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Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
CET AMOUR - Jacques Prevert
Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au milieu de la nuit
Cet amour qui faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C’est le tien
C’est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelle
Et qui n’a pas changé
Aussi vrai qu’une plante
Aussi tremblante qu’un oiseau
Aussi chaude aussi vivant que l’été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort,
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marbre
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi je l’écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Là où tu es
Là où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t’en va pas
Nous qui sommes aimés
Nous t’avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n’avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n’importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d’un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.
Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au milieu de la nuit
Cet amour qui faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C’est le tien
C’est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelle
Et qui n’a pas changé
Aussi vrai qu’une plante
Aussi tremblante qu’un oiseau
Aussi chaude aussi vivant que l’été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort,
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marbre
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi je l’écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Là où tu es
Là où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t’en va pas
Nous qui sommes aimés
Nous t’avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n’avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n’importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d’un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Prévert encore
CHANSON
Quel jour sommes-nous
Nous sommes tous les jours
Mon amie
Nous sommes toute la vie
Mon amour
Nous nous aimons et nous vivons
Nous vivons et nous nous aimons
Et nous ne savons pas ce que c'est que la vie
Et nous ne savons pas ce que c'est que le jour
Et nous ne savons pas ce que c'est que l'amour.
CHANSON
Quel jour sommes-nous
Nous sommes tous les jours
Mon amie
Nous sommes toute la vie
Mon amour
Nous nous aimons et nous vivons
Nous vivons et nous nous aimons
Et nous ne savons pas ce que c'est que la vie
Et nous ne savons pas ce que c'est que le jour
Et nous ne savons pas ce que c'est que l'amour.
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
- Art poétique
De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Où l'Indécis au Précis se joint.
C'est des beaux yeux derrière des voiles,
C'est le grand jour tremblant de midi,
C'est, par un ciel d'automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !
Car nous voulons la Nuance encor,
Pas la Couleur, rien que la nuance !
Oh ! la nuance seule fiance
Le rêve au rêve et la flûte au cor !
Fuis du plus loin la Pointe assassine,
L'Esprit cruel et le Rire impur,
Qui font pleurer les yeux de l'Azur,
Et tout cet ail de basse cuisine !
Prends l'éloquence et tords‑lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie,
Si l'on n'y veille, elle ira jusqu'où ?
Ô qui dira les torts de la Rime ?
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d'un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?
De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu'on sent qui fuit d'une âme en allée
Vers d'autres cieux à d'autres amours.
Que ton vers soit la bonne aventure
Eparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe ou le thym...
Et tout le reste est littérature.
— Verlaine, Jadis et naguère, 1884
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
Le poème qui m'a fait découvrir et aimer la poésie anglaise :
La Belle Dame Sans Merci, 1820
Ah, what can ail thee, wretched wight,
Alone and palely loitering;
The sedge is wither'd from the lake,
And no birds sing.
Ah, what can ail thee, wretched wight,
So haggard and so woe-begone?
The squirrel's granary is full,
And the harvest's done.
I see a lily on thy brow,
With anguish moist and fever dew;
And on thy cheek a fading rose
Fast withereth too.
I met a lady in the meads
Full beautiful, a faery's child;
Her hair was long, her foot was light,
And her eyes were wild.
I set her on my pacing steed,
And nothing else saw all day long;
For sideways would she lean, and sing
A faery's song.
I made a garland for her head,
And bracelets too, and fragrant zone;
She look'd at me as she did love,
And made sweet moan.
She found me roots of relish sweet,
And honey wild, and manna dew;
And sure in language strange she said,
I love thee true.
She took me to her elfin grot,
And there she gaz'd and sighed deep,
And there I shut her wild sad eyes--
So kiss'd to sleep.
And there we slumber'd on the moss,
And there I dream'd, ah woe betide,
The latest dream I ever dream'd
On the cold hill side.
I saw pale kings, and princes too,
Pale warriors, death-pale were they all;
Who cry'd--"La belle Dame sans merci
Hath thee in thrall!"
I saw their starv'd lips in the gloam
With horrid warning gaped wide,
And I awoke, and found me here
On the cold hill side.
And this is why I sojourn here
Alone and palely loitering,
Though the sedge is wither'd from the lake,
And no birds sing.
John Keats
PS : merci pour les derniers posts, je découvre beaucoup !
La Belle Dame Sans Merci, 1820
Ah, what can ail thee, wretched wight,
Alone and palely loitering;
The sedge is wither'd from the lake,
And no birds sing.
Ah, what can ail thee, wretched wight,
So haggard and so woe-begone?
The squirrel's granary is full,
And the harvest's done.
I see a lily on thy brow,
With anguish moist and fever dew;
And on thy cheek a fading rose
Fast withereth too.
I met a lady in the meads
Full beautiful, a faery's child;
Her hair was long, her foot was light,
And her eyes were wild.
I set her on my pacing steed,
And nothing else saw all day long;
For sideways would she lean, and sing
A faery's song.
I made a garland for her head,
And bracelets too, and fragrant zone;
She look'd at me as she did love,
And made sweet moan.
She found me roots of relish sweet,
And honey wild, and manna dew;
And sure in language strange she said,
I love thee true.
She took me to her elfin grot,
And there she gaz'd and sighed deep,
And there I shut her wild sad eyes--
So kiss'd to sleep.
And there we slumber'd on the moss,
And there I dream'd, ah woe betide,
The latest dream I ever dream'd
On the cold hill side.
I saw pale kings, and princes too,
Pale warriors, death-pale were they all;
Who cry'd--"La belle Dame sans merci
Hath thee in thrall!"
I saw their starv'd lips in the gloam
With horrid warning gaped wide,
And I awoke, and found me here
On the cold hill side.
And this is why I sojourn here
Alone and palely loitering,
Though the sedge is wither'd from the lake,
And no birds sing.
John Keats
PS : merci pour les derniers posts, je découvre beaucoup !
Killian- Messages : 86
Date d'inscription : 27/02/2011
Age : 40
Localisation : Pays de la Loire
Re: Vos poèmes préférés
Emily Brontë, To Imagination
When weary with the long day's care,
And earthly change from pain to pain,
And lost, and ready to despair,
Thy kind voice calls me back again:
Oh, my true friend! I am not lone,
While then canst speak with such a tone!
So hopeless is the world without;
The world within I doubly prize;
Thy world, where guile, and hate, and doubt,
And cold suspicion never rise;
Where thou, and I, and Liberty,
Have undisputed sovereignty.
What matters it, that all around
Danger, and guilt, and darkness lie,
If but within our bosom's bound
We hold a bright, untroubled sky,
Warm with ten thousand mingled rays
Of suns that know no winter days?
Reason, indeed, may oft complain
For Nature's sad reality,
And tell the suffering heart how vain
Its cherished dreams must always be;
And Truth may rudely trample down
The flowers of Fancy, newly-blown:
But thou art ever there, to bring
The hovering vision back, and breathe
New glories o'er the blighted spring,
And call a lovelier Life from Death.
And whisper, with a voice divine,
Of real worlds, as bright as thine.
I trust not to thy phantom bliss,
Yet, still, in evening's quiet hour,
With never-failing thankfulness,
I welcome thee, Benignant Power;
Sure solacer of human cares,
And sweeter hope, when hope despairs!
When weary with the long day's care,
And earthly change from pain to pain,
And lost, and ready to despair,
Thy kind voice calls me back again:
Oh, my true friend! I am not lone,
While then canst speak with such a tone!
So hopeless is the world without;
The world within I doubly prize;
Thy world, where guile, and hate, and doubt,
And cold suspicion never rise;
Where thou, and I, and Liberty,
Have undisputed sovereignty.
What matters it, that all around
Danger, and guilt, and darkness lie,
If but within our bosom's bound
We hold a bright, untroubled sky,
Warm with ten thousand mingled rays
Of suns that know no winter days?
Reason, indeed, may oft complain
For Nature's sad reality,
And tell the suffering heart how vain
Its cherished dreams must always be;
And Truth may rudely trample down
The flowers of Fancy, newly-blown:
But thou art ever there, to bring
The hovering vision back, and breathe
New glories o'er the blighted spring,
And call a lovelier Life from Death.
And whisper, with a voice divine,
Of real worlds, as bright as thine.
I trust not to thy phantom bliss,
Yet, still, in evening's quiet hour,
With never-failing thankfulness,
I welcome thee, Benignant Power;
Sure solacer of human cares,
And sweeter hope, when hope despairs!
- Traduction:
- À l'imagination
Lorsque, lassée du long souci du jour
Et ballottée de peine en peine
Je suis perdue, prête à désespérer,
Ta bonne voix de nouveau me rappelle.
Ô ma fidèle amie, comment serais-je seule
Tant que tu peux parler sur pareil ton ?
Le monde du dehors est si vide d’espoir
Que m’est deux fois précieux le monde du dedans,
Ce tien monde où jamais ne règnent ruse et haine
Non plus que doute et froid soupçon ;
Où toi et moi et la Liberté,
Exerçons souveraineté indiscutée.
Qu’importe que, de toutes parts,
Le Péril, le Péché, la Ténèbre nous pressent
Si nous gardons ancré au fond de notre cœur
Un brillant ciel immaculé,
Chaud des mille rayons mêlés
De soleils qui jamais ne connaissent l’hiver ?
La Raison peut souvent se plaindre en vérité
Du triste train de la Nature,
Et révéler au cœur souffrant combien ses rêves
Sont voués à demeurer vains ;
Et la Réalité peut piétiner, brutale,
Les fleurs de l’Imagination à peine écloses.
Mais tu es toujours là pour ramener
Les visions latentes, pour parer
Le printemps dépouillé de nouvelles splendeurs
Et tirer de la mort une vie plus exquise,
Évoquant d’un souffle divin
De vrais mondes aussi lumineux que le tien.
Je ne crois guère en ta félicité fantôme,
Mais à l’heure apaisée du soir,
C’est toujours, oui, toujours avec reconnaissance
Que je te vois venir, ô bienfaisant pouvoir,
Infaillible consolatrice
Et quand l’espoir se meurt, plus radieux espoir.
Elther- Messages : 60
Date d'inscription : 30/03/2013
Re: Vos poèmes préférés
Merci, et contente que ça puisse servir ! D'ailleurs, j'ai mis l'index à jour en ajoutant les nouveaux poèmes proposés - beaucoup de découvertes pour moi aussi, alors un grand merci à vous pour le partage.
Je continue, de mon côté, sur ma lancée, et vous propose une autre oeuvre d'un autre poète qui m'est très cher, Tristan Corbière. Subjectivement, je le trouve d'ailleurs très adapté, en cet automne naissant :
Je continue, de mon côté, sur ma lancée, et vous propose une autre oeuvre d'un autre poète qui m'est très cher, Tristan Corbière. Subjectivement, je le trouve d'ailleurs très adapté, en cet automne naissant :
Mâle-fleurette
Ici reviendra la fleurette blême
Dont les renouveaux sont toujours passés...
Dans les cœurs ouverts, sur les os tassés,
Une folle brise, un beau jour, la sème...
On crache dessus ; on l'imite même,
Pour en effrayer les gens très-sensés...
Ici reviendra la fleurette blême.
- Oh ! ne craignez pas son humble anathème
Pour vos ventres mûrs, Cucurbitacés !
Elle connaît bien tous ses trépassés !
Et, quand elle tue, elle sait qu'on l'aime...
- C'est la mâle-fleur, la fleur de bohème. -
Ici reviendra la fleurette blême.
Les Amours jaunes, 1873
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
- Quand je te voy discourant à par-toy,
Toute amuzée avecques ta pensée,
Un peu la teste encontre bas baissée,
Te retirant du vulgaire & de moy,
Je veux souvent pour rompre ton esmoy,
Te saluer, mais ma voix offensée,
De trop de peur se retient amassée
Dedans la bouche & me laisse tout coy.
Mon œil confus ne peut souffrir ta veue,
De ses rayons mon ame tremble esmeue;
Langue ne voix ne font leur action.
Seuls mes soupirs, seul mon triste visage
Parlent pour moy, & telle passion
De mon amour donne assez tesmoignage.
— Ronsard, Premier livre des Amours
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
Sans savoir pourquoi
J'aime ce monde
Où nous venons pour mourir.
J'aime ce monde
Où nous venons pour mourir.
Haïku
Natsume Sôsek
Natsume Sôsek
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: Vos poèmes préférés
Et un sourire
La nuit n'est jamais complète
Il y a toujours, puisque je le dis
Puisque je l'affirme
Au bout du chagrin
Une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille
Désir à combler, faim à satisfaire
Un coeur généreux
Une main tendue, une main ouverte
Des yeux attentifs
Une vie, la vie à se partager.
Paul Eluard
Le Phénix, 1951
La nuit n'est jamais complète
Il y a toujours, puisque je le dis
Puisque je l'affirme
Au bout du chagrin
Une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille
Désir à combler, faim à satisfaire
Un coeur généreux
Une main tendue, une main ouverte
Des yeux attentifs
Une vie, la vie à se partager.
Paul Eluard
Le Phénix, 1951
albatrosdore- Messages : 264
Date d'inscription : 18/11/2013
Localisation : Par çi par là
Re: Vos poèmes préférés
L’enfant que je fus pleure sur la route.
Je l’y laissais quand je vins être qui je suis;
Mais aujourd’hui, voyant que ce que je suis n’est rien,
Je veux aller chercher qui je fus là où il est resté.
Ah, comment faire pour le rencontrer? Qui s’est
Trompé en venant, au retour se trompera.
Et je ne sais plus d’où je suis venu ni où
Je me trouve. Ignorance où mon âme est en panne.
Que ne m’est-il donné d’atteindre en ces parages
Une élévation, d’où je puisse enfin voir
De mes yeux mes oublis, pour les remémorer!
Car, dans l’absence au moins, j’aurai de moi nouvelle:
Oui me voyant tel que je fus dans le lointain,
Trouver en moi un peu de quand j’étais ainsi!
Fernando Pessoa
Je l’y laissais quand je vins être qui je suis;
Mais aujourd’hui, voyant que ce que je suis n’est rien,
Je veux aller chercher qui je fus là où il est resté.
Ah, comment faire pour le rencontrer? Qui s’est
Trompé en venant, au retour se trompera.
Et je ne sais plus d’où je suis venu ni où
Je me trouve. Ignorance où mon âme est en panne.
Que ne m’est-il donné d’atteindre en ces parages
Une élévation, d’où je puisse enfin voir
De mes yeux mes oublis, pour les remémorer!
Car, dans l’absence au moins, j’aurai de moi nouvelle:
Oui me voyant tel que je fus dans le lointain,
Trouver en moi un peu de quand j’étais ainsi!
Fernando Pessoa
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: Vos poèmes préférés
- De mon mystérieux voyage
Je ne t'ai gardé qu'une image,
Et qu'une chanson, les voici :
Je ne t'apporte pas de roses,
Car je n'ai pas touché aux choses,
Elles aiment à vivre aussi.
Mais pour toi, de mes yeux ardents,
J'ai regardé dans l'air et l'onde,
Dans le feu clair et dans le vent,
Dans toutes les splendeurs du monde,
Afin d'apprendre à mieux te voir
Dans toutes les ombres du soir.
Afin d'apprendre à mieux t'entendre
J'ai mis l'oreille à tous les sons,
Écouté toutes les chansons,
Tous les murmures, et la danse
De la clarté dans le silence.
Afin d'apprendre comme on touche
Ton sein qui frissonne ou ta bouche,
Comme en un rêve, j'ai posé
Sur l'eau qui brille, et la lumière,
Ma main légère, et mon baiser.
— Charles van Lerberghe, La chanson d'Ève
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
La courbe de tes yeux
La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j’ai vécu
C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.
Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources des couleurs,
Parfums éclos d’une couvée d’aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l’innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.
Paul Eluard, Capitale de la douleur, 1926
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
'réflète ma phase romantico-love du moment..
Je t'aime
Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'ai pas connues
Je t'aime pour tout le temps
Où je n'ai pas vécu
Pour l'odeur du grand large
Et l'odeur du pain chaud
Pour la neige qui fond
Pour les premières fleurs
Pour les animaux purs
Que l'homme n’effraie pas
Je t'aime pour aimer
Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'aime pas
Qui me reflète sinon toi-même
Je me vois si peu
Sans toi je ne vois rien
Qu'une étendue déserte
Entre autrefois et aujourd'hui
Il y a eu toutes ces morts
Que j'ai franchies
Sur de la paille
Je n'ai pas pu percer
Le mur de mon miroir
Il m'a fallu apprendre
Mot par mot la vie
Comme on oublie
Je t'aime pour ta sagesse
Qui n'est pas la mienne
Pour la santé je t'aime
Contre tout ce qui n'est qu'illusion
Pour ce cœur immortel
Que je ne détiens pas
Que tu crois être le doute
Et tu n'es que raison
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Paul Eluard
Je t'aime
Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'ai pas connues
Je t'aime pour tout le temps
Où je n'ai pas vécu
Pour l'odeur du grand large
Et l'odeur du pain chaud
Pour la neige qui fond
Pour les premières fleurs
Pour les animaux purs
Que l'homme n’effraie pas
Je t'aime pour aimer
Je t'aime pour toutes les femmes
Que je n'aime pas
Qui me reflète sinon toi-même
Je me vois si peu
Sans toi je ne vois rien
Qu'une étendue déserte
Entre autrefois et aujourd'hui
Il y a eu toutes ces morts
Que j'ai franchies
Sur de la paille
Je n'ai pas pu percer
Le mur de mon miroir
Il m'a fallu apprendre
Mot par mot la vie
Comme on oublie
Je t'aime pour ta sagesse
Qui n'est pas la mienne
Pour la santé je t'aime
Contre tout ce qui n'est qu'illusion
Pour ce cœur immortel
Que je ne détiens pas
Que tu crois être le doute
Et tu n'es que raison
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Paul Eluard
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Pour que l'amour transcende l'amour...
- Psyché
Psyché, ma sœur, écoute immobile, et frissonne...
Le bonheur vient, nous touche et nous parle à genoux.
Pressons nos mains. Sois grave. Ecoute encor... Personne
N'est plus heureux ce soir, n'est plus divin que nous.
Une immense tendresse attire à travers l'ombre
Nos yeux presque fermés. Que reste-t-il encor
Du baiser qui s'apaise et du soupir qui sombre ?
La vie a retourné notre sablier d'or.
C'est notre heure éternelle, éternellement grande,
L'heure qui va survivre à l'éphémère amour
Comme un voile embaumé de rose et de lavande
Conserve après cent ans la jeunesse d'un jour.
Plus tard, ô ma beauté, quand des nuits étrangères
Auront passé sur vous qui ne m'attendrez plus,
Quand d'autres s'il se peut, amie aux mains légères,
Jaloux de mon prénom, toucheront vos pieds nus,
Rappelez-vous qu'un soir nous vécûmes ensemble
L'heure unique où les dieux accordent, un instant,
A la tête qui penche, à l'épaule qui tremble,
L'esprit pur de la vie en fuite avec le temps.
Rappelez-vous qu'un soir couchés sur notre couche,
En caressant nos doigts frémissants de s'unir,
Nous avons échangé de la bouche à la bouche
La perle impérissable où dort le souvenir.
— Pierre Loüys
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
https://www.youtube.com/watch?v=deFSC741coQ
david50- Messages : 5185
Date d'inscription : 16/09/2013
Re: Vos poèmes préférés
- Afin que pour jamais une marque demeure,
A l'age qui viendra, comme vostre je suis,
Je vous fay vœu du peu, mais du tout que je puis,
De peur que la mémoire avec nous ne s'en meure.
Je vous donne de moy la part qui est meilleure :
C'est l'esprit et la voix, qui, menez et conduis
Sous le flambeau d'Amour, des eternelles nuits
Sauveront vostre nom paravant que je meure.
Et, si assez à temps je n'ay pas commencé
De m'employer pour vous, puis que la destinée,
Qui vous cachoit à moy, m'en a desavancé :
Je feray, comme fait le devôt Pelerin,
Qui s'estant levé tard, pour faire sa journée,
Regagne à se haster le temps et le chemin.
— Jean Antoine de Baïf, Amour de Francine
Pieyre- Messages : 20908
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Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
- @ david50:
- merci pour le partage du poème de Peter Handke ! pour moi tout le film de Wenders est un poème.
- @ Mazarine:
- Connais-tu Je t'aime d'Eluard chanté par Montand ? un petit lien https://www.youtube.com/watch?v=-b1mEu25pHM
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Ça parle beaucoup d'amour, j'espère ne pas plomber l'ambiance .
Cesare PAVESE
La mort viendra et elle aura tes yeux -
cette mort qui est notre compagne
du matin jusqu'au soir, sans sommeil,
sourde, comme un vieux remords
ou un vice absurde. Tes yeux
seront une vaine parole,
un cri réprimé, un silence.
Ainsi les vois-tu le matin
quand sur toi seule tu te penches
au miroir. O chère espérance,
ce jour-là nous saurons nous aussi
que tu es la vie et que tu es le néant.
La mort a pour tous un regard.
La mort viendra et elle aura tes yeux.
Ce sera comme cesser un vice,
comme voir resurgir
au miroir un visage défunt,
comme écouter des lèvres closes.
Nous descendrons dans le gouffre muets.
Cesare PAVESE
La mort viendra et elle aura tes yeux -
cette mort qui est notre compagne
du matin jusqu'au soir, sans sommeil,
sourde, comme un vieux remords
ou un vice absurde. Tes yeux
seront une vaine parole,
un cri réprimé, un silence.
Ainsi les vois-tu le matin
quand sur toi seule tu te penches
au miroir. O chère espérance,
ce jour-là nous saurons nous aussi
que tu es la vie et que tu es le néant.
La mort a pour tous un regard.
La mort viendra et elle aura tes yeux.
Ce sera comme cesser un vice,
comme voir resurgir
au miroir un visage défunt,
comme écouter des lèvres closes.
Nous descendrons dans le gouffre muets.
Re: Vos poèmes préférés
On peut aussi associer l'amour et la mort.
- Quand au temple nous serons
Agenouillez, nous ferons
Les devots selon la guise
De ceux qui pour loüer Dieu
Humbles se courbent au lieu
Le plus secret de l'Eglise.
Mais quand au lict nous serons
Entrelassez, nous ferons
Les lascifs selon les guises
Des Amans qui librement
Pratiquent folastrement
Dans les draps cent mignardises.
Pourquoy doncque, quand je veux
Ou mordre tes beaux cheveux,
Ou baiser ta bouche aimée,
Ou toucher à ton beau sein,
Contrefais‑tu la nonnain
Dedans un cloistre enfermée ?
Pour qui gardes‑tu tes yeux
Et ton sein délicieux,
Ton front, ta lèvre jumelle ?
En veux‑tu baiser Pluton
Là bas, après que Charon
T'auras mise en sa nacelle ?
Apres ton dernier trespas,
Gresle, tu n'auras là bas
Qu'une bouchette blesmie;
Et quand mort je te verrois
Aux Ombres je n'avou'rois
Que jadis tu fus m'amie.
Ton test n'aura plus de peau,
Ny ton visage si beau
N'aura veines ny arteres :
Tu n'auras plus que les dents
Telles qu'on les voit dedans
Les testes de cimeteres.
Donque tandis que tu vis,
Change, Maistresse, d'avis,
Et ne m'espargne ta bouche.
Incontinent tu mourras,
Lors tu te repentiras
De m'avoir esté farouche.
Ah, je meurs! ah, baise moy !
Ah, Maistresse, approche toy !
Tu fuis comme un fan qui tremble.
Au‑moins souffre que ma main
S'esbate un peu dans ton sein,
Ou plus bas, si bon te semble.
— Ronsard, Stances
Pieyre- Messages : 20908
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Re: Vos poèmes préférés
(Notons que j'actualiserais bien l'index avec plaisir, mais quand j'essaie d'éditer mon post, les liens ont disparu... je ne sais pas ce qui ne marche pas, mais ça ne marche pas...)
Du coup, je me fais pardonner avec un poème de Jules Supervielle, parce que je suis comme ça :
Ce sont d'autres lèvres,
C'est un autre sourire
Si j'approche de vous.
Ah mon regard vous change
Vous rend méconnaissable
Même à vos familiers.
L'on s'étonne de vous
Au milieu de la pièce
Et prise alors de peur
Vous baissez les paupières
Sur des yeux inconnus.
De tremblants centimètres
Nous séparent à peine
Et je me sens aussi devenir étranger.
Il vous faut consentir
À me perdre à mon tour
Moi dont vous étiez sûre
Plus encor que de vous.
Et plus l'on se regarde
Plus vite l'on s'égare
Dans les sables de l'âme
Qui nous brûlent les yeux.
Dans Les Amis inconnus.
Du coup, je me fais pardonner avec un poème de Jules Supervielle, parce que je suis comme ça :
Ce sont d'autres lèvres,
C'est un autre sourire
Si j'approche de vous.
Ah mon regard vous change
Vous rend méconnaissable
Même à vos familiers.
L'on s'étonne de vous
Au milieu de la pièce
Et prise alors de peur
Vous baissez les paupières
Sur des yeux inconnus.
De tremblants centimètres
Nous séparent à peine
Et je me sens aussi devenir étranger.
Il vous faut consentir
À me perdre à mon tour
Moi dont vous étiez sûre
Plus encor que de vous.
Et plus l'on se regarde
Plus vite l'on s'égare
Dans les sables de l'âme
Qui nous brûlent les yeux.
Dans Les Amis inconnus.
Dernière édition par Alphonsine le Mar 17 Déc 2013 - 12:16, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
En effet, il y a des problèmes depuis quelques jours avec les formats. Je t'aurais bien proposé de modifier moi-même ton index mais tout est mêlé quand j'ouvre la fenêtre d'édition. C'est sans doute temporaire. Il suffit de garder l'espoir, malgré la leçon de Charles d'Orléans.
- D'espoir et que vous en dirais ?
C'est un beau bailleur de paroles;
Il ne parle qu'en parabole
Dont un grand livre j'écrirais.
En le lisant je me rirais,
Tant aurait de choses frivoles.
D'espoir, et que vous en dirais ?
C'est un beau bailleur de paroles !
Par tout un an ne le lirais.
Ce ne sont que promesses folles
Dont il tient chacun jour écoles.
Telles études n'élirais
D'espoir, et que vous en dirais ?
Pieyre- Messages : 20908
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Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
En primaire j'adorais Baudelaire! (ce qui est toujours le cas!) surtout L'Albatros, A une Passante, La Mort des Amants et Remord Posthume.
Maintenant, je suis plutôt Tristan Corbière avec :
Le Crapaud
Un chant dans une nuit sans air…
– La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre.
… Un chant ; comme un écho, tout vif
Enterré, là, sous le massif…
– Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre…
– Un crapaud ! – Pourquoi cette peur,
Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue… – Horreur ! –
… Il chante. – Horreur !! – Horreur pourquoi ?
Vois-tu pas son œil de lumière…
Non : il s’en va, froid, sous sa pierre.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Bonsoir – ce crapaud-là c’est moi.
Ce soir, 20 Juillet.
Et de Lord Byron (désolé pour les non anglophones mais il est hors de question de vous donner la traduction!)
She walks in beauty, like the night
Of cloudless climes and starry skies;
And all that's best of dark and bright
Meet in her aspect and her eyes:
Thus mellowed to that tender light
Which heaven to gaudy day denies.
One shade the more, one ray the less,
Had half impaired the nameless grace
Which waves in every raven tress,
Or softly lightens o'er her face;
Where thoughts serenely sweet express
How pure, how dear their dwelling place.
And on that cheek, and o'er that brow,
So soft, so calm, yet eloquent,
The smiles that win, the tints that glow,
But tell of days in goodness spent,
A mind at peace with all below,
A heart whose love is innocent!
Maintenant, je suis plutôt Tristan Corbière avec :
Le Crapaud
Un chant dans une nuit sans air…
– La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre.
… Un chant ; comme un écho, tout vif
Enterré, là, sous le massif…
– Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre…
– Un crapaud ! – Pourquoi cette peur,
Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue… – Horreur ! –
… Il chante. – Horreur !! – Horreur pourquoi ?
Vois-tu pas son œil de lumière…
Non : il s’en va, froid, sous sa pierre.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Bonsoir – ce crapaud-là c’est moi.
Ce soir, 20 Juillet.
Et de Lord Byron (désolé pour les non anglophones mais il est hors de question de vous donner la traduction!)
She walks in beauty, like the night
Of cloudless climes and starry skies;
And all that's best of dark and bright
Meet in her aspect and her eyes:
Thus mellowed to that tender light
Which heaven to gaudy day denies.
One shade the more, one ray the less,
Had half impaired the nameless grace
Which waves in every raven tress,
Or softly lightens o'er her face;
Where thoughts serenely sweet express
How pure, how dear their dwelling place.
And on that cheek, and o'er that brow,
So soft, so calm, yet eloquent,
The smiles that win, the tints that glow,
But tell of days in goodness spent,
A mind at peace with all below,
A heart whose love is innocent!
SeaTurtle- Messages : 8
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Age : 28
Localisation : Paris
Re: Vos poèmes préférés
- Le livre de la vie est le livre suprême
Qu'on ne peut ni fermer, ni rouvrir à son choix;
Le passage attachant ne s'y lit pas deux fois,
Mais le feuillet fatal se tourne de lui-même;
On voudrait revenir à la page où l'on aime
Et la page où l'on meurt est déjà sous vos doigts.
— Lamartine, Vers sur un album
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
- Créature d'un jour qui t'agites une heure,
De quoi viens-tu te plaindre, et qui te fait gémir ?
Ton âme t'inquiète, et tu crois qu'elle pleure :
Ton âme est immortelle, et tes pleurs vont tarir.
Tu te sens le cœur pris d'un caprice de femme,
Et tu dis qu'il se brise à force de souffrir.
Tu demandes à Dieu de soulager ton âme :
Ton âme est immortelle, et ton cœur va guérir.
Le regret d'un instant te trouble et te dévore;
Tu dis que le passé te voile l'avenir.
Ne te plains pas d'hier; laisse venir l'aurore :
Ton âme est immortelle, et le temps va s'enfuir.
Ton corps est abattu du mal de ta pensée;
Tu sens ton front peser et tes genoux fléchir.
Tombe, agenouille-toi, créature insensée :
Ton âme est immortelle, et la mort va venir.
Tes os dans le cercueil vont tomber en poussière,
Ta mémoire, ton nom, ta gloire vont périr,
Mais non pas ton amour, si ton amour t'est chère :
Ton âme est immortelle et va s'en souvenir.
— Musset, dans Lettre à M. de Lamartine
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
WHEN we two parted
In silence and tears,
Half broken-hearted
To sever for years,
Pale grew thy cheek and cold,
Colder thy kiss ;
Truly that hour foretold
Sorrow to this.
The dew of the morning
Sunk chill on my brow —
It felt like the warning
Of what I feel now.
Thy vows are all broken,
And light is thy fame :
I hear thy name spoken,
And share in its shame.
They name thee before me,
A knell to mine ear ;
A shudder comes o'er me —
Why wert thou so dear ?
They know not I knew thee,
Who knew thee too well :
Long, long shall I rue thee,
Too deeply to tell.
In secret we met —
In silence I grieve,
That thy heart could forget,
Thy spirit deceive.
If I should meet thee
After long years,
How should I greet thee ?
With silence and tears.
Lord Byron
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Le Vampire
Toi qui, comme un coup de couteau,
Dans mon coeur plaintif es entrée;
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée,
De mon esprit humilié
Faire ton lit et ton domaine;
— Infâme à qui je suis lié
Comme le forçat à la chaîne,
Comme au jeu le joueur têtu,
Comme à la bouteille l'ivrogne,
Comme aux vermines la charogne
— Maudite, maudite sois-tu!
J'ai prié le glaive rapide
De conquérir ma liberté,
Et j'ai dit au poison perfide
De secourir ma lâcheté.
Hélas! le poison et le glaive
M'ont pris en dédain et m'ont dit:
«Tu n'es pas digne qu'on t'enlève
À ton esclavage maudit,
Imbécile! — de son empire
Si nos efforts te délivraient,
Tes baisers ressusciteraient
Le cadavre de ton vampire!»
— Charles Baudelaire
Toi qui, comme un coup de couteau,
Dans mon coeur plaintif es entrée;
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée,
De mon esprit humilié
Faire ton lit et ton domaine;
— Infâme à qui je suis lié
Comme le forçat à la chaîne,
Comme au jeu le joueur têtu,
Comme à la bouteille l'ivrogne,
Comme aux vermines la charogne
— Maudite, maudite sois-tu!
J'ai prié le glaive rapide
De conquérir ma liberté,
Et j'ai dit au poison perfide
De secourir ma lâcheté.
Hélas! le poison et le glaive
M'ont pris en dédain et m'ont dit:
«Tu n'es pas digne qu'on t'enlève
À ton esclavage maudit,
Imbécile! — de son empire
Si nos efforts te délivraient,
Tes baisers ressusciteraient
Le cadavre de ton vampire!»
— Charles Baudelaire
une (gaufre)- Messages : 707
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Localisation : La cité aux cent clochers
Re: Vos poèmes préférés
"Un sol schisté de soleil par suc d'or m'enrose, m'abeille dans le jardin blanc"...
Jean claude Renard
Jean claude Renard
Fata Morgana- Messages : 20818
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Localisation : Un pied hors de la tombe
Re: Vos poèmes préférés
"Rectus vives, Licini, neque altum
Semper urgendo neque, dum procellas
Cautus horrescis, nimium premendo
Litus iniquum."
Horace, Livre second des Odes.
Semper urgendo neque, dum procellas
Cautus horrescis, nimium premendo
Litus iniquum."
Horace, Livre second des Odes.
Aristippe- Messages : 105
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Age : 31
Localisation : Bordeaux
Re: Vos poèmes préférés
Talking In Bed
Talking in bed ought to be easiest,
Lying together there goes back so far,
An emblem of two people being honest.
Yet more and more time passes silently.
Outside, the wind's incomplete unrest
Builds and disperses clouds in the sky,
And dark towns heap up on the horizon.
None of this cares for us. Nothing shows why
At this unique distance from isolation
It becomes still more difficult to find
Words at once true and kind,
Or not untrue and not unkind.
Philip Larkin
Talking in bed ought to be easiest,
Lying together there goes back so far,
An emblem of two people being honest.
Yet more and more time passes silently.
Outside, the wind's incomplete unrest
Builds and disperses clouds in the sky,
And dark towns heap up on the horizon.
None of this cares for us. Nothing shows why
At this unique distance from isolation
It becomes still more difficult to find
Words at once true and kind,
Or not untrue and not unkind.
Philip Larkin
Killian- Messages : 86
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Age : 40
Localisation : Pays de la Loire
Re: Vos poèmes préférés
- Nous avons pensé des choses pures
Côte à côte, le long des chemins,
Nous nous sommes tenus par les mains
Sans dire... parmi les fleurs obscures;
Nous marchions comme des fiancés
Seuls, dans la nuit verte des prairies;
Nous partagions ce fruit de féeries
La lune amicale aux insensés.
Et puis, nous sommes morts sur la mousse,
Très loin, tous seuls parmi l'ombre douce
De ce bois intime et murmurant;
Et là‑haut, dans la lumière immense,
Nous nous sommes trouvés en pleurant
Ô mon cher compagnon de silence !
— Paul Valéry, Le bois amical
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
Et pour continuer avec Paul Valéry, La Jeune Parque (que je ne cite pas en entier ici, c'est un peu long).
Qui pleure là, sinon le vent simple, à cette heure
Seule, avec diamants extrêmes ?... Mais qui pleure,
Si proche de moi-même au moment de pleurer ?
Cette main, sur mes traits qu’elle rêve effleurer,
Distraitement docile à quelque fin profonde,
Attend de ma faiblesse une larme qui fonde,
Et que de mes destins lentement divisé,
Le plus pur en silence éclaire un cœur brisé.
La houle me murmure une ombre de reproche,
Ou retire ici-bas, dans ses gorges de roche,
Comme chose déçue et bue amèrement,
Une rumeur de plainte et de resserrement...
Que fais-tu, hérissée, et cette main glacée,
Et quel frémissement d’une feuille effacé
Persiste parmi vous, îles de mon sein nu ?...
Je scintille, liée à ce ciel inconnu...
L’immense grappe brille à ma soif de désastres.
Tout-puissants étrangers, inévitables astres
Qui daignez faire luire au lointain temporel
Je ne sais quoi de pur et de surnaturel ;
Vous qui dans les mortels plongez jusques aux larmes
Ces souverains éclats, ces invincibles armes,
Et les élancements de votre éternité,
Je suis seule avec vous, tremblante, ayant quitté
Ma couche ; et sur l’écueil mordu par la merveille,
J’interroge mon cœur quelle douleur l’éveille,
Quel crime par moi-même ou sur moi consommé ?...
... Ou si le mal me suit d’un songe refermé,
Quand (au velours du souffle envolé l’or des lampes)
J’ai de mes bras épais environné mes tempes,
Et longtemps de mon âme attendu les éclairs ?
Toute ? Mais toute à moi, maîtresse de mes chairs,
Durcissant d’un frisson leur étrange étendue,
Et dans mes doux liens, à mon sang suspendue,
Je me voyais me voir, sinueuse, et dorais
De regards en regards, mes profondes forêts.
J’y suivais un serpent qui venait de me mordre.
Qui pleure là, sinon le vent simple, à cette heure
Seule, avec diamants extrêmes ?... Mais qui pleure,
Si proche de moi-même au moment de pleurer ?
Cette main, sur mes traits qu’elle rêve effleurer,
Distraitement docile à quelque fin profonde,
Attend de ma faiblesse une larme qui fonde,
Et que de mes destins lentement divisé,
Le plus pur en silence éclaire un cœur brisé.
La houle me murmure une ombre de reproche,
Ou retire ici-bas, dans ses gorges de roche,
Comme chose déçue et bue amèrement,
Une rumeur de plainte et de resserrement...
Que fais-tu, hérissée, et cette main glacée,
Et quel frémissement d’une feuille effacé
Persiste parmi vous, îles de mon sein nu ?...
Je scintille, liée à ce ciel inconnu...
L’immense grappe brille à ma soif de désastres.
Tout-puissants étrangers, inévitables astres
Qui daignez faire luire au lointain temporel
Je ne sais quoi de pur et de surnaturel ;
Vous qui dans les mortels plongez jusques aux larmes
Ces souverains éclats, ces invincibles armes,
Et les élancements de votre éternité,
Je suis seule avec vous, tremblante, ayant quitté
Ma couche ; et sur l’écueil mordu par la merveille,
J’interroge mon cœur quelle douleur l’éveille,
Quel crime par moi-même ou sur moi consommé ?...
... Ou si le mal me suit d’un songe refermé,
Quand (au velours du souffle envolé l’or des lampes)
J’ai de mes bras épais environné mes tempes,
Et longtemps de mon âme attendu les éclairs ?
Toute ? Mais toute à moi, maîtresse de mes chairs,
Durcissant d’un frisson leur étrange étendue,
Et dans mes doux liens, à mon sang suspendue,
Je me voyais me voir, sinueuse, et dorais
De regards en regards, mes profondes forêts.
J’y suivais un serpent qui venait de me mordre.
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Les Chercheuses de poux :
Quand le front de l'enfant, plein de rouges tourmentes,
Implore l'essaim blanc des rêves indistincts,
Il vient près de son lit deux grandes sœurs charmantes
Avec de frêles doigts aux ongles argentins.
Elles assoient l'enfant devant une croisée
Grande ouverte où l'air bleu baigne un fouillis de fleurs,
Et dans ses lourds cheveux où tombe la rosée
Promènent leurs doigts fins, terribles et charmeurs.
Il écoute chanter leurs haleines craintives
Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés,
Et qu'interrompt parfois un sifflement, salives
Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers.
Il entend leurs cils noirs battant sous les silences
Parfumés ; et leurs doigts électriques et doux
Font crépiter parmi ses grises indolences
Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux.
Voilà que monte en lui le vin de la Paresse,
Soupir d'harmonica qui pourrait délirer ;
L'enfant se sent, selon la lenteur des caresses,
Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.
Rimbaud
Quand le front de l'enfant, plein de rouges tourmentes,
Implore l'essaim blanc des rêves indistincts,
Il vient près de son lit deux grandes sœurs charmantes
Avec de frêles doigts aux ongles argentins.
Elles assoient l'enfant devant une croisée
Grande ouverte où l'air bleu baigne un fouillis de fleurs,
Et dans ses lourds cheveux où tombe la rosée
Promènent leurs doigts fins, terribles et charmeurs.
Il écoute chanter leurs haleines craintives
Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés,
Et qu'interrompt parfois un sifflement, salives
Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers.
Il entend leurs cils noirs battant sous les silences
Parfumés ; et leurs doigts électriques et doux
Font crépiter parmi ses grises indolences
Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux.
Voilà que monte en lui le vin de la Paresse,
Soupir d'harmonica qui pourrait délirer ;
L'enfant se sent, selon la lenteur des caresses,
Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.
Rimbaud
Dernière édition par neurone-indolent le Ven 10 Jan 2014 - 11:11, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
Voici un extrait du plan ancien poème que j'ai noté dans mon anthologie personnelle (d'où j'ai sorti tous ceux que j'ai postés ici), la Grièche d'hiver de Rutebeuf (1225-1285).
Je vous épargne pour cette fois la version originale (qu'on peut malgré tout consulter ici : Gallica, avec la traduction de Michel Zink), qui est autrement plus difficile à lire que le français du XVIe siècle. Mais je ne sais pas de qui est cette traduction. Je l'ai recopiée jadis sur l'une des anthologies que j'avais compulsées mais je ne prêtais pas attention alors aux références.
Je vous épargne pour cette fois la version originale (qu'on peut malgré tout consulter ici : Gallica, avec la traduction de Michel Zink), qui est autrement plus difficile à lire que le français du XVIe siècle. Mais je ne sais pas de qui est cette traduction. Je l'ai recopiée jadis sur l'une des anthologies que j'avais compulsées mais je ne prêtais pas attention alors aux références.
- Au temps où arbres se défeuillent
Et qu'il ne reste en branches feuille
Qui n'aille à terre,
Pour la pauvreté qui m'atterre,
Qui de partout me fait la guerre
Au temps d'hiver,
Beaucoup me sont changés les vers
Et mon dit commence divers,
De pauvre histoire.
Pauvre sens et pauvre mémoire
M'a Dieu donnés, le roi de gloire,
Et pauvre rente
Et froid au cul quand bise vente.
Le vent me vient, le vent m'évente
Et très souvent
Plusieurs fois je sens trop le vent.
La Grièche en ses dés me vend
Ce que me livre.
Bien me paye, bien me délivre :
Pour un sou me rend une livre
De pauvreté.
Toujours à elle suis livré,
Toujours l'accès m'est accordé.
Ah! le riche homme !
Je ne dors que le premier somme,
De mon avoir ne sais la somme :
N'y en point.
Dieu me fait le temps tout à point.
Noire mouche en été me point,
En hiver blanche.
Je suis tel l'oiseau sur la branche.
En hiver pleure et me lamente
Et me défeuille ainsi que l'ente
Au premier gel.
En moi n'y a venin ni fiel.
Ne me reste rien sous le ciel :
Tout va sa voie.
Pieyre- Messages : 20908
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Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
Demain dès l'aube
Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
— Victor Hugo, Les Contemplations, 1856
(Je suis une copieuse.)
Invité- Invité
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
La source tombait du rocher
La source tombait du rocher
Goutte à goutte à la mer affreuse.
L'océan, fatal au nocher,
Lui dit : - Que me veux-tu, pleureuse ?
Je suis la tempête et l'effroi ;
Je finis où le ciel commence.
Est-ce que j'ai besoin de toi,
Petite, moi qui suis l'immense ? -
La source dit au gouffre amer :
- je te donne, sans bruit ni gloire,
Ce qui te manque, ô vaste mer !
Une goutte d'eau qu'on peut boire.
VICTOR HUGO
Invité- Invité
iridium- Messages : 110
Date d'inscription : 09/09/2013
Localisation : Entre La Tronche et Seyssins
Re: Vos poèmes préférés
Colloque sentimental, Verlaine, Les fêtes galantes
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l'heure passé.
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l'on entend à peine leurs paroles.
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux spectres ont évoqué le passé.
- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
- Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne ?
- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ? Toujours vois-tu mon âme en rêve ?
- Non.
- Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignions nos bouches !
- C'est possible.
- Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir !
- L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.
Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.
Bon, je vous l'accorde, ce n'est pas très gai !! ...
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l'heure passé.
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l'on entend à peine leurs paroles.
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux spectres ont évoqué le passé.
- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
- Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne ?
- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ? Toujours vois-tu mon âme en rêve ?
- Non.
- Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignions nos bouches !
- C'est possible.
- Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir !
- L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.
Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.
Bon, je vous l'accorde, ce n'est pas très gai !! ...
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
J'oserais aussi :
Tears in rain soliloquy Roy Batty Character (Rutger Hauer) - Blade Runner, Ridley Scott
I've... seen things you people wouldn't believe...
Attack ships on fire off the shoulder of Orion.
I watched c-beams glitter in the dark near the Tannhäuser Gate.
All those... moments... will be lost in time, like tears... in... rain.
Time... to die...
Tears in rain soliloquy Roy Batty Character (Rutger Hauer) - Blade Runner, Ridley Scott
I've... seen things you people wouldn't believe...
Attack ships on fire off the shoulder of Orion.
I watched c-beams glitter in the dark near the Tannhäuser Gate.
All those... moments... will be lost in time, like tears... in... rain.
Time... to die...
Invité- Invité
Re: Vos poèmes préférés
La mort du Loup
I
Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon.
– Nous marchions, sans parler, dans l'humide gazon,
Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes,
Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
Nous avons aperçu les grands ongles marqués
Par les Loups voyageurs que nous avions traqués.
Nous avons écouté, retenant notre haleine
Et le pas suspendu. – Ni le bois ni la plaine
Ne poussaient un soupir dans les airs; seulement
La girouette en deuil criait au firmament;
Car le vent, élevé bien au-dessus des terres,
N'effleurait de ses pieds que les tours solitaires,
Et les chênes d'en bas, contre les rocs penchés,
Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés.
– Rien ne bruissait donc, lorsque, baissant la tête,
Le plus vieux des chasseurs qui s'étaient mis en quête
A regardé le sable en s'y couchant; bientôt,
Lui que jamais ici l'on ne vit en défaut,
A déclaré tout bas que ces marques récentes
Annonçaient la démarche et les griffes puissantes
De deux grands Loups-cerviers et de deux louveteaux.
Nous avons tous alors préparé nos couteaux
Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches,
Nous allions, pas à pas, en écartant les branches.
Trois s'arrêtent, et moi, cherchant ce qu'ils voyaient,
J'aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient,
Et je vois au delà quatre formes légères
Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères,
Comme font chaque jour, à grand bruit, sous nos yeux,
Quand le maître revient, les lévriers joyeux.
Leur forme était semblable et semblable la danse;
Mais les enfants du Loup se jouaient en silence,
Sachant bien qu'à deux pas, ne dormant qu'à demi,
Se couche dans ses murs l'homme, leur ennemi.
Le père était debout, et plus loin, contre un arbre,
Sa Louve reposait comme celle de marbre
Qu'adoraient les Romains, et dont les flancs velus
Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus.
Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées
Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris;
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
Du chien le plus hardi la gorge pantelante
Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair
Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang;
Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
– Il nous regarde encore, ensuite il se recouche.
Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche.
Et, sans daigner savoir comment il a péri,
Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.
II
J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
Sans ses deux Louveteaux la belle et sombre veuve
Ne l'eût pas laissé seul subir la grande épreuve;
Mais son devoir était de les sauver, afin
De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
A ne jamais entrer dans le pacte des villes
Que l'homme a fait avec les animaux serviles
Que chassent devant lui, pour avoir le coucher,
Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
III
Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C'est vous qui le savez, sublimes animaux !
A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse,
Seul le silence est grand; tout le reste est faiblesse.
– Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au cœur !
Il disait : « Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche,
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler.
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. »
— Alfred de Vigny, Les Destinées
I
Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon.
– Nous marchions, sans parler, dans l'humide gazon,
Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes,
Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
Nous avons aperçu les grands ongles marqués
Par les Loups voyageurs que nous avions traqués.
Nous avons écouté, retenant notre haleine
Et le pas suspendu. – Ni le bois ni la plaine
Ne poussaient un soupir dans les airs; seulement
La girouette en deuil criait au firmament;
Car le vent, élevé bien au-dessus des terres,
N'effleurait de ses pieds que les tours solitaires,
Et les chênes d'en bas, contre les rocs penchés,
Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés.
– Rien ne bruissait donc, lorsque, baissant la tête,
Le plus vieux des chasseurs qui s'étaient mis en quête
A regardé le sable en s'y couchant; bientôt,
Lui que jamais ici l'on ne vit en défaut,
A déclaré tout bas que ces marques récentes
Annonçaient la démarche et les griffes puissantes
De deux grands Loups-cerviers et de deux louveteaux.
Nous avons tous alors préparé nos couteaux
Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches,
Nous allions, pas à pas, en écartant les branches.
Trois s'arrêtent, et moi, cherchant ce qu'ils voyaient,
J'aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient,
Et je vois au delà quatre formes légères
Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères,
Comme font chaque jour, à grand bruit, sous nos yeux,
Quand le maître revient, les lévriers joyeux.
Leur forme était semblable et semblable la danse;
Mais les enfants du Loup se jouaient en silence,
Sachant bien qu'à deux pas, ne dormant qu'à demi,
Se couche dans ses murs l'homme, leur ennemi.
Le père était debout, et plus loin, contre un arbre,
Sa Louve reposait comme celle de marbre
Qu'adoraient les Romains, et dont les flancs velus
Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus.
Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées
Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris;
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
Du chien le plus hardi la gorge pantelante
Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair
Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang;
Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
– Il nous regarde encore, ensuite il se recouche.
Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche.
Et, sans daigner savoir comment il a péri,
Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.
II
J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
Sans ses deux Louveteaux la belle et sombre veuve
Ne l'eût pas laissé seul subir la grande épreuve;
Mais son devoir était de les sauver, afin
De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
A ne jamais entrer dans le pacte des villes
Que l'homme a fait avec les animaux serviles
Que chassent devant lui, pour avoir le coucher,
Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
III
Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C'est vous qui le savez, sublimes animaux !
A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse,
Seul le silence est grand; tout le reste est faiblesse.
– Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au cœur !
Il disait : « Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche,
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler.
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. »
— Alfred de Vigny, Les Destinées
Pieyre- Messages : 20908
Date d'inscription : 17/03/2012
Localisation : Quartier Latin
Re: Vos poèmes préférés
Pieyre a écrit: La mort du Loup
Un chef d'oeuvre.
Aristippe- Messages : 105
Date d'inscription : 30/12/2013
Age : 31
Localisation : Bordeaux
Re: Vos poèmes préférés
J adore tout les poèmes d'Emily Dickinson , une poétesse Americaine , qui a vécu les 3/4 de sa vie dans une chambre reclue a écrire
Elle mal connue du grand public et bien heureusement LOL
Une âme en incandescence
Je me dis : la Terre est brêve –
L’Angoisse – absolue –
Nombreux les meurtris,
Et puis après ?
Je me dis : on pourrait mourir –
La Meilleure Vitalité
Ne peut surpasser la Pourriture,
Et puis après ?
Je me dis qu’au Ciel, d’une façon
Il y aura compensation –
Don, d’une nouvelle équation –
Et puis après ?
J’essayais d’imaginer Solitude pire
Qu’aucune jamais vue –
Une Expiation Polaire – un Présage dans l’Os
De l’atrocement proche Mort –
Je fouillais l’Irrécupérable
Pour emprunter – mon Double –
Un Réconfort Éperdu sourd
De l’idée que Quelque Part –
À Portée de Pensée –
Demeure une autre Créature
De l’Amour Céleste – oubliée –
Je grattais à notre Paroi
Comme On doit scruter les Murs –
Entre un Jumeau de l’Horreur –et Soi –
Dans des Cellules Contiguës –
Je parvins presque à étreindre sa Main,
Ce devint – une telle Volupté –
Que tout comme de Lui – j’avais pitié –
Peut-être avait-il – pitié de moi –
Elle mal connue du grand public et bien heureusement LOL
Une âme en incandescence
Je me dis : la Terre est brêve –
L’Angoisse – absolue –
Nombreux les meurtris,
Et puis après ?
Je me dis : on pourrait mourir –
La Meilleure Vitalité
Ne peut surpasser la Pourriture,
Et puis après ?
Je me dis qu’au Ciel, d’une façon
Il y aura compensation –
Don, d’une nouvelle équation –
Et puis après ?
J’essayais d’imaginer Solitude pire
Qu’aucune jamais vue –
Une Expiation Polaire – un Présage dans l’Os
De l’atrocement proche Mort –
Je fouillais l’Irrécupérable
Pour emprunter – mon Double –
Un Réconfort Éperdu sourd
De l’idée que Quelque Part –
À Portée de Pensée –
Demeure une autre Créature
De l’Amour Céleste – oubliée –
Je grattais à notre Paroi
Comme On doit scruter les Murs –
Entre un Jumeau de l’Horreur –et Soi –
Dans des Cellules Contiguës –
Je parvins presque à étreindre sa Main,
Ce devint – une telle Volupté –
Que tout comme de Lui – j’avais pitié –
Peut-être avait-il – pitié de moi –
Soren- Messages : 661
Date d'inscription : 14/02/2014
Age : 47
Localisation : Dans un monde absurde
Re: Vos poèmes préférés
Sénèque, Phèdre, acte II :
Nulle vie n'est plus libre et dénuée de vice,
Nulle n'est plus conforme aux coutumes antiques
Que celle qui, loin des remparts, se plaît aux bois.
La folie de l'argent ni la faveur du peuple
Infidèle aux vertus, ni la mode inconstante
Ni la funeste envie ne font flamber celui
Qui voue son innocence aux cimes des montagnes,
N'est d'aucun roi l'esclave ou l'émule, et ne vise
Ni honneurs sans valeur ni périssables biens.
Ce n'est pas lui, libre d'espoir comme de crainte,
Que mord l'ignoble dent de la vorace envie,
Il ignore et la ville et la foule et leurs crimes,
Son âme en paix ne tremble pas au moindre bruit
Ses mots sont vrais? Il ne veut pas mille colonnes
Sous son toit opulent, ni ne plaque, insolent,
Ses lambris d'or massif, ni n'inonde de sang
De pieux autels, offrant cent boeufs aux cous neigeux
Enfarinés de blé selon le sacré rite,
Il a pour bien la vaste plaine, il erre, libre,
Innocent, sous le ciel, ne sait tendre qu'aux fauves
Ses pièges ingénieux, et, las d'un lourd labeur
Va retremper son corps dans l'Ilisos limpide.
L'original, pour ceux qui connaissent le latin :
Non alia magis est libera et uitio carens
Ritusque melius uita quae priscos colat,
Quam quae relictis moenibus siluas amat.
Non illum auarae mentis inflammat furor
Qui se dicauit montium insontem iugis,
Non aura populi et uulgus infidum bonis,
Non pestilens inuidia, non fragilis fauor,
Non ille regno seruit aut regno omminens
Uanos honores sequitur aut fluxas opes,
Spei metusque liber, haud illum niger
Edaxque liuor dente degeneri petit;
Nec scelera populos inter atque urbes sita
Nouit nec omnes conscius strepitus pauet
Aut uerba fingit; mille non quaerit tegi
Diues columnis nec trabes multo insolens
Suffigit auro; non cruor largus pias
Inundat aras, fruge nec sparsi sacra
Centena niuei colla summittunt boues.
Sed rure uacuo potitur et aperto aethere
Innocuus errat. Callidas tantum feris
Struxisse fraudes nouit et fessus graui
Labore niueo corpus Iliso fouet;
Nulle vie n'est plus libre et dénuée de vice,
Nulle n'est plus conforme aux coutumes antiques
Que celle qui, loin des remparts, se plaît aux bois.
La folie de l'argent ni la faveur du peuple
Infidèle aux vertus, ni la mode inconstante
Ni la funeste envie ne font flamber celui
Qui voue son innocence aux cimes des montagnes,
N'est d'aucun roi l'esclave ou l'émule, et ne vise
Ni honneurs sans valeur ni périssables biens.
Ce n'est pas lui, libre d'espoir comme de crainte,
Que mord l'ignoble dent de la vorace envie,
Il ignore et la ville et la foule et leurs crimes,
Son âme en paix ne tremble pas au moindre bruit
Ses mots sont vrais? Il ne veut pas mille colonnes
Sous son toit opulent, ni ne plaque, insolent,
Ses lambris d'or massif, ni n'inonde de sang
De pieux autels, offrant cent boeufs aux cous neigeux
Enfarinés de blé selon le sacré rite,
Il a pour bien la vaste plaine, il erre, libre,
Innocent, sous le ciel, ne sait tendre qu'aux fauves
Ses pièges ingénieux, et, las d'un lourd labeur
Va retremper son corps dans l'Ilisos limpide.
L'original, pour ceux qui connaissent le latin :
Non alia magis est libera et uitio carens
Ritusque melius uita quae priscos colat,
Quam quae relictis moenibus siluas amat.
Non illum auarae mentis inflammat furor
Qui se dicauit montium insontem iugis,
Non aura populi et uulgus infidum bonis,
Non pestilens inuidia, non fragilis fauor,
Non ille regno seruit aut regno omminens
Uanos honores sequitur aut fluxas opes,
Spei metusque liber, haud illum niger
Edaxque liuor dente degeneri petit;
Nec scelera populos inter atque urbes sita
Nouit nec omnes conscius strepitus pauet
Aut uerba fingit; mille non quaerit tegi
Diues columnis nec trabes multo insolens
Suffigit auro; non cruor largus pias
Inundat aras, fruge nec sparsi sacra
Centena niuei colla summittunt boues.
Sed rure uacuo potitur et aperto aethere
Innocuus errat. Callidas tantum feris
Struxisse fraudes nouit et fessus graui
Labore niueo corpus Iliso fouet;
Aristippe- Messages : 105
Date d'inscription : 30/12/2013
Age : 31
Localisation : Bordeaux
Re: Vos poèmes préférés
Merci beaucoup pour tous ces poèmes, je me suis régalé. J'allais poster Le loup de Vigny mais heureusement il vient d'être proposé. La nuit de décembre de Musset a été posté, personnellement j'aime beaucoup La nuit d'août, dont je reproduis un extrait :
Et que trouveras-tu, le jour où la misère
Te ramènera seul au paternel foyer ?
Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
Une voix sera là pour crier à toute heure :
Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.
L'amour l'aura brisé ; les passions funestes
L'auront rendu de pierre au contact des méchants ;
Tu n'en sentiras plus que d'effroyables restes,
Qui remueront encor, comme ceux des serpents.
Ô ciel ! qui t'aidera ? que ferai-je moi-même,
Quand celui qui peut tout défendra que je t'aime,
Et quand mes ailes d'or, frémissant malgré moi,
M'emporteront à lui pour me sauver de toi ?
Un membre du forum a produit un poème qui s'appelle Le Crapaud. Il y en a un aussi de Victor Hugo qui est absolument magnifique. Pareil, un extrait :
Que savons-nous ? qui donc connaît le fond des choses ?
Le couchant rayonnait dans les nuages roses ;
C'était la fin d'un jour d'orage, et l'occident
Changeait l'ondée en flamme en son brasier ardent ;
Près d'une ornière, au bord d'une flaque de pluie,
Un crapaud regardait le ciel, bête éblouie ;
Grave, il songeait ; l'horreur contemplait la splendeur.
(Oh ! pourquoi la souffrance et pourquoi la laideur ?
Hélas ! le bas-empire est couvert d'Augustules,
Les Césars de forfaits, les crapauds de pustules,
Comme le pré de fleurs et le ciel de soleils !)
Les feuilles s'empourpraient dans les arbres vermeils ;
L'eau miroitait, mêlée à l'herbe, dans l'ornière ;
Le soir se déployait ainsi qu'une bannière ;
L'oiseau baissait la voix dans le jour affaibli ;
Tout s'apaisait, dans l'air, sur l'onde ; et, plein d'oubli,
Le crapaud, sans effroi, sans honte, sans colère,
Doux, regardait la grande auréole solaire ;
Peut-être le maudit se sentait-il béni,
Pas de bête qui n'ait un reflet d'infini ;
Pas de prunelle abjecte et vile que ne touche
L'éclair d'en haut, parfois tendre et parfois farouche ;
Pas de monstre chétif, louche, impur, chassieux,
Qui n'ait l'immensité des astres dans les yeux.
Un homme qui passait vit la hideuse bête,
Et, frémissant, lui mit son talon sur la tête ;
C'était un prêtre ayant un livre qu'il lisait ;
Puis une femme, avec une fleur au corset,
Vint et lui creva l'œil du bout de son ombrelle ;
Et le prêtre était vieux, et la femme était belle.
Vinrent quatre écoliers, sereins comme le ciel.
– J'étais enfant, j'étais petit, j'étais cruel ; –
Tout homme sur la terre, où l'âme erre asservie,
Peut commencer ainsi le récit de sa vie.
Et en voici un anglais, que j'aime bien :
“A mermaid found a swimming lad,
Picked him up for her own,
Pressed her body to his body,
Laughed; and plunging down
Forgot in cruel happiness
That even lovers drown.”
― W.B. Yeats
Parmi mes poètes préférés figure Charles Bukowski, mais ses poèmes sont en anglais. Peut-être aurais-je l'opportunité d'en mettre quelques uns plus tard ! Merci pour ce sujet et pour tous ces poèmes.
Et que trouveras-tu, le jour où la misère
Te ramènera seul au paternel foyer ?
Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
Une voix sera là pour crier à toute heure :
Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.
L'amour l'aura brisé ; les passions funestes
L'auront rendu de pierre au contact des méchants ;
Tu n'en sentiras plus que d'effroyables restes,
Qui remueront encor, comme ceux des serpents.
Ô ciel ! qui t'aidera ? que ferai-je moi-même,
Quand celui qui peut tout défendra que je t'aime,
Et quand mes ailes d'or, frémissant malgré moi,
M'emporteront à lui pour me sauver de toi ?
Un membre du forum a produit un poème qui s'appelle Le Crapaud. Il y en a un aussi de Victor Hugo qui est absolument magnifique. Pareil, un extrait :
Que savons-nous ? qui donc connaît le fond des choses ?
Le couchant rayonnait dans les nuages roses ;
C'était la fin d'un jour d'orage, et l'occident
Changeait l'ondée en flamme en son brasier ardent ;
Près d'une ornière, au bord d'une flaque de pluie,
Un crapaud regardait le ciel, bête éblouie ;
Grave, il songeait ; l'horreur contemplait la splendeur.
(Oh ! pourquoi la souffrance et pourquoi la laideur ?
Hélas ! le bas-empire est couvert d'Augustules,
Les Césars de forfaits, les crapauds de pustules,
Comme le pré de fleurs et le ciel de soleils !)
Les feuilles s'empourpraient dans les arbres vermeils ;
L'eau miroitait, mêlée à l'herbe, dans l'ornière ;
Le soir se déployait ainsi qu'une bannière ;
L'oiseau baissait la voix dans le jour affaibli ;
Tout s'apaisait, dans l'air, sur l'onde ; et, plein d'oubli,
Le crapaud, sans effroi, sans honte, sans colère,
Doux, regardait la grande auréole solaire ;
Peut-être le maudit se sentait-il béni,
Pas de bête qui n'ait un reflet d'infini ;
Pas de prunelle abjecte et vile que ne touche
L'éclair d'en haut, parfois tendre et parfois farouche ;
Pas de monstre chétif, louche, impur, chassieux,
Qui n'ait l'immensité des astres dans les yeux.
Un homme qui passait vit la hideuse bête,
Et, frémissant, lui mit son talon sur la tête ;
C'était un prêtre ayant un livre qu'il lisait ;
Puis une femme, avec une fleur au corset,
Vint et lui creva l'œil du bout de son ombrelle ;
Et le prêtre était vieux, et la femme était belle.
Vinrent quatre écoliers, sereins comme le ciel.
– J'étais enfant, j'étais petit, j'étais cruel ; –
Tout homme sur la terre, où l'âme erre asservie,
Peut commencer ainsi le récit de sa vie.
Et en voici un anglais, que j'aime bien :
“A mermaid found a swimming lad,
Picked him up for her own,
Pressed her body to his body,
Laughed; and plunging down
Forgot in cruel happiness
That even lovers drown.”
― W.B. Yeats
Parmi mes poètes préférés figure Charles Bukowski, mais ses poèmes sont en anglais. Peut-être aurais-je l'opportunité d'en mettre quelques uns plus tard ! Merci pour ce sujet et pour tous ces poèmes.
Princeton- Messages : 1367
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Re: Vos poèmes préférés
C'est un beau soir de mars, rugueux et froid.
L'après‑midi, quelques fragiles anémones
Ont fleuri toutes à la fois.
À cette heure tombe le soleil jaune.
Merles et grives
S'interpellent et se poursuivent
Et s'écoutent siffler à pleine voix
Ou bien encore grincent et se chamaillent
Parmi les mailles
Des rameaux fins et divergents du bois.
Au ras du sol poussent les herbes
À petits brins, frêles et lisses.
La surface des eaux se plisse
Au vent acerbe.
Les villages, lavés par la neige et la pluie,
Au bord de la grand‑route et des mares s'appuient
Et reluisent, de loin en loin, parmi les champs :
Tuiles rouges et volets verts et pignons blancs.
— Émile Verhaeren, Clarté froide
L'après‑midi, quelques fragiles anémones
Ont fleuri toutes à la fois.
À cette heure tombe le soleil jaune.
Merles et grives
S'interpellent et se poursuivent
Et s'écoutent siffler à pleine voix
Ou bien encore grincent et se chamaillent
Parmi les mailles
Des rameaux fins et divergents du bois.
Au ras du sol poussent les herbes
À petits brins, frêles et lisses.
La surface des eaux se plisse
Au vent acerbe.
Les villages, lavés par la neige et la pluie,
Au bord de la grand‑route et des mares s'appuient
Et reluisent, de loin en loin, parmi les champs :
Tuiles rouges et volets verts et pignons blancs.
— Émile Verhaeren, Clarté froide
Pieyre- Messages : 20908
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