinet sauvage, sous mes sourires de faux-cul).
Les années passent. Le temps consiste à, de façon systématique/automatique — sous peine de désintégration/anéantissement/abandon et rejet éternel, me conformer en surface à ce que je suppose qu’autrui attend de moi (imagination fertile, en mode intuition délirante et débridée, ON ne m’en demande pas tant). Je me contorsionne, mens, faux-semblantise, m’imposture, me taille en morceaux (à chacun le sien, je les brade). Ado, je rêve de transparence et de flotter au milieu d’eux, invisible. Ce n’est pas possible, alors je lis (addiction 1), je couche à droite à gauche, je dépressionne, je bois (pré-addiction 2). Plus tard, je fais semblant d’étudier, d’adulter, de travailler, de parentaliser.
Un jour, c’est sûr, des types en noir bien informés, spécialistes en turpitudes mentales, viendront me chercher à six heures du mat.
Quelqu’une, intuitive, me dit une nuit de fête festive, mais toi, on ne sait pas vraiment qui tu es (ce que tu penses, ressens, aime, déteste, etc.). Je souscris à cette pensée, la relègue aussitôt dans mon trou noir. Changement de lieu. Non loin il y a une haute falaise, bien dessinée, ah que la mer est belle et l’horizon lointain. Un collègue bien intentionné, cheveux longs et sales, œil vitreux, me raconte un jour que son père s’est jeté du haut. Comme ça. Un jour. Endroit propice, noté mentalement pour les moments où. Je m’y rends une fois pour m’y balancer — une carcasse de plus, il y a du brouillard, un couple s’étreint dans une voiture, ça sent la chair et le mouillé. Trois pas dans la brume, demi-tour, je repars, ridicule (à mimer le drame comme dans un mauvais film français). Je bois un peu plus, à mesure de l’insupportable. Encore un peu plus. La nuit, surtout. J’aime la nuit. Je bois du vin. Beaucoup de vin. Rouge, de plus en plus mauvais. Pour me délester, souffler, exploser en douce, (banalité affligeante, je sais bien).
Un jour de printemps, c’est le matin, un matin solitaire, je bois déjà (le café n'a pas fait long feu), je voudrais écrire, je n’écris rien, je fixe l’écran et bois jusqu’à tomber et c’est le soir, une heure pénible, une heure à boire encore pour oublier qu’on a bu, une heure à chercher à atteindre le dernier verre, et pour la première fois cette pensée, cette pensée qu’il faudrait à cette heure précise de ce jour précis trancher net, entre vivre et mourir. C’est vertigineux, parce que soudain cette idée très claire, limpide, que s’il s’agit de vivre alors ça ne peut plus être comme ça, de cette façon que j’ai orchestrée savamment depuis des lustres, depuis aussi loin que je me rappelle, en fait. Vertigineux aussi parce qu’il me semble que c’est maintenant, la confrontation réelle, tangible, au vide, à l’inconnu, à l’incertitude, au temps et à la mort, à la vie nue, quoi. Bien plus vertigineux que la plus vertigineuse des falaises à suicides un jour de brume, en fait.
C’était il y a un peu plus d’un an, la déchirure.
Ce que je perçois aujourd’hui, ce qui s’est joué, je crois, en partie, c’est en fait une séparation : séparation d’avec l’alcool (mon si maternel, mon si cadavérique breuvage), mais séparation plus profonde avec autrui, l’idée que je me faisais d’autrui. C’était une impasse, en réalité, pour moi, car soit je me conformais mais l’intérieur hurlait, soit je ne me conformais pas et il me semblait que j’allais en mourir (ou pire encore). Si je me place hors de cette dualité fantasmée, si je regarde l’altérité comme quelque chose de l’ordre de singularités radicales (et non de "différences" qui sous-entendent nécessairement de mystérieuses et implacables normes velues), alors bien sûr il est question de SOLITUDE, mais le danger de l’autre comme empiètement, colonisation ou à l’inverse la possibilité du même parfaitement comblant tombent, et quelque part, là réside pour moi une possibilité d’être, même si elle est floue, mouvante, non définie. Quelque chose de l’ordre d’une liberté, même infime, même postulée, et d’un échange possible et complexe avec autrui, autre que celui qui consiste soit à se mesurer l’ego, soit à se fondre illusoirement dans l’autre, dans une nostalgie fusio-réparatrice.
Bazardées, du coup, les injonctions à être soi, à se connaître, à se réaliser, tout en grenouillant dans l’Enfer généralisé des normes du bien-être, bien–faire, bien-produire, bien-paraître (étau fatal, tétanisation absolue). Liquidées, les culpabilités mortifères, les horizons inatteignables, les horribles déclinaisons d’identité/goûts et couleurs, les sourires figés, tandis que les plaies suintent et puent. Au cul, les mille et une obligations internes, interminables, intergénérationnelles, interchangeables, interconnectables, interfécondes, intertextuelles. Anéanties, les attentes folles, les souhaits d’un autre qui comprendrait tout de moi (banzaï !), les peurs insensées inversées d’un autre qui me contraint, m’enchaîne, m’inflige, me dicte, me projette, me tranche menu (banzaï ! bis). Au feu, la honte de se savoir si mauvais, les automatismes, les postures figées, le connu et archi-connu, les états-mécaniques, la souffrance pour la souffrance pour la souffrance pour la souffrance pour la souffrance (rajoutez en moi une louche, c’est jamais jamais jamais jamais jamais fini, d’expier).
Dans l’idéal, pas encore tout à fait atteint (hum hum -les vieilles défroques-réflexes ont la vie dure), plus rien de tout ça, non. Juste marcher au bord du vide.
Sinon, je ne sais pas, pour HP ou pas (une psy a supputé récemment que, selon elle, sans doute, mais pas de test à ce jour et de mon point de vue de navet, ressenti plutôt carrément inverse). Je compte le faire, pour voir (en savoir un peu plus, sur le fonctionnement de mon cerveau. Oui les navets en ont un, les cons). Je viens par là parce que j’ai lu des trucs qui m’ont paru intéressants, et peut-être que je voudrais bien participer (enfin ce n’est pas si sûr, je ne m’avance pas trop, j’ai parfois des lubies qui passent aussi vite que l’éclair, et puis… je suis un tantinet sauvage, sous mes sourires de faux-cul).
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Bienvenue dans le coin, navet, une présentation saisissante.
Réponse bien fade, mais enfin.
Si tu es intéressé par des autrui différents, tu pourrais tenter les rencontres qui se font dans ta région ! Ca ne demande aucun engagement de ta part à quoi que ce soit.
Je suis désolé de ne rien avoir à répondre de plus, merci simplement de ce partage de ta vie et tes ressentis.
N'hésite pas à continuer, si tu en ressens le besoin et y trouves une utilité.
J'espère que tu trouveras ici ce que tu es venu y chercher (et plus encore, tant qu'on y est !).
Réponse bien fade, mais enfin.
Si tu es intéressé par des autrui différents, tu pourrais tenter les rencontres qui se font dans ta région ! Ca ne demande aucun engagement de ta part à quoi que ce soit.
Je suis désolé de ne rien avoir à répondre de plus, merci simplement de ce partage de ta vie et tes ressentis.
N'hésite pas à continuer, si tu en ressens le besoin et y trouves une utilité.
J'espère que tu trouveras ici ce que tu es venu y chercher (et plus encore, tant qu'on y est !).
Elijah Kvar- Messages : 581
Date d'inscription : 20/04/2011
Re: Des types en noir
Merci beaucoup pour ton accueil, Eleu Tessera, je vais de ce pas me rencarder du côté de Marseille, pour les rencontres.
Bon, j’ai passé le WAIS IV cette semaine. Me suis sentie tout à fait stupide (par moments, à ne pas savoir répondre correctement à des trucs pourtant faciles). Résultats pas avant un bail, on verra bien. Simplement contente d’avoir fait quelque chose pour moi, juste parce que j’en avais envie.
Indépendamment de ce machin secret, dont je ne sais pas trop ce que ça produira, comme effets (quel que soit le "résultat"), je sens poindre des choses nouvelles (bon, à l’état de frémissements). Un peu comme un passage du "il faut" global, terrassant, à "je veux". Rien ne m’oblige, en fait. Mais, si rien ne m’oblige, et que je me sens quand même contrainte, alors voir en quoi je fais, pourquoi je fais (je veux dire, sans le faire porter sur le bon dos de l’autre), examiner mes bonnes ou très grotesques raisons, ça dégonfle la colère, la frustration, tout le bazar bazardeux, et surtout, ça conduit à rechoisir, à choisir vraiment, en conscience (y compris de faire pour de mauvaises raisons). Et si je ne fais plus rien porter à l’autre, n’importe quel autre, alors je peux peut-être enfin l’entendre, le voir, le toucher, essayer de le comprendre (effet collatéral non négligeable).
C’est comme si tout était à reconfigurer, de mon rapport au monde, mais, peu à peu, il me semble que j’ai moins peur. Il me semble même que c’est terriblement joyeux, comme perspective.
Bon, j’ai passé le WAIS IV cette semaine. Me suis sentie tout à fait stupide (par moments, à ne pas savoir répondre correctement à des trucs pourtant faciles). Résultats pas avant un bail, on verra bien. Simplement contente d’avoir fait quelque chose pour moi, juste parce que j’en avais envie.
Indépendamment de ce machin secret, dont je ne sais pas trop ce que ça produira, comme effets (quel que soit le "résultat"), je sens poindre des choses nouvelles (bon, à l’état de frémissements). Un peu comme un passage du "il faut" global, terrassant, à "je veux". Rien ne m’oblige, en fait. Mais, si rien ne m’oblige, et que je me sens quand même contrainte, alors voir en quoi je fais, pourquoi je fais (je veux dire, sans le faire porter sur le bon dos de l’autre), examiner mes bonnes ou très grotesques raisons, ça dégonfle la colère, la frustration, tout le bazar bazardeux, et surtout, ça conduit à rechoisir, à choisir vraiment, en conscience (y compris de faire pour de mauvaises raisons). Et si je ne fais plus rien porter à l’autre, n’importe quel autre, alors je peux peut-être enfin l’entendre, le voir, le toucher, essayer de le comprendre (effet collatéral non négligeable).
C’est comme si tout était à reconfigurer, de mon rapport au monde, mais, peu à peu, il me semble que j’ai moins peur. Il me semble même que c’est terriblement joyeux, comme perspective.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Belle présentation. Peu tendre envers toi-même, mais très touchante.
Bienvenue
Bienvenue
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
Après avoir lu ta présentation, ...... content de te voir la semaine prochaine. Les conventions, les adaptations, les addictions (quant à moi presque maîtrisées), la vie et son alternative absolument inefficace, la prise de conscience, la folle tension vers l'autre.... et la certitude chevillée dans le plancher du cerveau que non, c'est faux, mal fait, de biais, de pas grand chose du reste. Quand je sais, c'est plus vite plus loin plus fort. Quand je sens, c'est par tous les sens. Quand j'aime ou que je n'aime pas, c'est océanique. Quand je pense, c'est une fulgurance qui m'agresse presque et part dans tous les sens, ce n'est ni déductif, ni inductif, c'est artifice. Quand je fais, c'est pour de beaux yeux, sinon, je ne fais pas, cela ne m'intéresse pas.
Alors, si ce que j'ai lu de toi me parle et que tu liras de moi te parle, alors oui, je crois bien pouvoir te souhaiter la bienvenue chez toi.
Alors, si ce que j'ai lu de toi me parle et que tu liras de moi te parle, alors oui, je crois bien pouvoir te souhaiter la bienvenue chez toi.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Bonjour Ours, merci pour tes mots. Ils font des échos*.
J’aime bien les mots qui portent en eux-mêmes des sens si différents, si contraires parfois, qu’ils semblent cacher encore d’autres territoires secrets (un peu comme les gens). Je pense soudain au mot "trafic" que tu as employé quelquefois sur ton fil (que j’ai lu, enfin la plus grande partie, ainsi que d’autres). Je me disais ça ce matin, je me disais que je me suis délibérément (bien qu’en douce, sous des prétextes officiellement validés par la société, et au vague motif que ce serait provisoire, pour mieux réfléchir à que faire et où aller) exclue du trafic en arrêtant de travailler, il y a sept ans, mais que c’était pour mieux trafiquer (trafic au sens d’activité mystérieuse, compliquée). Bref.
Le mot "personne", aussi, je l'aime bien (son double sens abyssal).
FaWantsBi, merci aussi. Pas très tendre, mais faut reconnaître que le tableau n’est objectivement pas joli-joli, brossé à grands traits. Et je sais bien que ça cache aussi un truc un peu plus retors, même si j’essaye d’en sortir (bon) qui consiste à s’auto-flageller au préalable (pour, illusoirement, prévenir d’atroces blessures susceptibles d’être causées par autrui, ou même par moi, si je regardais plus loin et plus finement les choses). Je ne le fais pas de façon consciente, je veux dire pour manipuler, mais par réflexe vain de protection. C’est une façon de présenter sa vulnérabilité, mais sans aller jusqu’au bout. En la masquant, encore, certainement. Je ne sais pas.
En douce, ouais, c’est ça. Tous les rares trucs importants (pour moi, je veux dire), je les ai faits en douce, par la bande. Je veux bien bazarder le faux- self/l’informe/le mou/le soumis dégueulasse tout ça, mais est-ce que ça veut nécessairement dire transparence, clarté absolues? Alors je ne pourrai pas, je crois. Je n’arrive à fomenter à la source de mes désirs, que dans le secret, le silence, l’opaque, le caché.
Comment faire ? Je ne sais pas, là. Et peut-être que je confonds tout, peut-être qu’il y a bien plus de strates, de possibilités, de nuances, de chemins de traverse que je suis encore tout à fait incapable d’imaginer. Peut-être que comme les mots on dispose chacun d’un noyau indicible, inatteignable, imprenable, peut-être qu’il suffit de penser cela pour se laisser aller à être, à être complètement, et pas en tranches? Peut-être qu'on peut passer de la seconde peau artificielle (sans visage derrière) aux masques ponctuellement et librement choisis, si besoin (le cas échéant)?
(*Sur ma soif, de toutes façons, elle est gigantesque, énorme, sans fin, intranquille, aussi impossible à rassasier que n’importe quel besoin de consolation… que je boive ou non de l’alcool n’y change strictement rien.)
J’aime bien les mots qui portent en eux-mêmes des sens si différents, si contraires parfois, qu’ils semblent cacher encore d’autres territoires secrets (un peu comme les gens). Je pense soudain au mot "trafic" que tu as employé quelquefois sur ton fil (que j’ai lu, enfin la plus grande partie, ainsi que d’autres). Je me disais ça ce matin, je me disais que je me suis délibérément (bien qu’en douce, sous des prétextes officiellement validés par la société, et au vague motif que ce serait provisoire, pour mieux réfléchir à que faire et où aller) exclue du trafic en arrêtant de travailler, il y a sept ans, mais que c’était pour mieux trafiquer (trafic au sens d’activité mystérieuse, compliquée). Bref.
Le mot "personne", aussi, je l'aime bien (son double sens abyssal).
FaWantsBi, merci aussi. Pas très tendre, mais faut reconnaître que le tableau n’est objectivement pas joli-joli, brossé à grands traits. Et je sais bien que ça cache aussi un truc un peu plus retors, même si j’essaye d’en sortir (bon) qui consiste à s’auto-flageller au préalable (pour, illusoirement, prévenir d’atroces blessures susceptibles d’être causées par autrui, ou même par moi, si je regardais plus loin et plus finement les choses). Je ne le fais pas de façon consciente, je veux dire pour manipuler, mais par réflexe vain de protection. C’est une façon de présenter sa vulnérabilité, mais sans aller jusqu’au bout. En la masquant, encore, certainement. Je ne sais pas.
En douce, ouais, c’est ça. Tous les rares trucs importants (pour moi, je veux dire), je les ai faits en douce, par la bande. Je veux bien bazarder le faux- self/l’informe/le mou/le soumis dégueulasse tout ça, mais est-ce que ça veut nécessairement dire transparence, clarté absolues? Alors je ne pourrai pas, je crois. Je n’arrive à fomenter à la source de mes désirs, que dans le secret, le silence, l’opaque, le caché.
Comment faire ? Je ne sais pas, là. Et peut-être que je confonds tout, peut-être qu’il y a bien plus de strates, de possibilités, de nuances, de chemins de traverse que je suis encore tout à fait incapable d’imaginer. Peut-être que comme les mots on dispose chacun d’un noyau indicible, inatteignable, imprenable, peut-être qu’il suffit de penser cela pour se laisser aller à être, à être complètement, et pas en tranches? Peut-être qu'on peut passer de la seconde peau artificielle (sans visage derrière) aux masques ponctuellement et librement choisis, si besoin (le cas échéant)?
(*Sur ma soif, de toutes façons, elle est gigantesque, énorme, sans fin, intranquille, aussi impossible à rassasier que n’importe quel besoin de consolation… que je boive ou non de l’alcool n’y change strictement rien.)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
le navet a écrit:
En douce, ouais, c’est ça. Tous les rares trucs importants (pour moi, je veux dire), je les ai faits en douce, par la bande. Je veux bien bazarder le faux- self/l’informe/le mou/le soumis dégueulasse tout ça, mais est-ce que ça veut nécessairement dire transparence, clarté absolues? Alors je ne pourrai pas, je crois. Je n’arrive à fomenter à la source de mes désirs, que dans le secret, le silence, l’opaque, le caché.
Il ne s'agit pas non plus de se balader à poils, le cœur et le cerveau en bandoulière et sa souffrance à bout de bras. Je l'évoque d'autant plus librement que j'ai fait cela ici. C'est peut-être un passage nécessaire.
La révélation de ma douance (cela me fait tout bizarre d'écrire : "je suis surdoué" - ce n'est pas de moi que je parle, pas possible, peut-être un jour j'aurai complètement assumé (je me sens encore souvent très nul....)) et sa confirmation chiffrée m'ont permis au terme d'un chemin d'environ 6 mois de revivre, d'assumer et de réorienter 50 ans de vie consciente. Mais surtout, de savoir de quoi j'avais soif et de rencontrer des gens avec qui étancher cette soif. Curieusement, ce que je faisais en douce, quasi honteusement à mon seul profit en réponse à "la source de mes désirs" s'est trouvé mis en pleine lumière et a cessé de me miner.
J'ai cessé de m'autodétruire, comme si j'étais guéri d'une maladie auto-immune : "ma vie d'avant". Rein n'est simple, si tu as lu mon fil (80 pages et 2000 messages..... je suis impressionné) tu auras pu y sentir les affres par lesquels je suis passé. Pour être clair, c'est un parcours comme cela vers lequel tu t'engages. Personne n'a le même, mais tous y passent tôt ou tard. Mais après.... je peux te dire que je ne crains plus rien ni personne, que je me respecte parce que j'ai de la valeur du simple fait d'ETRE un homme. Et étonnamment, je craignais de verser dans l'orgueil, j'ai demandé à mes amis de veiller à me redresser au cas où, mais je ne me sens pas orgueilleux : je suis ce que je suis et n'ai pas honte de l'être, je pense ce que ......, j'aime et déteste ce que ..... Cela fait un bien fou.
C'est ce que je te souhaite : accéder à ta vérité, complètement, l'assumer et être capable de l'offrir.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Tiens, je viens de me rendre compte que j'ai en quelque sorte paraphrasé ma citation - signature.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Sacrée prez Monsieur le navet ! Une lucidité tranchante et touchante... en tous cas je suis touchée. Tellement de mots résonnent qu'il est presque inutile de les lister... Pour moi ce n'était pas une falaise mais les eaux noires et glauques de la Seine, pathétique comme tu dis, même pas cap' !
Pas besoin de résultats pour se définir et trouver ta place ici, sois le bienvenu dans ce lieu confortable et parfois bien utile pour accompagner nos transformations. Solitude, c'est vrai, pour toujours, c'est vrai aussi, mais partageable quand même... (et t'as de la chance, y'a du beau monde du côté de Marseille !)
Pas besoin de résultats pour se définir et trouver ta place ici, sois le bienvenu dans ce lieu confortable et parfois bien utile pour accompagner nos transformations. Solitude, c'est vrai, pour toujours, c'est vrai aussi, mais partageable quand même... (et t'as de la chance, y'a du beau monde du côté de Marseille !)
♡Maïa- Messages : 1734
Date d'inscription : 06/03/2012
Re: Des types en noir
Ces quelques mots me rappellent furieusement l'écriture de mes propres "flashes" d'un souvenir à l'autre lorsque je tentais désespérément de me définir, peu après la découverte du sujet.Changement de lieu.
"du sujet"
du sujet d'être "Z". Fait chier d'en être encore à cette pudeur, tiens...
bref.
Bien sûr, l'aspiration vers le vide, la lassitude de n'être rien et de n'aller vers rien, le sentiment de lâcheté... tout ça me parle.
Sans vouloir faire dans la "nostalgie fusio-réparatrice", je trouve heureux que tes pas t'aient mené jusqu'ici. Cet endroit (et l'échange, la rencontre d'autres Z, de différences et de similarités), peut donner l'occasion de rebondir. Peut-être car il permet de s'y mettre à nu, si on veut... comme dit ours, c'est peut-être nécessaire, je ne sais trop non plus.
Pour ce qui est de la démarche derrière le fait d'avoir durci la brosse de ton tableau, je t'entends. Fort bien. Protection. Sûrement en grande partie. Mais également, main dans la main, une grosse déchirure dans l'estime de soi. "Se libérer du faux-self", "être soi", je ne pourrai t'en parler. Pas aussi bien que d'autres qui te répondent ici, ou qui te répondront. Je n'en suis pas là, ces notions sont hors de ma portée. Mais j'ai tout de même l'impression diffuse, que simplement retrouver l'estime de soi, est un chemin vers tout ça.
Ou que c'est le carrefour vers ce chemin.
Ou même... que c'en est finalement l'arrivée.
"Savoir se pardonner"
C'est encore flou... mais selon moi c'est par là.
Je te souhaite une bonne et enrichissante plongée dans ce forum.
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
bienvenue...
... dans ton monde.
Tes maux écrits me parlent, leurs orthographes n’est pas la même, mais le fond d’âme oui.
Seul « le fait de savoir » que tu peux transformer tes pensées envers toi te montre que le chemin existe.
C’est une belle balade.
Je n’ai que 10 jours d’avance sur toi sur ce forum.
Je peux juste te dire que lorsque j’ai rencontré pour la première fois un assemblage de zèbres, j’ai été à l’aise, comme si je les connaissais depuis très longtemps, comme si c’était des amis proches, et ceci AVANT d’avoir émis le premier mot !
C’était dans l’air, quelque chose d’indéfinissable, de protecteur, de curiosité enfin à la hauteur et à la variété demandée, une énergie calmante. On se pose. Enfin…
S’il y a des fautes de frappes, ne m’en veuillez pas, c’est mon chat qui me tient compagnie.
Il s’appelle capitaine Némo.
Comme le commandant de Jules Vernes qui a refusé la compagnie des humains et rejeté son propre nom pour prendre celui de Némo, qui veut dire « personne » en grec…
Rien n’est innocent (mais personne est coupable).
Tu as raison de penser à une reconfiguration, chacun ses propres mots, j’emploie celui de me centrer. Par apport à ce que JE pense.
Des nouvelles bases. De réflexions, de vie, d’existence. De futur coloré.
TOUT devient différent. Mieux.
Tu as raison d’émettre la pensée que c’est terriblement joyeux, car c’est ce qui ce passe pour moi.
Tellement gigantesque que j’aperçois même plus les limites de ce bonheur.
La vie 2.0 est belle.
Magnifique film de F.Capra, hymne à la vie.
A samedi !
Tes maux écrits me parlent, leurs orthographes n’est pas la même, mais le fond d’âme oui.
Seul « le fait de savoir » que tu peux transformer tes pensées envers toi te montre que le chemin existe.
C’est une belle balade.
Je n’ai que 10 jours d’avance sur toi sur ce forum.
Je peux juste te dire que lorsque j’ai rencontré pour la première fois un assemblage de zèbres, j’ai été à l’aise, comme si je les connaissais depuis très longtemps, comme si c’était des amis proches, et ceci AVANT d’avoir émis le premier mot !
C’était dans l’air, quelque chose d’indéfinissable, de protecteur, de curiosité enfin à la hauteur et à la variété demandée, une énergie calmante. On se pose. Enfin…
S’il y a des fautes de frappes, ne m’en veuillez pas, c’est mon chat qui me tient compagnie.
Il s’appelle capitaine Némo.
Comme le commandant de Jules Vernes qui a refusé la compagnie des humains et rejeté son propre nom pour prendre celui de Némo, qui veut dire « personne » en grec…
Rien n’est innocent (mais personne est coupable).
Tu as raison de penser à une reconfiguration, chacun ses propres mots, j’emploie celui de me centrer. Par apport à ce que JE pense.
Des nouvelles bases. De réflexions, de vie, d’existence. De futur coloré.
TOUT devient différent. Mieux.
Tu as raison d’émettre la pensée que c’est terriblement joyeux, car c’est ce qui ce passe pour moi.
Tellement gigantesque que j’aperçois même plus les limites de ce bonheur.
La vie 2.0 est belle.
Magnifique film de F.Capra, hymne à la vie.
A samedi !
félindemars- Messages : 68
Date d'inscription : 17/02/2011
Age : 62
Re: Des types en noir
J'adorefélindemars a écrit:La vie 2.0 est belle.
♡Maïa- Messages : 1734
Date d'inscription : 06/03/2012
Re: Des types en noir
Ours, félin, je crois que j’entraperçois de loin, d’encore assez loin, ce que vous cherchez à me dire. Il y a encore deux ans, ça aurait été impossible, et là, aujourd’hui, j’entraperçois. Il faut juste que je dépose les cadavres pendus autour du cou, sur le chemin. C’est comme si c’était à la fois très simple, redoutablement simple, et terriblement compliqué. Pour l’instant, c’est un peu comme se retrouver dans une zone d’attente, un non-lieu, un hall de gare. J’y fume des clopes (je sais, c’est mal, c’est interdit), je regarde les gens passer, j’entends des bribes de phrases, je songe. Je ne prends aucun train, mais j’envisage parfois d’y monter au hasard.
L’estime de soi, Fa, c’est un truc qui m’échappe totalement. Ou alors, je ne comprends pas ce que c’est. Je veux dire, je n’ambitionne pas de m’estimer (me jauger, même en bien), mais de me lâcher la grappe, cesser de tourner autour de mon nombril défaillant comme dans un navet en cage, en gros. L’autre soir, je discutais avec une amie, on parlait de ce qu’on mettait dans le mot aimer, aimer quelqu’un, et pour moi c’était de l’ordre, essentiellement, de ne jamais juger, d’accepter totalement, de laisser l’autre entièrement libre, le plus libre possible, de ne jamais vouloir le changer, le transformer, le mettre à sa sauce.
Si je le reporte à mon propre rapport à ce que je "suis" ( ?), c’est ça, je crois ; qu’il n’y ait pas d’échelle de valeur, de jugement intime qui pousse sans arrêt à se regarder faire (ou ne rien faire, assez souvent), à vouloir être autre, autrement, mieux, etc. Je voudrais que la question de l’estime de soi n’ait même plus lieu d’être, en fait. Qu’il s’agisse juste de vivre pleinement, comme quand on est petit et qu’on joue, et qu’on joue et que c’est à la fois si sérieux et si excitant. Qu’il y ait du ressenti et de l’agir, de l’incarnation, en somme, plutôt que de la rumination stérile, du dédoublement carton-pâte, de l’absence, pendant que la vie passe et pouf, the end.
J’aimerais bien cesser une fois pour toutes d’avoir honte du simple fait d’exister, comme tu l’écris, ours.
Je crois que je suis née sous le sceau de "pas la bonne personne" (déjà, une fille, c’était assez mal barré), et que j’ai passé mon temps à essayer de l’être (le pire, sans savoir qui elle serait vraiment, cette fameuse-là – les données étant assez contradictoires). Je croyais qu’il fallait absolument être aimée, et que ça marchait comme ça (et je détestais tout aussi absolument être aimée, du coup, bien sûr, puisque ça signifiait dans mon cerveau malade se mettre à la merci de l’autre, de devoir m’adapter sans arrêt, etc. — et des liens et des chaînes et des fouets et des prisons). Mais c’était-c’est moi toute seule, le bourreau des bourreaux (alias Super Navet).
Du coup, finalement, ça m’a fait beaucoup de bien, de devenir alcoolique (car le dire, ensuite, c’était comme signifier clairement à qui de droit, moi la première, eh bien voilà, je suis un monstre- dans l’idée de rupture nette avec la suradaptation, la fausse parfaititude du rien qui dépasse, je veux dire)…Et pas seulement pour ça, mais c’est une autre histoire.
Merci pour Jean-Navet, Mogwai, et tes petits mots chaleureux. La Seine, ça me rend toujours mélancolique, quand on l’évoque…
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
L’estime de soi, Fa, c’est un truc qui m’échappe totalement. Ou alors, je ne comprends pas ce que c’est. Je veux dire, je n’ambitionne pas de m’estimer (me jauger, même en bien), mais de me lâcher la grappe, cesser de tourner autour de mon nombril défaillant comme dans un navet en cage, en gros. L’autre soir, je discutais avec une amie, on parlait de ce qu’on mettait dans le mot aimer, aimer quelqu’un, et pour moi c’était de l’ordre, essentiellement, de ne jamais juger, d’accepter totalement, de laisser l’autre entièrement libre, le plus libre possible, de ne jamais vouloir le changer, le transformer, le mettre à sa sauce.
Si je le reporte à mon propre rapport à ce que je "suis" ( ?), c’est ça, je crois ; qu’il n’y ait pas d’échelle de valeur, de jugement intime qui pousse sans arrêt à se regarder faire (ou ne rien faire, assez souvent), à vouloir être autre, autrement, mieux, etc. Je voudrais que la question de l’estime de soi n’ait même plus lieu d’être, en fait. Qu’il s’agisse juste de vivre pleinement, comme quand on est petit et qu’on joue, et qu’on joue et que c’est à la fois si sérieux et si excitant. Qu’il y ait du ressenti et de l’agir, de l’incarnation, en somme, plutôt que de la rumination stérile, du dédoublement carton-pâte, de l’absence, pendant que la vie passe et pouf, the end.
J’aimerais bien cesser une fois pour toutes d’avoir honte du simple fait d’exister, comme tu l’écris, ours.
Je crois que je suis née sous le sceau de "pas la bonne personne" (déjà, une fille, c’était assez mal barré), et que j’ai passé mon temps à essayer de l’être (le pire, sans savoir qui elle serait vraiment, cette fameuse-là – les données étant assez contradictoires). Je croyais qu’il fallait absolument être aimée, et que ça marchait comme ça (et je détestais tout aussi absolument être aimée, du coup, bien sûr, puisque ça signifiait dans mon cerveau malade se mettre à la merci de l’autre, de devoir m’adapter sans arrêt, etc. — et des liens et des chaînes et des fouets et des prisons). Mais c’était-c’est moi toute seule, le bourreau des bourreaux (alias Super Navet).
Du coup, finalement, ça m’a fait beaucoup de bien, de devenir alcoolique (car le dire, ensuite, c’était comme signifier clairement à qui de droit, moi la première, eh bien voilà, je suis un monstre- dans l’idée de rupture nette avec la suradaptation, la fausse parfaititude du rien qui dépasse, je veux dire)…Et pas seulement pour ça, mais c’est une autre histoire.
Merci pour Jean-Navet, Mogwai, et tes petits mots chaleureux. La Seine, ça me rend toujours mélancolique, quand on l’évoque…
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
le navet a écrit:
L’autre soir, je discutais avec une amie, on parlait de ce qu’on mettait dans le mot aimer, aimer quelqu’un, et pour moi c’était de l’ordre, essentiellement, de ne jamais juger, d’accepter totalement, de laisser l’autre entièrement libre, le plus libre possible, de ne jamais vouloir le changer, le transformer, le mettre à sa sauce.
Si je le reporte à mon propre rapport à ce que je "suis" ( ?), c’est ça, je crois ; qu’il n’y ait pas d’échelle de valeur, de jugement intime qui pousse sans arrêt à se regarder faire (ou ne rien faire, assez souvent), à vouloir être autre, autrement, mieux, etc. Je voudrais que la question de l’estime de soi n’ait même plus lieu d’être, en fait. Qu’il s’agisse juste de vivre pleinement, comme quand on est petit et qu’on joue, et qu’on joue et que c’est à la fois si sérieux et si excitant. Qu’il y ait du ressenti et de l’agir, de l’incarnation, en somme, plutôt que de la rumination stérile, du dédoublement carton-pâte, de l’absence, pendant que la vie passe et pouf, the end.
J’aimerais bien cesser une fois pour toutes d’avoir honte du simple fait d’exister, comme tu l’écris, ours.
Je ne peux que te témoigner, je n'ai pas de recette. Il y a 10 mois, j'ai débarqué en plein questionnement et certain d'avoir une tache mentale (voire d'être cette tache). J'essayais de découper ma vie en tranche, comme les anatomopathologistes découpent les tumeurs, pour voir où cela "merdait". Ne trouvant rien, j'avais une rapport affectif où le principal était de dire à l'autre : "regarde comme j'ai mal, fais quelque chose et dis-moi pourquoi et guéris-moi". Je n'ai aucun besoin de te dire combien ce pouvait être efficace !
10 mois après, j'ai à peu près compris ce que je suis et ce n'est plus un sujet. Et là tu interviens : "estime de soi", "amour" - Et bien oui, je ne pouvais pas y penser comme cela, mais tu as raison. C'est cela qui s'est installé. Je me coucherai moins con, ce soir, merci
le navet a écrit:Je crois que je suis née sous le sceau de "pas la bonne personne" (déjà, une fille, c’était assez mal barré),
Ainsi "le navet" est une "Navette". J'avais bien vu les accords féminisés mais.... Tant mieux, je préfère les spécialités biscuitières provençales aux légumes à soupe. Ceci dit, j'ai un certain respect pour les raves, ces légumes qui ont alimentés nos ancêtres jusqu'à la période moderne
le navet a écrit:Du coup, finalement, ça m’a fait beaucoup de bien, de devenir alcoolique (car le dire, ensuite, c’était comme signifier clairement à qui de droit, moi la première, eh bien voilà, je suis un monstre
Tu es sous dépendance quotidienne ou as-tu pu mettre à distance ?
le navet a écrit:Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
Merci pour cette citation !
Et comme c'est dimanche, alors, je déclare pour ce jour. Nah, même si la météo ou le tempo moral n'y est pas.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
ours a écrit:
Tu es sous dépendance quotidienne ou as-tu pu mettre à distance ?
Bonjour ours,
Tu écrivais plus haut, "maîtrise des addictions", et il est clair que pour moi, en ce qui concerne l’alcool, et pour l’instant en tout cas, c’est impossible.
Je sais que je ne peux pas boire un verre ou deux de temps en temps, mais que si je bois, il m’en faut des tonneaux (et cela, sans même plus avoir la sensation d’ivresse, celle que j’ai tant aimée quand j’ai commencé à boire, ado).
Je ne bois donc plus du tout (enfin si, beaucoup de thé), et c’est pour moi très salutaire, d’une part parce que mon espace psychique est enfin débarrassé de tous les questionnements qui finissaient par tourner exclusivement autour de ça (quand vais-je pouvoir boire, etc. — donc j’étais déjà et tout le temps, sous contrôle), d’autre part parce que je n’arrivais plus à rien, tout était accentué et atroce (le dégoût de soi, le repliement, l’incapacité à faire face, la déréliction, la phobie sociale, la coupure avec le corps, et j’en passe).
Quand j’ai arrêté, au début, j’ai eu l’impression de renaître, en fait. Et ce qui ce qui a compté, c’est aussi que personne ne m’a rien demandé, à ce sujet (personne ne savait rien, ou ne voulait rien savoir).
Mais ce dont j’ai conscience, c’est que l’alcool m’a permis d’aller loin, dans le noir, le fond du (de mon) trou, les gouffres, et que, d’une certaine façon, c’est à ce moment-là que, comme dans un sursaut vital, le désir de vivre est réellement apparu (ou réapparu, je ne sais pas).
Globalement, je n’ai plus envie/besoin de boire, et, quand ça arrive parfois, c’est toujours très instructif (de me demander pour quoi, pourquoi). Dans ces cas-là, je me retire en moi-même, et j’examine ce qui se passe. Et j’attends, et ça passe (tout passe toujours, c’est effrayant et libérateur à la fois, cette pensée-là).
Et il y a aussi que j’ai deux minots (dont un avec pas mal de difficultés/handicaps, et un autre pré-ado dont je me demande s’il n’est pas surdoué, sans savoir pour l’instant), et un amoureux, et que si ces circonstances-là ne m’ont pas empêchée de sombrer (en accentuant la honte et la culpabilité, facteurs non négligeables de recherche d’oubli, serpents qui se mordent la queue), elles sont aujourd’hui plutôt des moteurs, pas pour une image qu’il y aurait à rebâtir, mais bien au contraire pour me trouver un peu plus derrière les sous-couches de mauvaises peintures, et d’être enfin à même, aussi, d’être avec ces autres-là, si proches, si aimés.
Ne plus tout détruire de ce qui m’importe.
Je crois que j’en ai à peu près fini avec la honte liée à ça, même si tout reste à faire, du point de vue existentiel… Et c’est sans doute jamais terminé…
(tant mieux)
Pour le choix du navet, c’est juste qu’il me semblait que c’était un truc un peu neutre, qui limitait les projections (bon, je l’avoue, j’ai quand même pris soin d’ôter tout accord, dans mon premier message, j’aimais bien l’idée qu’on ne sache pas). Et j’aimais bien aussi l’idée que ce que j’allais écrire ensuite, ça serait comme un scénario un peu pourri, pour un film un peu naze.
Sinon, pas trop fan de la fleur d’oranger (au goût)...
Merci pour tes mots, c'est quand même assez chouette de lire d'autres chemins, d'autres possibles, et de penser que rien n'est jamais foutu.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Pennyroyal Tea ?le navet a écrit:(enfin si, beaucoup de thé)
J'espère que ça vit encore tout de même
Marrant, ça... pour la navette. Comme ours, j'avais le même sentiment, et quand mogwai a dit "monsieur", je me suis dit "bin non !"... Mais sans raison valable, car j'ai sur le coup relu le 1er post, et... et aucun accord, en effet (ce qui me fait me sentir d'autant plus proche, ayant déjà utilisé la technique des auxiliaires avoir en d'autres temps )
Ca doit donc se sentir quelque part, mais je ne sais à quoi ça tient
J'en profite pour bisouiller ours
Pour ce qui est de l'estime de soi... je pense comprendre ce que tu dis en voulant que la question ne se pose même pas, que ça n'ait pas lieu d'être.
Mais je crois, au fond, que lorsqu'on y parvient, c'est alors, qu'elle ne se pose plus (ou c'est qu'elle ne se pose plus, enfin, c'est intriqué. Ou flou ^^ au choix).
Il n'est plus question d'échelle, lorsqu'on accepte de s'aimer quoi qu'il arrive.
En filigrane, l'idée que ça permet d'être plus apte à aimer tout court, je crois. En commençant par ces proches auxquels tu tiens. Content de voir que tu es sur ce chemin
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
Mais, comment ai-je pu rater cette présentation ?!
Bref, je n'ai pas le temps d'écrire quelque chose d'intelligent, mais je montre le bout de mon nez, avant de revenir plus tard...
Bienvenue !
Bref, je n'ai pas le temps d'écrire quelque chose d'intelligent, mais je montre le bout de mon nez, avant de revenir plus tard...
Bienvenue !
BR- Messages : 255
Date d'inscription : 08/08/2012
Re: Des types en noir
j'avais ressenti quelque chose d'étrange, d'arrangé effectivement dans les accords de tes premiers posts, un masquage volontaire qui m’a inquiété, je l’avoue.
mais j’ai souri lorsque j’ai lu que tu montrais ta féminité. se dévoiler suppose une certaine mise en confiance..
L’addiction est la conséquence, l’origine de la cause (mal-être) doit être identifié et transmuté en sa vraie réalité.
Les gens nous inculquent une mauvaise image de soi, c’est à nous à constater qu’ils se trompent lourdement, car eux, c’est eux et nous, c’est nous.
Nous sommes ce que nous sommes.
La connaissance et l’acceptation de soi amène à l’estime de soi.
L’estime de soi amène à s’aimer (destruction à construction).
S’aimer amène à aimes les autres.
S’aimer soi et les autres amènent à la sérénité intérieure.
Avant de passer à l’étape d’être aimé, il y a l’étape s’aimer.
On ne peut pas sauter une étape sur ce plan là.
Malheureusement, beaucoup de personnes, volontairement ou non, n’aide pas à la fabrication de cette étape essentielle dans l’enfance.
Allez, je vais dire un secret. Vous ne le répéterez pas, ok ?
Je fais parti des personnes qui collectionnent les navets du monde entier. Les pires films au monde.
Et je peux vous dire, en tant que spécialiste es navets et autres légumes, qu’il y a des perles parmi ceux-là !
Des films qui ne se démodent pas, des films qui font rire, des films sans un sou, mais qui existent,
Des films originaux, des films qui valent plus que certains grands films.
Oui, il existe des excellents navets !
mais j’ai souri lorsque j’ai lu que tu montrais ta féminité. se dévoiler suppose une certaine mise en confiance..
L’addiction est la conséquence, l’origine de la cause (mal-être) doit être identifié et transmuté en sa vraie réalité.
Les gens nous inculquent une mauvaise image de soi, c’est à nous à constater qu’ils se trompent lourdement, car eux, c’est eux et nous, c’est nous.
Nous sommes ce que nous sommes.
La connaissance et l’acceptation de soi amène à l’estime de soi.
L’estime de soi amène à s’aimer (destruction à construction).
S’aimer amène à aimes les autres.
S’aimer soi et les autres amènent à la sérénité intérieure.
Avant de passer à l’étape d’être aimé, il y a l’étape s’aimer.
On ne peut pas sauter une étape sur ce plan là.
Malheureusement, beaucoup de personnes, volontairement ou non, n’aide pas à la fabrication de cette étape essentielle dans l’enfance.
Allez, je vais dire un secret. Vous ne le répéterez pas, ok ?
Je fais parti des personnes qui collectionnent les navets du monde entier. Les pires films au monde.
Et je peux vous dire, en tant que spécialiste es navets et autres légumes, qu’il y a des perles parmi ceux-là !
Des films qui ne se démodent pas, des films qui font rire, des films sans un sou, mais qui existent,
Des films originaux, des films qui valent plus que certains grands films.
Oui, il existe des excellents navets !
félindemars- Messages : 68
Date d'inscription : 17/02/2011
Age : 62
Re: Des types en noir
félindemars a écrit:
Allez, je vais dire un secret. Vous ne le répéterez pas, ok ?
Je fais parti des personnes qui collectionnent les navets du monde entier. Les pires films au monde.
Et je peux vous dire, en tant que spécialiste es navets et autres légumes, qu’il y a des perles parmi ceux-là !
Des films qui ne se démodent pas, des films qui font rire, des films sans un sou, mais qui existent,
Des films originaux, des films qui valent plus que certains grands films.
Oui, il existe des excellents navets !
Partage !
Je connais un ou deux Z cinéphiles qui vont être enthousiastes !
Invité- Invité
Re: Des types en noir
FaWantsBi a écrit:
Marrant, ça... pour la navette.
Ca doit donc se sentir quelque part, mais je ne sais à quoi ça tient
J'aimerais bien savoir, quand même (plus généralement s'il existe une façon d'écrire sexuée, quand on parle de soi, ou même en général, tiens, pendant qu'on y est... ça m'intrigue)
Sinon, Fa, oui, I’m a thief and a liar, mais j’ai l’impression que ça frétille encore un peu, derrière, dessous, enfin je sais pas trop où (et je préfère quand même le thé fumé).
Félin, bien sûr que l’addiction est une conséquence, pour moi (et pas une simple habitude qui aurait mal tourné), et je crois saisir à peu près où elle s’enracine. Mais je pense qu’elle est extrêmement liée, ensuite, à la construction à mon insu consciente de ce faux-self, qui, d’asile protecteur (de fous) est devenu goulag, et ce n’est tout simplement pas tenable de vivre là-dedans, sans quelques petites compensations droguesques qui ne font qu’accentuer, au final, l’enfermement.
La dépression comme l’alcool ont été les moyens que j’ai trouvés pour souffler, pour m’extraire du cirque qu’il me semblait obligatoire d’arpenter, en bon clown—soldat qui a peur. En ce sens-là j’aime à croire que l’addiction n’est pas qu’un problème psychologique et individuel, mais touche également à la société (il y aurait comme un acte transgressif, mais mal fichu, qui se retournerait in fine contre l’individu auto-saboteur de lui-même, à défaut d’autre chose).
C’est insupportable pas seulement parce qu’on n’existe pas, mais parce que l’idée même du double mine la réalité entière de toute existence. Le monde et le réel disparaissent, en quelque sorte. Il n’y a plus rien, que des fantômes et des ombres, des représentations. C’est vers le réel que j’ai maintenant envie d’aller, tout le réel, prendre tout ce qui est. Et c’est très troublant, en un sens, parce que tout ce que je croyais était faux (par exemple, je me pensais très lucide, non pas que je le sois plus maintenant, mais disons que c’était encore bien pire). Je ne voyais rien, et pourtant j’y croyais dur comme fer. Et j’attendais dans ma grotte je ne sais quel miracle, alors qu’elle était ouverte sur le monde et que si ça se trouve, il faisait même presque beau, dehors (quoique j’aime bien la pluie, et l’automne, enfin bref).
« … et c’était démoralisant de vivre éternellement dans la cave de ses torts, d’attendre éternellement que quelqu’un prenne pitié de vous… » (Les corrections de Franzen que je suis en train de lire, ça m'a fait penser à ce que ours a écrit plus haut).
Il me semble que c’est par là (par la plongée dans le réel) que se niche la possibilité de l’allégresse, quel que soit les drames et les bonheurs vécus. Du coup c’est pas tellement la sérénité qui m’intéresse (comme état possiblement constant), mais plutôt l’acuité, la perception, l’expérimentation, la pensée libre (ou moins dupe), le "et si je passais par là plutôt que par ici, et on verra bien" (ce qu’il y a à voir).
Quant aux navets, je veux bien que tu me donnes quelques pistes...
Salut Brutus, au passage, j’aime beaucoup cette citation de Céline que tu as posté quelque part
c’est peut-être cela qu’on cherche à travers la vie, rien que cela, le plus grand chagrin possible pour devenir soi-même avant de mourir
– (aparté) c’est drôle à chaque grand chagrin, ou très grande peur, j’ai ressenti comme du soulagement, quelque chose de l’ordre du c’est mérité, ou plutôt enfin une vraie bonne grosse raison objective, pour souffrir, plutôt que cette sensation diffuse de fabriquer toute seule ma petite fange, ma plaie, un truc pas flamboyant du tout, un truc de rat katoupourêtreureu et faut encore qu’il emmerde le monde…
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
!!! je n'ajoute rien parce que ça sera moins juste que ce que tu dis là, mais je n'en pense pas moins.le navet a écrit:Il me semble que c’est par là (par la plongée dans le réel) que se niche la possibilité de l’allégresse, quel que soit les drames et les bonheurs vécus. Du coup c’est pas tellement la sérénité qui m’intéresse (comme état possiblement constant), mais plutôt l’acuité, la perception, l’expérimentation, la pensée libre (ou moins dupe), le "et si je passais par là plutôt que par ici, et on verra bien" (ce qu’il y a à voir).
un douloureux bonheur de précision.
bonsoir
wkndmarkt- Messages : 146
Date d'inscription : 07/12/2011
Age : 57
Localisation : Parijs
Re: Des types en noir
le navet a écrit:
Il me semble que c’est par là (par la plongée dans le réel) que se niche la possibilité de l’allégresse, quel que soit les drames et les bonheurs vécus. Du coup c’est pas tellement la sérénité qui m’intéresse (comme état possiblement constant), mais plutôt l’acuité, la perception, l’expérimentation, la pensée libre (ou moins dupe), le "et si je passais par là plutôt que par ici, et on verra bien" (ce qu’il y a à voir).
Petit ajustement par rapport à ce que j'appelle la sérénité : savoir qu'au fond de soi, on est désormais assez solide pour plonger dans le réel pour effectivement vivre l'allégresse.
Bonne journée
Dernière édition par ours le Mar 23 Oct 2012 - 11:52, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Pour savoir que nous tomberons encore et encore mais que nous trouverons l'énergie de nous relever et d'y croire ... dans ces infimes pépites de bonheur éphémères ?
prendre conscience
les effluves du café encore dans le fond de ma gorge,
les lumières s'allument petit à petit dans mon crâne,
je viens de m’apercevoir, au vu de vos mails, qu'il existe plusieurs définitions de la sérénité!
on y met donc chacun ce qu'on recherche.
perso, c'est le calme dans ma tête.
savoir ce que je veux, qui je suis, où je trouve mon "allégresse". pour y aller.
plus de tempête tropicale en permanence, plus de longueur pour faire des choix, plus cette désagréable sensation qu'on me juge,
vivre comme je le désire, basta les beaux penseurs, je suis le seul juge de mes actes.
en gardant la multitude éclectique de mes pensées.
j'y suis arrivé. c'est donc possible!
j'ai une lanterne à ma main, regardez au loin, dans le brouillard de vos pensées, vous devriez l'apercevoir...
ours, TU es solide. et d'un niveau qui va te surprendra.
il suffit "juste" que tu en prennes conscience.
prendre le chemin de cette recherche est déjà accompli, il me semble.
savoir que ce chemin à une fin est un élément important maintenant.
une fois arrivé à cet endroit, tu verras le tournant.
j’espère voir ton sourire, révélateur de ton bien-être intérieur.
navet, ton chemin est différent,
tes buts apparemment aussi.
apparemment.
il y a le blanc et le noir, il existe des contraires en tout.
lorsqu'on pense "... que se niche la possibilité de l'allégresse", il faut savoir que son contraire EXISTE.
pas de niche (nietzsche ;-) ), de petite alcôve, mais de grands espaces aérées où tout est possible,
pas de possibilité, mais une certitude, une existence, une réalité, un fait réel.
dans ce monde libre, TU peux penser comme tu veux, te foutre de l'avis des autres, Vivre sans le regard des juges et t'accomplir.
enlève ces regards.
bonne journée à tous!
les lumières s'allument petit à petit dans mon crâne,
je viens de m’apercevoir, au vu de vos mails, qu'il existe plusieurs définitions de la sérénité!
on y met donc chacun ce qu'on recherche.
perso, c'est le calme dans ma tête.
savoir ce que je veux, qui je suis, où je trouve mon "allégresse". pour y aller.
plus de tempête tropicale en permanence, plus de longueur pour faire des choix, plus cette désagréable sensation qu'on me juge,
vivre comme je le désire, basta les beaux penseurs, je suis le seul juge de mes actes.
en gardant la multitude éclectique de mes pensées.
j'y suis arrivé. c'est donc possible!
j'ai une lanterne à ma main, regardez au loin, dans le brouillard de vos pensées, vous devriez l'apercevoir...
ours, TU es solide. et d'un niveau qui va te surprendra.
il suffit "juste" que tu en prennes conscience.
prendre le chemin de cette recherche est déjà accompli, il me semble.
savoir que ce chemin à une fin est un élément important maintenant.
une fois arrivé à cet endroit, tu verras le tournant.
j’espère voir ton sourire, révélateur de ton bien-être intérieur.
navet, ton chemin est différent,
tes buts apparemment aussi.
apparemment.
il y a le blanc et le noir, il existe des contraires en tout.
lorsqu'on pense "... que se niche la possibilité de l'allégresse", il faut savoir que son contraire EXISTE.
pas de niche (nietzsche ;-) ), de petite alcôve, mais de grands espaces aérées où tout est possible,
pas de possibilité, mais une certitude, une existence, une réalité, un fait réel.
dans ce monde libre, TU peux penser comme tu veux, te foutre de l'avis des autres, Vivre sans le regard des juges et t'accomplir.
enlève ces regards.
bonne journée à tous!
félindemars- Messages : 68
Date d'inscription : 17/02/2011
Age : 62
Re: Des types en noir
ours a écrit:
Petit ajustement par rapport à ce que j'appelle la sérénité : savoir qu'au fond de soi, on est désormais assez solide pour plonger dans le réel pour effectivement vivre l'allégresse.
Ours, je crois saisir ce que tu veux dire, et ça me séduit assez, à ma sauce ça donnerait devenir aussi réelle que le réel, en gros (car l’idée de la solidité, je crains que ça ne soit pas possible —mais là je parle pour ma pomme, et pourtant c’est bien ce que je suis sans doute aller chercher, en passant ce foutu test, donc tout cela est encore très flou et bourré de contradictions).
Ce que je veux dire c’est qu’il me semble confusément que justement le réel (et le soi réel) n’est pas solide, au sens de stable et définissable (toujours un rien qui échappe), et que bien qu’il soit ainsi, il existe. Au contraire du faux qui n’existe pas mais s’échine à la permanence et à l’assignation.
Ou alors, ce serait pour moi le solide de l’existant en tant qu’il ne l’est pas (solide) et ne vise pas à l’être (pfffou, pardon, ce que j'essaye d'écrire est très très confus…).
Pour le dire vite j'ai peur que chercher une solidité comme préalable/passeport d'accès soit le meilleur moyen pour moi, non seulement de ne jamais l'atteindre (la solidité), mais de rester encore à côté (du monde, de la vie), derrière la vitre.
Donc je traduirai ta phrase, en l'état actuel du théâtre de mes opérations, en quelque chose comme:
savoir qu'au fond de soi, on est désormais assez solide pour renoncer au solide et plonger dans le réel.
Mais je suspecte aussi, comme félin, que nos buts ne sont pas très différents (même si tu es plus avancé que moi on the road), et bien sûr je retiens ça :
"de grands espaces aérées où tout est possible,
pas de possibilité, mais une certitude, une existence, une réalité, un fait réel.
dans ce monde libre, TU peux penser comme tu veux, te foutre de l'avis des autres, Vivre sans le regard des juges", merci félin
(la petite alcôve que tu cites avant me fait penser à une vraie, une vraie et douceâtre et rose, alcôve-geôle)
Bonsoir renarde, j’aime bien ton image des pépites, bien que peut-être il n’y ait pas à y croire mais juste à les éprouver ; et j’aime bien aussi l’idée d’une énergie qui servirait à se relever, plutôt qu’à être morte avant d’être morte. Merci à toi.
(wkndmarkt, « douloureux bonheur de précision », bon ben là, c’est moi qui n’ajoute rien. Merci)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
oui oui comme Duchamp faisait de la "peinture de précision", je maintiensle navet a écrit:(wkndmarkt, « douloureux bonheur de précision », bon ben là, c’est moi qui n’ajoute rien. Merci)
je vais juste en dire un peu plus parce que ça a continué à me travailler quasiment toute la journée - même si c'est le genre de choses qui passent mieux à l'oral pour moi.
dans ton texte d'hier il y a une chose que je trouvais très juste, mais j'ai sûrement fait ma mayonnaise avec des idées différentes, et je n'arriverai sûrement pas à la retranscrire dans toute sa largeur: la qualification de l'allégresse, que j'entendais comme un être au monde du plus conscient possible / il me semblait que tu l'associais (aussi) à la douleur, au moins à des vécus douloureux.
Plus j'avance, plus je me désintègre, et plus ces moments d'allégresse sont teintés de mes douleurs les plus significatives, celles sur lesquelles on ne peut pas revenir, toujours. Ce ne sont pas des moments d'insouciance - mais c'est infiniment plus puissant - je pensais tout à l'heure au café (pour l'amertume) ou aux vins un peu complexes, qui ne sont pas des choses qui se donnent - les enfants n'aiment pas ça - il faut un minimum de vécu; du coup la joie qu'ils donnent est teintée de la douleur de leur compréhension, le raffinement. L'allégresse dont tu parles, je la relie forcément au matin, au frais (oui oui), au fait d'être à jeun, et aussi des grands espaces, je suis absolument d'accord, mais aussi à un arrière goût de douleur transcendée (quelque chose comme), une amertume surement liée à la solitude encore renouvelée d'être encore là encore plus loin. où on se sentirait accéder à une forme de dignité encore inconnue. (accepté là, mais avec tout de même le souvenir du renoncement, de ce qu'on laisse derrière)(la beauté est dans les choses qu'on quitte (?))
Et je crois qu'il y a des grands espaces parce que ça correspond toujours à des avancées, bêtement, à des avant-postes.
C'est ce que je lisais dans l"allégresse" - et finalement c'est peut-être juste ça, des avancées - se tenir debout au bout d'un truc.
chose numéro deux: "c’est pas tellement la sérénité qui m’intéresse"
(dans la prétention de mon ignorance, j'ai longtemps cru être le seul à penser ça) du coup oui on chercherait plutôt le chan d'avant le zen, l'extraversion dans le monde, et plutôt bourré que détaché. (je ne sais plus quel poète chinois s'est noyé, complètement ivre, sous la lune)
je pense que tu te méfiais de la "solidité" d'ours pour la même raison que je me méfie de la méditation: moi je veux être dans le monde entier, pas bouclé dans un circuit sensoriel réduit à mon microcosme.
ça demande une fluidité, qui est forcément une méfiance envers la pensée. la solidité, pour ce genre de visée, n'est pas dans la pensée. la solidité c'est la douleur passée, le goût de l'événement dans la bouche. et puis l'intelligence c'est du flux, c'est comment tu le comprends, pas comment tu l'expliques, ça n'a rien a voir avec la pensée (dans le fond, j'en ai peur, la pensée m'emmerde)
personnellement, je pense que mon but est de me dissoudre dans le réel - c'est mon destin. j'en suis encore loin, mais tant que ça sera mon but, enfin ma pulsion, je pense que ça m'autorisera l'allégresse.
[edit sans rapport] à propos d'alcool, tu connais le "B comme Boisson" dans l'abécédaire de Deleuze? la recherche du dernier verre et les choses trop grandes pour nous? [/edit]
(bon comme d'habitude, une fois posé c'est figé c'est moche, je ne sais plus trop quoi en penser, mais c'est pas grave, on va quand même cliquer sur Envoyer)(puis éditer 15 fois)
Et que ta joie demeure!
wkndmarkt- Messages : 146
Date d'inscription : 07/12/2011
Age : 57
Localisation : Parijs
interlude
Le poète chinois qui s’est noyé dans la rivière Yangtze en essayant d’embrasser la lune qu’il venait de peindre est Li Bô (701-762),
fulgurant génie au ciel des lettres chinoises,
considéré comme le poète le plus romantique de la dynastie de Tang.
1100 poèmes nous sont parvenus à ce jour.
Li Bô est connu pour son extravagante imagination, ses images taoïstes et… son grand amour pour l’alcool.
Voici un exemple de ses écrits :
Un toast à notre vie
Monsieur, ne voyez-vous point que l’eau de la rivière jaune vient du ciel ?
Elle coule jusqu’à la mer et ne retourne plus jamais.
Monsieur, ne voyez-vous point devant le miroir net d’une noble demeure quelqu’un se languit pour ses cheveux blancs ?
Le matin, ils sont comme les fils de soie noire, le soir, devenus neige.
Dans la vie, quand on se voit réaliser ses désirs, il faut se réjouir à volonté.
Ne pas laisser la tasse d’or vide vers la lune.
Si le ciel m’a fait, je dois sûrement servir à quelque chose.
Mille pièces d’or dépensées, elles reviendront.
Il avait reçu le prénom Bo (clarté) et le surnom Taibo (grande clarté)
Son nom a croisé nos discussions.
A méditer.
fulgurant génie au ciel des lettres chinoises,
considéré comme le poète le plus romantique de la dynastie de Tang.
1100 poèmes nous sont parvenus à ce jour.
Li Bô est connu pour son extravagante imagination, ses images taoïstes et… son grand amour pour l’alcool.
Voici un exemple de ses écrits :
Un toast à notre vie
Monsieur, ne voyez-vous point que l’eau de la rivière jaune vient du ciel ?
Elle coule jusqu’à la mer et ne retourne plus jamais.
Monsieur, ne voyez-vous point devant le miroir net d’une noble demeure quelqu’un se languit pour ses cheveux blancs ?
Le matin, ils sont comme les fils de soie noire, le soir, devenus neige.
Dans la vie, quand on se voit réaliser ses désirs, il faut se réjouir à volonté.
Ne pas laisser la tasse d’or vide vers la lune.
Si le ciel m’a fait, je dois sûrement servir à quelque chose.
Mille pièces d’or dépensées, elles reviendront.
Il avait reçu le prénom Bo (clarté) et le surnom Taibo (grande clarté)
Son nom a croisé nos discussions.
A méditer.
félindemars- Messages : 68
Date d'inscription : 17/02/2011
Age : 62
Re: Des types en noir
A la loupe de la réponse de wkndmarkt à ce sujet, je me rends compte à quel point j'avais zappé cette petite phrase... alors qu'elle rejoint fortement une de mes préoccupations récentes.le navet a écrit:c’est pas tellement la sérénité qui m’intéresse
J'aime bien vos idées là dessus.
Mais la plongée dans le réel... le vrai réel qui pique ? Ca m'effraie, parfois.
Et puis j'associe le réel aux tâches quotidiennes, à l'ennui... Alors je reste dans le rêve.
Il faudrait que je refasse ce lien entre réel et sensations (agréables, de préférence). Juste ressentir plutôt que de
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
La réalité n'est pas seulement à l'extérieur ...
Ce qui me heurte si fort de ce monde qui m'agresse vient très souvent du plus profond de moi !
Entendre et écouter l'enfant blessé en nous. Le bercer, le consoler, lui assurer notre présence et notre aide ... Apprivoiser sa confiance pour acquérir enfin la notre.
Ce qui me heurte si fort de ce monde qui m'agresse vient très souvent du plus profond de moi !
Entendre et écouter l'enfant blessé en nous. Le bercer, le consoler, lui assurer notre présence et notre aide ... Apprivoiser sa confiance pour acquérir enfin la notre.
Re: Des types en noir
Bonsoir renarde,
Je crois que j’ai du mal avec cette histoire d’enfant blessé en soi, il m’emmerde, cet enfant. J’ai envie de le zigouiller pif paf et on n’en parle plus (tu parles d’une communication non violente !). J’ai du mal mais ça ne veut pas dire que ce n’est pas une bonne idée, sûrement que je ne sais pas faire (une sorte de désir de table rase, j’ai l’impression qu’il a déjà tellement pleuré que j’en ai marre de l’écouter). Mais je dois quand même te dire que j’ai ressorti une minuscule photo de moi petiote barbotant dans une bassine orange, hirsute (des fois je la regarde quand j’ai envie d’être ivre morte), alors bon…
Fa,
Ce que tu écris m’interroge, enfin c’est une question que je me pose aussi (imagination vs réel). J’ai parfois l’impression que l’imagination augmente le réel (sans le vider de sa substance), et que parfois, à l’inverse, elle en détourne (elle l’occulte ou le remplace). Peut-être qu’après c’est une question de proportions (je veux dire, pour vivre) ; ou alors, d’une distinction à faire entre imagination et fantasme ?
Il me semble que si on est toujours dans le fantasme d’un ailleurs, d’un autrement, d’un autre temps, d’un autre tout court, alors le réel est toujours et nécessairement, décevant (ou en tout cas, jamais celui que l’on attend). Et c’est peut être ça qui fiche la trouille, l’incertitude et l’éternelle surprise du réel (qu’on ne voit pas, si on n’y est pas). Sa cruauté aussi, parfois.
Je me demande si cette histoire de désir qui ne saurait prospérer que sur du manque (donc forcément sur de la réalité estimée insatisfaisante en tant que réalité), n’est pas en fin de compte une vaste fumisterie…
Pour digresser un peu, mais peut-être pas tant que ça, il me semble que l’imagination dans la création artistique, si elle n’est pas le réel lui-même, en propose un regard sur, une recomposition, qui peut enrichir, intensifier, questionner, et que c’est aussi un biais considérable d’accès (même s’il existe aussi la fonction échappatoire).
Félin, merci beaucoup pour Bo, je ne le connaissais pas.
wkndmarkt,
Mille mercis pour ton message édité quinze fois (d’ailleurs j’en ai lu une version où il y avait le mot disparition, mais je vois que conformément à sa nature éphémère tu l’as déjà enlevé… Il ne reste plus "que" dissolution). Il me fait cogiter dans tous les sens et je te répondrai sans doute plus longuement quand ça se sera un peu calmé…
Je voudrais juste ajouter, par rapport à ce que tu écris là :
"...plus ces moments d'allégresse sont teintés de mes douleurs les plus significatives"
que je retournerai volontiers ta proposition, au sens où il y aussi dans les moments graves et/ou très douloureux des instants de joie pure, non pas déconnectés de ce qui se joue par ailleurs, mais liés, complètement liés (je voudrais écrire mieux ce que je ressens par rapport à ça mais je n’y parviens pas, les mots s’échappent et disparaissent … eux aussi). Je reviendrai (avec mon magma).
Pour Deleuze, j'aime bien ce qu'il dit à B comme boisson (j'ai eu l'impression de comprendre très nettement tout ce qu'il disait, ce qui n'est pas le cas de pas mal d'autres trucs), je l'avais écouté peu après avoir arrêté et je me rappelle avoir trouvé ça très juste, et surtout plus intéressant que ce qui est habituellement dit sur l'alcoolisme...
(ours, si tu passes une patte par ici, je t'envoie quelques pensées, je t'ai un peu lu sur ton fil sans savoir quoi écrire même si l'envie m'est venue)
Je crois que j’ai du mal avec cette histoire d’enfant blessé en soi, il m’emmerde, cet enfant. J’ai envie de le zigouiller pif paf et on n’en parle plus (tu parles d’une communication non violente !). J’ai du mal mais ça ne veut pas dire que ce n’est pas une bonne idée, sûrement que je ne sais pas faire (une sorte de désir de table rase, j’ai l’impression qu’il a déjà tellement pleuré que j’en ai marre de l’écouter). Mais je dois quand même te dire que j’ai ressorti une minuscule photo de moi petiote barbotant dans une bassine orange, hirsute (des fois je la regarde quand j’ai envie d’être ivre morte), alors bon…
Fa,
Ce que tu écris m’interroge, enfin c’est une question que je me pose aussi (imagination vs réel). J’ai parfois l’impression que l’imagination augmente le réel (sans le vider de sa substance), et que parfois, à l’inverse, elle en détourne (elle l’occulte ou le remplace). Peut-être qu’après c’est une question de proportions (je veux dire, pour vivre) ; ou alors, d’une distinction à faire entre imagination et fantasme ?
Il me semble que si on est toujours dans le fantasme d’un ailleurs, d’un autrement, d’un autre temps, d’un autre tout court, alors le réel est toujours et nécessairement, décevant (ou en tout cas, jamais celui que l’on attend). Et c’est peut être ça qui fiche la trouille, l’incertitude et l’éternelle surprise du réel (qu’on ne voit pas, si on n’y est pas). Sa cruauté aussi, parfois.
Je me demande si cette histoire de désir qui ne saurait prospérer que sur du manque (donc forcément sur de la réalité estimée insatisfaisante en tant que réalité), n’est pas en fin de compte une vaste fumisterie…
Pour digresser un peu, mais peut-être pas tant que ça, il me semble que l’imagination dans la création artistique, si elle n’est pas le réel lui-même, en propose un regard sur, une recomposition, qui peut enrichir, intensifier, questionner, et que c’est aussi un biais considérable d’accès (même s’il existe aussi la fonction échappatoire).
Félin, merci beaucoup pour Bo, je ne le connaissais pas.
wkndmarkt,
Mille mercis pour ton message édité quinze fois (d’ailleurs j’en ai lu une version où il y avait le mot disparition, mais je vois que conformément à sa nature éphémère tu l’as déjà enlevé… Il ne reste plus "que" dissolution). Il me fait cogiter dans tous les sens et je te répondrai sans doute plus longuement quand ça se sera un peu calmé…
Je voudrais juste ajouter, par rapport à ce que tu écris là :
"...plus ces moments d'allégresse sont teintés de mes douleurs les plus significatives"
que je retournerai volontiers ta proposition, au sens où il y aussi dans les moments graves et/ou très douloureux des instants de joie pure, non pas déconnectés de ce qui se joue par ailleurs, mais liés, complètement liés (je voudrais écrire mieux ce que je ressens par rapport à ça mais je n’y parviens pas, les mots s’échappent et disparaissent … eux aussi). Je reviendrai (avec mon magma).
Pour Deleuze, j'aime bien ce qu'il dit à B comme boisson (j'ai eu l'impression de comprendre très nettement tout ce qu'il disait, ce qui n'est pas le cas de pas mal d'autres trucs), je l'avais écouté peu après avoir arrêté et je me rappelle avoir trouvé ça très juste, et surtout plus intéressant que ce qui est habituellement dit sur l'alcoolisme...
(ours, si tu passes une patte par ici, je t'envoie quelques pensées, je t'ai un peu lu sur ton fil sans savoir quoi écrire même si l'envie m'est venue)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
L’allégresse, pour moi, ce serait exultation et désolation, ensemble, peut-être ?
J’ai l’impression que le réel a à voir avec la limite, qui serait la limite ultime de l’ici et maintenant, une limite qui a longtemps été positivement insoutenable pour moi, si je regarde bien. C’est une limite au sens de frontière avec l’irréel (ce qui n’est pas là, ce qui est ailleurs, ce qui est avant et après), mais ce n’est pas une limité au sens de limité, réduit, rabougri.
*
Hier, je suis allée voir ça, au cinoche:
Et j'ai repensé à celui-là:
Hiroshima mon amour, Alain Resnais
*
Dans l’expo de photos de Bernard Plossu que j’ai vue récemment à Marseille, il y avait cette phrase (enfin de mémoire, je ne sais pas si c’est vraiment la bonne, je ne l’ai pas notée) : comprendre, c’est écouter ce qu’on voit, et je trouve que ça a un lien avec ce que tu écris wkndmarkt sur la fluidité, et enfin sur l’idée qu’il ne s’agit pas d’expliquer. J’ai comme la vague impression de commencer seulement un peu à voir…
Il y a quelques mois, j’ai commencé une sorte de journal filmé (vu que je n’ai jamais écrit de journal intime, ou approchant, et vu aussi que je cherchais une voie et pour appréhender les images), l’idée étant juste d’utiliser ce que j’ai toujours ou presque sur moi (mon tél portable) pour glaner, un peu comme quand on ramasse des trucs qui traînent dans les poubelles ; glaner des fragments, saisir et prélever des détails, etc. L’idée aussi, sans doute, était peut-être de conserver ce qui part à jamais, ce dont on ne se souvient pas (mais ce n’était pas mon but conscient, d’autant que j’ai toujours détesté les films de famille et l’oncle machin qui dégaine sans arrêt sa caméra).
Je ne voulais pas filmer des moments particuliers en l’envisageant à l’avance mais, au gré du temps, de mes déambulations et de mes émotions, saisir des petits bouts, sans avoir savoir ce que j’allais réellement en faire et sous quelle forme.
Un truc pour moi, pour expérimenter. Je me disais que je verrais peut-être mieux qu’avec mes seuls yeux.
J’ai commencé ça un peu comme ça, et puis mon fils aîné (11 ans) est tombé très gravement malade. Il y a eu alors ce huis-clos dans une chambre d’hôpital au 16ème étage, onze jours et dix nuits à attendre, sans savoir s’il allait vivre ou mourir. Et j’ai prélevé, un peu, des riens : des murs écaillés, le ciel à travers la grille, le café en bas, la nuit, enfin bref. Très peu de gens. Puis mon fils s’est rétabli, et j’ai gardé ces images, mais sans les regarder, et je savais en même temps qu’il fallait que j’en fasse qqch, que je les vois et que je les assemble, enfin j’ai cru sans doute qu’avec elles j’arriverai à éclaircir ce fameux truc que je n’avais pas éclairci à la mort de mon père (ce moment où il était vivant et après mort, et aussi qui sont les gens, ce qu’est la vie, enfin tout un tas de machins).
Je l’ai fait (j’ai gardé tout brut, son réel et images, pas de voix-off, j’avais imaginé en faire une mais ça n’allait pas, il y a juste une phrase au milieu écrite, enfin bref ce n’est très pas important) et ce qui m’a frappée, après coup, c’est d’une part que j’ai vu cette tension à comprendre dans mon choix d’image (notamment à plusieurs reprises je m’approche du visage de mon fiston, quand il dort, ça dure longtemps), et qu’en même temps elles ne disent rien, rien du tout, elles ne disent que le dérisoire, l’absurde, l’impossibilité de saisir le réel si ce n’est, au moment où, d’être complètement et entièrement présent à celui-ci.
C’est peut-être alors cette tension vers, qui m’intéresse le plus, tension qui ne pouvait exister quand je me bardais de tout côtés d’étais imaginaires.
(je suis désolée, je ne réponds pas du tout de la façon dont j’aurais aimé le faire…)
(et je mets plein de parenthèses partout)
(et j’ai un problème avec les smileys, je ne sais pas si c’est que je ne sais pas les utiliser ou que je ne les aime pas)
(et j’ai un problème avec échanger par écrit de façon construite)
(c'est plutôt, telle chose fait écho à une autre, des bribes se répondent ou emmènent encore ailleurs, liens, connexions de points quelconques vers d'autres points quelconques - impossibilité de la cohérence et du bien ficelé)
(et à l’oral c’est pareil je ne sais pas faire, et c'est pire si on est plus de deux)
J’ai l’impression que le réel a à voir avec la limite, qui serait la limite ultime de l’ici et maintenant, une limite qui a longtemps été positivement insoutenable pour moi, si je regarde bien. C’est une limite au sens de frontière avec l’irréel (ce qui n’est pas là, ce qui est ailleurs, ce qui est avant et après), mais ce n’est pas une limité au sens de limité, réduit, rabougri.
*
Hier, je suis allée voir ça, au cinoche:
Et j'ai repensé à celui-là:
Hiroshima mon amour, Alain Resnais
*
Dans l’expo de photos de Bernard Plossu que j’ai vue récemment à Marseille, il y avait cette phrase (enfin de mémoire, je ne sais pas si c’est vraiment la bonne, je ne l’ai pas notée) : comprendre, c’est écouter ce qu’on voit, et je trouve que ça a un lien avec ce que tu écris wkndmarkt sur la fluidité, et enfin sur l’idée qu’il ne s’agit pas d’expliquer. J’ai comme la vague impression de commencer seulement un peu à voir…
Il y a quelques mois, j’ai commencé une sorte de journal filmé (vu que je n’ai jamais écrit de journal intime, ou approchant, et vu aussi que je cherchais une voie et pour appréhender les images), l’idée étant juste d’utiliser ce que j’ai toujours ou presque sur moi (mon tél portable) pour glaner, un peu comme quand on ramasse des trucs qui traînent dans les poubelles ; glaner des fragments, saisir et prélever des détails, etc. L’idée aussi, sans doute, était peut-être de conserver ce qui part à jamais, ce dont on ne se souvient pas (mais ce n’était pas mon but conscient, d’autant que j’ai toujours détesté les films de famille et l’oncle machin qui dégaine sans arrêt sa caméra).
Je ne voulais pas filmer des moments particuliers en l’envisageant à l’avance mais, au gré du temps, de mes déambulations et de mes émotions, saisir des petits bouts, sans avoir savoir ce que j’allais réellement en faire et sous quelle forme.
Un truc pour moi, pour expérimenter. Je me disais que je verrais peut-être mieux qu’avec mes seuls yeux.
J’ai commencé ça un peu comme ça, et puis mon fils aîné (11 ans) est tombé très gravement malade. Il y a eu alors ce huis-clos dans une chambre d’hôpital au 16ème étage, onze jours et dix nuits à attendre, sans savoir s’il allait vivre ou mourir. Et j’ai prélevé, un peu, des riens : des murs écaillés, le ciel à travers la grille, le café en bas, la nuit, enfin bref. Très peu de gens. Puis mon fils s’est rétabli, et j’ai gardé ces images, mais sans les regarder, et je savais en même temps qu’il fallait que j’en fasse qqch, que je les vois et que je les assemble, enfin j’ai cru sans doute qu’avec elles j’arriverai à éclaircir ce fameux truc que je n’avais pas éclairci à la mort de mon père (ce moment où il était vivant et après mort, et aussi qui sont les gens, ce qu’est la vie, enfin tout un tas de machins).
Je l’ai fait (j’ai gardé tout brut, son réel et images, pas de voix-off, j’avais imaginé en faire une mais ça n’allait pas, il y a juste une phrase au milieu écrite, enfin bref ce n’est très pas important) et ce qui m’a frappée, après coup, c’est d’une part que j’ai vu cette tension à comprendre dans mon choix d’image (notamment à plusieurs reprises je m’approche du visage de mon fiston, quand il dort, ça dure longtemps), et qu’en même temps elles ne disent rien, rien du tout, elles ne disent que le dérisoire, l’absurde, l’impossibilité de saisir le réel si ce n’est, au moment où, d’être complètement et entièrement présent à celui-ci.
C’est peut-être alors cette tension vers, qui m’intéresse le plus, tension qui ne pouvait exister quand je me bardais de tout côtés d’étais imaginaires.
(je suis désolée, je ne réponds pas du tout de la façon dont j’aurais aimé le faire…)
(et je mets plein de parenthèses partout)
(et j’ai un problème avec les smileys, je ne sais pas si c’est que je ne sais pas les utiliser ou que je ne les aime pas)
(et j’ai un problème avec échanger par écrit de façon construite)
(c'est plutôt, telle chose fait écho à une autre, des bribes se répondent ou emmènent encore ailleurs, liens, connexions de points quelconques vers d'autres points quelconques - impossibilité de la cohérence et du bien ficelé)
(et à l’oral c’est pareil je ne sais pas faire, et c'est pire si on est plus de deux)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
ah ouais, tu as eu le temps de voir ça? c'est coolle navet a écrit:Mille mercis pour ton message édité quinze fois (d’ailleurs j’en ai lu une version où il y avait le mot disparition, mais je vois que conformément à sa nature éphémère tu l’as déjà enlevé… Il ne reste plus "que" dissolution).
(désolé pour les éditions, pour ce genre de propos je n'arrive pas à faire autrement: il faut que le texte soit publié pour que je voie ce qu'il faut y modifier, je ne sais pas pourquoi)
OUI tout à fait, ça marche dans les deux sens. Je crains d'ailleurs que ça tende à se rejoindre vers une allégresse qui ne soit plus que moitié (souvenir de la) douleur et moitié joie; peut-être que la douleur aura changé de nature d'ici là.le navet a écrit:Je voudrais juste ajouter, par rapport à ce que tu écris là :
"...plus ces moments d'allégresse sont teintés de mes douleurs les plus significatives"
que je retournerai volontiers ta proposition, au sens où il y aussi dans les moments graves et/ou très douloureux des instants de joie pure, non pas déconnectés de ce qui se joue par ailleurs, mais liés, complètement liés
oui ça ressemble à ce que j'avais en tête; à savoir que c'est être dans le monde (je ne dis pas dans le moment) avant même qu'il soit formalisé/cristallisé en pensée - donc ça peut correspondre à une écoute.le navet a écrit:Dans l’expo de photos de Bernard Plossu que j’ai vue récemment à Marseille, il y avait cette phrase (enfin de mémoire, je ne sais pas si c’est vraiment la bonne, je ne l’ai pas notée) : comprendre, c’est écouter ce qu’on voit, et je trouve que ça a un lien avec ce que tu écris wkndmarkt sur la fluidité, et enfin sur l’idée qu’il ne s’agit pas d’expliquer. J’ai comme la vague impression de commencer seulement un peu à voir…
C'est à la fois étonnant et très familier ce que tu dis là. Décidément je comprends plein de trucs ici. Certains arrivent à produire du sens en image de manière très fluide et très naturelle, sans effort apparent. Pour moi, comme pour toi apparemment (ça reste à vérifier) ça ne donne rien - juste une éventuelle injonction à travailler beaucoup plus pour que ça commence à éventuellement donner quelque chose. D'un côté je trouve ça terrifiant, d'un autre côté je pense que c'est juste une forme d'altération de la spontanéité. Je pense, en tout cas j'espère que ça se retrouve; effectivement une fois qu'on a vu les étais on est sur la bonne piste - reste à piger comment ça tient quand on les enlève.le navet a écrit:Il y a quelques mois, j’ai commencé une sorte de journal filmé (...)
et qu’en même temps elles ne disent rien, rien du tout, elles ne disent que le dérisoire, l’absurde, l’impossibilité de saisir le réel si ce n’est, au moment où, d’être complètement et entièrement présent à celui-ci.
C’est peut-être alors cette tension vers, qui m’intéresse le plus, tension qui ne pouvait exister quand je me bardais de tout côtés d’étais imaginaires.
Je situe ça autour d'un malentendu avec moi-même sur "ce que j'ai à dire".
le navet a écrit:(je suis désolée, je ne réponds pas du tout de la façon dont j’aurais aimé le faire…)
moi non plus, c'est dramatique
(et je mets plein de parenthèses partout)
et tu es bien la seule à faire ça ici!
(et j’ai un problème avec les smileys, je ne sais pas si c’est que je ne sais pas les utiliser ou que je ne les aime pas)
les smileys sont bienveillants, mais je ne les aime pas non plus, j'admets
(et j’ai un problème avec échanger par écrit de façon construite)
là encore, tu es bien la seule!
(c'est plutôt, telle chose fait écho à une autre, des bribes se répondent ou emmènent encore ailleurs, liens, connexions de points quelconques vers d'autres points quelconques - impossibilité de la cohérence et du bien ficelé)
bah c'est surement parce qu'on est dans des zones pas forcément simples, alors on fait comme on peut
(et à l’oral c’est pareil je ne sais pas faire, et c'est pire si on est plus de deux)
wkndmarkt- Messages : 146
Date d'inscription : 07/12/2011
Age : 57
Localisation : Parijs
Re: Des types en noir
C'est bien lui! 李白!félindemars a écrit:Le poète chinois qui s’est noyé dans la rivière Yangtze en essayant d’embrasser la lune qu’il venait de peindre est Li Bô (701-762)
Merci félin d'avoir précisé mon allusion nonchalante.
Par contre j'ai vraiment du mal avec les traductions françaises des poètes Tang - je trouve que les traductions "mot à mot" de François Cheng (l'écriture poétique chinoise), même si elles sont difficiles à lire, sont souvent plus parlantes et beaucoup plus proches des originaux.
Par rapport au chan, je recherchais aussi sans la retrouver une citation traduite par Jacques Gernet, dans L'intelligence de la Chine, qui me semble coller à ce qu'on se raconte ici; un commentaire d'un texte bouddhiste: "la vérité est impermanente, et non-produite"; un truc comme ça. C'est d'une profondeur inouïe, quand c'est correctement cité et commenté. En gros, ça dit que la vérité (donc ici "le réel", ou "l'allégresse") n'est pas "tenable" dans la durée: elle nous tombe sur la tête, de temps en temps; on la saisit, puis on la perd. On ne peut pas la produire, la provoquer, tout ce qu'on peut faire c'est apprendre à se mettre dans l'état le plus propice à une nouvelle révélation, temporaire.
(du coup par extension, on ramènerait presque la "vérité" à une forme de sensation - puisque dans le bouddhisme en général toute sensation est aussi définie comme impermanente, et qu'elle est le plus souvent non-produite. je trouve ça plutôt pas mal)
wkndmarkt- Messages : 146
Date d'inscription : 07/12/2011
Age : 57
Localisation : Parijs
Re: Des types en noir
wkndmarkt a écrit:
(du coup par extension, on ramènerait presque la "vérité" à une forme de sensation - puisque dans le bouddhisme en général toute sensation est aussi définie comme impermanente, et qu'elle est le plus souvent non-produite. je trouve ça plutôt pas mal)
Une forme de sensation, oui, c’est sans doute aussi ténu et incroyable que ça.
(mais je suis pour l’instant totalement ignare, en matière de bouddhisme)
Ce que tes mots m’évoquent, et là où il me semble partir de très très loin, voire de nulle part, c’est la question du corps. J’ai l’impression pour ma part qu’il y a eu amputation, relégation, en tout cas coupure nette (et sans doute assez occidentale) entre le mental (qui tourne et tourne à vide), et le corps qui sent. Et que c’est le corps, en premier lieu, qui est support pour être dans le monde ; qu’il n’est pas coupé de l’esprit, en réalité.
Je relierais à ça, l’altération de la spontanéité que tu évoques, et dans laquelle je me reconnais, même si ça m’embête de le faire (dans la série des trucs qu’on préfèrerait être, et force est de constater…).
Je crois que pour ma part que c’est assez lié au fait d’avoir évolué dans le pays du faux. On sent que c’est faux, mais on apprend, à force, que ce qu’on sent n’a pas lieu d’être, alors on le rentre, on l’élimine, on se coupe. Et après, plus tard, bien plus tard, on ne sait plus, on ressent dans tous les sens, ou on ne sent plus rien, on ne sait plus comment ça peut s’accorder avec la pensée, avec le réel, de toutes façons on ne sait pas, pour le réel, on ne sait plus si on pense, on ne sait plus rien de rien.
(Archéologie socio-culturelle, tentative d’exploration du faux-self par d’autres voies, ou le pays du faux:
Mésalliance bourgeoisie/petits commerçants, accord subtil du faire semblant consubstantiel et de la vente-sourire organisée, le meilleur terrain possible?
Un bon terreau bien grouillant, bien fertile, je crois.
Tout à lisser sans cesse, lisser comme on repasse, écarter et tanner les peaux pour que tout glisse, tout s’huile et vous me mettrez deux baguettes, ailleurs de père en fils on s’appelle alternativement Paul ou François ou Charles et on est notaire, et les grands appartements au bord du Rhône luisent, mais point trop n’en faut, c’est subtil, on sait se mettre à la portée du bas-monde, on ne la ramène pas trop, les signes distinctifs sont ténus mais très clairs, on en est ou on en n’est pas, de l’autre les clients c’est toute la vie, les clients à qui il faut sourire et le fric, sourire dents blanches= fric et c’est bien, on bosse à quatorze ans de ce côté-là, on se saigne, on conspue Tonton Robert qui vit à cinquante ans passés aux crochets de sa mère le nez dans ses bouquins, des bouquins on n’a pas idée.
En dessous on part de pas grand-chose mais c’est les trente glorieuses, quand on veut on peut, et on vend, on vend encore, on gagne de l’argent, on le dépense, on se sépare sans se séparer, on meurt d’une longue maladie. On vit dans un immeuble cossu spécialisé en suicides/morts violentes de jeunes hommes dans la force de l’âge (mais il n’y a jamais de problèmes, sous les hauts plafonds — à peine quelques incidents).
En dessous, on est petit, mais on sent que tout sonne faux. On sent que quelque chose cloche, mais sans savoir quoi. Il n’existe rien d’autre que le lisse, érigé en dogme non écrit. Alors on marche dans la combine. Et on accumule les squelettes dans les placards, comme tous les autres. On devient virtuose pour planquer le sang et la merde.
Dans le pays du faux, il y a des faux mots et des silences, parce qu’il faut que toujours, tout aille bien ; que tout aille apparemment bien. Dans le pays du faux, on fait ce qu’on a à faire pour cela, on maintient, on compacte, on tait, on relègue en permanence la réalité dans des cryptes. On ne meurt pas, dans le pays du faux. On ne baise pas, non plus. On n’est pas triste, ivre, mort de trouille, en colère à péter les plombs, désespéré, fou de joie. Non. On a son quant-à-soi. Si on dit, ça existe, et on ne veut surtout pas que ça existe. Tout doit continuer et se perpétuer, dans le morne factice. Et plus des failles s’ouvrent, et plus il faut colmater.
Dans le pays du faux il y a de lourdes tentures vertes et des tapis moelleux.)
Dans ce sens-là, le pays du faux est entièrement produit et permanent, et je me demande dans quelle mesure il n’est pas aussi promu et fabriqué par la société dans laquelle on vit (et mon petit microcosme d’enfant n’en serait qu’une des variations, un élément particulier bien que parfaitement banal, d’un ensemble plus vaste).
Pour moi, le faux self n’a rien d’un masque. Il n’est pas non plus une politesse un peu exagérée, que d’aucuns pratiqueraient par facilité d’âme. Il est une chape de plomb, ou alors un poison qui contamine insidieusement chaque organe et se transmet soigneusement.
De ça, il me semble en être sortie (ou à peu près) ; que dépression et alcool ont été comme des moyens (à ma médiocre mesure, j’aurais préféré être révolutionnaire) de transgresser la donne de ce jeu bien pipé. Mais reste à faire avec tout, du coup. Tout est entièrement nouveau. Comme s’il n’y avait plus aucun point de repère. (Et puis, comment faire pour ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain, si bébé il y a ?)
J’entrevois alors la possibilité d’un état de disponibilité, de vacance au monde qui ouvrirait au lieu de restreindre. C’est encore très très ténu, comme expérience, et ça part d’une complète désorientation (peut-être un préalable nécessaire, mais est-ce si sûr ?). Seulement je suspecte fortement qu’il y ait encore pas mal d’illusions à dégommer, sur mon propre compte. Et qu’il faut absolument les dégommer. Ou alors, se jeter dans l’arène comme un animal sauvage ?
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Face à ces "longues maladies", ces "incidents" que tu décris, on me servit des "fatigues", des "l'entreprise lui donne bien des soucis", des "notre évêque l'a rendu disponible pour des missions en Afrique", des disparitions soudaines dans les mythologies familiales et des apparitions aussi. Un véritable régime soviétique.
Le plus étonnant c'est que cela a pris une forme "2.0" maintenant, mais cela existe toujours.
Et moi, en contre poison je lisais Céline et Simenon. Je lisais de la Science Fiction, un peu de philosophie, histoire de survivre. Comme un tuba, comme une bouteille d'oxygène.
Et j'acceptais.
Autant t'avouer que ce que tu écris résonne fortement. Genève n'est pas loin des quais de Saône et la bourgeoisie du sud est à l'image de celle du monde.
Tu n'as peut-être pas tant d'illusions à gommer. Tu as déjà fait le travail de décapage. Il te reste simplement à constater qu'il est des gens qui s'offrent et sont vraiment ce qu'ils sont. Et globalement, c'est plaisant.
Le plus étonnant c'est que cela a pris une forme "2.0" maintenant, mais cela existe toujours.
Et moi, en contre poison je lisais Céline et Simenon. Je lisais de la Science Fiction, un peu de philosophie, histoire de survivre. Comme un tuba, comme une bouteille d'oxygène.
Et j'acceptais.
Autant t'avouer que ce que tu écris résonne fortement. Genève n'est pas loin des quais de Saône et la bourgeoisie du sud est à l'image de celle du monde.
Tu n'as peut-être pas tant d'illusions à gommer. Tu as déjà fait le travail de décapage. Il te reste simplement à constater qu'il est des gens qui s'offrent et sont vraiment ce qu'ils sont. Et globalement, c'est plaisant.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Bonsoir ours,
Oui, s’il n’y avait pas eu de livres, il me semble que je serais morte étouffée.
Et comme tu le souligne à juste titre, les mots sont primordiaux. Chez moi il formait comme une sorte de gangue (ces mots dont tu parles, du genre "maman se repose"), et il m’a été très difficile de m’en extraire, d’autant qu’après, plus tard, j’ai choisi un boulot dans lequel il existe aussi une novlangue (le langage administratif et juridique). Depuis je recherche sans cesse le mot exact, le mot non-publicitaire, mais il s’échappe sans cesse…
Là je repense à un truc qui me hantait, petite.
J’avais alors une sorte de phobie. Je croyais que ce qui était apparemment stable, de ce que je voyais et percevais, à un instant T, allait à l’instant suivant se transformer (subtilement, mais un subtilement du coup très inquiétant). Par exemple, quelqu’un de très familier me tournait le dos, et, je pensais (je pensais vraiment, et c’était terrifiant) que quand il se retournerait, par exemple, sa couleur d’yeux aurait changé, ou ses dents seraient implantés différemment, ou n’importe quel détail de peu d’importance, dans l’absolu. Mais d’une importance littéralement redoutable, dans mon cas de terreur imaginaire.
Je dis quand j’étais petite, mais ça m’est arrivé adulte, aussi.
Plus tard j’ai mis cette phobie métaphorique sur le compte d’un père très cyclothymique (tout va bien, et pof d’un coup, il se glace, se terre, devient subtilement méchant, sans que je ne comprenne pourquoi… et donc je me sentais confusément coupable, mais sans savoir exactement quelle horrible faute j’avais bien pu commettre – j’ai développé par la suite une culpabilité presque naturelle, qui cherche comme une fouine/tête chercheuse ses objets, a posteriori… mais c’est un autre sujet).
Mais je me demande aujourd’hui, si, comme je n’avais pas les mots et que je ne comprenais pas vraiment, que je vivais dans un théâtre d’apparences, je me demande donc si cette phobie ne traduisait pas une intuition, l’intuition que ce qu’on me donnait à voir n’était pas vrai, que derrière les façades gisaient des désirs sourds et contrariés, des angoisses phénoménales, des tristesses insondables. Et que le message subliminal que je retenais était qu’il n’y avait pas d’autres manières de faire que de cacher tout ça (y compris à soi), sinon on serait nécessairement dévasté.
Comme s’il n’y avait pas de juste milieu possible, entre tout enfouir et tout déballer (et faire mal, donc).
Je n’avais pas compris à l’époque tout ce qu’il y avait de mortifère et d’empêchement d’être, dans ce déni généralisé (que j’ai repris mon compte, pendant longtemps, car la violence réelle ou supposée des autres était aussi la mienne…)
Il y a sans doute des tas de moyens de faire différemment, oui. Et le fait de le constater chez d'autres, c'est certainement une fenêtre de plus, enfin quelque chose qui ouvre, encore.
Oui, s’il n’y avait pas eu de livres, il me semble que je serais morte étouffée.
Et comme tu le souligne à juste titre, les mots sont primordiaux. Chez moi il formait comme une sorte de gangue (ces mots dont tu parles, du genre "maman se repose"), et il m’a été très difficile de m’en extraire, d’autant qu’après, plus tard, j’ai choisi un boulot dans lequel il existe aussi une novlangue (le langage administratif et juridique). Depuis je recherche sans cesse le mot exact, le mot non-publicitaire, mais il s’échappe sans cesse…
Là je repense à un truc qui me hantait, petite.
J’avais alors une sorte de phobie. Je croyais que ce qui était apparemment stable, de ce que je voyais et percevais, à un instant T, allait à l’instant suivant se transformer (subtilement, mais un subtilement du coup très inquiétant). Par exemple, quelqu’un de très familier me tournait le dos, et, je pensais (je pensais vraiment, et c’était terrifiant) que quand il se retournerait, par exemple, sa couleur d’yeux aurait changé, ou ses dents seraient implantés différemment, ou n’importe quel détail de peu d’importance, dans l’absolu. Mais d’une importance littéralement redoutable, dans mon cas de terreur imaginaire.
Je dis quand j’étais petite, mais ça m’est arrivé adulte, aussi.
Plus tard j’ai mis cette phobie métaphorique sur le compte d’un père très cyclothymique (tout va bien, et pof d’un coup, il se glace, se terre, devient subtilement méchant, sans que je ne comprenne pourquoi… et donc je me sentais confusément coupable, mais sans savoir exactement quelle horrible faute j’avais bien pu commettre – j’ai développé par la suite une culpabilité presque naturelle, qui cherche comme une fouine/tête chercheuse ses objets, a posteriori… mais c’est un autre sujet).
Mais je me demande aujourd’hui, si, comme je n’avais pas les mots et que je ne comprenais pas vraiment, que je vivais dans un théâtre d’apparences, je me demande donc si cette phobie ne traduisait pas une intuition, l’intuition que ce qu’on me donnait à voir n’était pas vrai, que derrière les façades gisaient des désirs sourds et contrariés, des angoisses phénoménales, des tristesses insondables. Et que le message subliminal que je retenais était qu’il n’y avait pas d’autres manières de faire que de cacher tout ça (y compris à soi), sinon on serait nécessairement dévasté.
Comme s’il n’y avait pas de juste milieu possible, entre tout enfouir et tout déballer (et faire mal, donc).
Je n’avais pas compris à l’époque tout ce qu’il y avait de mortifère et d’empêchement d’être, dans ce déni généralisé (que j’ai repris mon compte, pendant longtemps, car la violence réelle ou supposée des autres était aussi la mienne…)
Il y a sans doute des tas de moyens de faire différemment, oui. Et le fait de le constater chez d'autres, c'est certainement une fenêtre de plus, enfin quelque chose qui ouvre, encore.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Bonjour le navet !
Ça fait un petit moment que j'ai envie d'écrire ici, mais je ne savais pas trop quoi dire. J'étais intrigué par ton style, et ce que tu écris. Je ne comprenais pas toujours, mais j'ai adoré des fulgurances comme :
Que c'est beau et que c'est fort !
En lisant tes deux derniers posts, tout à coup je comprend tout ce que tu dis, et je me souviens. Je me souviens avoir lu assez jeune un bouquin de Fritz Zorn, "Mars". Je m'interroge sur ce paradoxe : ma (fausse ?) non conscience de mon décalage (appelons donc ça zébritude), et en même temps mes lectures qui étaient quasiment toutes tournées vers ce thème.
Mars, donc.
Le pays du faux, je le connais bien. J'en sors à peine.
Edit: est-ce que tu écris ? A te lire, j'ai l'impression que oui.
Ça fait un petit moment que j'ai envie d'écrire ici, mais je ne savais pas trop quoi dire. J'étais intrigué par ton style, et ce que tu écris. Je ne comprenais pas toujours, mais j'ai adoré des fulgurances comme :
Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente
Que c'est beau et que c'est fort !
En lisant tes deux derniers posts, tout à coup je comprend tout ce que tu dis, et je me souviens. Je me souviens avoir lu assez jeune un bouquin de Fritz Zorn, "Mars". Je m'interroge sur ce paradoxe : ma (fausse ?) non conscience de mon décalage (appelons donc ça zébritude), et en même temps mes lectures qui étaient quasiment toutes tournées vers ce thème.
Mars, donc.
« Je suis jeune et riche et cultivé ; et je suis malheureux, névrosé et seul. Je descends d'une des meilleures familles de la rive droite du lac de Zurich, qu'on appelle aussi la Rive dorée. J'ai eu une éducation bourgeoise et j'ai été sage toute ma vie. Ma famille est passablement dégénérée, c'est pourquoi j'ai sans doute une lourde hérédité et je suis abîmé par mon milieu. Naturellement j'ai aussi le cancer, ce qui va de soi si l'on en juge d'après ce que je viens de dire. Cela dit, la question du cancer se présente d'une double manière : d'une part c'est une maladie du corps, dont il est bien probable que je mourrai prochainement, mais peut-être aussi puis-je la vaincre et survivre ; d'autre part, c'est une maladie de l'âme, dont je ne puis dire qu'une chose : c'est une chance qu'elle se soit enfin déclarée. Je veux dire par là qu'avec ce que j'ai reçu de ma famille au cours de ma peu réjouissante existence, la chose la plus intelligente que j'aie jamais faite, c'est d'attraper le cancer ».
...
« Survivrai-je à cette maladie? Aujourd'hui je n'en sais rien. Au cas où j'en mourrais, on pourra dire de moi que j'ai été éduqué à mort »
Le pays du faux, je le connais bien. J'en sors à peine.
Edit: est-ce que tu écris ? A te lire, j'ai l'impression que oui.
Re: Des types en noir
Bonjour Harpo,
C’est très beau, mais ce n’est pas de moi, bien sûr, mais d’Apollinaire (référence à la Seine, et au pont Mirabeau).
Quant à Mars, je l’ai lu récemment, et il est indéniable que ça a éclairé encore d’une autre façon mon propre milieu, et ma façon d’avoir été (ou de ne pas avoir été, plutôt), et que ma parenthèse sur le pays du faux en est très directement inspirée.
En fait je voulais lire ce livre pour une toute autre raison, depuis longtemps, par rapport à cette histoire de cancer comme maladie de l’âme (c’était une idée que je trouvais plutôt révoltante, et qui rejoignait tous ces discours que j’avais pu entendre sur " il faut se battre contre", et "si on meurt c’est qu’on est faible moralement", en gros, et j’étais du coup assez d’accord avec ce qu’écrit Susan Sonntag dans La maladie comme métaphore).
Après avoir lu Mars, je comprends mieux ce que son auteur a voulu dire, ou faire, c’est-à-dire essayer de donner du sens, à ce qui apparaît finalement comme tellement absurde (et l’allégeance au faux, et le tragique de cette non-existence qui entrevoit la possibilité d’exister seulement quand c’est trop tard).
Ecrire, pour moi, ce serait comme un moyen de m’extraire. Mais j’ai mis beaucoup, beaucoup de temps à m’autoriser à essayer. Je me rappelle qu’en sixième, j’avais pondu une bouse (il fallait décrire un personnage), bourrée de clichés (il s’agissait d’un marin aux yeux bleu, cheveux au vent), et la prof de français, que j’aimais en plus beaucoup, avait à juste titre critiqué ce texte. Ensuite, pendant plus de vingt-cinq ans, je n’ai rien écrit. Il me semblait que je n’en avais pas le droit. Puis, quand tout a commencé à s’effriter, alors j’ai commencé un peu, à expérimenter. Je dirais que ça a changé pas mal de choses, rien que de s’octroyer cette possibilité-là, pour soi, même si c’est très laborieux, très loin de ce que j’aimerais vraiment pouvoir écrire. Mais c’est cette recherche, ce processus qui me plaît, une quête sans fin, un plaisir tout à fait personnel et intense.
C’est très beau, mais ce n’est pas de moi, bien sûr, mais d’Apollinaire (référence à la Seine, et au pont Mirabeau).
Quant à Mars, je l’ai lu récemment, et il est indéniable que ça a éclairé encore d’une autre façon mon propre milieu, et ma façon d’avoir été (ou de ne pas avoir été, plutôt), et que ma parenthèse sur le pays du faux en est très directement inspirée.
En fait je voulais lire ce livre pour une toute autre raison, depuis longtemps, par rapport à cette histoire de cancer comme maladie de l’âme (c’était une idée que je trouvais plutôt révoltante, et qui rejoignait tous ces discours que j’avais pu entendre sur " il faut se battre contre", et "si on meurt c’est qu’on est faible moralement", en gros, et j’étais du coup assez d’accord avec ce qu’écrit Susan Sonntag dans La maladie comme métaphore).
Après avoir lu Mars, je comprends mieux ce que son auteur a voulu dire, ou faire, c’est-à-dire essayer de donner du sens, à ce qui apparaît finalement comme tellement absurde (et l’allégeance au faux, et le tragique de cette non-existence qui entrevoit la possibilité d’exister seulement quand c’est trop tard).
Ecrire, pour moi, ce serait comme un moyen de m’extraire. Mais j’ai mis beaucoup, beaucoup de temps à m’autoriser à essayer. Je me rappelle qu’en sixième, j’avais pondu une bouse (il fallait décrire un personnage), bourrée de clichés (il s’agissait d’un marin aux yeux bleu, cheveux au vent), et la prof de français, que j’aimais en plus beaucoup, avait à juste titre critiqué ce texte. Ensuite, pendant plus de vingt-cinq ans, je n’ai rien écrit. Il me semblait que je n’en avais pas le droit. Puis, quand tout a commencé à s’effriter, alors j’ai commencé un peu, à expérimenter. Je dirais que ça a changé pas mal de choses, rien que de s’octroyer cette possibilité-là, pour soi, même si c’est très laborieux, très loin de ce que j’aimerais vraiment pouvoir écrire. Mais c’est cette recherche, ce processus qui me plaît, une quête sans fin, un plaisir tout à fait personnel et intense.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Rhaaa, sous le pont Mirabeau coule la Seine ! Quel con je fais
Ce n'est donc pas étonnant qu'en lisant tes posts j'ai de suite pensé à Fritz Zorn...
As-tu confronté tes écrits à la lecture d'autrui ?
Ce n'est donc pas étonnant qu'en lisant tes posts j'ai de suite pensé à Fritz Zorn...
As-tu confronté tes écrits à la lecture d'autrui ?
Re: Des types en noir
Harpo a écrit:Rhaaa, sous le pont Mirabeau coule la Seine ! Quel con je fais
Ben non, c’était plutôt à moi de citer mes sources…
C’est étonnant, car après avoir lu ton fil, et bien que nous n’ayons pas du tout la même histoire, ni le même âge, ni le même sexe (etc. ), tes mots produisent pas mal d’échos. J’ai vu que toi aussi, tu écris, d’ailleurs…
Je n’ai pas de lecteur idéal (au sens de tout à fait critique et non parasité par de l’affectif), mais je fais lire certains trucs à mon compagnon (les textes longs, une fois finis le premier jet), c’est assez utile pour moi au moins pour pointer ce qu’il y a d’incompréhensible, d’abscons, de tordu dans le mauvais sens du terme. Et puis, quand j’ai commencé, j’ai un peu écrit sur un forum dédié aux romans noirs, mais qui n’existe plus aujourd’hui.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Pour l'écho, je ne pense pas que cela soit étonnant, nous parlons bien de la même chose, malgré nos histoires différentes
J'écris, oui et non. J'ai écrit sur la musique, le cinéma, la littérature et le théâtre, sur pas mal de blogs - jamais le mien, je n'en ai jamais eu. Des chroniques, des critiques (mais je n'aime pas ce mot, je préfère "mise en bouche" comme a dit un jour Mogwai sur mon fil).
Ensuite j'ai écrit sur moi, sur des évènements de ma vie, à un moment précis assez proche de celui que tu nommes toi même déchirure. Comme une thérapie, comme si coucher des mots sur un papier me permettait enfin de comprendre et de décider. (Je me dis d'ailleurs à l'instant que ma mémoire passe souvent par l'écrit).
Mais je n'ai jamais écrit de fiction. Je ne sais pas faire, et n'ai jamais essayé. La feuille blanche est en général le lieu où se déverse un texte longtemps maturé dans la tête - j’écris d'un jet, ne corrige presque pas, sinon l'orthographe. Ces textes là ont peu de lecteurs, trop intime. Pour ça que la mise en fiction me trotte...
J'écris, oui et non. J'ai écrit sur la musique, le cinéma, la littérature et le théâtre, sur pas mal de blogs - jamais le mien, je n'en ai jamais eu. Des chroniques, des critiques (mais je n'aime pas ce mot, je préfère "mise en bouche" comme a dit un jour Mogwai sur mon fil).
Ensuite j'ai écrit sur moi, sur des évènements de ma vie, à un moment précis assez proche de celui que tu nommes toi même déchirure. Comme une thérapie, comme si coucher des mots sur un papier me permettait enfin de comprendre et de décider. (Je me dis d'ailleurs à l'instant que ma mémoire passe souvent par l'écrit).
Mais je n'ai jamais écrit de fiction. Je ne sais pas faire, et n'ai jamais essayé. La feuille blanche est en général le lieu où se déverse un texte longtemps maturé dans la tête - j’écris d'un jet, ne corrige presque pas, sinon l'orthographe. Ces textes là ont peu de lecteurs, trop intime. Pour ça que la mise en fiction me trotte...
Re: Des types en noir
Pas d'écho personnel sur le faux et cette phobie du masque qui change... et pourtant ces écrits me touchent.
Je rejoins Harpo, tu écris très bien. On a envie de te lire.
Je rejoins Harpo, tu écris très bien. On a envie de te lire.
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
Fa, pour poursuivre ta réflexion, je ne pense pas du tout que le faux-self, ça soit forcément un truc de surdoués (de névrosés, plus sûrement), et ce d’autant que je ne sais même pas, en ce qui me concerne (ça me donnerait presque l’idée que c’est une marque inverse, finalement, tant il y a, avec le recul, une forme de bêtise à s’être assujetti si longtemps comme ça).
C’est plutôt une façon d’être au monde complètement pervertie, en lien sans doute aussi, malgré ce que j’écris (sur l’imprégnation culturelle) avec des choses plus psychologiques, liées à la toute petite enfance. C’est Winnicott je crois qui a écrit des trucs là-dessus, mais je ne l’ai jamais vraiment et sérieusement lu.
Personnellement je ne suis jamais satisfaite de ce que j’écris (sur tout un fatras il y a peut-être une phrase, un paragraphe à tout casser dont je suis contente, et encore), mais c’est aussi cet échec permanent et renouvelé qui me meut. Ce n’est plus un truc écrasant qui me fait dire à quoi bon, parce qu’en fait ce qui compte pour moi, bêtement et égoïstement, c’est l’état dans lequel ça me met. C’est une forme d’intensité très spécifique, liée à une nécessité intérieure et à un plaisir pur (certainement aussi parce que personne ne me demande rien, personne n’attend rien, donc je ne me sens en rien, contrainte par les autres).
Et contrairement à toi, Harpo, je n’écris pas de choses personnelles (hormis ici, un peu), comme si, en fait, pour moi, l’espace de la fiction était un moyen, un biais plus efficace, plus porteur, pour parvenir à être dans une forme de vérité (avec un petit, tout petit v, ou à une forme de réel, disons). Dès qu’il s’agit de mon moi nu, c’est plus compliqué (car mes mises en scènes me sautent aux yeux, peut-être). J’ai l’impression de moins cacher et travestir dans la fiction que quand j’essaye d’écrire des trucs sur moi (ici je peux un peu car je suis un navet, et je parle surtout de trucs de navet passés, finalement… comme ça, allez hop :
Dans le réel, il y a le fait que je suis une fille, et j’ai pendant longtemps trouvé ça dommage. Au début je voulais être un garçon (il me semblait que c’était plus simple, à l’époque), et puis après c’était encore trop pauvre, trop limitant.
J’aurais voulu être l’un et l’autre, changer de temps en temps.
Je ne voulais pas être assignée à un sexe avec toute sa cohorte de représentations que je jugeais pénibles, mais, en même temps, je souffrais de ne pas coller, de ne pas être ce genre de fille si fille, si féminine. Je ne voulais pas séduire sur ce terrain mais je voulais séduire quand même, et secrètement je rêvais sans doute d’être des leurs (des vraies de vraies). Je séparais tout à fait sexe et amour, il y avait les corps pour les corps et d’autres à aimer (amour amitié, sans différence majeure).
Je croyais que les filles étaient destinées ou à pleurer et à subir, ou à devenir des monstres froids si fières de leur résilience, je croyais que c’était à elles de se rendre aimables sinon leurs mères les perdraient dans la forêt, et les princes charmant idem, et tout cela me faisait horreur, et pourtant je détestais les princes charmants, je n’étais pas romantique, je n’étais pas jalouse, pas d’instinct de propriétaire, pas de visée à long terme, je trouvais l’amour mièvre ou faux, ou, au mieux, j’y voyais l’association plus ou moins heureuse de deux aliénations complémentaires. Je ne voulais pas de mec, pas de couple, pas d’enfants.
Je ne voulais rien de près ou de loin qui empêche de s’enfuir.
C’est plutôt une façon d’être au monde complètement pervertie, en lien sans doute aussi, malgré ce que j’écris (sur l’imprégnation culturelle) avec des choses plus psychologiques, liées à la toute petite enfance. C’est Winnicott je crois qui a écrit des trucs là-dessus, mais je ne l’ai jamais vraiment et sérieusement lu.
Personnellement je ne suis jamais satisfaite de ce que j’écris (sur tout un fatras il y a peut-être une phrase, un paragraphe à tout casser dont je suis contente, et encore), mais c’est aussi cet échec permanent et renouvelé qui me meut. Ce n’est plus un truc écrasant qui me fait dire à quoi bon, parce qu’en fait ce qui compte pour moi, bêtement et égoïstement, c’est l’état dans lequel ça me met. C’est une forme d’intensité très spécifique, liée à une nécessité intérieure et à un plaisir pur (certainement aussi parce que personne ne me demande rien, personne n’attend rien, donc je ne me sens en rien, contrainte par les autres).
Et contrairement à toi, Harpo, je n’écris pas de choses personnelles (hormis ici, un peu), comme si, en fait, pour moi, l’espace de la fiction était un moyen, un biais plus efficace, plus porteur, pour parvenir à être dans une forme de vérité (avec un petit, tout petit v, ou à une forme de réel, disons). Dès qu’il s’agit de mon moi nu, c’est plus compliqué (car mes mises en scènes me sautent aux yeux, peut-être). J’ai l’impression de moins cacher et travestir dans la fiction que quand j’essaye d’écrire des trucs sur moi (ici je peux un peu car je suis un navet, et je parle surtout de trucs de navet passés, finalement… comme ça, allez hop :
Dans le réel, il y a le fait que je suis une fille, et j’ai pendant longtemps trouvé ça dommage. Au début je voulais être un garçon (il me semblait que c’était plus simple, à l’époque), et puis après c’était encore trop pauvre, trop limitant.
J’aurais voulu être l’un et l’autre, changer de temps en temps.
Je ne voulais pas être assignée à un sexe avec toute sa cohorte de représentations que je jugeais pénibles, mais, en même temps, je souffrais de ne pas coller, de ne pas être ce genre de fille si fille, si féminine. Je ne voulais pas séduire sur ce terrain mais je voulais séduire quand même, et secrètement je rêvais sans doute d’être des leurs (des vraies de vraies). Je séparais tout à fait sexe et amour, il y avait les corps pour les corps et d’autres à aimer (amour amitié, sans différence majeure).
Je croyais que les filles étaient destinées ou à pleurer et à subir, ou à devenir des monstres froids si fières de leur résilience, je croyais que c’était à elles de se rendre aimables sinon leurs mères les perdraient dans la forêt, et les princes charmant idem, et tout cela me faisait horreur, et pourtant je détestais les princes charmants, je n’étais pas romantique, je n’étais pas jalouse, pas d’instinct de propriétaire, pas de visée à long terme, je trouvais l’amour mièvre ou faux, ou, au mieux, j’y voyais l’association plus ou moins heureuse de deux aliénations complémentaires. Je ne voulais pas de mec, pas de couple, pas d’enfants.
Je ne voulais rien de près ou de loin qui empêche de s’enfuir.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
ou ça (inspiré de trucs lus chez Doinel, mais je n’ai pas osé intervenir) :
Quand j’étais fonctionnaire active (sic ?), il m’est arrivé quelquefois de devoir trancher, entre morale et lâcheté (au nom de plein de mots qui sont très exactement ceux des nazis). Bien sûr il n’était pas question d’envoyer des gens à la mort, mais le processus est le même…
J’ai souvent été visqueuse et lâche, tout en en ayant parfaitement conscience (et en me sentant très fortement coupable). C’est pour cette raison que j’aurais tendance à penser que la culpabilité n’empêche pas forcément, voire, dans certains cas pathologiques dont je fus, elle permet, elle autorise, elle rend passif et incapable de dire non, de refuser de faire. Il y a quelque part l’idée que c’est moins grave, si on s’en repend. Et peut-être aussi au fond, que ça donnerait enfin une vraie bonne raison, pour être puni, puisque qu’on se sent déjà éternellement coupable, même sans rien faire de mal.
Un peu le même processus que tout faire pour que quelqu’un qu’on aime et qui a l’air de nous aimer nous désaime (puisque c’est nécessairement ce qui doit arriver).
Punis, abandonnés, et nous voilà, au fond, fort soulagés (brisés et incapables de puiser dans notre souffrance auto-produite la mesure de notre responsabilité).
Quand ça n’arrive pas, quand ces plans obscurs sont outrageusement et immoralement déjoués, alors il faut reconsidérer les méthodes, les visées, les croyances.
(S’abandonner ?)
Quand j’étais fonctionnaire active (sic ?), il m’est arrivé quelquefois de devoir trancher, entre morale et lâcheté (au nom de plein de mots qui sont très exactement ceux des nazis). Bien sûr il n’était pas question d’envoyer des gens à la mort, mais le processus est le même…
J’ai souvent été visqueuse et lâche, tout en en ayant parfaitement conscience (et en me sentant très fortement coupable). C’est pour cette raison que j’aurais tendance à penser que la culpabilité n’empêche pas forcément, voire, dans certains cas pathologiques dont je fus, elle permet, elle autorise, elle rend passif et incapable de dire non, de refuser de faire. Il y a quelque part l’idée que c’est moins grave, si on s’en repend. Et peut-être aussi au fond, que ça donnerait enfin une vraie bonne raison, pour être puni, puisque qu’on se sent déjà éternellement coupable, même sans rien faire de mal.
Un peu le même processus que tout faire pour que quelqu’un qu’on aime et qui a l’air de nous aimer nous désaime (puisque c’est nécessairement ce qui doit arriver).
Punis, abandonnés, et nous voilà, au fond, fort soulagés (brisés et incapables de puiser dans notre souffrance auto-produite la mesure de notre responsabilité).
Quand ça n’arrive pas, quand ces plans obscurs sont outrageusement et immoralement déjoués, alors il faut reconsidérer les méthodes, les visées, les croyances.
(S’abandonner ?)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Dans la salle d’attente j’ai attaqué La vie est un songe, et j’ai pris l’air de rien.
L’air de rien, ça me fait penser qu’en fait j’ai souvent eu l’air de quelqu’un d’autre, au point que je n’ai jamais su si moi, c’était vraiment moi (puisqu’on me prend souvent pour X). Dilution totale. Même effet sur le net, avec un nom et prénom d’une banalité écrasante (comme mon physique, je suppose). Je m’autogougueulise, et des tas de nanas qui doivent être "moi" apparaissent. Ma vocation à la disparition a aussi pris cet aspect-là (plus tous ces squelettes/cadavres que je voyais en permanence, à seize ans).
En un sens, c'est assez amusant.
Bon, bref, j’ai vu la dame qui a dit que j’en étais, malgré un QI hétérogène (compréhension verbale et raisonnement perceptif bien plus hauts que mémoire de travail et vitesse de traitement – tout de même un peu moins pires que ce qu’elle suspectait, vu ma construction dépressivo-alcoolique). En gros elle explique ça par des fragilités psychologiques (estime de soi en berne, profil "traumatique"?, lutte permanente contre des émotions envahissantes), et par un trouble attentionnel (que je n’avais jamais réellement mesuré, c’est finalement en passant le test que j’ai bien senti que je décrochais, par moments).
Le premier truc qui m’est bien sûr venu c’est le doute (oui mais du coup le test ne veut rien dire, etc. etc.). , puis le deuxième c’est je m’en fous, je m'en tape, là n’est pas l’important, l’important est plutôt ce que je peux en tirer (en termes d’introspection un peu moins stérile ? que d’habitude).
Puis j’ai fumé quinze clopes et j’ai pris le métro.
J’ai croisé des trucs moches et désossés (j’aime terriblement ce qui est moche et cassé, les déchets, les rebuts, les zones, les ruines).
Pour l’instant, encore un peu à chaud, je dirais ça :
- le test a objectivé certains trucs que je pensais déjà (surtout les trucs négatifs, en fait)
- mais il a aussi perçu des choses que je ne pensais absolument pas, comme par exemple une capacité intuitive à trouver des solutions, quand il y a doute.
Alors comme ça, à vue de nez, il me semble que c’est un petit jalon, dans un mouvement déjà un peu amorcé ailleurs, avant. Je me doute bien qu’il ne va pas révolutionner la façon dont je me perçois (sans parler d’estime, un peu de confiance ne ferait pas de mal), mais je ne me sens ni écrasée, ni dévorée, ni en colère, ni déçue (ni non plus galvanisée, ailes qui poussent dans le dos tambours et trompettes).
Et ça me donne un peu des pistes, pour un de mes minots (histoire de ne pas trop passer à côté de ce qu’il est, histoire de faire un peu moins pire, si c’est possible, que mes honorables et moitié décédés parents).
Alors ce que je ressens…
Peut-être une douce et infinitésimale excitation… L’impression que je pourrais peut-être, maintenant, enfourcher en vrai ma vespa et parcourir Rome… Qui sait…
Qui je suis n’aura plus trop d’importance… Disparaître ou Apparaître non plus… Juste à chercher et désirer encore… S’aventurer…
(Etre bouleversée, oui, je crois que c’est ça qui m’intéresse, au fond du fond)
(C'est pour ça que je ne distingue pas, entre l'art et la vie)
(C'est peut-être pour ça juste, que j'ai bu comme un trou)
...
(…) il pourra croire qu’il a fait un songe, et il sera dans le vrai quand il le croira, parce que dans le monde, Clothalde, tous ceux qui vivent sont dans un songe
L’air de rien, ça me fait penser qu’en fait j’ai souvent eu l’air de quelqu’un d’autre, au point que je n’ai jamais su si moi, c’était vraiment moi (puisqu’on me prend souvent pour X). Dilution totale. Même effet sur le net, avec un nom et prénom d’une banalité écrasante (comme mon physique, je suppose). Je m’autogougueulise, et des tas de nanas qui doivent être "moi" apparaissent. Ma vocation à la disparition a aussi pris cet aspect-là (plus tous ces squelettes/cadavres que je voyais en permanence, à seize ans).
En un sens, c'est assez amusant.
Bon, bref, j’ai vu la dame qui a dit que j’en étais, malgré un QI hétérogène (compréhension verbale et raisonnement perceptif bien plus hauts que mémoire de travail et vitesse de traitement – tout de même un peu moins pires que ce qu’elle suspectait, vu ma construction dépressivo-alcoolique). En gros elle explique ça par des fragilités psychologiques (estime de soi en berne, profil "traumatique"?, lutte permanente contre des émotions envahissantes), et par un trouble attentionnel (que je n’avais jamais réellement mesuré, c’est finalement en passant le test que j’ai bien senti que je décrochais, par moments).
Le premier truc qui m’est bien sûr venu c’est le doute (oui mais du coup le test ne veut rien dire, etc. etc.). , puis le deuxième c’est je m’en fous, je m'en tape, là n’est pas l’important, l’important est plutôt ce que je peux en tirer (en termes d’introspection un peu moins stérile ? que d’habitude).
Puis j’ai fumé quinze clopes et j’ai pris le métro.
J’ai croisé des trucs moches et désossés (j’aime terriblement ce qui est moche et cassé, les déchets, les rebuts, les zones, les ruines).
Pour l’instant, encore un peu à chaud, je dirais ça :
- le test a objectivé certains trucs que je pensais déjà (surtout les trucs négatifs, en fait)
- mais il a aussi perçu des choses que je ne pensais absolument pas, comme par exemple une capacité intuitive à trouver des solutions, quand il y a doute.
Alors comme ça, à vue de nez, il me semble que c’est un petit jalon, dans un mouvement déjà un peu amorcé ailleurs, avant. Je me doute bien qu’il ne va pas révolutionner la façon dont je me perçois (sans parler d’estime, un peu de confiance ne ferait pas de mal), mais je ne me sens ni écrasée, ni dévorée, ni en colère, ni déçue (ni non plus galvanisée, ailes qui poussent dans le dos tambours et trompettes).
Et ça me donne un peu des pistes, pour un de mes minots (histoire de ne pas trop passer à côté de ce qu’il est, histoire de faire un peu moins pire, si c’est possible, que mes honorables et moitié décédés parents).
Alors ce que je ressens…
Peut-être une douce et infinitésimale excitation… L’impression que je pourrais peut-être, maintenant, enfourcher en vrai ma vespa et parcourir Rome… Qui sait…
Qui je suis n’aura plus trop d’importance… Disparaître ou Apparaître non plus… Juste à chercher et désirer encore… S’aventurer…
(Etre bouleversée, oui, je crois que c’est ça qui m’intéresse, au fond du fond)
(C'est pour ça que je ne distingue pas, entre l'art et la vie)
(C'est peut-être pour ça juste, que j'ai bu comme un trou)
...
(…) il pourra croire qu’il a fait un songe, et il sera dans le vrai quand il le croira, parce que dans le monde, Clothalde, tous ceux qui vivent sont dans un songe
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Alors ce que je ressens…
Peut-être une douce et infinitésimale excitation… L’impression que je pourrais peut-être, maintenant, enfourcher en vrai ma vespa et parcourir Rome…
Oui, en vrai, dans la vraie réalité.
Je suis content pour toi.
Laisse le temps se dérouler, un verrou vient d'être ouvert. Derrière la porte, il y a de la lumière et du soleil. Au début c'est surprenant, on doute, mais peu à peu, on marche, on trotte, on court, à perdre haleine de la vie retrouvée.
Peut-être une douce et infinitésimale excitation… L’impression que je pourrais peut-être, maintenant, enfourcher en vrai ma vespa et parcourir Rome…
Oui, en vrai, dans la vraie réalité.
Je suis content pour toi.
Laisse le temps se dérouler, un verrou vient d'être ouvert. Derrière la porte, il y a de la lumière et du soleil. Au début c'est surprenant, on doute, mais peu à peu, on marche, on trotte, on court, à perdre haleine de la vie retrouvée.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Merci beaucoup petite trace.
Aujourd’hui j’ai eu envie de pleurer quasi toute la journée. Je ne sais pas pourquoi.Si on pleure c’est qu’on est triste ?
Hier avant de m’endormir (très très tard), j’ai eu la vision de ce forum, et d’internet et des gens en général, un peu comme ça :
Mais multipliés à l’infini.
Des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris
Oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées
Des tas d'êtres partout, tapis dans le noir, qui vagissent en espérant un écho, un contenant, un contenu (remplir le vide, combler l’éternel manquant/a manqué/va manquer ?).
Depuis que j’ai débarqué ici, je réponds mentalement à des tas de gens, mais je n’écris rien. Je réponds je réponds je réponds je réponds dans ma tête, mais en vrai, en vrai pour communiquer en dehors, nada. J’ai du mal avec cette impression de m’incruster, j’ai du mal avec moi parmi les autres. J’ai du mal à savoir ce que je fiche là. J’ai peur qu’il y ait trop d’autres, je ne sais pas. J’ai peur de ne pas savoir encore bien les limites. J’ai peur d’être con. Je veux et je ne veux pas de consolation. Je sais bien que je ne peux ni l’être, ni l’apporter. Je me dis à quoi bon.
Et je crie moi aussi, pourtant. Et je suis très précisément ce machin vagissant, vide en creux, vide en place, vide au bord,avec lequel je pensais pouvoir faire, pourtant, il y a peu.
Ce qui me hante, ce qui me hante, ce qui me hante est donc bien encore là, très précisément là, et ça tourne autour d’une mère pourtant vivante mais comme morte. Entièrement morte. C’est son fantôme qui me côtoie et me colle. Je pensais vraiment avoir accepté ce qui a manqué, l’avoir relégué dans le passé (fini plié tac tac tac). Mais ce n’est pas entièrement vrai. Je voudrais savoir, je voudrais des mots, je voudrais qu’elle prenne chair enfin. Je voudrais qu’elle ne soit pas mutique, mur, muraille, forteresse imprenable, bouche scellée.
Je voudrais poser des bombes et qu’elle l’ouvre, enfin.
Qu’elle s’incarne une bonne fois, pour moi.
Pourtant je ne fais rien. Dans le moindre interstice il y a son ombre, sa transparence opaque. Son refus et ce rempart imprenable (tac cogne-toi, vieille petite fille, pathétique, tac et retac, jusqu’à brutaliser le joli cercueil à venir que je choisirai en bois, simple).
Je voudrais des mots, n’importe lesquels.
Et je pleure pour des riens, des tout, et je ne sais pas pourquoi.
Je pleure pour des vivants déjà morts. Je pleure pour des présences-absences.
Tout à l’heure mon fiston de douze ans me dit qu’il ne veut pas qu’on lise en lui comme dans un livre ouvert. Il dit que c’est pour ça, l’ironie permanente. Pour se protéger.
De quoi ?
Je lui ai dit.
(Comme si j’avais la réponse).
On s’est regardé et on a cligné des yeux.
On a souri.
Dans la cuisine.
(Des bombes pour exploser les châteaux aux règles si étranges que personne ne peut jamais, jamais, y entrer)
Aujourd’hui j’ai eu envie de pleurer quasi toute la journée. Je ne sais pas pourquoi.
Hier avant de m’endormir (très très tard), j’ai eu la vision de ce forum, et d’internet et des gens en général, un peu comme ça :
Mais multipliés à l’infini.
Des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris et des cris
Oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées oreilles bouchées
Des tas d'êtres partout, tapis dans le noir, qui vagissent en espérant un écho, un contenant, un contenu (remplir le vide, combler l’éternel manquant/a manqué/va manquer ?).
Depuis que j’ai débarqué ici, je réponds mentalement à des tas de gens, mais je n’écris rien. Je réponds je réponds je réponds je réponds dans ma tête, mais en vrai, en vrai pour communiquer en dehors, nada. J’ai du mal avec cette impression de m’incruster, j’ai du mal avec moi parmi les autres. J’ai du mal à savoir ce que je fiche là. J’ai peur qu’il y ait trop d’autres, je ne sais pas. J’ai peur de ne pas savoir encore bien les limites. J’ai peur d’être con. Je veux et je ne veux pas de consolation. Je sais bien que je ne peux ni l’être, ni l’apporter. Je me dis à quoi bon.
Et je crie moi aussi, pourtant. Et je suis très précisément ce machin vagissant, vide en creux, vide en place, vide au bord,avec lequel je pensais pouvoir faire, pourtant, il y a peu.
Ce qui me hante, ce qui me hante, ce qui me hante est donc bien encore là, très précisément là, et ça tourne autour d’une mère pourtant vivante mais comme morte. Entièrement morte. C’est son fantôme qui me côtoie et me colle. Je pensais vraiment avoir accepté ce qui a manqué, l’avoir relégué dans le passé (fini plié tac tac tac). Mais ce n’est pas entièrement vrai. Je voudrais savoir, je voudrais des mots, je voudrais qu’elle prenne chair enfin. Je voudrais qu’elle ne soit pas mutique, mur, muraille, forteresse imprenable, bouche scellée.
Je voudrais poser des bombes et qu’elle l’ouvre, enfin.
Qu’elle s’incarne une bonne fois, pour moi.
Pourtant je ne fais rien. Dans le moindre interstice il y a son ombre, sa transparence opaque. Son refus et ce rempart imprenable (tac cogne-toi, vieille petite fille, pathétique, tac et retac, jusqu’à brutaliser le joli cercueil à venir que je choisirai en bois, simple).
Je voudrais des mots, n’importe lesquels.
Et je pleure pour des riens, des tout, et je ne sais pas pourquoi.
Je pleure pour des vivants déjà morts. Je pleure pour des présences-absences.
Tout à l’heure mon fiston de douze ans me dit qu’il ne veut pas qu’on lise en lui comme dans un livre ouvert. Il dit que c’est pour ça, l’ironie permanente. Pour se protéger.
De quoi ?
Je lui ai dit.
(Comme si j’avais la réponse).
On s’est regardé et on a cligné des yeux.
On a souri.
Dans la cuisine.
(Des bombes pour exploser les châteaux aux règles si étranges que personne ne peut jamais, jamais, y entrer)
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Il y a quelque chose dans l'air.
Alors que je croyais maitriser mon équilibre,je me suis fait casser la gueule autour de la mère, de l'abandon de la confusion des sentiments.
L'une de mes amies, pareil, et deux de mes copains aussi.
Je ne sais pas que te dire, je ne suis fort en rien si ce n'est en perception. J'ai le sentiment que tu es une belle femme et que le soleil est devant toi. Nous venons de l'informe et du noir, est-il temps de passer de l'ombre à la lumière. L'ombre a toujours raison de la lumière, une pointe de noir grise le blanc, mais pas l'inverse. Alors, si le noir ne se veut pas clair, tu n'y pourra rien, si ce n'est te tourner vers le soleil. N'est-ce pas instinctivement ce que tu as fait en venant dans le sud ?
Je ne sais si ce que je t'ai écrit a un sens pour toi, , je ne suis pas en forme ce soir, mais je ne pouvais pas laisser passer tes mots. Munch est le peintre de la prison, des fond bas, des chemins qui serpentent et des perpectives qui ceignent les toiles. Il a peint le cri et l'ahurissement effrayé tout en espérant le baiser.
Alors, même si je n'ai aucun droit, ni délégation, ni.... et parce que tu es bien plus belle (et moi je ne vois pas l'extérieur mais l'intérieur) que tu crois être :
En te priant d'excuser cette impudeur qui n'est pas une familiarité.
Alors que je croyais maitriser mon équilibre,je me suis fait casser la gueule autour de la mère, de l'abandon de la confusion des sentiments.
L'une de mes amies, pareil, et deux de mes copains aussi.
Je ne sais pas que te dire, je ne suis fort en rien si ce n'est en perception. J'ai le sentiment que tu es une belle femme et que le soleil est devant toi. Nous venons de l'informe et du noir, est-il temps de passer de l'ombre à la lumière. L'ombre a toujours raison de la lumière, une pointe de noir grise le blanc, mais pas l'inverse. Alors, si le noir ne se veut pas clair, tu n'y pourra rien, si ce n'est te tourner vers le soleil. N'est-ce pas instinctivement ce que tu as fait en venant dans le sud ?
Je ne sais si ce que je t'ai écrit a un sens pour toi, , je ne suis pas en forme ce soir, mais je ne pouvais pas laisser passer tes mots. Munch est le peintre de la prison, des fond bas, des chemins qui serpentent et des perpectives qui ceignent les toiles. Il a peint le cri et l'ahurissement effrayé tout en espérant le baiser.
Alors, même si je n'ai aucun droit, ni délégation, ni.... et parce que tu es bien plus belle (et moi je ne vois pas l'extérieur mais l'intérieur) que tu crois être :
En te priant d'excuser cette impudeur qui n'est pas une familiarité.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Effet post-test :
Tunnel tristesse/colère/sortie des émotions refoulées (y compris les pires, jalousies, agressivité)/lecture d’Alice Miller/je pleure, je pleure/ intérieurement/ enfance enfin expurgée des préservations d’eux/ deuil réel de ne pas avoir été aimée, enfin ?
Je me laisse le droit de les vivre. Entièrement. J’attends. C’est un cri, oui, mais qui n’est destiné à personne. C’est un cri qui se suffit à lui-même, par le simple fait qu’il peut enfin, exister. Je le réceptionne dans le même mouvement, je suis mon réceptacle. Je ne juge pas, je ne juge rien.
J’entrevois qu’il est possible de casser la longue chaîne du tu dois me réparer, petit être, tu n’existes QUE pour cela. Je veux, la rompre. Pour moi bien sûr, mais aussi pour mes deux loustics.
Alors je ne suis plus l’Ingrate. Je ne suis plus la (mal) liée.
Ils n’ont pas pu faire autrement mais j’ai le droit d’en souffrir, pour ne plus en souffrir. D’en souffrir vraiment, une bonne fois. De leur en vouloir à mort, et plus sans affinités.
C’était ça, le tunnel. J’en sors ?/ Ou bien j’y retourne, mais si je fais cela, je m’enterre.
Alors je fais un pas et je cligne des yeux.
Il n’y a plus à attendre qu’elle parle. Elle ne parlera pas. Je n’ai plus besoin d’elle. Je n’ai plus besoin de la préserver, mais plus besoin non plus qu’elle reconnaisse, qu’elle éclaire, qu’elle solutionne, qu’elle fasse ce qui a manqué car ce qui a manqué a à jamais, manqué.
Je ne suis plus si petite, ma petite.
C’est ce manque-là qui existera toujours, mais je peux faire avec, là, je le sens. Avec comme on isole un endroit non contaminant, à l’intérieur de soi. Avec comme s’il pouvait devenir une source, plutôt qu’une gangrène.
(J’écris ça ici au cas où, un jour, je souhaite me réenterrer)
*
Il y a des cheminées d’usine et une route droite. Impeccablement droite. Il y a des panneaux colorés qui indiquent école, zone commerciale, bureaux, enfances/vies idéales, au-delà de cette limite votre ticket ne sera plus valable. Il y a des lacs, des mers, des océans d’alcool, ça brille au loin, le vent se lève. Je me cogne et me cogne dans la jolie boîte perfusée.
Quand ça s’entaille je lève la tête. Les nuages les maisons les arbres des visages. Les morceaux tombent dans les poubelles, je ne trie pas, ces lambeaux sont de chair, ils roulent en petites boulettes molles entre les jambes pressées, destinées à. Le reste, à vif. J’avale le vent, j’avale la terre.
Il y a des cheminées d’usine gris sur noir et des routes, des routes. Les panneaux sont voilés de noir, plus de ticket. Je sens le fond des mers. Le vent se lève sur les plaies, ça brille là, et là, ça se disperse, s’intensifie, se transforme, meurt et renaît. Des routes et des gouffres où encore, aller
mais
je frémis, dans l’ombre et la lumière
(ours, merci pour tes mots, et sinon je suis venue à Marseille très précisément, et pas dans le Sud en général, parce qu’il me semblait que c’était là, pour moi, qu’il y avait des possibilités d’être – une impression confuse, sans doute un fantasme puisque je connaissais très peu la ville avant d’y venir, mais force est de constater que c’est la première fois de ma vie que je me sens bien dans un lieu où je vis, un peu comme si j’étais dans une ville-brouillon, une ville-esquisse, une ville indéfinie-indéfinissable, une ville non assignable, et que c’est ce qui, précisément, me convient).
Tunnel tristesse/colère/sortie des émotions refoulées (y compris les pires, jalousies, agressivité)/lecture d’Alice Miller/je pleure, je pleure/ intérieurement/ enfance enfin expurgée des préservations d’eux/ deuil réel de ne pas avoir été aimée, enfin ?
Je me laisse le droit de les vivre. Entièrement. J’attends. C’est un cri, oui, mais qui n’est destiné à personne. C’est un cri qui se suffit à lui-même, par le simple fait qu’il peut enfin, exister. Je le réceptionne dans le même mouvement, je suis mon réceptacle. Je ne juge pas, je ne juge rien.
J’entrevois qu’il est possible de casser la longue chaîne du tu dois me réparer, petit être, tu n’existes QUE pour cela. Je veux, la rompre. Pour moi bien sûr, mais aussi pour mes deux loustics.
Alors je ne suis plus l’Ingrate. Je ne suis plus la (mal) liée.
Ils n’ont pas pu faire autrement mais j’ai le droit d’en souffrir, pour ne plus en souffrir. D’en souffrir vraiment, une bonne fois. De leur en vouloir à mort, et plus sans affinités.
C’était ça, le tunnel. J’en sors ?/ Ou bien j’y retourne, mais si je fais cela, je m’enterre.
Alors je fais un pas et je cligne des yeux.
Il n’y a plus à attendre qu’elle parle. Elle ne parlera pas. Je n’ai plus besoin d’elle. Je n’ai plus besoin de la préserver, mais plus besoin non plus qu’elle reconnaisse, qu’elle éclaire, qu’elle solutionne, qu’elle fasse ce qui a manqué car ce qui a manqué a à jamais, manqué.
Je ne suis plus si petite, ma petite.
C’est ce manque-là qui existera toujours, mais je peux faire avec, là, je le sens. Avec comme on isole un endroit non contaminant, à l’intérieur de soi. Avec comme s’il pouvait devenir une source, plutôt qu’une gangrène.
(J’écris ça ici au cas où, un jour, je souhaite me réenterrer)
*
Il y a des cheminées d’usine et une route droite. Impeccablement droite. Il y a des panneaux colorés qui indiquent école, zone commerciale, bureaux, enfances/vies idéales, au-delà de cette limite votre ticket ne sera plus valable. Il y a des lacs, des mers, des océans d’alcool, ça brille au loin, le vent se lève. Je me cogne et me cogne dans la jolie boîte perfusée.
Quand ça s’entaille je lève la tête. Les nuages les maisons les arbres des visages. Les morceaux tombent dans les poubelles, je ne trie pas, ces lambeaux sont de chair, ils roulent en petites boulettes molles entre les jambes pressées, destinées à. Le reste, à vif. J’avale le vent, j’avale la terre.
Il y a des cheminées d’usine gris sur noir et des routes, des routes. Les panneaux sont voilés de noir, plus de ticket. Je sens le fond des mers. Le vent se lève sur les plaies, ça brille là, et là, ça se disperse, s’intensifie, se transforme, meurt et renaît. Des routes et des gouffres où encore, aller
mais
je frémis, dans l’ombre et la lumière
(ours, merci pour tes mots, et sinon je suis venue à Marseille très précisément, et pas dans le Sud en général, parce qu’il me semblait que c’était là, pour moi, qu’il y avait des possibilités d’être – une impression confuse, sans doute un fantasme puisque je connaissais très peu la ville avant d’y venir, mais force est de constater que c’est la première fois de ma vie que je me sens bien dans un lieu où je vis, un peu comme si j’étais dans une ville-brouillon, une ville-esquisse, une ville indéfinie-indéfinissable, une ville non assignable, et que c’est ce qui, précisément, me convient).
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Il faut le temps que je comprenne.
Moments merveilleux mais si éprouvants vécus ces 3 dernières semaines.
Je suis affectivement au seuil de rupture et physiquement épuisé par tant d'intensité.
Il faut le temps que je comprenne.
La lecture de tes mots me renvoie à certaines personnes qui ce WE m'ont dit des choses à demi mots. Des choses d'indignité, des choses cachées : Il n'y a de terrible en nous que ce qui n'a pas encore été dit.
Et pour dire, il faut l'autre.
Et pour vivre il faut assembler, "compléter des niveaux".
Quelle est ma morale ? Quelles sont les valeurs irréductibles auxquelles je me réfère ?
Quelle est mon éthique ? C'est à dire, comment je souhaite concrétiser ma morale, comment l'appliquer à ma vie quotidienne, comment je dois l'imposer à ceux dont j'ai la charge éducative.
Quelle est mon intégrité ? A savoir que si je suis en morceaux, je ne peux respecter ma morale et mon éthique, or ce sont mes bases. Donc pour les respecter, il me faut être un, unitaire et pour l'être, je dois me protéger, me sauvegarder, me nourrir, me reposer. Seulement une fois réuni, je pourrais me tourner vers l'extérieur, que celui-ci soit d'ordre réel ou fantasmatique.
Quelle est mon environnement ? Quels sont les faits que j'observe ? Les faits, pas l'image de ceux-ci tels qu'ils ont l'habitude de m'assaillir. Les faits, les mots simples, les éléments dans leur nudité factuelle.
Quelles sont les émotions qui me servent à investir le fait, à me l'approprier ? Sans celles-ci, le fait reste extérieur et donc ne m'atteint pas et globalement la vie ne m'atteint pas. Mais si je ne considère que l'émotion, celle-ci me dépasse, m'envahit, me décolle de la réalité.
Ce sont les 5 niveaux de réflexion que je tente d'utiliser au quotidien pour me dépatouiller de ma vie. Ce ne sont que les miens et à chaque "impact", je les balaye, cherchant à valider mes 5 niveaux, tenter de rester en cohérence, exprimer mes affections sans aller à contre sens. Cela me permet d'aller très loin, de récupérer en conscience des sentiments en principe inadmissibles parce que primaires, animaux, reptiliens, .... Dire, écrire ou penser : "là, c'est de la confusion, mais il faut que je le dise, je trierai plus tard parce que j'ai les outils pour le faire et que si je ne dis pas maintenant, je vais faire naître un fantôme qui me hantera".
Je suis loin de ce que tu écris.
Je ne suis pourtant pas certain d'être hors sujet sur le fond.
Mesurer sa puissance, avoir un référentiel, c'est faire tomber les oripeaux, les lambeaux, c'est avoir une certitude, même si celle-ci est "artificielle" et un peu arbitraire, au moins elle est. C'est déjà un point fixe.
Moments merveilleux mais si éprouvants vécus ces 3 dernières semaines.
Je suis affectivement au seuil de rupture et physiquement épuisé par tant d'intensité.
Il faut le temps que je comprenne.
La lecture de tes mots me renvoie à certaines personnes qui ce WE m'ont dit des choses à demi mots. Des choses d'indignité, des choses cachées : Il n'y a de terrible en nous que ce qui n'a pas encore été dit.
Et pour dire, il faut l'autre.
Et pour vivre il faut assembler, "compléter des niveaux".
Quelle est ma morale ? Quelles sont les valeurs irréductibles auxquelles je me réfère ?
Quelle est mon éthique ? C'est à dire, comment je souhaite concrétiser ma morale, comment l'appliquer à ma vie quotidienne, comment je dois l'imposer à ceux dont j'ai la charge éducative.
Quelle est mon intégrité ? A savoir que si je suis en morceaux, je ne peux respecter ma morale et mon éthique, or ce sont mes bases. Donc pour les respecter, il me faut être un, unitaire et pour l'être, je dois me protéger, me sauvegarder, me nourrir, me reposer. Seulement une fois réuni, je pourrais me tourner vers l'extérieur, que celui-ci soit d'ordre réel ou fantasmatique.
Quelle est mon environnement ? Quels sont les faits que j'observe ? Les faits, pas l'image de ceux-ci tels qu'ils ont l'habitude de m'assaillir. Les faits, les mots simples, les éléments dans leur nudité factuelle.
Quelles sont les émotions qui me servent à investir le fait, à me l'approprier ? Sans celles-ci, le fait reste extérieur et donc ne m'atteint pas et globalement la vie ne m'atteint pas. Mais si je ne considère que l'émotion, celle-ci me dépasse, m'envahit, me décolle de la réalité.
Ce sont les 5 niveaux de réflexion que je tente d'utiliser au quotidien pour me dépatouiller de ma vie. Ce ne sont que les miens et à chaque "impact", je les balaye, cherchant à valider mes 5 niveaux, tenter de rester en cohérence, exprimer mes affections sans aller à contre sens. Cela me permet d'aller très loin, de récupérer en conscience des sentiments en principe inadmissibles parce que primaires, animaux, reptiliens, .... Dire, écrire ou penser : "là, c'est de la confusion, mais il faut que je le dise, je trierai plus tard parce que j'ai les outils pour le faire et que si je ne dis pas maintenant, je vais faire naître un fantôme qui me hantera".
Je suis loin de ce que tu écris.
Je ne suis pourtant pas certain d'être hors sujet sur le fond.
Mesurer sa puissance, avoir un référentiel, c'est faire tomber les oripeaux, les lambeaux, c'est avoir une certitude, même si celle-ci est "artificielle" et un peu arbitraire, au moins elle est. C'est déjà un point fixe.
Invité- Invité
Page 1 sur 2 • 1, 2
Sujets similaires
» bonjour!!!! heuuuu....je sais plus......blanc a rayure noir ou noir a rayure blanche?
» Les types de zèbres...
» Y a t'il différents types de Zèbres ?
» Les deux types de zèbres
» Un zèbre c'est noir rayé blanc ou blanc rayé noir ??
» Les types de zèbres...
» Y a t'il différents types de Zèbres ?
» Les deux types de zèbres
» Un zèbre c'est noir rayé blanc ou blanc rayé noir ??
Page 1 sur 2
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum