Comment devenir moins paresseux ?

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Message par Princeton Dim 14 Juin 2015 - 11:20

Suce ces p'tits Bleus ! a écrit:
Princeton a écrit:Là c'est une de mes grandes questions existentielles : je suis souvent partagé entre m'engager dans le monde ou l'accepter comme il est.

On naît au monde, on est déjà engagé, qu'on l'accepte ou pas. Dent pétée

C'est vrai... Merci pour cette idée.

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Message par Invité Dim 14 Juin 2015 - 12:57

Je me demande s'il ne faudrait pas accepter que beaucoup d'hommes sont cupides, les laisser se faire leurs guerres et leurs courses au supermarché et contre la montre. Du moment qu'ils ne m'empêchent pas de vivre comme moi je l'entends ?

Par malheur, le monde n'est pas infini, les ressources sont également disponibles en quantité finies, et même en voie d'épuisement pour la plupart. Ce qui rend tout théorique le fait de "laisser chacun libre". On a longtemps cru, et bâti des systèmes de pensée entiers sur l'implicite de ressources infinies à l'échelle de l'homme, ce qui permettait de laisser chacun être économe ou goinfre à son gré. Maintenant, chaque fois que je ponctionne une ressource, je l'ôte à quelqu'un, d'une manière concrète, non pas abstraite et théorique. De sorte que ceux qui se font leurs guerres et leurs courses ne laissent plus les autres vivre comme ils l'entendent. C'était mignon en théorie, mais c'est fini, parce qu'il n'y a plus assez de place, de nourriture, de terres rares ou d'écosystèmes en état de marche pour que ça puisse encore être vrai. Chacun de nos actes retentit concrètement sur toute l'humanité; la plus grande des illusions est de continuer à croire qu'on puisse vivre sans que nos choix touchent les autres. A chaque instant, chacun de mes actes est à même d'empêcher quelqu'un de vivre sa vie, et réciproquement. Tout doit être repensé pour tenir compte de cette réalité.

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Message par deep thought Dim 14 Juin 2015 - 13:15

Princeton a écrit:Là c'est une de mes grandes questions existentielles : je suis souvent partagé entre m'engager dans le monde ou l'accepter comme il est.
Je pense qu'il faut d’abord s'accepter soit même, ensuite on peut déteindre un peu sur le monde et contribuer à son évolution. J'ai pensé à ça en faisant la vaisselle tout à l'heure.
J'ai réglé son problème de cette façon : je n'en ai pas suffisamment pour la laisser trop longtemps salle. En gros quand, j'ai plus d'assiette ou de couvert j'ai pas le choix, je dois la laver. Parfois ça ne suffit pas et j'ai tellement la flemme que je mange des trucs qui ne nécessitent pas de vaisselle (sandwich) que je fais moi même d'ailleurs.
J'assume complètement ma procrastination et je vis les choses que je ne fais pas vachement bien pendant que j'en fais d'autres... D'ailleurs, parfois je fais la vaisselle parce que j'ai pas envie de faire ma déclaration d'impôt. Parfois c'est l'inverse...

Bibo a écrit:Ce professeur de philo a une façon interessante d'envisager la chose : http://chronicle.com/article/How-to-ProcrastinateStill/93959
Exactement ce que je fais. Je ne l'aurai pas dit comme ça mais c'est exactement ma méthode! Ça me touche...

Merci Princeton, j'aime bien ce fil, il me permet d'éviter de faire ma vaisselle!!
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Message par Princeton Dim 14 Juin 2015 - 15:05

ceed a écrit:Merci Princeton, j'aime bien ce fil, il me permet d'éviter de faire ma vaisselle!!

Haha le fil qui manque complètement son but Pété de rire

Bon allez, je vais faire ma vaisselle et réfléchir à ce que tu as dit à propos de "déteindre" un peu sur le monde. J'aime bien cette image. Merci.

Ca pourrait devenir une technique pour faire la vaisselle : un message, une vaisselle. Very Happy
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Message par Invité Dim 14 Juin 2015 - 22:16

t'auras ta récompense : si tu fais ta vaisselle, tu peux venir poster !

je trouve exact de dire que tant que tu n'es pas bien construit (ou que tu ne t'es pas bien reconstruit) il est impossible d'avoir la bonne distance bien-richesse-pouvoir-altruisme-vie de la cité. on est cupides parce qu'on ne sait pas se "remplir" (je trouve pas le mot - l'idée est dans la satisfaction, l'écoute de qui on est) de la bonne manière. ça rejoint un autre fil sur les préjugés je trouve.
Cultiver son jardin, ça demande du courage, de se regarder en face et c'est pas donné à tout le monde. ensuite tu pourras déteindre sur le monde. encore que pour que cela marche, il faut aussi que l'on vienne déteindre sur nous.

On nait/est au monde oui mais on peut passer une vie centré sur la sienne.

y a plein d'idées dans ce fil...

l'argument de dire que la Terre s'en sortira après nous, je ne l'ai jamais compris, car en attendant qu'elle nous survive, nos enfants et nous avons un potentiel de Vie à notre portée alors qu'on en profite ! on n'est pas des fourmis.

Comme dit Fus, sachant qu'on est tous liés je ne vois pas comment on pourrait faire cohabiter ceux qui ont besoin du pouvoir pour se sentir vivre (et utilisent toutes les manières pour l'obtenir) et ceux qui estiment que l'essentiel est ailleurs.

bannir la propriété. est -ce que cela changerait le fait qu'il y aura toujours des humains mal construit pour envier, voler, violenter, dénigrer, déconsidérer, hiérarchiser, exclure, une partie de ses semblables ? les cupides seront toujours là, d'une autre manière.

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Message par Wise Ven 19 Juin 2015 - 1:17




(question) ... faire ce qu'on a envie.
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Message par Pieyre Ven 19 Juin 2015 - 1:30

Faire ce qu'il me plairait le plus de faire, voilà qui m'est difficile. Cela peut paraître étrange mais c'est ainsi. Il y a sans doute des forces en nous qui peuvent nous en empêcher. Alors, faire malgré tout, c'est se vaincre soi-même, aller contre son envie d'oublier ce dont on est capable.

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Message par Invité Ven 19 Juin 2015 - 2:10

Princeton a écrit:
Et je crois que le changement progressif des lois peut avoir aussi un effet sur les mentalités, comme le témoignage, l'exemple, le discours, etc. Je ne crois pas que ces moyens s'excluent, on peut agir sur tous les tableaux. Concernant le premier, je pense qu'à un moment donné, qu'il faut bien jauger, un changement de loi peut avoir un effet sur les moeurs, autant de validation que d'évolution. Les deux s'entretiennent. Je pense par exemple à l'abolition de la peine de mort, et aussi aux lois relatives à l'homosexualité : dépénalisation, Pacs, mariage gay, etc. Et bien d'autres lois.

Alors évidemment, il faut y aller mollo et progressivement, mais pourquoi pas agir aussi ponctuellement au niveau législatif, pour insuffler une direction. C'est la technique des petits pas...


Oui oui faut bien jauger,
la loi devance les mœurs, abolition peine de mort,
ou vient parachever l'évolution programmée de celles-ci grâce à l'exemple et discours médiatique propos modérés .

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Message par Invité Ven 19 Juin 2015 - 2:11

Désolé chuis paresseux aucun effort haha

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Message par Invité Lun 22 Juin 2015 - 13:57

Je crois avoir trouvé l'arme anti-procrastination!
Pour le fun (on s'amuse comme on peut lol!), j'ai calculé le temps que me prenait réellement sur une journée (à la louche), mes obligations si je ne travaille pas (recherche d'emploi "minimale" inclue; je ne retire donc pas les 12 h 00 hors de chez moi si je travaille).
Bref, en retirant les "obligations (ménage minimum, études perso, repas, courses, me laver, les temps de trajet divers et variés....), il me reste 70 % de mon temps pour procrastiner si je veux. J'ai arrondi car j'ai sans doute  oublié des choses.

J'ai calculé des journées de 7 h à 22 h 30 (15 h 30/ jour de veille), 7 jours sur 7 sur une semaine pour 108, 5 h de veille, j'arrive à 70 h pour procrastiner bien arrondis pour inclure toutes mes activités. Ca fait 65 % de mon temps à procrastiner.

Vu comme ça, c'est du gâchis total. Je n'ai jamais le temps de faire plein de choses!! Je suis sûre qu'en passant à 40 % de mon temps à procrastiner, je n'en serais pas plus malheureuse et je pourrais avancer plein de projets.
Bref, je vais passer dans un premier temps à un emploi du temps millimétré mais équilibré, le temps de prendre un nouveau rythme. C'est un gâchis total de ma vie, en fait!!! affraid

C'est officiel, j'arrête de procrastiner dès demain (et je note que si je n'arrive pas à changer un comportement malgré tous mes efforts, il me faut changer de point de vue!!).

Spoiler:

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Message par Princeton Lun 22 Juin 2015 - 16:33

Pas mal Bleuenn... Effectivement, vu comme ça, quel dommage ! Merci pour ton commentaire. Je crois que pour lui faire honneur, je vais faire ma vaisselle haha.

Bleuenn a écrit:C'est officiel, j'arrête de procrastiner dès demain

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Message par Stauk Mar 23 Juin 2015 - 12:14

Bleuenn a écrit:
J'ai calculé des journées de 7 h à 22 h 30 (15 h 30/ jour de veille), 7 jours sur 7 sur une semaine pour 108, 5 h de veille, j'arrive à 70 h pour procrastiner bien arrondis pour inclure toutes mes activités. Ca fait 65 % de mon temps à procrastiner.


Bleuenn a écrit:Vu comme ça, c'est du gâchis total. Je n'ai jamais le temps de faire plein de choses!! Je suis sûre qu'en passant à 40 % de mon temps à procrastiner, je n'en serais pas plus malheureuse et je pourrais avancer plein de projets.
Bref, je vais passer dans un premier temps à un emploi du temps millimétré mais équilibré, le temps de prendre un nouveau rythme. C'est un gâchis total de ma vie, en fait!!! affraid

Hello, intéressant et courageux point de vue (j'aurais jamais eu le courage de faire tous ces calculs !). Est ce que tu comptes réduire doucement le temps de "procrastination", ou brutalement ? Tu nous feras un suivi quotidien/hebdomadaire des avantages et limites de la méthode ?
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Message par Invité Mar 23 Juin 2015 - 12:57

Je pense redécouper les choses:
Matin jusqu'à 9 h petit déj/ toilette/ mails/ trainage sur internet (je me lève toujours tôt)
9 h - 10 h 30 offres d'emploi et un peu de "développement personnel" (point sur les projets perso, lecture de livres)/ études perso selon l'envie et le temps
10 h 30-12 h un peu de rangement/ ménage/ administratif (ménage, courses + ce que je fais généralement de suite à savoir payer les factures et envoyer les courriers)
12 h- 22 h 30/23 h ce que je veux. Je pense avoir même le temps de m'ennuyer!

+ vaisselle après chaque repas obligatoire sinon, ça déborde vite si on cuisine un minimum.
J'avais inclus dans mon calcul les obligations: activités extraprofessionnelles, temps de trajet divers et variés (et oui, ça prend du temps!!) qui sont à heures fixes le plus souvent.

Au final, j'ai le temps de proscratiner dans les blocs de "travail".

Ca va juste changer que j'ai une "heure fixe" (en un sens, pour moi, c'est plus: en début de matinée, je fais ça; en milieu de matinée, ça comme ça maximum à midi tout est bouclé et l'après-midi, récréation!!) pour ma recherche d'emploi et mon ménage donc ça "m'oblige" à les faire (même un peu, là en 20 mn mon ménage est bouclé + un peu de rangement). Le principe, c'est qu'en faisant un peu tous les jours, au final, les choses avancent sans qu'on s'en rende compte. Le fait de noter permet de ne pas délaisser "un pôle" deux trois jours d'affilée car on se concentre ailleurs et de voir les choses s'accumuler (ménage, projets perso laissés de côté) en se mettant bien en tête qu'en faisant un peu chaque jour, le "pôle projet" va vraiment avancer (donc notre vie aussi!) et que comme on n'a plus à faire les choses en une fois (typiquement, le ménage qui s'accumule, ça veut dire frotter plus fort et plus longtemps!! au lieu de nettoyer une fois facilement. Au choix, je préfère me bouger pour faire les choses, ça fait plus de temps de loisir gagné.).


Dernière édition par Bleuenn le Mar 23 Juin 2015 - 20:21, édité 1 fois

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Message par nanaille Mar 23 Juin 2015 - 14:04

Une méthode qui marche relativement bien pour moi :
Il y a plein de raisons (bonnes et moins bonnes) pour procrastiner, et remettre les choses à plus tard. Dans la majorité des cas, une part du découragement provient de la perception que ces tâches à réaliser nous semble d'un certain point de vue monumentale (ie l'image "montagnes à déplacer"). On sait qu'on n'arrivera pas à faire la vaisselle de la semaine en dix minutes, que l'administratif des 6 derniers mois va nous prendre au bas mot deux heures, que le permis c'est minimum trois mois, qu'un roman ne s'écrit pas en une semaine, qu'apprendre le piano c'est au moins plusieurs années.
J'arrive à contenir une partie de cette tendance qui nous empoisonne tous en considérant non pas la tâche à accomplir, mais simplement le premier pas.
En effet : faire le ménage de la maison devient simplement sortir et brancher l'aspirateur, passer le permis devient prendre rendez vous à l'auto école, faire l'administratif devient sortir les enveloppes et les timbres, écrire mon roman devient ouvrir mon document word...
C'est beaucoup plus simple, beaucoup plus rapide, et en général, quand tu as l'aspirateur dans les mains prêt à faire feu, bah tu y vas, tu arrêtes de tergiverser.
La plupart du temps, ce qui manque est simplement l'élan. Une fois qu'on est lancé, on a tendance naturellement à procéder par petites étapes qui font que la tâche à accomplir se réalise finalement naturellement.
D'autres l'ont déjà dit, mais considérer l'ampleur de la tâche est simplement contreproductif, il faut faire le maximum pour éviter d'y réfléchir.

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Message par martemma Mar 23 Juin 2015 - 14:16

Très intéressant ce fil ! Et merci pour toutes les petites astuces.
Moi j'ai un truc tout simple (qui, indirectement, rejoint ce qui a déjà été dit) = la mise en "pilotage automatique".
À savoir stopper toute réflexion et faire comme si j'avais appuyé sur un bouton "action". En fait je me force à ne pas réfléchir durant la mise en oeuvre du truc, et ensuite, comme pour bon nombre de vos astuces, le reste vient tout seul.
C'est pas toujours évident, mais pour les trucs bien rébarbatifs, ça aide.
Un autre truc est de procéder par priorité (ex : il est plus urgent à 9h30 d'aller sous la douche pour ensuite partir bosser que de réfléchir à une nouvelle organisation de sa vie ou à l'opportunité d'installer de nouvelles jardinières sur son balcon) (d'autant que sous la douche ou dans ta voiture, tu reprends ta réflexion).

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Message par Princeton Mar 23 Juin 2015 - 18:50

Bleuenn a écrit:Ca va juste changer que j'ai une "heure fixe" (en un sens, pour moi, c'est plus: en début de matinée, je fais ça; en milieu de matinée, ça comme ça maximum à midi tout est bouclé et l'après-midi, récréation!!)

Bonne idée de d'abord faire les choses pour être tranquille et faire ce que tu veux ensuite. Après l'effort, le réconfort...

nanaille a écrit:Une méthode qui marche relativement bien pour moi

J'aime beaucoup ta réflexion (pas que sur ce fil d'ailleurs), merci ! Je vais essayer cette nouvelle technique, c'est un peu comme changer d'angle de vue, ou ne pas regarder la montagne mais plutôt chaque petite étape sur le chemin, découper, ou limite regarder ses pieds... Un peu comme si on se bernait à ne regarder que tout près pour ne pas avoir le vertige en voyant au loin, ou l'ensemble, qui bien souvent n'est aussi spectaculaire que par exagération de ma part d'ailleurs. Une fois les choses réalisées je me dis souvent qu'elles n'étaient finalement pas si difficiles à accomplir.

Je mets en lien ton propos aussi avec l'effort : quand on voit la montagne, l'effort à accomplir semble immense, et puis demander beaucoup de temps et d'énergie et de concentration, etc, alors qu'en divisant en toutes petites étapes, eh bien il s'agit alors d'accomplir de tous petits efforts presque ridicules (ex: mettre un pied devant l'autre), ça devient tout de suite moins impressionnant. L'image de la montagne est pas mal, parce que j'adore faire de la rando. ;-)

Je pense qu'il y a aussi un lien avec le tempo, le rythme, c'est ce à quoi je réfléchissais hier... Avec le fait d'accélérer, de ralentir... Je me rendais compte que je n'avais peut-être pas le même tempo que les gens en général, comme si j'étais à haute fréquence, et avec beaucoup plus de variations...

martemma a écrit:Moi j'ai un truc tout simple (qui, indirectement, rejoint ce qui a déjà été dit) = la mise en "pilotage automatique".

Merci pour ton commentaire, qui rejoint l'idée de se mettre en action, d'arrêter de réfléchir... La pensée finit par inhiber l'action alors qu'elle devrait la provoquer au contraire.

C'est marrant parce que ces réflexions me ramènent à la vie en général, je disais à ma psy dernièrement que j'avais beaucoup de difficultés avec la vie en général parce que je n'avais pas trop le mécanisme de la "carotte", en me disant "à quoi bon ?" ou "quel intérêt ?"... Problème de motivation sans doute... Mais beaucoup de choses qui motivent les autres (le pouvoir, la reconnaissance, l'argent, la réussite, que sais-je) ne me motivent pas.

C'est comme si en regardant toujours de très loin, avec tellement de recul, je n'arrivais pas à me mettre la tête dans le guidon, à réduire mon système à des mini-choses, des mini-projets, des mini-actions... Je ne sais pas si je suis compréhensible, ce sont des réflexions en cours...
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Message par Invité Mar 23 Juin 2015 - 19:03

Justement, j'ai changé ma carotte: me débarrasser des "obligations" (oui, chercher du boulot, ça compte comme une obligation parce que je veux avoir une indépendance financière) une bonne fois pour toutes et pouvoir profiter du reste de la journée en loisirs. Je pars du principe qu'au début, ce sera des gros morceaux et par la suite, en faisant un peu tous les jours en période de croisière, la charge sera allégée.
Une fois tout ça fait, je peux faire ce que j'ai envie sans culpabilité ni passer plus de temps que nécessaire à une tâche car je l'ai longtemps repoussée.

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Message par Princeton Mar 23 Juin 2015 - 19:30

Princeton a écrit:Bonne idée de d'abord faire les choses pour être tranquille et faire ce que tu veux ensuite. Après l'effort, le réconfort...

En écrivant cette phrase, je me suis rendu compte qu'elle recélait à mon avis une information importante de ma pensée et de mon fonctionnement : car que ce soit des choses à faire ou autres, agréables ou non, qu'elles demandent des efforts ou non, faire les unes comme les autres procède de ma volonté.

C'est comme si pour les activités qui me demandent des efforts ou qui sont désagréables, je m'y sentais contraint, alors je traîne des pieds, je me rebiffe, je regimbe, je me plains, j'y mets de la mauvaise volonté justement... Alors pourtant que je peux aussi choisir de les réaliser, auquel cas l'action procède de ma volonté, auquel cas elle est libre. Ces actions, bien que désagréables, me servent aussi, elles sont de mon intérêt.

Il faudrait que je réfléchisse aussi au rapport entre la volonté et la contrainte. C'est comme si dès que je percevais quelque chose comme obligatoire, comme une contrainte ou une nécessité, je ne voulais pas la faire, comme si la faire entravait, voire niait ma liberté... Je ne me bats pas forcément contre la chose en elle-même, mais contre le fait d'être obligé ou plutôt de me sentir obligé, de me sentir contraint. Comme si je ne voulais faire que des choses contingentes. Comme si je refusais la nécessité, la contrainte, l'obligation.

J'ajoute que ces derniers posts me rappellent un autre sujet : celui de l'acquisition de méthodes, notamment de méthodes de travail, du fameux "apprendre à travailler" ou "apprendre à faire des efforts"... Ce que les HQI n'ont en général pas appris d'ailleurs. Ne serions-nous pas en train d'apprendre à travailler, à faire des efforts ? Very Happy
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Message par Invité Mar 23 Juin 2015 - 20:32

Disons que je me rends compte qu'il y a plus d'avantage à une certaine discipline au final. On perd moins de temps en faisant les choses!
Exemples tout bêtes:
Payer le loyer: je reçois l'avis de paiement, je fais le virement/ chèque + envoi du courrier/ je note pour moi sur l'avis que j'ai bien payé/ le range/ remplis mes comptes et on n'en parle plus> 30 mn maximum
Je ne le fais pas: je cherche si par hasard, je n'ai pas déjà payé en recevant la relance (10 mn si je dois allumer l'ordi)/ non, donc je refais la procédure normale en plus> au final, j'ai perdu 10 mn! Si 15 j plus tard, je retrouve l'avis de paiement: je me dis "je l'ai payé ça!!!" mais je vérifie dans le doute> 10 mn de plus de perdues soit déjà 20 mn.

Et j'ai l'impression que c'est pareil pour tout:
la vaisselle qui reste et qu'il faut frotter
le linge non plié/ lavé qui m'oblige à courir le matin pour trouver de quoi m'habiller
le rangement pas fait: le jour où je cherche quelque chose, ça peut être long et je casse parfois des choses dans l'énervement
les poubelles pas descendues de suite: ça sent mauvais, ça coule parfois, il faut donc nettoyer l'escalier en plus de descendre les poubelles

Au final, j'y gagne à faire les choses de suite une bonne fois pour toutes...

C'est une méthode de travail comme une autre. D'ailleurs, c'est marrant, j'ai ressorti ma méthode GTD, pour ne plus laisser mes projets s'accumuler.

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Message par nanaille Mar 23 Juin 2015 - 21:26

Princeton a écrit:J'aime beaucoup ta réflexion (pas que sur ce fil d'ailleurs), merci !
Merci à toi, et dans le genre, t'es pas mal non plus Wink

Voici quelques années, j'avais décidé de prendre le taureau par les cornes et d'acheter ce bouquin : "Comment ne pas tout remettre au lendemain" du Dr Bruno Koeltz. Ce cher monsieur donne tout un tas de raisons sur le pourquoi du comment, sur la peur de l'échec, sur la procrastination en tant que mécanisme de défense et tout. Instructif, mais au final, à côté de la plaque (en ce qui me concerne) : pas une fois il n'aborde la procrastination comme notion savante pour dire feignantise.

On utilise tout un tas de stratagèmes pour éviter de faire certaines choses, et je tiens à souligner que réfléchir, cogiter et trainer sur ZC (et sur le net en général) sont des stratagèmes en or justement Wink

Parfois, il faut mettre son cerveau en pause, et intégrer (mais vraiment hein) que réfléchir est aussi une façon de se tenir en retrait, d'avoir tous les possibles face à soi. C'est beau, c'est vertigineux, mais au final on n'avance pas.
Or, avancer, c'est choisir; c'est de décider d'emprunter une voie pour voir ce qui se trouve derrière le premier virage, bien que se faisant, on se ferme aux autres possibles.
Et la seule manière de choisir, c'est agir.

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Message par Princeton Mar 23 Juin 2015 - 23:22

Bleuenn a écrit:Au final, j'y gagne à faire les choses de suite une bonne fois pour toutes...

C'est vrai, mais je ne pense pas que la paresse et la procrastination soient rationnelles, aussi je ne sais pas si des arguments rationnels peuvent vraiment en venir à bout, même si on ne perd rien à tenter le coup...

nanaille a écrit:pas une fois il n'aborde la procrastination comme notion savante pour dire feignantise.

Haha oui c'est pourquoi j'ai parlé de paresse dès le départ : c'est ainsi que je le ressens. On pourrait aussi introduire les termes d'oisiveté et d'acédie, le premier parce que c'est assez proche de l'état que je recherche, qui me plaît, et que je vis plus ou moins en ce moment; le second parce qu'hormis sa connotation morale et religieuse, il renvoie à une négligence, à ne pas s'occuper de certaines choses, à ne pas en prendre soin, in fine à s'en désintéresser, ce qui me caractérise également.

nanaille a écrit:Parfois, il faut mettre son cerveau en pause, et intégrer (mais vraiment hein) que réfléchir est aussi une façon de se tenir en retrait, d'avoir tous les possibles face à soi. C'est beau, c'est vertigineux, mais au final on n'avance pas.
Or, avancer, c'est choisir; c'est de décider d'emprunter une voie pour voir ce qui se trouve derrière le premier virage, bien que se faisant, on se ferme aux autres possibles.
Et la seule manière de choisir, c'est agir.

Marrant que tu parles de virage car je passe le permis de conduire en ce moment, alors je pense beaucoup avec des images de la conduite, la boîte de vitesse, le frein, l'accélérateur, les limites de vitesse, les distances de sécurité, les panneaux, anticiper, la trajectoire, etc. Une des premières choses que mon moniteur m'a dit (entendre : m'a hurlé dessus, comme tout moniteur d'auto-école qui se respecte) est que je ne regardais pas assez loin devant, le plus loin possible sur la route, à l'horizon, pour voir où j'allais. Pour le coup je regardais juste derrière le pare-brise, alors ma trajectoire était bancale, vacillante, peu assurée... Difficile de regarder à la fois où l'on va et où l'on est... L'avenir et le présent... Pour la conduite, j'ai appris : je regarde au loin et ça ne m'empêche pas de voir de près. Reste à l'apprendre pour ma vie.

Le problème du loin dans ma vie c'est que l'horizon est ma mort. Alors forcément, ça ne me donne pas envie de conduire, et si je regarde au loin tout me semble alors futile. Enfin bon, je m'égare, même si je suis dans mon sujet. Je suis paresseux, mais aussi parce que beaucoup de choses de la vie me semble tellement inessentielles, tellement futiles. Le lointain rend le proche vain au lieu de me le rendre précieux. Pourquoi faire autant de choses ? Pourquoi se dépenser ? Pourquoi agir ? Une autre chose que m'a dite mon moniteur est que je me pose trop de questions. Mais que faire, une fois qu'une question est apparue à la conscience, il faut bien chercher à y répondre. Je ne peux plus fermer les yeux. Alors beaucoup de philosophes y ont réfléchi, Pascal disait : tout le malheur de l'homme vient d'une seule chose, qu'il ne sait pas demeurer en repos dans une chambre...

Mettre son cerveau en pause. Si seulement... D'ailleurs j'ai pour projet de m'intéresser à la méditation depuis des mois mais je ne me suis pas lancé, j'ai comme l'impression que je n'y arriverai pas (mais je me dis que j'en ai peur aussi, de la méditation... C'est bizarre, et je ne sais pas pourquoi). Je suis comme un hyperactif de la pensée et un hypoactif de l'action. Sans doute serait-il bon que je rééquilibre les deux. Encore un projet...

nanaille a écrit:Et la seule manière de choisir, c'est agir.

Quelle belle et juste phrase, je suis impressionné, décidément. Elle me rappelle le mot décision, et le verbe décider. Il y a quelque chose de tellement radical dans ces termes, quelque chose qui coupe, comme une paire de ciseaux, qui sépare, qui coupe et fait tomber au sol, abat, tue...

Ce qui me rappelle que pendant ma classe préparatoire, le thème de culture générale et philosophie était l'action. Plusieurs sujets tournaient autour du rapport entre l'action et la parole. N'est-ce pas le problème de la procrastination : on dit, mais on ne fait pas. C'est un problème de la philosophie morale aussi. C'est comme s'il y avait un hiatus, un gouffre entre la pensée ou la parole, et l'action. C'est revenir au problème de la volonté, de ma volonté, de cet écart entre ce que je voudrais faire et ce que je fais effectivement, entre celui que je voudrais être et celui que je suis effectivement, entre ce qu'il y a dans ma tête et ce qui est dans le monde, de ces écarts douloureux qui me désespèrent comme des fatalités.
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Message par JCVD Mar 23 Juin 2015 - 23:32

Faudrait (sur les conseils de Centaure) que je vous fasse un baratin pour vous vendre mon "produit miracle" (mes livres sur la Vérité Vraie) mais j'ai la flemme !
Rien que de voir vos gros pavés, je suis fatigué !
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Message par Princeton Mar 23 Juin 2015 - 23:37

JCVD a écrit:Faudrait (sur les conseils de Centaure) que je vous fasse un baratin pour vous vendre mon "produit miracle" (mes livres sur la Vérité Vraie) mais j'ai la flemme !

Ben il faudrait que tu t'appliques ton produit miracle alors avant d'essayer de nous le vendre... ;-)
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Message par Ereen Jeu 25 Juin 2015 - 10:24

J'ai continué à réfléchir à ce topic ^^ et quelques idées me sont aussi venues (courage à toi  Bleuenn pour tes bonnes résolution !!! )  Wink

C'est marrant parce que quand j'étais étudiante, je ne connaissais pas du tout ces problèmes de paresse. J'étais ultra-méthodique supra-organisée, tout dans les temps et anticipé, pour les études, mais aussi factures, tâches ménagères... je faisais la vaisselle tout de suite après avoir mangé!! Sous-jacent, je m'amusais à expliquer que si je faisais ça, c'était sûrement par flemme  Rolling Eyes , que si je faisais pas les choses immédiatement, que je ne l'aurais probablement jamais fait. On me croyait pas !

Aujourd'hui, ma rigoureuse discipline est partie,... Et, effectivement, sous-jacent, c'était bien la paresse qui me gouvernait. Je pourrais rester longtemps à rêvasser dans l'inactivité, ou dans une activité donnée où je perds la notion du temps, beaucoup d'activités que j'aurais pu faire avec tout ce temps peuvent y passer à la trappe... Ce qui m'énerve le plus c'est que j'ai beaucoup de mal à sortir du monde magnifique du sommeil le matin, et de quitter mon PC pour aller me coucher le soir (nuits blanches). J'ai du mal à gérer le temps pour passer d'une activité dans une autre, pour arriver à l'heure à un RDV...

How to get things done ?

- attendre que ça vienne. Alors ça c'est le mieux, mais ça ne *FONCTIONNE PAS * ^^ ou très mal  Laughing
- l'organisation. Faire des listes, un planning... C'est dans cette méthode que je me suis construite, notamment dans les études. Réfléchir une fois le dimanche soir à son planning pour la semaine, en organisant les tâches nécessaires mais qu'on risque de zapper "Tiens, ce midi là j'ai une heure de libre, je ferai les courses"^^, franchement, c'est grave efficace ! Ca fonctionne très bien pour moi, après, mon soucis est plus pour le sommeil et les retards, et internet aussi... donc les autres méthodes :
- la ruse  Very Happy (se dire qu'il faut être parti à 9h30 pour un RDV qui aurait nécessité que je parte à 9h40, mettre un réveil loin dans la pièce pour m'obliger à me lever pour l'éteindre) mais les ruses ne marchent jamais bien longtemps, je finis par partir à 9h50 xD puis courrir et faire tout à fond pour arriver à l'heure ou 2-3 min en retard, et ça passe, mon corps a compris que ça passe, il sait,... aussi, mon corps à appris à dormir avec la sonnerie de mon réveil allumé l'autre côté de la pièce ><) donc, la ruse, vite compris, vite contourné, ça ne fonctionne pas ^^
- l'injonction. Pareil, j'ai sûrement un pb de rapport à l'autorité! Se forcer, se faire violence, s'arracher du moment... "Faut que je fasse ceci, faut que je m'interdise de faire cela"... ça marche un peu parfois, mais pas franchement à tout les coup !!

Ces derniers temps m'est venue une nouvelle idée. Je crois que, ce qui pourrait fonctionner, serait d'apprendre à apprivoiser le versant émotionnel de la paresse

Lorsque l'on paresse, que ressent-on : noyade dans une mer d'endorphines , est-ce que vous n'avez pas cette sensation un peu nauséeuse, à la fin d'une journée de paresse ? La paresse est une zone de confort, mais je crois à petite dose. Lorsque l'on se met dans la bonne énergie pour effectuer une série de tâche, que ressent-on ? un pic de sérotonine, est-ce que vous n'avez pas cette impression joyeuse et légère qui porte loin, quand vous vous êtes motivés à bouger... ? On est dans une bonne énergie, content ! Du coup je crois que se mettre dans le train de l'activité, serait peut-être une nouvelle zone de confort à découvrir. Aussi, je me demande si tout cela ne serait pas lié à savoir prendre soin de soi. Car, parmi toutes ces tâches que l'on effectue pas, certaines pourraient pourtant nous apporter du bonheur (conduire sa voiture musique à fond Princeton, imagines-tu ce bonheur ?? ^^). J'essaie donc d'observer ces émotions à l'intérieure de moi. Et j'essaie de me pousser à rechercher cette joyeuse sensation ressentie dans l'activité. J'expérimente. En quelques semaines, c'est vraiment drôle de constater déjà les effets. Il faut vraiment écouter ses émotions. Si je m'abstiens d'Internet tard le soir (c'est prouvé que les écrans empêchent le bon déroulement de l'arrivée du sommeil, vu la processus de fabrication de l'hormone du sommeil la mélatonine), si je prends plutôt un livre, je ressens que mon corps est fatigué, et je me couche à une heure normale. Donc le matin, c'est moins difficile. Je suis plus en forme la journée pour mener mon planning, de meilleure humeur. Je prends aussi le temps de me faire à manger. Ca transforme le quotidien ! Je pense que apprivoiser le versant émotionnel de la paresse est forcément un gros travail sur soi, mais, qui peut vraiment apporter !

Parmi les émotions à ressentir, il y a aussi cette question : "Est-ce que je serais contente si ce truc était fait ?".
... "Ok, ça me fait chier de le faire, mais ouais, je serais contente si c'était fait". -> je vous conseil vraiment, c'est grave efficace !!!!!

Ca aide à se lancer, à se mettre dans la bonne énergie Smile Mais c'est aussi important de préparer à l'avance une bonne organisation, afin de redevenir maître de son temps dans une journée. Pour ma part, je suis désespérée qu'il n'y ai que 24h dans une journée !!!, avec 9h de sommeil et 8h au boulot, il ne reste déjà plus beaucoup de temps !

Comment faites-vous pour faire tout ce que vous aimeriez faire ?? Smile


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Message par Ereen Jeu 25 Juin 2015 - 10:39

(haha taper ce pavé m'a vraiment demandé de sortir de la paresse et de m'organiser !!  Guitare  )
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Message par Stauk Jeu 25 Juin 2015 - 11:23

Ereen a écrit:
How to get things done ?
- attendre que ça vienne. Alors ça c'est le mieux, mais ça ne *FONCTIONNE PAS * ^^ ou très mal  Laughing
C'est la voie que j'explore. Comment dit le proverbe ?
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Message par Invité Jeu 25 Juin 2015 - 11:39

C'est bien le souci: faire tout ce qu'on voudrait (moi, je n'y arrive pas, ce qui fait que je délaisse des choses durant longtemps et je m'en veux parce que je n'y avance pas d'où l'intérêt du planning). Sauf qu'il faut aussi faire ce qu'on n'aimerait pas faire (le ménage, les courses)!! Et c'est bien le souci de trouver un juste équilibre.
Là pour le moment, je me dis dans ma tête ou à voix haute les avantages à faire la chose. Du genre, "range ça de suite sinon, il va trainer, tu vas le chercher quand tu en auras besoin et à force de laisser des choses trainer, ce sera le bordel! Sachant que ça va te prendre une minute de le faire de suite!".
Ca marche mais c'est une habitude à prendre.

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Message par Minuit Jeu 25 Juin 2015 - 11:52

Que ce sujet me parle...

Princeton a écrit:Il faudrait que je réfléchisse aussi au rapport entre la volonté et la contrainte. C'est comme si dès que je percevais quelque chose comme obligatoire, comme une contrainte ou une nécessité, je ne voulais pas la faire, comme si la faire entravait, voire niait ma liberté... Je ne me bats pas forcément contre la chose en elle-même, mais contre le fait d'être obligé ou plutôt de me sentir obligé, de me sentir contraint. Comme si je ne voulais faire que des choses contingentes. Comme si je refusais la nécessité, la contrainte, l’obligation.

Pour laisser s’exprimer une autre nécessité. Parce qu’il n’y a qu’elle qui m’amène, disons, à l’action « sans karma », en qu'en bon perfectionnistes qui se veulent par-dessus tout des héros moraux, on ne peut s'empêcher de rêver à cette action "adéquate", égale à elle-même, la "rose sans pourquoi". Alors on attend que ça vienne, et en attendant, on ne se mouille pas. Seule l'urgence a force de loi. En temps de guerre, j'pense qu'on a pas de problème d'anxiété ou de procrastination.

On vit dans un monde saturé de "projets". Pour moi justement ce qui fait la force et la difficulté des "gens comme ça" c’est peut-être paradoxalement une plus grande confiance dans l’harmonie universelle, et peut-être que le monde a besoin de ça. ^^

Je ne dis pas que je compte sur l’harmonie universelle pour faire ma vaisselle, mais c’est presque ça : pour faire toute chose, j’ai tendance à attendre le kairos, le moment opportun, l’alignement de planètes. Enfin, non, je ne l’attends pas, j’essaie de le sentir, de m’y disposer. Résultat : hors alignement de planètes, je suis constamment anxieuse et insatisfaite. Mais je pense que c’est la rançon de l’authenticité.

Ce n’est pas vraiment que je déteste les tâches concrètes en soi. Au contraire, une fois que j’ai ENFIN réussi à m’y mettre, j’y grappille enfin ma maigre joie du travail accompli, et je profite du fait que pour une fois ce travail a des effets tangibles : je frotte cette tâche, elle part ! Wahou, j’ai fait quelque chose de ma journée dans le monde réel ! Et surtout, une fois absorbée dans une tâche que je sais de toute façon utile, inévitable, ça suspend un peu mon éternel Pourquoi qui tournicote en boucle en permanence, et ça laisse de la place à des rêveries réflexives très oxygénantes.

Je suis toujours fascinée quand je regarde un film du Studio Ghibli par exemple, où les personnages ont toujours l’air tellement paisibles quand ils sont à l’ouvrage. On dirait qu'ils font les choses - plier leur draps, faire leurs sushis, etc. - en obéissant à un rythme à la fois intérieur et universel. Il y a une vraie beauté des tâches simples, et elle n'est pas que gentiment bucolique et pittoresque. Quand par un heureux hasard de mon humeur je parviens à m'aligner sur ce que je fais, ça a beau être la plus petite chose au monde, j'y trouve une satisfaction complète. A tel point que dans ces moments-là je me dis que je pourrais vraiment être... femme de ménage, ou coiffeuse, qu'en fait on s'en fout, que c'est de faire les choses avec amour qui compte par-dessus tout "devant l'éternel".

J'adore cette citation d'Interstellar que je me suis marquée sur un post-it au dessus de mon bureau :
- Cooper, what are you doing ?!
- Docking.
- It's not possible !
- No. It's necessary.
(BADASSSS)
Docking scene:

Le docking mode  pirat , c’est la vie. C'est ce moment où tu n'as plus le choix, tu ne peux plus reculer, tu DOIS faire ce que tu fais, et tu es tout entier plongé dans l'action. Cette scène est magique, pour moi elle représente vraiment ce qui se passe dans ma tête quand se déclenche "l'action nécessaire", l'acte artistique, "genuine" comme disent les english. Et ça marque un moment où les personnages en ont tellement chié qu'ils sont désintéressés de leur propre sort. A ce moment là, tu n'es plus un petit humain qui trépigne avec ses petits projets, tu es une force de la nature, un instrument du divin !  What a Face
Voilà comment je veux faire ma vaisselle !

En fait tu n’es pas motivé par la contrainte, mais par la nécessité désencombrée de sa gaine trop humaine.

Princeton a écrit:Je mets en lien ton propos aussi avec l'effort : quand on voit la montagne, l'effort à accomplir semble immense, et puis demander beaucoup de temps et d'énergie et de concentration, etc, alors qu'en divisant en toutes petites étapes, eh bien il s'agit alors d'accomplir de tous petits efforts presque ridicules (ex: mettre un pied devant l'autre), ça devient tout de suite moins impressionnant. L'image de la montagne est pas mal, parce que j'adore faire de la rando. ;-)

Je pense qu'il y a aussi un lien avec le tempo, le rythme, c'est ce à quoi je réfléchissais hier... Avec le fait d'accélérer, de ralentir... Je me rendais compte que je n'avais peut-être pas le même tempo que les gens en général, comme si j'étais à haute fréquence, et avec beaucoup plus de variations…

Je me dis que mon incapacité chronique à me concentrer a aussi beaucoup à voir avec le « rythme » commun. Comme tu le disais Princeton, je pense qu’on est pas à la même fréquence, on est pas dans le même espace-temps (désolée pour les rapprochements barbares, je me fonde sur la valeur potentiellement métaphorique de ces notions)
J’ai remarqué par exemple une très nette différence dans ma capacité à aligner des tâches selon que je suis ou non à Paris. Ca peut sembler étrange, mais j’ai l’impression que c’est réellement déterminant. Comme tu le disais de l’anticipation des tâches, ce qui nous dessert, c’est l’intuition : quand j’ai une tâche à faire, je souffre d’avance parce que je me représente déjà trop bien tous les obstacles. Aussi l’anticipation de la douleur me rend-elle réticente à sauter l’obstacle, et cette réticence elle-même créant un sentiment négatif de culpabilité et d’impuissance, j’en viens à souffrir carrément d’anticiper le sentiment négatif dû à l’anticipation !

Bref, et pour en revenir à ce que je disais sur « l’espace-temps » : l’intuition est également très énergivore, je trouve, quant à l’environnement. Quand je suis dans une petite ville (chez mes parents par exemple), c’est comme si je « ressentais » que la ville est petite, que le rythme y est plus calme, les gens plus posés. Et ça me pose. Je fais mieux les choses, j’ai l’impression d’avoir plus de temps. Quand je suis à Paris, même du fond de ma petite chambre, je me représente l’extérieur comme un énorme mastodonte grouillant et fumant, plein de codes et d’impératifs, et ça me fout en l’air mon propre rythme. Je ne peux pas empêcher cette fréquence globale de frénésie et d’anxiété générales d’interférer avec ma sphère temporelle. De même je pense que dans une grande ville comme Paris, outre le climat émotionnel ambiant qui n’est pas très réjouissant (enfin c’est subjectif), il y a une foule de petits facteurs dont on se dit qu’ils ne doivent pas être importants, mais qui ajoutés les uns aux autres finissent forcément par devenir proprement épuisants, et nous conduire à la paresse comme « réaction nerveuse défensive ». Je pense à la lumière la nuit, à la pollution, au bruit, à la foule ininterrompue en bas dans la rue, aux innombrables activités possibles et qui sont autant de tentations tellement nombreuses qu’elles en sont paralysantes.
Alors je crois que c’est aussi pour faire un fuck à tout ça, même inconsciemment, que je procrastine et que je ne fais que ce qui me chante. Que malgré moi je décide de ne plus décider, de me laisser porter par le courant. Ce qui est un peu casse-gueule, mais comme vous dites, il y a un irrésistible côté "piment de la vie", "pic de sérotonine".

Je suis d'accord avec toi Ereen, je suis passée par les mêmes phases : organisation absolue et totalitaire suivie de périodes à "attendre que l'inspiration divine vienne", et finalement ça se "soigne" peu à peu par l'écoute attentive de ce que j'ai envie de faire, en fait ça peut paraitre idiot, mais je suis sérieuse : ça se soigne par le "bon sens". Il faut arriver à trouver le bon dosage entre le désir personnel et impersonnel, l'envie et le "raisonnable". Il n'y a pas vraiment de règle à ça, c'est une secousse de la conscience. Genre comme tu dis, quitter Internet avant qu'il ne soit 2h du matin et essayer de ne pas terminer là-dessus parce que la lumière artificielle dérègle l'horloge interne, c'est du bon sens. Si j'en fais une règle, je vais soigneusement l'éviter (même si elle est dans mon intérêt), par contre si j'en ressens vraiment la nécessité profonde, je vais finir par mettre ça en place.
Mais bon. Chez moi l'équilibre est de toute façon plus le fait d'une moyenne entre des cimes et des gouffres qu'une jolie ligne droite et bien tenue. Trop plat, trop angoissant. clown Je n'aiguise mon instinct que dans la souffrance...


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Message par Stauk Jeu 25 Juin 2015 - 11:52

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Message par Ereen Jeu 25 Juin 2015 - 13:42

Minuit a écrit: Je suis toujours fascinée quand je regarde un film du Studio Ghibli par exemple, où les personnages ont toujours l’air tellement paisibles quand ils sont à l’ouvrage. On dirait qu'ils font les choses - plier leur draps, faire leurs sushis, etc. - en obéissant à un rythme à la fois intérieur et universel. Il y a une vraie beauté des tâches simples

J'aime beaucoup ce que tu dis là, ce serait la voie à atteindre sunny
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Message par Ilithyie Jeu 25 Juin 2015 - 13:56

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Message par Princeton Ven 26 Juin 2015 - 18:12

Merci pour vos interventions !

Je me suis retenu de répondre hier parce que je devais préparer un entretien. Je me suis fait violence, mais vous constaterez que j'ai réussi, je ne poste qu'aujourd'hui. Il y a donc eu un progrès ! Si si ! Very Happy

Ereen a écrit:Je pourrais rester longtemps à rêvasser dans l'inactivité, ou dans une activité donnée où je perds la notion du temps, beaucoup d'activités que j'aurais pu faire avec tout ce temps peuvent y passer à la trappe... Ce qui m'énerve le plus c'est que j'ai beaucoup de mal à sortir du monde magnifique du sommeil le matin, et de quitter mon PC pour aller me coucher le soir (nuits blanches). J'ai du mal à gérer le temps pour passer d'une activité dans une autre, pour arriver à l'heure à un RDV...

Oui moi aussi, je crois qu'on l'a déjà un peu abordé sur le fil, et je me suis demandé si dans mon cas ça n'avait pas quelque chose à voir avec un comportement obsessionnel, car souvent il m'arrive de relire certaines choses vingt fois de suite, de cliquer sur la même chose vingt fois de suite, de faire les mêmes circuits sur l'ordinateur, sans but, mais c'est comme si ça m'enlevait du stress, de l'anxiété. Mais de quoi ? En tout cas je remarque que ces moments de léthargie et d'inactivité déclenchent à la fois une sorte de plaisir, comme si je "décrochais", que je rentrais dans un mode automatique, et de déplaisir, car je suis conscient que cette activité est complètement stérile. Dans ces moments je ne fais plus aucun effort, c'est sans doute ce que je recherche.

Concernant les techniques, "attendre que ça vienne" ne fonctionne pas chez moi. Si je suis cette logique, en général ça ne vient pas, je ne fais rien, jusqu'à ce que je sois mis au pied du mur et là je suis obligé de tout faire d'un coup si la deadline est impérative (par exemple préparer un entretien) et si je peux y échapper je ne le fais pas (ce qui parfois me met dans des difficultés encore plus grandes). Ce qui me renvoie un la bande dessinée de Calvin et Hobbes en première page. Donc cette technique chez moi ne fonctionne pas, parce que les choses que j'évite sont les choses désagréables, donc il n'y aura jamais un moment où je vais avoir envie de les réaliser...

A propos de l'action, tout de même, et de se lancer, je pense à ces deux citations (trouvées en anglais) attribuées à Léonard de Vinci (...), et que j'aime bien même si j'ai comment dire encore quelques difficultés à les mettre en pratique :


  • "I have been impressed with the urgency of doing. Knowing is not enough, we must apply. Being willing is not enough, we must do."

  • "It had long since come to my attention that people of accomplishment rarely sat back and let things happen to them. They went out and happened to things."


La seconde citation me parle beaucoup, car j'ai parfois pour ne pas dire souvent une attitude assez passive, j'attends que les choses arrivent, m'arrivent, auquel cas je vais seulement réagir, en bon paresseux en somme, mais j'aimerais tellement arriver aux choses, je trouve cette expression géniale.

Oui, j'utilise aussi la ruse, c'est pas mal, par exemple au lieu de partir normalement à l'heure T, je me convainc qu'il faut que je parte de chez moi à l'heure T-15 minutes, et de cette manière je pars à l'heure... T. Very Happy Mais le téléphone qui sonne loin de moi et que je ne peux pas atteindre me rend fou, j'ai pu le faire quelque fois mais globalement je ne le supporte pas, j'ai l'impression de devenir l'esclave d'une machine, de mon téléphone portable, donc en général mon téléphone portable avec alarme est à portée de main. Après, en général je ne me rendors pas de toute façon. Il m'arrive plutôt de trainer un peu au lit, mais c'est surtout quand je suis déprimé. Tiens cette histoire du réveil me rappelle cette petite blague : "Just had a fight with my alarm clock. It wanted me to wake up, I disagreed. Things got violent, now its broken and I’m awake. Not sure who won the fight."

Pour l'organisation et l'autorité, il y a quelque chose me concernant qui fait que ces deux aspects sont liés, car je vis l'organisation et la planification comme une sorte d'auto-contrainte et partant d'un ordre que je m'impose à moi-même, une autorité. Or je n'aime pas être contraint et j'aime encore moins me contraindre. C'est comme assez étranger à mon fonctionnement de manière générale. Je mets ces aspects en lien avec la discussion à propos des HQI complexes vs les HQI laminaires (il y a des fils à ce sujet sur le forum) : les profils complexes dont je suis une caricature auraient apparemment un déficit "cérébral" en matière de planification et de contrôle. Et je dois dire que j'ai des difficultés tant avec la planification, l'organisation, qu'avec le contrôle, et aussi dans une certaine mesure, avec l'attention. Je ne pense pas être TDA, mais si la tâche ne m'intéresse pas je n'y prête pas attention ou bien difficilement, ce qui au demeurant me semble assez logique. Ces caractéristiques du profil complexe seraient à relier avec une autre : la pensée analogique, vs la pensée chronologique. J'ai une pensée analogique (faire des liens, rapprocher, comparer, distinguer...) mais quasiment pas chronologique (je ne mets pas les choses dans le temps, il n'y a pas d'avant, pas d'après, enfin c'est difficile à expliquer). C'est peut-être pourquoi j'ai autant de mal, en définitive, à m'organiser, à planifier, etc. qui requiert un certain rapport au temps, une pensée du temps.

Ereen a écrit:Ces derniers temps m'est venue une nouvelle idée. Je crois que, ce qui pourrait fonctionner, serait d'apprendre à apprivoiser le versant émotionnel de la paresse

Ah oui, les émotions... Alors oui je suis d'accord avec toi, il y a un aspect agréable à la zone de confort (en même temps que désagréable, cf supra). Mais je ne ressens pas beaucoup le côté agréable de l'action. N'est-ce pas la raison pour laquelle je suis paresseux ? Ou alors c'est parce que j'associe l'action avec l'effort : réfractaire à l'un, je suis réfractaire à l'autre... Oui m'imaginer dans ma voiture me fait plaisir, mais peut-être que je me contente assez bien de l'imagination en fait. Je peux avoir des émotions positives rien qu'en m'imaginant des choses (et je ne m'en prive pas !), limite plus que si je les réalisais dans le réel (ce sera moins beau, et puis après des efforts, etc.). C'est le problème de vivre dans ma tête. Une joyeuse sensation ressentie dans l'activité : comme j'aimerais la découvrir ! (J'ajoute que le rapport à l'action et donc à la paresse est pour moi lié à la question du sens, que je n'ai pas encore résolue. J'ai des difficultés sinon une impossibilité à me lancer dans quoi que ce soit qui ne revête pas un sens pour moi.)

Ereen a écrit:Parmi les émotions à ressentir, il y a aussi cette question : "Est-ce que je serais contente si ce truc était fait ?".

Là encore le bat blesse pour moi parce que ce mécanisme est un peu cassé chez moi, c'est comme si la carotte ne fonctionnait pas, une fois qu'une chose est réalisée je n'en tire pas vraiment de plaisir, et encore moins de fierté. Alors je n'anticipe pas non plus de plaisir à imaginer la chose réalisée. C'est assez marqué chez moi, par exemple j'ai pu très bien réussir un examen très important et j'ai ressenti du soulagement dans un premier temps, et dans un second temps, de la honte, oui ! Alors que les autres étaient fiers de moi, et se "vantaient" pour moi, moi je voulais qu'ils arrêtent d'en parler ! Je n'arrive pas à être fier de moi, de ce que j'accomplis. En revanche je sais très bien me démolir dès que je loupe quelque chose, ou même quand j'ai un simple contretemps. Alors globalement, je ne ressens pas de plaisir à accomplir quelque chose, c'est comme neutre, et sinon bizarrement c'est sans plaisir (autre que le soulagement de ne pas avoir raté).

Enfin, je pense qu'il y a vraiment un point important à propos des émotions, j'y pensais ce matin : c'est que je fonctionne sur le principe du plaisir / déplaisir immédiat, mais je me rends compte que le critère de vivre ou du fonctionnement de vivre n'est peut-être pas censé être ce principe. Peut-être qu'il faut accepter le plaisir quand il se présente, et le déplaisir quand il se présente, sans rechercher l'un ou l'autre. C'est un peu introduire la notion du devoir plutôt que du sentiment. Parce que j'évite à tout prix ce qui m'est désagréable... Mais je réalise que si je veux vivre, je vais bien être obligé de l'accepter, de l'inclure dans ma vie... Quelque part, c'est faire une croix sur l'Eden, accepter de vivre sur la Terre, avec son lot de choses désagréables... C'est tomber de haut.
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Message par Princeton Ven 26 Juin 2015 - 19:03

Minuit a écrit:Que ce sujet me parle...

J'ai l'impression d'écrire un roman avec mes longs messages, ce qui peut sembler à première vue paradoxal vu le sujet qu'ils abordent, mais est en fait assez cohérent : la pensée est agitée, active, énergivore, elle consomme l'énergie qui pourrait être dévolue à l'action. Comment agir ensuite, les batteries sont à plat. Et comme je ne sais pas m'arrêter de penser...

Merci pour ton message très riche et intéressant Minuit. Ah oui le fameux kairos des Grecs ! Il faudra me donner la recette parce que je ne trouve pas le moment propice pour bien des choses... Je l'attends et il ne se révèle pas à ma conscience, alors je reste dans une inaction attentiste. Bon je suis un peu extrême, parce qu'il y a bien quelques fois où j'ai eu envie de faire quelque chose et où je l'ai fait, mais c'est tellement rare. Tes propos, notamment la rose sans pourquoi, me rappellent l'idée de la spontanéité, de la grâce... Mais ensuite tu parles de nécessité, et du film Interstellar qui me plaît énormément. Ta citation me rappelle le titre d'un livre écrit sur la NASA : "Failure is not an option." Alors j'aimerais vivre dans un monde de contingence, de liberté, de possibilités, de grâce, de spontanéité, dans un monde où la vie n'est pas une obligation mais une succession de moments dérivés de notre liberté et de nos désirs comme des pas de danse qu'on improvise au gré de la musique qu'on entend. Tiens, une citation de Nietzsche m'apparaît, en anglais encore : "And those who were seen dancing were thought to be insane by those who couldn't hear the music." J'aimerais tellement me sentir libre, libre de faire, libre de ne pas faire. Et pourtant je suis libre, si je ne veux pas faire, eh bien je peux fort bien ne pas faire, c'est simplement que je n'aurais plus de vaisselle propre. Je voudrais chanter tout l'été, comme la cigale, et puis danser... Mais comment me nourrir pendant l'hiver ? Faut-il devenir une fourmi ? Je ne veux pas être une fourmi.

J'aime que tu parles de mettre en veilleuse le pourquoi par l'action, cela m'a évoqué l'image d'un paysan qui laboure la terre sous un soleil de plomb et qui se désaltère, puis s'essuie son visage ruisselant de sueur avec la manche de sa chemise sale, et qui voit germer, pousser, grandir les céréales dans ses champs, puis les récolte puis met sa terre en jachère, acceptant le cycle, les saisons, d'être humain, attaché à la terre, sans se demander pourquoi... Mon image s'arrête là car je pense que tout le monde a compris que je n'y connais rien en agriculture. :-D Alors que ma stratégie a été jusqu'ici de trouver le pourquoi de mes actions, tu me proposes d'agir sans pourquoi et d'agir, finalement, par la nécessité impérieuse d'une cosmogonie des éléments auquel je participe, et pourquoi pas, aussi, pour la beauté du geste ?

Est-ce qu'il n'y a pas une forme de renoncement, de... je cherche le mot... d'incarnation ? D'humilité ? De la créature humaine qui n'est pas un pur esprit, et qui s'incarne dans le monde ? Condamné à interagir avec son environnement, à le modifier et à être modifié par lui ? Est-ce qu'agir, même comme Sisyphe qui porte son rocher, même avec tout ce que l'action peut avoir d'absurde et de dérisoire, ne serait pas une manière d'accepter sa nature humaine ou plutôt, la condition humaine ?

Enfin, comme j'ai des difficultés avec les projets ! Parce qu'ils demandent une notion du temps, encore une fois. Un début, un milieu, une fin. Tout ce qui commence se termine, mais souvent quand je commence quelque chose, soit j'imagine déjà la fin et je m'en désintéresse sans la terminer dans le réel (mes milliers de projets commencés et inachevés), soit je suis tellement frustré de ne pas déjà être à la fin que mon action devient une vraie tourmente. J'ai des difficultés avec le temps... C'est comme si je voulais être déjà à la fin quand je suis au début et comme si je voyais la fin avant le début.
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Message par Princeton Ven 26 Juin 2015 - 19:29

Ilithyie a écrit:Bonjour Smile

Bonjour Ilithyie (beaucoup de i dont un grec !), merci pour ton commentaire. Je suis un peu comme la personne que tu décris, à une période je préférais même ne pas manger plutôt que de manger et d'avoir à sortir de mon activité, à faire l'effort de mâcher, déglutir, faire la vaisselle, etc. Cela me rappelle que mon problème de paresse est très large, à tel point que ce n'est peut-être même pas de la paresse : si je fais quelque chose d'intéressant, c'est comme si je m'y consacrais à 100%, alors non seulement je ne vois plus le temps passer, mais je refuse aussi de prendre une pause pour me nourrir, pour faire ce que je dois faire, etc. Tout le reste passe à la trappe. Plus rien n'existe que ce que je suis en train de faire. Un peu comme un accroc aux jeux-vidéo je pense, en quelque sorte, peut-être. Cet état n'arrive plus très souvent ces derniers temps, cela dit. Mais si j'ai un bon bouquin par exemple, le simple fait de me dire qu'il faut que je me nourrisse devient source d'une frustration immense (la fatigue d'être un humain qui doit se nourrir...). Ah oui, je ne sais pas faire deux choses à la fois, contrairement à d'autres... Sans doute est-ce lié au reste.

Ilithyie a écrit:et je l'ai couplé avec le système de liste et de découpage des taches, le tout mis en forme avec numéro de priorité/d'importance via un logiciel de mind-mapping (il me semble avoir vu un sujet là dessus quelque part sur ZC). Je m'y retrouve beaucoup mieux dans une liste en arborescence qui part dans tous les sens, un peu comme mes intérieurs, en somme :-D

Haha sympa, je serais curieux de voir à quoi ça ressemble ? Je n'aime ni les listes ni les tâches ni leurs découpages ni les priorités ni leurs numéros. En fait dans ma tête je suis persuadé que les choses sont très bien organisées, notamment sur le plan de la pensée, mais je ne fonctionne pas avec des listes ni avec des tâches... C'est plutôt comme un immense brouillon mais en fait beaucoup plus juste que si j'essaie de l'organiser. J'ai comme l'impression qu'une liste est excessivement linéaire. J'irai voir le mind-mapping, j'ai l'impression que ça pourrait me plaire ! Mais mettre ce qu'il y a dans ma tête à l'extérieur donnerait plutôt des oeuvres d'art (écriture, peinture, dessin) que des listes je pense. :-D Si je devais écrire une liste de courses pour le primeur, je pense que ça deviendrait rapidement des dessins de fruits et de légumes et des réflexions sur les fruits et légumes et des poèmes etc. :-D
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Message par Stauk Ven 26 Juin 2015 - 19:35

Princeton a écrit: J'irai voir le mind-mapping, j'ai l'impression que ça pourrait me plaire ! Mais mettre ce qu'il y a dans ma tête à l'extérieur donnerait plutôt des oeuvres d'art (écriture, peinture, dessin) que des listes je pense. :-D Si je devais écrire une liste de courses pour le primeur, je pense que ça deviendrait rapidement des dessins de fruits et de légumes et des réflexions sur les fruits et légumes et des poèmes etc. :-D

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Message par Princeton Ven 26 Juin 2015 - 19:51

Merci Stauk ! Ah ben ça ressemble à une oeuvre d'art. :-D

Ma pensée n'est pas vraiment comme ça parce que dans le dessin les ramifications vont dans un sens, les branches se divisent, alors que dans ma pensée il n'y a pas de sens particulier et surtout tout est mouvant, dynamique, se réorganise selon les besoins. Il n'y a pas de point principal de départ non plus, d'où découlerait tout le reste selon des embranchements successifs. Le sujet de la pensée arborescente est intéressant : je dirais que ma pensée est plutôt systémique, associative et dynamique. Elle peut prendre la forme d'un arbre, mais aussi toutes les autres formes selon les besoins, une boule par exemple, où quelques points s'allument pour produire une autre forme appropriée.
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Message par Ereen Sam 27 Juin 2015 - 1:27

Princeton a écrit: je me suis demandé si dans mon cas ça n'avait pas quelque chose à voir avec un comportement obsessionnel, car souvent il m'arrive de relire certaines choses vingt fois de suite, de cliquer sur la même chose vingt fois de suite, de faire les mêmes circuits sur l'ordinateur, sans but, mais c'est comme si ça m'enlevait du stress, de l'anxiété. Mais de quoi ? En tout cas je remarque que ces moments de léthargie et d'inactivité déclenchent à la fois une sorte de plaisir, comme si je "décrochais", que je rentrais dans un mode automatique, et de déplaisir, car je suis conscient que cette activité est complètement stérile.

Tu n'as pas peur de dire les choses  Embarassed !!!! j'ai aussi ce côté obsessionnel ... ça peut paraitre stérile, mais est-ce si stérile que ça, puisqu'on le fait ? Souvent, je lis plusieurs fois de suite, ou j'écoute une musique en boucle, ou je fais un plat plusieurs jours de suite. Je me demande si le but serait pas de chercher à rentrer en profondeur dans l'émotion que procure le texte, la musique, le goût. La répétition permet d'explorer l'objet à fond. J'ai l'impression que c'est important, et que sinon je n'ai pas vécu l'objet jusqu'au bout !! Focalisation ? Par contre, une fois sortie de la boucle, je peux ne plus réécouter la musique ou refaire le plat du tout. Il y a même violent rejet. C'est un processus intense, intimement lié au présent...


It had long since come to my attention that people of accomplishment rarely sat back and let things happen to them. They went out and happened to things.  Very Happy  J'aime ! "mais j'aimerais tellement arriver aux choses, je trouve cette expression géniale"   Trop !!
Après, en général je ne me rendors pas de toute façon. T'as trop de chance !!! Moi je me rendors direct... ^^
Or je n'aime pas être contraint et j'aime encore moins me contraindre. C'est pourtant nécessaire, de savoir se faire discipline Smile Organiser de l'ordre dans le chaos, c'est le principe de la vie... avec la cellule qui organise ses molécules, pour devenir différente du chaos extérieur. J'ai vu que tu parlais de la cigale et de la fourmi dans un post plus loin. N'est-ce pas paradoxal, la cigale, qui aime tant la vie et danser, ne prend pas de précaution pour survivre à l'hiver... mais comment pourrait-elle continuer à danser encore et encore tous les ans ?!
J'ai une pensée analogique (faire des liens, rapprocher, comparer, distinguer...) mais quasiment pas chronologique (je ne mets pas les choses dans le temps, il n'y a pas d'avant, pas d'après, enfin c'est difficile à expliquer). Je suis peut-être un peu comme ça je réalise. C'est pour ça que je délègue à mon planning papier de se souvenir pour moi des tâches importantes (sérieux, essaie ! ^^)
Mais je ne ressens pas beaucoup le côté agréable de l'action. Par exemple, tu ne fais pas de sport ?
C'est le problème de vivre dans ma tête. Oui c'est un problème que j'ai aussi... 25 projets à la fois, n'en concrétiser aucun !!
Une joyeuse sensation ressentie dans l'activité : comme j'aimerais la découvrir ! Tu peux la découvrir !! Il faut y trouver le sens (J'ajoute que le rapport à l'action et donc à la paresse est pour moi lié à la question du sens, que je n'ai pas encore résolue. J'ai des difficultés sinon une impossibilité à me lancer dans quoi que ce soit qui ne revête pas un sens pour moi.) Le sens. Prendre soin de soi ? Se donner les moyens de prendre soin de soi ? Pour être une cigale qui danse l'été suivant...  Wink  
C'est comme si la carotte ne fonctionnait pas. En fait, là est le soucis, peut-être il ne faut plus raisonner en carottes... Quelles sont les choses qui te font plaisir lorsqu'elles sont effectuée, c'est à dire, avec un résultat qui apporte quelque chose de concret, qui te procure du bonheur ?. Par exemple, est-ce que tu apprécies manger un bon plat ? En parallèle, est-ce que tu te fait souvent à manger ? L'écart entre les deux, ce serait ne pas prendre soin de soi !! Je prends l'exemple de se faire à manger ça aurait pu être autre chose plus en rapport avec tes préférences.
Je n'arrive pas à être fier de moi, de ce que j'accomplis. En revanche je sais très bien me démolir dès que je loupe quelque chose, ou même quand j'ai un simple contretemps. Ca me faisait un peu pareil pour mes examens... Peut-être tu ne connais pas encore ce que tu aimerais vraiment accomplir ? Si ça ne te fait rien de réussir, c'est que la chose n'était pas si importante pour toi ? Sinon, on déborde de joie je dirais  Smile (moi je fais une danse de la victoire Razz)
Enfin, je pense qu'il y a vraiment un point important à propos des émotions, j'y pensais ce matin : c'est que je fonctionne sur le principe du plaisir / déplaisir immédiat, mais je me rends compte que le critère de vivre ou du fonctionnement de vivre n'est peut-être pas censé être ce principe. Peut-être qu'il faut accepter le plaisir quand il se présente, et le déplaisir quand il se présente, sans rechercher l'un ou l'autre. C'est un peu introduire la notion du devoir plutôt que du sentiment. Parce que j'évite à tout prix ce qui m'est désagréable...  En fait, je ne pense pas qu'il faille utiliser le mot devoir. Devoir envers qui ? Simplement ressentir que pour obtenir certains plaisirs, il faut d'abord payer avec un peu de déplaisir. Payer un coût énergétique, pour accéder à un niveau d'énergie supérieur. Ramasser un peu de bois (fourmi), pour chanter tous les étés Smile
Mais je réalise que si je veux vivre, je vais bien être obligé de l'accepter, de l'inclure dans ma vie... Quelque part, c'est faire une croix sur l'Eden, accepter de vivre sur la Terre, avec son lot de choses désagréables... C'est tomber de haut. La vie va te rattraper ! Le bonheur consiste aussi à accepter les souffrances... accepter la Terre, le réel. Croire en l'Eden doit être une souffrance quand j'y pense...
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Message par Slafka Sam 27 Juin 2015 - 9:48

J'ai souvent la même sensation par rapport au plaisir immédiat, c'est-à-dire faire des choses connes, pas constructives, insensées parce qu'il y a une satisfaction immédiate ou une satisfaction que j'avais déjà connue avant, comme écouter une vieille chanson de pop pourrie en boucle pendant des heures, parce que je l'écoutais quand j'étais ado. Il y a beaucoup de liens avec l'enfance, d'ailleurs, dans ces raisonnements du cerveau, comme s'il voulait redevenir un gosse réclamant sa glace à la vanille pour la manger tout de suite. C'est des comportements, qui sont proches de la nature, je pense, car en observant des chats, on voit qu'ils ne construisent pas de stratégie compliquée orientée vers le futur auprès de leur maître pour obtenir leur bol de pâté, ils miaulent en manifestant leur "déplaisir" du moment présent, ils ont le pâté soit immédiatement, soit ils re-miaulent.

Pour ce qui est des efforts et de la discipline, ça, je dirais que le cerveau comprend tout à fait ce qu'il faut faire, il peut même énumérer toutes les étapes pour arriver à un but quelconque, en très détaillé, avec des précisions, en comprenant les enjeux de chaque pas, de chaque geste qu'on doit faire pour aller vers le but, à tel point que... le plaisir finit par s'évaporer, comme si l'intellectualisation et l'analyse du processus faisaient que le but était déjà atteint en quelque sorte, puisque compris, et que sa réalisation perdait tout d'un coup tout son intérêt. Le cerveau s’ennuie, puisque il n'y a plus rien à "digérer", il ne reste que l’exécution simple de ce qu'on a prévu de faire. L'ennui s'installe, on abandonne le projet, pour aller vers autre chose, en papillonnant d'idée en idée.

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Message par tagore Sam 27 Juin 2015 - 22:20

bonjour à tous,

C'est un sujet passionnant je trouve, que je comprends plus à travers mon passé que mon présent certes, mais voilà - si ces quelques réflexions peuvent aider...

Princeton, je pense que tu dis déjà beaucoup de choses importantes dès ton premier message. Je ne crois pas du tout au fait que l'on puisse séparer ce trait de la "paresse" de tout le reste de notre existence et de notre vécu, comme on le ferait d'un trait de caractère particulier.

À mon sens le cœur de ce que tu décris, ce n'est pas du tout une question sectorielle qui pourrait se résoudre au moyen de quelques techniques mais, bien au contraire (et c'est peut-être plus lourd à entendre), le "symptôme" de quelque chose qui reste inaccompli sur un plan beaucoup plus global. Sur le plan de l'existence même. C'est le signe de besoins inassouvis sur ce plan-là, un profond besoin de sens, par rapport auquel toutes ces petites activités pourraient justement s'intégrer. Je pense que c'est un vrai travail personnel à faire, de s'interroger sur ce que ces formes d'apathie révèlent en négatif quant aux divers manques ressentis, c'est-à-dire quant aux désirs positifs de sens que l'on a bel et bien mais qui ne sont pas comblés.

C'est vrai au niveau professionnel, c'est vrai au niveau relationnel bien sûr également... Une rencontre, par exemple, peut changer tellement de choses !... Du moins je crois que cela peut aider à initier un processus créatif personnel qui n'aura plus de fin, ensuite, quelles que soient les vicissitudes rencontrées au fil du parcours.

Je pense qu'on a besoin, globalement, de la reconnaissance des autres - on a besoin, pour se construire et être capable d'aimer soi-même, c'est-à-dire aussi d'insuffler une certaine vie aux choses, un mouvement propre (ce qui est une autre forme d'amour), d'avoir reçu et pu vivre cet amour en profondeur, d'abord. Tout devient plus simple ensuite.

Il y a deux auteurs que j'aime beaucoup qui se rejoignent de manière très belle, sur ce sujet. Christian Bobin écrit par exemple : "Être vivant, c'est être vu, entrer dans la lumière d'un regard aimant." Et Thich Nhat Hanh ne dit pas autre chose, de l'autre point de vue en quelque sorte : "Aimer, c'est reconnaître l'autre comme existant. Et vous verrez, quand vous faites cela, l'autre va pouvoir fleurir." (traduction libre !)

Peut-être qu'il y a deux grandes manières de comprendre la volonté. La première, très cognitive, ce serait cette faculté autonome, ce libre-arbitre absolu par rapport auquel notre "paresse" serait un défaut moral, une faiblesse.

L'autre manière de comprendre, je pense que c'est l'envisager comme désir, comme la force de vie qui nous anime. (Spinoza dirait le "conatus") C'est-à-dire un processus de croissance profondément personnel et émotionnel, qu'il faut apprendre à reconnaître et à nourrir. C'est tout ce qui fait la singularité de ce que nous sommes, tout ce qui nous motive intrinsèquement, tous nos désirs les plus enfouis ou qui paraissent, parfois, les plus inaccessibles. - Libérer toute cette partie enfouie, vitale de soi-même... alors les choses prennent sens naturellement, au travers d'expériences, de rencontres, de choix de vie fondamentalement fructueux et structurants pour nous.

À ce niveau-là ce n'est plus l'intelligence qui tente de résoudre la question du sens d'une manière autonome, comme si elle pouvait s'abstraire de la vie même. On en vient plutôt à se demander : qu'est-ce que je peux initier concrètement pour me nourrir moi-même et me rapprocher, peu à peu, de celui ou celle que j'aimerais être, dans mes choix de vie, dans mes relations, toutes ces choses qui ensemble pourront m'aider à trouver une nouvelle dynamique - fondamentalement nourrissante, et qui s'entretiendra d'elle-même alors, sans avoir a être étayée sans cesse à coups de "volonté" ? Ici la réflexion sert bien sûr, mais plus comme un guide pour nous porter vers les choses qui nous nourrissent vraiment - sans être elle-même la nourriture et sans pouvoir s'y substituer...


Dernière édition par tagore le Sam 27 Juin 2015 - 22:59, édité 1 fois
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Message par Slafka Sam 27 Juin 2015 - 22:54

Pour dire donc, plus simplement, que faire des choses qu'on aime, ça ne peut qu'aider à se bouger les fesses ? Very Happy

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Message par tagore Sam 27 Juin 2015 - 23:13

@Slava : oui, si tu veux, il y a de ça, mais c'est aussi plus subtil !

Ce qui me semble important surtout, c'est que tout est lié... notre désir et notre plaisir ne sont pas autonomes pour telle ou telle activité (nous n'avons qu'un seul cerveau, qui a son unité !), ils dépendent aussi de notre état émotionnel à la base, et de la perspective de sens qui s'y rattache, comme de celui qu'on éprouve dans sa vie en général à tel moment donné - bref, des dimensions beaucoup plus structurelles et globales.

Je pense qu'on en a tous fait l'expérience : faire la vaisselle, par exemple, paraîtra beaucoup plus facile si l'on se sent dans un "bon jour" (si l'on vient d'être nourri par un échange positif, par exemple) que si l'on est déjà dans l'inertie.
Dans ces deux cas, l'activité est la même, mais l'état à partir duquel on y entre n'a rien à voir - et c'est cela, justement, qui fait toute la différence !

Lorsqu'on rencontre un déficit de "volonté" (ou de désir), je pense donc qu'il y a matière à s'interroger sur tout ce qui le nourrit au quotidien, de manière globale, et qui fait justement qu'on est plus ou moins capable, ensuite, d'initier facilement telle ou telle activité particulière.
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Message par Slafka Dim 28 Juin 2015 - 1:09

Donc, la paresse traduirait un état d'insatisfaction globale, de manque de sens jusqu'à conduire à une neurasthénie ou une apathie comme pour la vaisselle et le désordre organisationnel, ce qui est propre en fait, je dirais, à toute baisse de moral ou déprime.

Je pense plutôt, que justement par rapport au problème de sens global, le cerveau, de par les expériences prolongées de liberté cognitive qu'il a eues, s'habitue à ce fonctionnement non-contraignant, et quand il s'agit de revenir à la vie pratique et terrestre, il se retrouve confronté au problème des contraintes qu'il doit s'inffliger et qui limitent cette liberté et qu'il se sent obligé de prendre en compte, d'où la fuite par la glandouille.

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Message par tagore Dim 28 Juin 2015 - 21:02

Oui voilà, je pense que le parallèle que tu fais avec la déprime est excellent pour expliciter l'idée que j'essaie de partager. On pourrait dire que l'état de dépression est un miroir grossissant de ce qui peut exister de manière plus diffuse dans, sinon une dépression, du moins une insatisfaction et une torpeur vitale latente. Parce qu'on retrouve dans la dépression, de manière exacerbée, tous les symptômes dont on parle ici : et notamment, ce fait que le cerveau devient tellement inhibé dans son fonctionnement biochimique normal que la moindre action en vient à coûter un effort surhumain.

Et d'ailleurs ce qui marche alors, pour repartir de l'avant, et remobiliser la volonté, c'est d'apprendre à nous nourrir émotionnellement (par d'autres personnes bienveillantes - c'est peut-être ce qui fonctionne le mieux dans un tel cas -, par un environnement fondamentalement sain et soutenant, mais aussi par nous-même - au travers de tous nos actes et pensées au quotidien).

Pour ce qui est de la deuxième partie de ton message, oui c'est vrai je pense qu'en phase de concentration intense (en phase créative par exemple) on peut en venir à délaisser le monde pratique. Il me semble néanmoins que ce dont il est question dans les messages précédents n'est pas vraiment de cet ordre. Quand tu parles de "liberté cognitive" ou de "fonctionnement non-contraignant", cela m'évoquerait plutôt un mode de vie solitaire manquant de structure et de direction forte, trop isolé des autres, bref tout cela qui est souvent commun à l'état de dépression (isolement, manque de sens) et qui engendre les mêmes errements.
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Message par Invité Dim 28 Juin 2015 - 21:11

En procrastinant sa paresse ! Idée

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Message par Slafka Dim 28 Juin 2015 - 21:29

Déjà, oui, faire la vaisselle pour quelqu'un, pour faire plaisir à l'autre, ça pourrait être pas mal. :°

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Message par Princeton Dim 28 Juin 2015 - 22:00

Merci pour vos messages !

tagore a écrit:(et c'est peut-être plus lourd à entendre),

En effet ce que tu me dis est assez lourd à entendre, particulièrement en raison du vocabulaire choisi : inaccomplissement, inassouvissement, apathie, déprime, dépression, "un mode de vie solitaire manquant de structure et de direction forte, trop isolé des autres", des errements, et mon cerveau inhibé dans son "fonctionnement biochimique normal"... Néanmoins je te remercie pour tes messages, qui trouvent tout de même une résonance en moi. J'ai été pendant longtemps assez dépressif, et si j'ai l'impression d'avoir fait des progrès notamment grâce à la thérapie psychanalytique que je mène de front depuis un an maintenant, tu as peut-être raison, et peut-être que je ne suis pas encore sorti de l'auberge, et que mon problème de paresse n'est que l'arbre qui cache la forêt de ronces qu'est la dépression.  

Là où je me retrouve dans ce que tu dis, c'est d'une part mon côté solitaire, qui pourrait constituer un sujet à part entière : grosso modo je dirais que j'aime entrer en relation avec les autres, et j'ai d'ailleurs de bonnes relations avec les gens de manière générale, et des amis que j'aime, mais que je suis aussi introverti, et que j'ai besoin de pas mal de temps en solo pour recharger mes batteries. Je dois concéder que je suis peut-être atypique par ce besoin de solitude, pourtant je ne le vois pas forcément comme un défaut de ma part. Il y a des moments où j'ai envie de voir mes amis, de faire la fête, puis d'autres où j'ai besoin d'être seul : ces moments alternent de manière générale, selon une logique cyclique. J'aime tant les premiers moments que les seconds, notamment car ils se répondent. Je me sens rarement seul, dans le sens anglais de lonely.

En revanche, je dois dire qu'en matière de relation de type amoureuse, j'ai tendance à mettre des barrières pour me rassurer voire me protéger, et à être dans un certain évitement. Je suis encore un professionnel de l'auto-sabordage dans ce domaine, et je sais que j'ai beaucoup de progrès à faire. Enfin, je ne me flagelle pas non plus, j'y vais à mon rythme. Je prends conscience que la difficulté que j'ai à être dans un rapport intime avec autrui vient sans doute de ma difficulté à être au contact d'autrui de manière prolongée : vient toujours un moment où j'ai besoin de me recueillir, de me reposer, et d'être seul. Serait-lié au désir d'être libre, sans contraintes, etc ? Il est vrai que je peux ressentir la présence d'autrui comme une gène au bout d'un moment, comme si elle faisait effraction (à quoi ?). J'ai bien envie de lancer un fil sur ces questions, maintenant que j'y pense. Toutes ces problématiques sont liées je pense...

D'autre part, je me reconnais bien quand tu parles de problématiques existentielles. Ces problématiques m'inhibent énormément. Je pense à ma mort très souvent, et cette pensée m'angoisse. Le fait de pouvoir mourir à tout instant me tétanise. Je n'arrive pas à me projeter. La seule chose que j'arrive à projeter, c'est la seule chose certaine : ma mort. Ainsi, toute mon existence est rapportée à cette fin dernière, et dans une moindre mesure, à son début, ma naissance. Je me sens assez bloqué dans mes questionnements, que pourtant je n'arrive pas à empêcher. Tout ce que ces questionnements produisent pour le moment, c'est l'angoisse. Je n'arrive pas à m'empêcher de penser à toutes ces choses. Alors mes pensées alimentent probablement ma situation, et l'inverse est aussi vrai, j'imagine que c'est un ensemble.

Enfin, la résultante est que je manque en effet de direction (cela rejoint d'ailleurs, je trouve, un des autres sujets que j'ai lancé sur le forum pour obtenir de l'aide : La vie professionnelle d'un scanner), c'est comme si l'incertitude concernant le moment de ma mort rendait toute tentative de donner une direction à ma vie futile, puisque je peux fort bien être arrêté en plein vol. Comme si je ne voulais pas risquer ou plutôt prendre la peine de vivre puisque je ne sais pas quand je vais mourir : à quoi bon faire des efforts puisque, pareil à un château de cartes, un rien (la mort) peut m'effondrer ? Mon désir, notamment mon désir de vivre, est assez inhibé lui aussi. C'est comme si je ne voulais pas marcher, et que je préférais m'asseoir sur un tronc d'arbre sur le bord de la route en regardant les gens passer et en me demandant pourquoi ils marchent et s'ils ont conscience de n'aller nulle part, comme un observateur plutôt que comme un acteur, comme un enfant fâché d'apprendre qu'il est mortel et qui refuse alors de jouer le jeu parce que les dés sont pipés. J'ai tellement conscience d'être fragile, éphémère, mortel, passager... Comment m'ancrer dans le monde ? Comment y vivre ? J'ai l'impression de devoir me forcer à "faire comme si", comme si je n'allais pas mourir demain ou après-demain, comme si je pouvais me lancer dans des projets avec la certitude de pouvoir les terminer, etc. Est-ce que la condition de la vie est d'accepter ce qu'elle recèle d'absurde, de si mystérieux, de si insensé ? Pourquoi agir, pourquoi me dépenser ? Je souffre d'être humain. J'écoute beaucoup cette chanson (en boucle) en ce moment :

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Message par Princeton Dim 28 Juin 2015 - 22:54

Ereen a écrit:Tu n'as pas peur de dire les choses  Embarassed !!!! j'ai aussi ce côté obsessionnel ... ça peut paraitre stérile, mais est-ce si stérile que ça, puisqu'on le fait ? Souvent, je lis plusieurs fois de suite, ou j'écoute une musique en boucle, ou je fais un plat plusieurs jours de suite. Je me demande si le but serait pas de chercher à rentrer en profondeur dans l'émotion que procure le texte, la musique, le goût. La répétition permet d'explorer l'objet à fond. J'ai l'impression que c'est important, et que sinon je n'ai pas vécu l'objet jusqu'au bout !! Focalisation ? Par contre, une fois sortie de la boucle, je peux ne plus réécouter la musique ou refaire le plat du tout. Il y a même violent rejet. C'est un processus intense, intimement lié au présent...

Hey. Ben je pense aussi que ce n'est pas stérile puisque ça a un effet anxiolytique, en tout cas dans mon cas. Disons que répéter la même chose est une manière de me rassurer, si j'écoute la même chanson et qu'elle est toujours identique, c'est rassurant, c'est agréable. Je crois que c'est peu ou prou le même principe avec les troubles obsessionnels compulsifs (je n'en ai pas, du moins pas à ma connaissance). La répétition à l'identique provoque une sorte de confort, de réassurance, d'assurance que certaines choses ne changent pas, qu'elles sont fiables, qu'on peut leur faire confiance. Je crois que c'est un peu pareil dans la vie : on recherche la sécurité, la répétition du même, car c'est confortable, rassurant... On revient sur cette idée de confort, finalement dangereuse à long terme : "si vous ne risquez rien, vous risquez encore plus" (Erica Jong). Je crois que c'est aussi lié à l'absence de "chronologie" dans ma manière de fonctionner, c'est difficile à expliquer mais je peux écouter la même chanson en boucle sans me lasser parce qu'elle ne s'épuise pas, elle a toujours son goût, sa saveur, ses couleurs, même après la centième écoute d'affilée. Elle ne devient ni fade ni grise. C'est comme si l'écouter cent fois c'était l'écouter une longue fois, comme si elle n'avait ni début ni fin. Comme si c'était simplement une couleur que je mettais en fond sonore, qu'elle colorait la pièce. Je ne sais pas dire mieux.

Je comprends le violent rejet que j'ai aussi, par exemple pour mes intérêts intellectuels, comme un contrecoup de l'investissement réalisé. L'investissement est massif, soudain et violent, et le désinvestissement l'est tout autant. Comme je rentre de manière excessive dans un objet, au bout d'un moment il m'écoeure et je suis obligé d'en sortir et de passer à autre chose. Comme une personne qui mange jusqu'à vomir : sans connaître ses limites, à se rendre malade. Au bout d'un moment le corps dit stop, comme un réflexe... Puis quand les choses se calment, je peux y retourner, mais de manière beaucoup plus apaisée, avec moins d'émotion, et moins d'intérêt aussi.

Ereen a écrit:N'est-ce pas paradoxal, la cigale, qui aime tant la vie et danser, ne prend pas de précaution pour survivre à l'hiver... mais comment pourrait-elle continuer à danser encore et encore tous les ans ?!

J'aimerais savoir comment, sans avoir à me prostituer auprès de la fourmi. Parce que dans la fable la cigale est obligée d'aller voir la fourmi qui n'est pas prêteuse, de dépendre d'autrui, de son bon vouloir. La cigale n'est pas autonome. Pourtant, je trouve que ce que fait la cigale, chanter, danser, est une ode à la vie... Une vie faite pour s'exprimer, vibrer au diapason de la vie, rechercher la beauté et l'instant, pas pour souffrir et économiser.
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Message par Aouregan Dim 28 Juin 2015 - 23:25

La Procrastination, c'est comme la Masturbation
Sur le coup ça fait du bien,
Mais ensuite tu t'aperçois que tu t'es baisé toi-même


Perso, je me lève tôt et je me couche tard,
Je me grouille de faire toutes mes corvées,
Et ça me laisse plein de temps pour buller Bravo !
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Message par Minuit Dim 28 Juin 2015 - 23:30

Je trouve ça chouette que cette discussion ose les profondeurs existentielles pour décortiquer le phénomène de la paresse. Car effectivement j'ai toujours su qu'en moi ce problème n'était pas simplement un souci de mécanique cérébrale, mais était intimement lié à la question du sens.
Désolée pour le groooos post un peu pompeux. M'enfin.

Princeton, ça se sentait effectivement dans ce que tu disais même plus haut que c'est ça le problème : que tu as peur de la mort. De la mort même pas en tant qu'évènement qui mettra fin à ta vie, mais en tant même que catégorie : pourquoi les choses meurent ? Pourquoi les choses passent ? Si elles passent, où est notre place alors ? Où est ce qui dure ?
Au fond on en arrive à ces : Qu'est ce qui a de la valeur ? Qu'est ce que la valeur ?

C'est ça la grande question que pose la certitude de la mort.
Je ne dis pas tout ça parce que j'aurais surmonté cette peur. Je dis ça parce que je fais face au même problème et qu'en tout cas c'est comme ça que pour ma part je l'analyse.
Or il me semble que peu à peu se tisse en moi, au fur et à mesure de mes expériences, une réponse à ce problème. Cette réponse est faite de chair et elle se construit, s'entretient. Elle est dans le temps. Elle n'est pas faites d'idées. Même si ce sont les idées, c'est à dire simplement la perspective, qui peuvent servir d'échelle pour me hisser jusqu'à elle avant que je ne les laisse derrière moi comme une chrysalide.

Je vais dire un truc glauque, mais vrai : s'il vous est arrivé que survienne dans votre entourage une mort brutale et injuste, vous avez dû ressentir, en plus de la douleur, une claque de vérité. Une sorte de rappel de l'univers, un : "et toi, qu'as-tu fait de ta vie ?", et il arrive qu'un tel évènement remette brusquement pas mal de pendules à l'heure.
On dit que l'être humain est conscient de sa mort. En réalité, je crois, nous ne sommes pas réellement conscients de notre mort. Nous en avons l'idée, ce n'est pas pareil. S'il y a un truc dont nous ne voulons pas avoir conscience, c'est bien ça. C'est une idée, que nous rejetons hors de nous. Et de ce fait elle nous fait peur, car elle est comme étrangère à ce que nous sommes. C'est comme s'il y avait "nous", et le fait que ce "nous" doive s'arrêter est absurde, injuste.
Et c'est le refus de comprendre cette énigme fondamentale, qui fait de nous des trouillards, ou qui suscite des rêves d'immortalité un peu infantiles comme en fantasme une certaine forme de transhumanisme, sans pour autant que cela ne fasse taire en nous la question du sens.

Que disent les gens qui ont fait une NDE ? Qu'ils n'ont plus peur de la mort, non pas même parce qu'ils auraient vu ce qu'il y a de l'autre côté, mais parce que c'est leur vision de la vie qui a changé. C'est leur vision du duo vie/mort, en tant que tel, qui a été assouplie.

"Philosopher, c'est apprendre à mourir", comme dirait l'autre. C'est pas juste une jolie phrase au accents héroïques. C'est une définition assez pointue de toute philosophie, à mon avis, qui nait de cette angoisse de fond. Ca n'exprime ni une résignation à notre triste sort, ni le fait que la philosophie serait un mode d'emploi afin de se prémunir contre toute angoisse de la mort, simplement que c'est sur le fond de ce constat originel que se dessine tout sens, toute pensée, toute question et toute réponse, et qu'au contraire d'évacuer ce problème, l'âme va y plonger tout entière.
Je crois qu'on pourrait même tout simplement dire : "vivre, c'est apprendre à mourir".

De la réflexion nait une réponse toute théorique : s'il n'y avait pas de mort, il n'y aurait pas de sens. S'il nous étions condamnés à rester là pour l'éternité, à construire nos maisons et nos villes pour l'éternité, qu'est ce qui aurait du prix ?
J'ai relu Huis-Clos, de Sartre, très récemment. Cette pièce a quelque chose d'impressionnant quand on la lit pour la première fois, souvent jeune dans un cadre scolaire, et pourtant je l'ai trouvée "fausse" quand je l'ai relue l'autre jour (même si c'est probablement l'effet voulu, au fond du fond). Non, l'enfer ce ne sont pas les autres. Cette phrase est fausse, ce qui se passe entre les personnages est faux, pour une simple raison : ils ne peuvent pas mourir. Les trois protagonistes sont bloqués dans une chambre pour l'éternité, ne pouvant pas mourir parce qu'ils sont déjà morts, condamnés donc à se regarder, à se chercher des noises ensemble pour l'éternité, à ne pouvoir se mentir, à ne pouvoir créer de fictions, parce qu'il n'y a pas de temps, parce qu'à rien ne sert de croire à quoi que ce soit, puisqu'ils seront éternels et que tout tombera. Tout devient alors poussière, cynisme. C'est ça l'enfer : c'est l'éternité. Or dans la vraie vie, ça n'existe pas : Dieu merci nous sommes mortels ! C'est une pièce qui indirectement se retrouve à faire l'apologie de la mortalité. Il n'y a que la mortalité, la temporalité, le fait que les choses passent et meurent qui donne un enracinement à la valeur, qui nous permet de créer des fictions et de prendre le risque d'y croire, de parier. La mort, c'est ce qui donne un sens à la vie. Pour nous, humains. C'est la condition Number One pour que la vie ait du sens.

Mais évidemment, cette réponse théorique n'est pas satisfaisante pour le coeur. Parce que c'est bien joli, mais du coup précisément C'EST QUOI LE SENS ? Qu'est ce que j'en ai à foutre, moi, au plus fort de l'angoisse, que la mort (qui reste quand même un truc abstrait, encore loin de moi) donne leur sens aux choses (notion encore plus abstraite s'il en est) ? C'est là que je crois que ce qui se dessine sous forme de concepts, dans les philosophies ou les oeuvres, ne prend de valeur que vécu, et où fait-on l'expérience concrète du questionnement sur la mort, hors traumatismes et deuils : dans l'angoisse.
Je hais l'angoisse, c'est une horreur, et pourtant c'est "mon plus grand maître". Je ne la prends pas d'ailleurs comme quelque chose qui m'arrive "fatalement", je pense qu'elle m'arrive parce que quelque chose en moi la cherche. Quelque chose en moi cherche une grande réponse, un Sens grand S, cette chose est irrépressible, elle est le fond du fond de moi-même, et là où elle m'emmène chercher de grandes réponses se trouvent nécessairement de grandes angoisses. Je peux m'y laisser bouffer, mais je sais aussi qu'elles sont mes "travaux pratiques", les endroits où se sécrètent les "vraies réponses", celles qui vont rester gravées en moi, qui vont s'ajouter à moi, devenir moi, et non pas venir grossir la somme de "ce que je sais", de mes "grandes idées sur la vie". Elles sont des parties de moi qui doivent mourir et qui meurent effectivement. Ce sont de vraies questions, et de vraies réponses, car elles sont informulables.
C'est dans ces moments que je comprends intimement que vie et mort sont les deux facettes d'une même médaille. Mais c'est comme s'il fallait que je le réapprenne constamment, parce que je me laisse avoir au piège de "l'éternité." L'insatiable curiosité se paie par la cyclothymie, mais finalement... allez, je paie volontiers.  Rolling Eyes

Pense à Interstellar qu'on évoquait auparavant (et vu qu'apparemment ce film t'a parlé je peux le citer) : tout le film est une épuration de l'égo, une progressive aventure hors de tous repères, un exil jusqu'à l'autre bout de l'univers, une lente apocalypse. Dans les dernières scènes avant la "quatrième dimension", les personnages se marrent. Ils sont morts à eux-mêmes, ils ont abandonné leur souffrance et leur zèle humains, mais pas leur humanité, au contraire, ils l'ont "trouvée". Ce qui se passe à la fin c'est qu'ils ont accepté leur mortalité, "la" mortalité. Et c'est là qu'ils "retournent à la terre".

Ce que je cherchais à dire c'est que... ton questionnement sur la mort, c'est le fil rouge du sens. Pourquoi parle t-on de dépression dès qu'un être humain a le malheur de lever la tête vers les étoiles, et de se demander pourquoi diable les choses vivent et meurent ? Le problème, c'est que ce sont de vraies questions, des questions viscérales et pas seulement intellectuelles, qu'elles nous taraudent nécessairement et peut-être d'autant plus que nous sommes une génération de gens qui prenons conscience de la possible mortalité de notre espèce en même temps que celle-ci n'a jamais rêvé aussi fort d'immortalité, que c'est le fait de faire dignement face à ces questions et d'aller jusqu'au bout qui pourrait nous permettre d'épanouir ce qui est en nous de plus humain... mais non, c'est trop souvent étiqueté comme un symptôme de mauvaise santé, un gouffre qu'il faut enrayer absolument. L'accompagner, oui. En faire une "maladie", décréter que : c'est mal, et qu'il faut traiter le mal, ça manque cruellement de perspective.

Sorry pour cette digression sur la mort. C'est que pour moi, rien à faire... c'est dans le sujet ! Laughing
Je me permets de développer car en effet je crois que "l'inaction" a, aussi étrange que cela puisse paraitre et comme cela a été abordé plus haut, beaucoup à voir avec la question du sens et inévitablement le questionnement sur la mort. Paresser, c'est se reclure dans une sorte d'éternité qui se refuse à risquer. C'est arrêter artificiellement le temps par crainte d'avoir conscience de son passage, pour éviter d'assumer qu'il passe, et ce que ce passage recèle de responsabilité. Et de vie, aussi, malheureusement !


Dernière édition par Minuit le Lun 29 Juin 2015 - 0:41, édité 2 fois
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Message par Slafka Lun 29 Juin 2015 - 0:28

Penser à la mort c'est avoir un rapport particulier à son corps, non ? La mort ne m'effraie pas, je ne dis pas que je pense que l'âme est éternelle mais je ne cherche plus à m'interroger sur la manière dont je pourrai me rendre éternel, réaliser ma vie. Etant un peu dans ton cas de figure, je me dis que les choses de la vie, quelles soient moches, simples ou remplies d'un sens profond, auront de toutes façons le même destin mortel. A un moment, j'avais pensé à être caissier de Monoprix ou un truc dans le genre. En faisant ce petit job, me disais-je, je réfléchirai aux belles choses de l'existence, je serai en connexion avec moi-même en permanence, je me contenterai de peu et personne ne saura, après ma mort de caissier, que j'avais de belles idées sur le monde, sur la vie, sur les gens, et je penserai que c'est bien, personne n'a besoin de savoir, ils ne s'en porteront mieux.

Je pense qu'il manque dans ton récit une base concrète sur quoi t’appuyer pour poser le pied, ça peut être des gens concrets avec qui tu as ton naturel, des choses motivantes et émouvantes concrètes qui font battre ton cœur, il manque une connaissance de soi dans différents contextes moi/autres, car peu de retour des autres sur ce que tu fais bien. Je peux me tromper. Mais il ne manque pas la curiosité et l'esprit analytique.

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Message par Princeton Lun 29 Juin 2015 - 0:55

Je ne veux pas être immortel, je ne veux pas vivre toujours, cette pensée m'est encore plus terrible que l'idée de mourir, ce serait l'enfer pour moi de vivre toujours. Et je crois comme toi que la temporalité, la finitude, donne sa valeur aux choses, et à la vie. Comme si par la mort, les choses prenaient un relief, une certaine profondeur, et aussi un certain caractère dramatique. Je trouve que la mort dépouille aussi, elle montre à nu, l'humain par exemple. Elle l'humilie (pas forcément dans un sens péjoratif). Et puis, la vie sans la mort ne serait pas la vie, ce serait autre chose. Ainsi, la vie et la mort vont ensemble. Dernièrement, je me disais que la condition de l'existence de toute chose est qu'elle ait un début et une fin, une naissance et une mort : le temps est le prix à payer. Il n'y aurait pas de temps s'il n'y avait pas de mort et il n'y aurait pas de mort s'il n'y avait pas de vie.

Alors oui, pourquoi vivre ? Pourquoi je vis ? Et si je suis libre, de choisir le sens que je veux donner à ma vie, alors quelle angoisse encore ! Que d'angoisse, de vivre, de mourir, d'écrire, d'être libre ! Que de tourments intérieurs... Et les conseils de mon entourage sont bien vains : arrête de te poser des questions, arrête de réfléchir, lance-toi. Mais c'est comme si j'étais devant le Sphinx et que je faisais semblant de ne pas le voir, alors même qu'il m'a posé une question, une énigme, et moi il faudrait que je l'ignore ! Non, je le vois, face à moi, imposant, fier, et moi je suis tout petit et je n'ai pas de réponse, pourtant je veux le vaincre, je veux passer, mais tout ce que je peux faire c'est pleurer de rage et de désespoir et taper du pied dans la poussière de laquelle j'ai été tiré...

Parce que oui, l'angoisse n'est pas une pensée, c'est autre chose, d'insupportable et que pourtant je supporte, comme une indicible étreinte, qui serre le coeur, comme ce sentiment que tout m'est si étranger, si étrange, ce sentiment du mouvement, que toutes les choses vont et viennent, naissent, vivent et meurent, et moi je suis de celles-là, comme un petit bateau dans une mer en pleine tempête, sans ancre, sans étoiles, avec cette impression imminente de chavirer, mais je ne chavire pas, j'ai juste le haut le coeur, j'ai la nausée, et je ne me renverse pas, je ne tombe pas, et l'angoisse est là, elle est dans ce moment qui dure une éternité, dans ce vertige, qui dure et qui dure, dans cet entre-deux, entre la vie et la mort, sur cette tangente cruelle, comme un équilibriste sur son fil, entre la terre et le ciel... Oui, j'ai peur des hauteurs, et peur des profondeurs, de voir les unes comme les autres, sans atteindre ni les unes ni les autres, comme bloqué, ridicule, dans cet entre-deux, en attendant que mon sort soit fixé, que la mort vienne, me soulage de l'angoisse, me libère... Quelle épreuve de vivre ! Quelle épreuve de ne pas mourir ! Et l'angoisse est un quelque chose auquel je ne m'habitue pas, c'est le principe de l'angoisse...

Je me sens tellement nul, nul d'être ainsi, de ressentir ces choses, nul de ne pas trouver de sérénité, de paix, et pourtant partout les gens me disent leur vérité, ils savent, ils ont trouvé, et moi je les admire, puisque je cherche et ne trouve pas... Et pourtant je cherche ! Je cherche partout, mais je cherche hors de moi, ce qui n'est peut-être qu'en moi-même... Pourquoi est-ce que je suis si curieux, sinon pour diminuer mon angoisse ? Qu'est l'intellectualisation sinon une défense ? Je voudrais mettre le monde dans la paume de ma main, comprendre les mystères des dieux, maîtriser enfin... Comme c'est vain et comme je souffre de le savoir ! Je suis tellement impuissant, je ne sais rien, je me sens comme soumis à un jeu dont je ne comprends pas les règles, comme une marionnette dont les ficelles sont tirées par des forces inconnues de moi. Donnez-moi un manuel d'instructions, donnez-moi des ciseaux...

Je ne crois pas qu'on puisse jamais apprendre à mourir : on peut seulement apprendre à vivre, avec comme points de repère notre naissance passée et le fait prochain de notre mort. Et la philosophie, tous les mots, toutes les réponses, j'ai tellement l'impression que c'est du vent, tellement ridicule face à la mort, face à la vie, face à l'existence. Des châteaux de cartes aussi, et des opiums. "How little is achieved when the problems of philosophy are solved." Wittgenstein Comme nous sommes ridicules ! C'est là peut-être où l'on peut rire, où l'ironie devient essentielle... L'ironie de la vie...

“There are certain queer times and occasions in this strange mixed affair we call life when a man takes this whole universe for a vast practical joke, though the wit thereof he but dimly discerns, and more than suspects that the joke is at nobody's expense but his own.”

― Herman Melville, Moby-Dick

Rire, c'est défier, mais défier qui, il n'y a personne à défier, personne à qui demander, personne pour se battre, pour se plaindre... Prends ton angoisse, serre-là bien contre toi, et supporte. Comme la fin de ce poème que j'adore de Vigny, La mort du loup :

"Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le sort a voulu t'appeler,
Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler."

Oh, et ce poème de Musset, La Nuit d'août :

Et que trouveras-tu, le jour où la misère
Te ramènera seul au paternel foyer ?
Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
Une voix sera là pour crier à toute heure :
Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.

Et ce petit conte :

It is said an Eastern monarch once charged his wise men to invent him a sentence, to be ever in view, and which should be true and appropriate in all times and situations. They presented him the words: “And this too shall pass.”

La poésie, c'est mon refuge... Et si l'art ne faisait que répondre à l'angoisse ? "L'art et rien que l'art, nous avons l'art pour ne point mourir de la vérité" (Nietzsche). "Art is to console those who are broken by life." (Van Gogh) Oui, je cite en anglais et en français, je m'en fiche. Et si la santé et la joie ne pouvaient s'obtenir non en dépassant l'angoisse, mais en l'acceptant ? En acceptant la grandeur de la vie, son mystère, son angoisse ? En acceptant d'être tout petit ? En renonçant à chercher, à vouloir, à vaincre ? Retourner alors à la terre. Mourir avant l'heure. Mourir à soi. Mourir pour renaître. Quand je me suis inscrit sur le forum, le titre de ma présentation était et est toujours d'ailleurs le titre d'un ouvrage d'André Gide (ah ! si j'avais été sage j'aurais choisi un autre titre : Les Nourritures terrestres !), et ce titre est : Si le grain ne meurt.

qui est une référence à ce passage de l'évangile selon Saint Jean :

"En vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul;
Mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit."
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