Des types en noir
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Re: Des types en noir
Il faut le temps que je comprenne.
Moments merveilleux mais si éprouvants vécus ces 3 dernières semaines.
Je suis affectivement au seuil de rupture et physiquement épuisé par tant d'intensité.
Il faut le temps que je comprenne.
La lecture de tes mots me renvoie à certaines personnes qui ce WE m'ont dit des choses à demi mots. Des choses d'indignité, des choses cachées : Il n'y a de terrible en nous que ce qui n'a pas encore été dit.
Et pour dire, il faut l'autre.
Et pour vivre il faut assembler, "compléter des niveaux".
Quelle est ma morale ? Quelles sont les valeurs irréductibles auxquelles je me réfère ?
Quelle est mon éthique ? C'est à dire, comment je souhaite concrétiser ma morale, comment l'appliquer à ma vie quotidienne, comment je dois l'imposer à ceux dont j'ai la charge éducative.
Quelle est mon intégrité ? A savoir que si je suis en morceaux, je ne peux respecter ma morale et mon éthique, or ce sont mes bases. Donc pour les respecter, il me faut être un, unitaire et pour l'être, je dois me protéger, me sauvegarder, me nourrir, me reposer. Seulement une fois réuni, je pourrais me tourner vers l'extérieur, que celui-ci soit d'ordre réel ou fantasmatique.
Quelle est mon environnement ? Quels sont les faits que j'observe ? Les faits, pas l'image de ceux-ci tels qu'ils ont l'habitude de m'assaillir. Les faits, les mots simples, les éléments dans leur nudité factuelle.
Quelles sont les émotions qui me servent à investir le fait, à me l'approprier ? Sans celles-ci, le fait reste extérieur et donc ne m'atteint pas et globalement la vie ne m'atteint pas. Mais si je ne considère que l'émotion, celle-ci me dépasse, m'envahit, me décolle de la réalité.
Ce sont les 5 niveaux de réflexion que je tente d'utiliser au quotidien pour me dépatouiller de ma vie. Ce ne sont que les miens et à chaque "impact", je les balaye, cherchant à valider mes 5 niveaux, tenter de rester en cohérence, exprimer mes affections sans aller à contre sens. Cela me permet d'aller très loin, de récupérer en conscience des sentiments en principe inadmissibles parce que primaires, animaux, reptiliens, .... Dire, écrire ou penser : "là, c'est de la confusion, mais il faut que je le dise, je trierai plus tard parce que j'ai les outils pour le faire et que si je ne dis pas maintenant, je vais faire naître un fantôme qui me hantera".
Je suis loin de ce que tu écris.
Je ne suis pourtant pas certain d'être hors sujet sur le fond.
Mesurer sa puissance, avoir un référentiel, c'est faire tomber les oripeaux, les lambeaux, c'est avoir une certitude, même si celle-ci est "artificielle" et un peu arbitraire, au moins elle est. C'est déjà un point fixe.
Moments merveilleux mais si éprouvants vécus ces 3 dernières semaines.
Je suis affectivement au seuil de rupture et physiquement épuisé par tant d'intensité.
Il faut le temps que je comprenne.
La lecture de tes mots me renvoie à certaines personnes qui ce WE m'ont dit des choses à demi mots. Des choses d'indignité, des choses cachées : Il n'y a de terrible en nous que ce qui n'a pas encore été dit.
Et pour dire, il faut l'autre.
Et pour vivre il faut assembler, "compléter des niveaux".
Quelle est ma morale ? Quelles sont les valeurs irréductibles auxquelles je me réfère ?
Quelle est mon éthique ? C'est à dire, comment je souhaite concrétiser ma morale, comment l'appliquer à ma vie quotidienne, comment je dois l'imposer à ceux dont j'ai la charge éducative.
Quelle est mon intégrité ? A savoir que si je suis en morceaux, je ne peux respecter ma morale et mon éthique, or ce sont mes bases. Donc pour les respecter, il me faut être un, unitaire et pour l'être, je dois me protéger, me sauvegarder, me nourrir, me reposer. Seulement une fois réuni, je pourrais me tourner vers l'extérieur, que celui-ci soit d'ordre réel ou fantasmatique.
Quelle est mon environnement ? Quels sont les faits que j'observe ? Les faits, pas l'image de ceux-ci tels qu'ils ont l'habitude de m'assaillir. Les faits, les mots simples, les éléments dans leur nudité factuelle.
Quelles sont les émotions qui me servent à investir le fait, à me l'approprier ? Sans celles-ci, le fait reste extérieur et donc ne m'atteint pas et globalement la vie ne m'atteint pas. Mais si je ne considère que l'émotion, celle-ci me dépasse, m'envahit, me décolle de la réalité.
Ce sont les 5 niveaux de réflexion que je tente d'utiliser au quotidien pour me dépatouiller de ma vie. Ce ne sont que les miens et à chaque "impact", je les balaye, cherchant à valider mes 5 niveaux, tenter de rester en cohérence, exprimer mes affections sans aller à contre sens. Cela me permet d'aller très loin, de récupérer en conscience des sentiments en principe inadmissibles parce que primaires, animaux, reptiliens, .... Dire, écrire ou penser : "là, c'est de la confusion, mais il faut que je le dise, je trierai plus tard parce que j'ai les outils pour le faire et que si je ne dis pas maintenant, je vais faire naître un fantôme qui me hantera".
Je suis loin de ce que tu écris.
Je ne suis pourtant pas certain d'être hors sujet sur le fond.
Mesurer sa puissance, avoir un référentiel, c'est faire tomber les oripeaux, les lambeaux, c'est avoir une certitude, même si celle-ci est "artificielle" et un peu arbitraire, au moins elle est. C'est déjà un point fixe.
Invité- Invité
Re: Des types en noir
Je digresse sur un truc...
Si oui, je ne crois pas en cette solution.
Tu es perfectionniste, je suppose... alors quand seras-tu pleinement satisfait de ta construction, avant de te tourner vers l'extérieur ?
Tes proches ont besoin de toi maintenant. Ta vie a besoin de toi maintenant. Faudra poursuivre le chantier tout en existant pleinement, j'en ai peur.
Peut-être que je me trompe, mais j'entends dans ce discours un désir d'ermitage pour se recentrer avant de vivre.ours a écrit:A savoir que si je suis en morceaux, je ne peux respecter ma morale et mon éthique, or ce sont mes bases. Donc pour les respecter, il me faut être un, unitaire et pour l'être, je dois me protéger, me sauvegarder, me nourrir, me reposer. Seulement une fois réuni, je pourrais me tourner vers l'extérieur
Si oui, je ne crois pas en cette solution.
Tu es perfectionniste, je suppose... alors quand seras-tu pleinement satisfait de ta construction, avant de te tourner vers l'extérieur ?
Tes proches ont besoin de toi maintenant. Ta vie a besoin de toi maintenant. Faudra poursuivre le chantier tout en existant pleinement, j'en ai peur.
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
Pas autant que tu le dis....
Je me sais fragile, alors je me "rapatrie" vers cette "unification" dès que je sens qu'un sujet me touche fort.
Pour la vie quotidienne, je série les faits et me réfère à mes modèles.
Oui, je pratique l'ermitage et oui j'ai une sociabilité complexe....
Et oui, il me faut des mois pour arriver à vivre sans "réfléchir" avec un groupe relativement restreint.
Et encore, avec les zèbres c'est plus rapide ; je te laisse imaginer avec les autres personnes, ils sont bien souvent passés à autre chose quand moi je suis prêt.
Souvent, j'essaie de faire ou de donner, plutôt que de parler. C'est plus facile pour moi.
Tant pis.
Je ne sais faire que comme cela.
Et la folie, la colère et la haine me prendront si je ne fais pas cela.
Mais, je n'ai jamais prétendu être normal.........
Je me sais fragile, alors je me "rapatrie" vers cette "unification" dès que je sens qu'un sujet me touche fort.
Pour la vie quotidienne, je série les faits et me réfère à mes modèles.
Oui, je pratique l'ermitage et oui j'ai une sociabilité complexe....
Et oui, il me faut des mois pour arriver à vivre sans "réfléchir" avec un groupe relativement restreint.
Et encore, avec les zèbres c'est plus rapide ; je te laisse imaginer avec les autres personnes, ils sont bien souvent passés à autre chose quand moi je suis prêt.
Souvent, j'essaie de faire ou de donner, plutôt que de parler. C'est plus facile pour moi.
Tant pis.
Je ne sais faire que comme cela.
Et la folie, la colère et la haine me prendront si je ne fais pas cela.
Mais, je n'ai jamais prétendu être normal.........
Invité- Invité
Re: Des types en noir
J’ai moi aussi fortement besoin de ce mouvement, solitude et monde, mais je vois ça comme un besoin vital, comme celui de respirer. C’est une sorte d’équilibre subtil qu’il me faut respecter, parce que je ne peux pas vivre, sinon. Il est des périodes où le besoin de solitude est plus fort, parce qu’il y a sans doute plus de choses qui ont bougé et il faut alors un temps plus long d’incubation, de réagencement des morceaux, comme tu le dis, ours.
C’est aussi une base cruciale pour moi dans la relation de couple, être avec quelqu’un qui sait à quel point la solitude m’est nécessaire, et qui ne se sent pas rejeté à cause de ça. Et c’était aussi sans doute ce qui a fait que c’était compliqué pour moi, d’envisager une vie familiale. Même si ça s’invente très bien, finalement.
Sur le dire, je te rejoins ours, et je constate que si on ne parvient pas à dire à un autre, c’est qu’en général on ne parvient pas non plus à se dire à soi, c’est-à-dire à regarder en face et à nommer. Cela nécessite à mon sens une sorte de recul intérieur, un déplacement infime pour laisser ce qui est en soi advenir, se déployer. Alors cela peut être nommé, et ce n’est pas parce que c’est nommé que ça s’ancre, au contraire, ça peut alors nous traverser, puis, partir. (Avant je croyais que mettre des mots signifierait nécessairement un arrêt de mort).
J’ai pris conscience que je m’interdisais de le faire non seulement pour ne pas me confronter au réel, mais aussi parce que, implicitement, je postulais une image valable de moi qui était forcément une, de la forme au tréfonds. Je postulais que la moindre bribe de pensée, la moindre émotion mesquine, ferait de moi un être entièrement et complètement mesquin, pour donner un exemple.
C’est pour cette raison que j’envisage le fait d’être "un" plutôt un conglomérat en perpétuel mouvement (de sensations, perceptions, sentiments, désirs etc.), et que rien de tout cela ne me définit entièrement et absolument, ni ne dit rien d’une "valeur" de soi. Je ne peux pas m’interdire de ressentir, mais je peux m’interdire d’en tirer des principes intimes plombants, des définitions radicales et permanentes, des écarts qui signifieraient encore et encore que je suis nulle et minable.
Je peux en effet rapporter mes émotions aux faits nus dont tu parles, constater parfois le décalage, comprendre ce qui se joue alors. Je peux reconsidérer mes limites, entre moi et le monde (cette intégrité), limites elles-mêmes non figées et sans cesse à reconsidérer. Je peux voir en quoi mes valeurs ne seront pas compromises, voire, au contraire, si je me laisse éprouver, si je comprends, si je respecte, si je ne laisse pas le tout grouiller et m’envahir à mon insu sous prétexte que je ne DOIS pas.
Puis tendre vers, concrètement, ce qui importe pour moi (comprendre, aimer, créer…).
Une tension vers, un agir tendu vers, j’aime bien l’écrire comme ça car du coup je me débarrasse de cette idée de perfection soulevée par Fa, et je laisse l’espace ouvert pour l’expérimentation , le plantage, etc. Et ça ne ruine pas tout, d’emblée.
Alors tu n’es pas du tout hors sujet, au contraire, tu me donnes à réfléchir. J’aime beaucoup ton idée des cinq niveaux. Et je vois bien qu’il y a encore du boulot (ou plutôt, que le boulot est peut-être toujours à faire, si on ne veut pas trop s’éloigner, si on ne veut pas être dans un hiatus existentiel permanent).
Ce dont je prends conscience peu à peu, c’est que ni moi ni l’autre n’est (consubstantiellement, à l'origine) un danger, un monstre, un ogre qui va nécessairement me manger toute crue. Qu’il n’y a pas besoin de se protéger, ou plutôt que se protéger tel que je l’ai fait, c’était le meilleur moyen de ne pas vivre (de l’auto-dévoration en pratique intensive et multiforme). Alors je peux choisir ce que je dis, ce que je laisse voir, je peux même envisager de me positionner (provisoirement), je peux préserver ce qui importe de mes terrains secrets, je peux dire non, oui, etc., mais cela en conscience, disons, ou avec attention (la plus grande attention possible).
Et pas parce que je ne peux pas faire autrement, tétanisée de toutes mes peurs innommables et rampantes, cachées.
C’est aussi une base cruciale pour moi dans la relation de couple, être avec quelqu’un qui sait à quel point la solitude m’est nécessaire, et qui ne se sent pas rejeté à cause de ça. Et c’était aussi sans doute ce qui a fait que c’était compliqué pour moi, d’envisager une vie familiale. Même si ça s’invente très bien, finalement.
Sur le dire, je te rejoins ours, et je constate que si on ne parvient pas à dire à un autre, c’est qu’en général on ne parvient pas non plus à se dire à soi, c’est-à-dire à regarder en face et à nommer. Cela nécessite à mon sens une sorte de recul intérieur, un déplacement infime pour laisser ce qui est en soi advenir, se déployer. Alors cela peut être nommé, et ce n’est pas parce que c’est nommé que ça s’ancre, au contraire, ça peut alors nous traverser, puis, partir. (Avant je croyais que mettre des mots signifierait nécessairement un arrêt de mort).
J’ai pris conscience que je m’interdisais de le faire non seulement pour ne pas me confronter au réel, mais aussi parce que, implicitement, je postulais une image valable de moi qui était forcément une, de la forme au tréfonds. Je postulais que la moindre bribe de pensée, la moindre émotion mesquine, ferait de moi un être entièrement et complètement mesquin, pour donner un exemple.
C’est pour cette raison que j’envisage le fait d’être "un" plutôt un conglomérat en perpétuel mouvement (de sensations, perceptions, sentiments, désirs etc.), et que rien de tout cela ne me définit entièrement et absolument, ni ne dit rien d’une "valeur" de soi. Je ne peux pas m’interdire de ressentir, mais je peux m’interdire d’en tirer des principes intimes plombants, des définitions radicales et permanentes, des écarts qui signifieraient encore et encore que je suis nulle et minable.
Je peux en effet rapporter mes émotions aux faits nus dont tu parles, constater parfois le décalage, comprendre ce qui se joue alors. Je peux reconsidérer mes limites, entre moi et le monde (cette intégrité), limites elles-mêmes non figées et sans cesse à reconsidérer. Je peux voir en quoi mes valeurs ne seront pas compromises, voire, au contraire, si je me laisse éprouver, si je comprends, si je respecte, si je ne laisse pas le tout grouiller et m’envahir à mon insu sous prétexte que je ne DOIS pas.
Puis tendre vers, concrètement, ce qui importe pour moi (comprendre, aimer, créer…).
Une tension vers, un agir tendu vers, j’aime bien l’écrire comme ça car du coup je me débarrasse de cette idée de perfection soulevée par Fa, et je laisse l’espace ouvert pour l’expérimentation , le plantage, etc. Et ça ne ruine pas tout, d’emblée.
Alors tu n’es pas du tout hors sujet, au contraire, tu me donnes à réfléchir. J’aime beaucoup ton idée des cinq niveaux. Et je vois bien qu’il y a encore du boulot (ou plutôt, que le boulot est peut-être toujours à faire, si on ne veut pas trop s’éloigner, si on ne veut pas être dans un hiatus existentiel permanent).
Ce dont je prends conscience peu à peu, c’est que ni moi ni l’autre n’est (consubstantiellement, à l'origine) un danger, un monstre, un ogre qui va nécessairement me manger toute crue. Qu’il n’y a pas besoin de se protéger, ou plutôt que se protéger tel que je l’ai fait, c’était le meilleur moyen de ne pas vivre (de l’auto-dévoration en pratique intensive et multiforme). Alors je peux choisir ce que je dis, ce que je laisse voir, je peux même envisager de me positionner (provisoirement), je peux préserver ce qui importe de mes terrains secrets, je peux dire non, oui, etc., mais cela en conscience, disons, ou avec attention (la plus grande attention possible).
Et pas parce que je ne peux pas faire autrement, tétanisée de toutes mes peurs innommables et rampantes, cachées.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
A propos du besoin de solitude, cette vidéo a déjà été postée par je ne sais plus qui sur ce forum, pardon de la repompe, mais ça t'intéressera peut-être :
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
Merci pour le lien, je suis une quiche en anglais mais je crois avoir compris l’essentiel (que je partage).
Mogwai a écrit sur son fil, l’amour, c’est subversif. Oui, je crois aussi, et parfois je me dis ça :
Et si on arrêtait de raisonner en termes de différences/similitudes ?
Et si on pouvait juste parler de singularités ? Chaque être humain, humain et irréductiblement singulier. Et que c’est là tout l’enjeu, toute la richesse du monde. La biodiversité, je ne vois pas pourquoi ça ne serait que pour les plantes et les animaux, en fait, même si c’est crucial, bien entendu (mais aussi pour les livres et les gens, hop).
Humain, sur cette base je peux bâtir une égalité des droits, je peux reconnaître en chaque autre son humanité.
Singularités, sur celles-ci je peux réfléchir à l’équité, au vivre ensemble pour que chacun puisse avoir sa place, suivre son chemin (et non pour que chacun puisse être rectifié et conduit là où il faut).
C’est sémantique (et écrit à la hache hyper réductrice), mais pas que. Il me semble que c’est une façon de voir qui change radicalement les choses. On entre dans l’altérité, en somme (il me semble qu’on n’y est pas encore, qu’on en est loin, sous couvert du culte de l’individu auto-épanouissant qui bizarrement, n’aspire qu’à ressembler à l’autre, ou que les autres lui ressemblent – et les moutons seront bien gardés par Apple et Diet Coke).
On entre dans la possibilité de l’amour, qui se distingue de l’amour du même, du miroir, de l’objet, etc. (versus la haine/peur de l’étranger, de l’étrange, du non-soi, de ce qui échappe et ne peut se chosifier à notre bon vouloir). On sort du normal-pas normal-à normaliser, on sort des représentations toutes faites et du prêt à penser, prêt à étiqueter, on essaye de trouver des ponts, des passerelles, on invente des fils qui nous tiennent et nous relient, et pas malgré, mais bien grâce à (aux échanges et aux ouvertures mutuelles, sur un vrai Autre, à ce que ça apporte de potentiellement bouleversant).
On arrête d’avoir PEUR, en somme.
Peu de temps après la rentrée, j’attendais mon fils devant l’école, et j’entends une nana dire à un type à côté de moi : J’ai vraiment hésité à mettre mon enfant ici, car y a des handicapés, une classe spéciale, ça craint. L’autre renchérissait. J’attendais mon fils qui est dans cette classe spéciale (CLIS), et j’écoutais cette nana sans rien dire, et je ne sais pas, je crois que je me suis sentie désespérée. Car ce n’est pas une question de connerie spécifique à cette femme, d’ailleurs elle n’est peut-être pas conne du tout, et c’est tellement et partout si bien partagée, la peur (quand je vois que même dans le "milieu du handicap" — sic, par exemple, il y a des jugements de valeurs subtils et des peurs similaires, ça me rend malade, un peu).
En quatre ans de scolarité/broyage désastreux, c’est la première fois, avec cette école-là (classée ZEP, beaucoup de primo-arrivants, une CLIS, beaucoup d’enfants avec auxiliaires de vie scolaire dans les classes dites "ordinaires", une équipe enseignante motivée et formidable), qu’on sent l’enfant accueilli pour ce qu’il est. Il n’est plus un PROBLEME, celui qui dérange, celui qui ne colle pas. On cherche à le comprendre, à alimenter sa curiosité, ses appétences, on ne se focalise plus sur ce qui ne va pas. On le laisse être et se déployer. On le nourrit, plutôt que le faner prématurément.
J’écris cela parce qu’évidemment c’est là d’où je parle. De mon expérience intime de mère, mais aussi d’un vécu finalement assez similaire (où le broyage des identités était ce qui était BON, en particulier, et en général, pour la société).
C’est peut-être pour ça que je me suis toujours intéressée aux lieux de relégation : la prison, l’hôpital psychiatrique, les maisons pour les vieux.
Ces lieux de mise à l’écart, opaques, d’enfermement.
Des traductions architecturales concrètes d’autres enfermements, moins visibles, plus psychiques, qui courent dans la société toute entière.
C’est aussi pour ça que j’ai du mal en termes politiques, car il me semble que l’articulation et la pensée nécessaire, entre égalité et liberté, pour le dire vite, n’est faite nulle part, que certains mots sont privatisés par les uns ou les autres, et que pèse des interdits (de pensée) dans tous les camps, comme si on était paralysé, incapable d’inventer d’autres façons d’être ensemble.
Mogwai a écrit sur son fil, l’amour, c’est subversif. Oui, je crois aussi, et parfois je me dis ça :
Et si on arrêtait de raisonner en termes de différences/similitudes ?
Et si on pouvait juste parler de singularités ? Chaque être humain, humain et irréductiblement singulier. Et que c’est là tout l’enjeu, toute la richesse du monde. La biodiversité, je ne vois pas pourquoi ça ne serait que pour les plantes et les animaux, en fait, même si c’est crucial, bien entendu (mais aussi pour les livres et les gens, hop).
Humain, sur cette base je peux bâtir une égalité des droits, je peux reconnaître en chaque autre son humanité.
Singularités, sur celles-ci je peux réfléchir à l’équité, au vivre ensemble pour que chacun puisse avoir sa place, suivre son chemin (et non pour que chacun puisse être rectifié et conduit là où il faut).
C’est sémantique (et écrit à la hache hyper réductrice), mais pas que. Il me semble que c’est une façon de voir qui change radicalement les choses. On entre dans l’altérité, en somme (il me semble qu’on n’y est pas encore, qu’on en est loin, sous couvert du culte de l’individu auto-épanouissant qui bizarrement, n’aspire qu’à ressembler à l’autre, ou que les autres lui ressemblent – et les moutons seront bien gardés par Apple et Diet Coke).
On entre dans la possibilité de l’amour, qui se distingue de l’amour du même, du miroir, de l’objet, etc. (versus la haine/peur de l’étranger, de l’étrange, du non-soi, de ce qui échappe et ne peut se chosifier à notre bon vouloir). On sort du normal-pas normal-à normaliser, on sort des représentations toutes faites et du prêt à penser, prêt à étiqueter, on essaye de trouver des ponts, des passerelles, on invente des fils qui nous tiennent et nous relient, et pas malgré, mais bien grâce à (aux échanges et aux ouvertures mutuelles, sur un vrai Autre, à ce que ça apporte de potentiellement bouleversant).
On arrête d’avoir PEUR, en somme.
Peu de temps après la rentrée, j’attendais mon fils devant l’école, et j’entends une nana dire à un type à côté de moi : J’ai vraiment hésité à mettre mon enfant ici, car y a des handicapés, une classe spéciale, ça craint. L’autre renchérissait. J’attendais mon fils qui est dans cette classe spéciale (CLIS), et j’écoutais cette nana sans rien dire, et je ne sais pas, je crois que je me suis sentie désespérée. Car ce n’est pas une question de connerie spécifique à cette femme, d’ailleurs elle n’est peut-être pas conne du tout, et c’est tellement et partout si bien partagée, la peur (quand je vois que même dans le "milieu du handicap" — sic, par exemple, il y a des jugements de valeurs subtils et des peurs similaires, ça me rend malade, un peu).
En quatre ans de scolarité/broyage désastreux, c’est la première fois, avec cette école-là (classée ZEP, beaucoup de primo-arrivants, une CLIS, beaucoup d’enfants avec auxiliaires de vie scolaire dans les classes dites "ordinaires", une équipe enseignante motivée et formidable), qu’on sent l’enfant accueilli pour ce qu’il est. Il n’est plus un PROBLEME, celui qui dérange, celui qui ne colle pas. On cherche à le comprendre, à alimenter sa curiosité, ses appétences, on ne se focalise plus sur ce qui ne va pas. On le laisse être et se déployer. On le nourrit, plutôt que le faner prématurément.
J’écris cela parce qu’évidemment c’est là d’où je parle. De mon expérience intime de mère, mais aussi d’un vécu finalement assez similaire (où le broyage des identités était ce qui était BON, en particulier, et en général, pour la société).
C’est peut-être pour ça que je me suis toujours intéressée aux lieux de relégation : la prison, l’hôpital psychiatrique, les maisons pour les vieux.
Ces lieux de mise à l’écart, opaques, d’enfermement.
Des traductions architecturales concrètes d’autres enfermements, moins visibles, plus psychiques, qui courent dans la société toute entière.
C’est aussi pour ça que j’ai du mal en termes politiques, car il me semble que l’articulation et la pensée nécessaire, entre égalité et liberté, pour le dire vite, n’est faite nulle part, que certains mots sont privatisés par les uns ou les autres, et que pèse des interdits (de pensée) dans tous les camps, comme si on était paralysé, incapable d’inventer d’autres façons d’être ensemble.
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
Re: Des types en noir
Désolé pour l'angliche... Bon, pour ce qui est de parler en termes de singularités... oui, mais comment éviter les réponse du genre "ah oui, mon fils fait ça aussi", ou "tiens, moi je fonctionne différemment". Alors, ce n'est peut-être pas le discours qui est à modifier mais les conclusions qu'on en tire (va-t-on essayer de recadrer une différence, rectifier, comme tu le dis, ou l'accepter avec le coeur ouvert).
Bah c'est pas si humain que ça, d'avoir le coeur ouvert, on dirait. Et en disant ça je ferme moi-même le coeur à ces coeur-fermés. Devrais-je les accepter davantage ?
L'important est peut-être dans la capacité à protéger qui en a besoin. Pas l'impression que ces parents étriqués devant l'école aient besoin de mon coeur... par contre, lorsqu'il est question de personnes sensibles, fragiles - et on y est en plein, je suppose, avec les enfants et le "milieu du handicap" - il est urgent de l'ouvrir.
En tout cas c'est chouette que tu aies pu trouver ce lieu et un accueil enseignant à la hauteur, à défaut d'y trouver une ambiance formidable avec les autres parents.
Bah c'est pas si humain que ça, d'avoir le coeur ouvert, on dirait. Et en disant ça je ferme moi-même le coeur à ces coeur-fermés. Devrais-je les accepter davantage ?
L'important est peut-être dans la capacité à protéger qui en a besoin. Pas l'impression que ces parents étriqués devant l'école aient besoin de mon coeur... par contre, lorsqu'il est question de personnes sensibles, fragiles - et on y est en plein, je suppose, avec les enfants et le "milieu du handicap" - il est urgent de l'ouvrir.
En tout cas c'est chouette que tu aies pu trouver ce lieu et un accueil enseignant à la hauteur, à défaut d'y trouver une ambiance formidable avec les autres parents.
Fa- Messages : 1849
Date d'inscription : 23/06/2012
Age : 45
Re: Des types en noir
L’univers administratif concentrationnaire et judiciaire, et l’intérieur de ma Tête, c’est pareil. C’est pour ça que j’ai tant aimé Kafka. Des kilomètres et des kilomètres de règles, sous-règles, sous-sous règles à appliquer (mais lesquelles, pourquoi), je suis coupable (de quoi), et je ne pourrai ni sortir, ni entrer.
Nulle part.
Jamais.
*
Prisonnier, oui.
Comme Henry Spencer et sa jolie bouille ?
(comme toi et moi, quoi)
*
Parfois on regarde le monde, et il n’y a plus aucun geste possible.
*
Et, on ne sait pourquoi, le lendemain ou un autre jour, on a peut-être évité — de justesse — les bestioles immondes dans la Tête,
On n’a rien fait de spécial, on n’attendait rien
Il y a juste
Quoi ?
Un brin de soleil une parcelle de peau une trouvaille un éclaircissement un décalage une étrangeté un souffle une perte soudaine d’habitudes une possibilité?
C’est flagrant, on le flaire on le flambe.
Tout est déjà et entièrement là.
Jusqu’au prochain accablement (que je dois tant aimer, pire que l’amour, pour si consciencieusement, si régulièrement, m’y vautrer)
Et à nouveau regarder le monde sans pouvoir s'y fondre, sans pouvoir le toucher
Nulle part.
Jamais.
*
Prisonnier, oui.
Comme Henry Spencer et sa jolie bouille ?
(comme toi et moi, quoi)
*
Parfois on regarde le monde, et il n’y a plus aucun geste possible.
*
Et, on ne sait pourquoi, le lendemain ou un autre jour, on a peut-être évité — de justesse — les bestioles immondes dans la Tête,
On n’a rien fait de spécial, on n’attendait rien
Il y a juste
Quoi ?
Un brin de soleil une parcelle de peau une trouvaille un éclaircissement un décalage une étrangeté un souffle une perte soudaine d’habitudes une possibilité?
C’est flagrant, on le flaire on le flambe.
Tout est déjà et entièrement là.
Jusqu’au prochain accablement (que je dois tant aimer, pire que l’amour, pour si consciencieusement, si régulièrement, m’y vautrer)
Et à nouveau regarder le monde sans pouvoir s'y fondre, sans pouvoir le toucher
le navet- Messages : 72
Date d'inscription : 05/10/2012
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